Comportement d’interface des matériaux granulaires

Les matériaux granulaires sont présents dans de nombreux secteurs d’activité, notamment dans le domaine du génie civil, sous la forme de matière première (granulats, ciments) et substrat des fondations (sols granulaires), mais aussi dans divers procèdes industriels (fabrication de céramiques, traitement de surfaces…), industrie pharmaceutique (poudres, capsules…), agro-alimentaire (céréales)…

La maîtrise de ces matériaux nécessite une bonne connaissance de leur comportement mécanique. De très nombreux travaux concernent le comportement en volume. Cependant, la région d’interface entre le matériau granulaire et la paroi s’avère avoir des caractéristiques propres qu’il est essentiel de comprendre puisqu’elle constitue une des conditions aux limites du problème mécanique. La transmission des efforts et des déplacements entre la paroi et le matériau granulaire dépend fondamentalement du comportement de cette couche d’interface. Du point de vue structurel, c’est une information indispensable pour la conception des ouvrages de fondation, par exemple. Le dimensionnement des parois de silos et des conduites est fondée sur les efforts appliqués par le milieu lors de son stockage (condition statique) ou en mouvement (condition de déformation).

D’un autre coté, la réponse du milieu granulaire (comportement contrainte/déformation, par exemple) dépend fortement du type et du niveau des sollicitations agissants au niveau de cette interface. Dans le cas d’une fondation, l’intérêt est de solliciter le milieu granulaire dans des limites statiques. Par ailleurs, dans un conduite, c’est l’inverse, puisqu’elle transport des particules sera plus efficace pour un bas niveau d’efforts.

On s’intéresse au comportement en cisaillement des régions à proximité des parois rigides. La compatibilité des efforts et des déplacements entre le matériau granulaire et le milieu continu dépend d’un ensemble de paramètres tels que : la géométrie du système considéré, la forme et la taille des aspérités des parois, l’existence d’effets inertiels… Les caractéristiques du milieu granulaire tels que la forme, la taille, le coefficient de frottement, la granulométrie, etc. sont aussi fondamentales pour une caractérisation complète du problème.

La géométrie et les forces volumiques, associées aux propriétés rhéologiques du matériau, définissent la distribution des contraintes et des déformations au sein du matériau et aux interfaces. Une distribution hétérogène de contraintes peut conduire à une localisation plus au moins prononcé des déformations à proximité des parois. La taille et la forme des aspérités caractérisent les rugosités des parois. Leur rapport avec la forme et la dimension des particules du milieu est directement relié à la capacité de transmission des efforts (et des déplacements) tangentiels de la paroi vers le milieu et vice-versa.

Le comportement du matériau granulaire peut être affecté par des effets d’inertie des particules selon les niveaux de vitesse de cisaillement et de contraintes de confinement. Dans des situations où la masse des particules et/ou la vitesse de cisaillement sont faibles, et/ou la pression de confinement est élevée, les effets d’inertie sont négligeables. Dans ce cas, la réponse du milieu est indépendante du niveau de pression de confinement et de la vitesse de cisaillement. Par contre, à partir d’un certain niveau de vitesse et de pression, des effets modifient le comportement du matériau, qui dévient dépendant de ces grandeurs.

De façon à mieux comprendre les phénomènes physiques qui déterminent le comportement d’interface des matériaux granulaires, on a réalisé des études sur des matériaux modèles bien caractérisés. On analyse le comportement d’interface à partir d’essais de cisaillement à vitesse et pression de confinement imposées dans la géométrie de cisaillement simple annulaire. On aborde le problème à l’aide de trois approches complémentaires :
– simulations discrètes en dynamique moléculaire ;
– appareil de cisaillement simple annulaire (ACSA) ;
– Mini-ACSA, spécialement construit dans cette thèse pour être inséré dans un appareil de résonance magnétique.

Les matériaux granulaires sont des assemblées de solides discrets, particules macroscopiques non browniennes caractérisées par des interactions de contact dissipatives (telles que le frottement). La taille de ces particules peut varier de 1 µm pour des poudres fines jusqu’à quelques mètres dans le cas des éboulements rocheux. Liés à la taille et à la nature des matériaux granulaires, les types d’interactions entre les particules peuvent être très variés. Sont objet de l’étude de cette thèse des particules de taille supérieure à environ 100 µm. Cette limitation sur la taille correspond à des limitations quant au type d’interaction entre les grains. On s’intéresse à des assemblées de grains non soumis à des interactions cohésives de type van der Waals. Les matériaux granulaires sont naturellement multiphasiques : une phase solide dispersée dans une phase liquide et/ou une phase gazeuse (respectivement du sable saturé, partiellement saturé et sec, par exemple). Les différentes interactions possibles entre les phases contribuent à l’extrême variété des comportements observés. On considère des grains plongés dans un fluide interstitiel de viscosité assez faible pour qu’il n’ait pratiquement pas d’effet sur le comportement de la phase solide. De manière à simplifier le problème, on utilise des matériaux modèles, des particules avec des géométries simples (disques en 2D et sphères en 3D), et invariants (on néglige les changements de forme et de volume éventuels des particules liés à des effets d’endommagement en limitant ses possibles causes) .

Les particules modèles utilisées dans les études ne sont pas soumises aux forces de cohésion ([8] discute les éventuels effets des interactions des grains et de l’air). Les contacts directs constituent donc les interactions qui gèrent le comportement de ces matériaux et constituent les mécanismes élémentaires de transfert de quantité de mouvement et de dissipation d’énergie.

Table des matières

Introduction 
1 Rhéologie des matériaux granulaires en volume
1.1 Matériaux granulaires
1.2 Interactions entre particules
1.2.1 Force normale de contact
1.2.1.1 Modèle de Hertz
1.2.1.2 Temps de contact
1.2.2 Les lois fondamentales du frottement solide
1.2.3 Interprétation microscopique du frottement solide
1.3 Caractérisation macroscopique
1.3.1 Frottement interne
1.3.2 Frottement effectif
1.3.3 Compacité ν
1.4 Comportement macroscopique
1.4.1 Régimes quasi-statique et inertiel
1.4.1.1 Nombre inertiel I
1.4.2 Régimes transitoire et stationnaire
1.4.3 Le principe de dilatance et l’état critique
1.5 Caractérisation microscopique
1.5.1 Réseau de contacts
1.5.2 Nombre de coordination Z et mobilisation du frottement M
1.5.3 Fluctuations et corrélations du mouvement de grains
2 Interface entre un matériau granulaire et une structure
2.1 Introduction
2.2 Loi d’interface et conditions aux limites
2.2.1 Conditions aux limites utilisées
2.2.1.1 Conditions aux limites tangentielles
2.2.1.2 Conditions aux limites normales
2.3 Interface granulaire
2.3.1 Localisation de la déformation
2.3.2 Définition de l’interface granulaire-structure
2.3.3 Couche d’interface
2.4 Frottement à la paroi et comportement volumique
2.4.1 Effet de la rugosité de la paroi
2.4.2 Effet de la taille des particules et de la rugosité normalisée Rn
2.4.3 Rapport entre l’angle de frottement d’interface δ∗et l’angle de frottement interne φ
2.4.4 Effet de la rugosité sur les variations volumiques
2.5 Étude expérimentale du comportement d’interface
2.5.1 Identification des composantes du déplacement
2.5.2 Quelques appareils d’étude de l’interface
2.5.2.1 Appareil de cisaillement direct plan
2.5.2.2 Appareil de cisaillement annulaire direct
2.5.2.3 Appareil d’arrachement à symétrie de révolution
2.5.2.4 Appareil de cisaillement simple plan
2.5.2.5 Appareil de cisaillement double
2.5.2.6 Appareil de cisaillement tridimensionnel
2.5.2.7 Appareil de cisaillement simple annulaire
2.6 Système étudié : géométrie de cisaillement simple annulaire
2.6.1 Distribution des contraintes en régime stationnaire
2.6.1.1 Cisaillement annulaire tridimensionnel
2.6.1.2 Cisaillement annulaire bidimensionnel
2.6.1.3 Cisaillement plan bidimensionnel
Conclusion

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