Diversité moléculaire de souches Staphylococcus aureus méticillinorésistant isolées

Diversité moléculaire de souches Staphylococcus aureus méticillinorésistant isolées

Persistance et évolution adaptative de Staphylococcus aureus au cours de la persistance chez les patients atteints de mucoviscidose 

Généralités 

Au cours de la colonisation chronique, sont souvent observés des changements phénotypiques des colonies isolées des échantillons du tractus respiratoire, que ce soit au niveau du morphotype en culture, ou au niveau de la sensibilité aux antibiotiques. La question se pose de savoir s’il s’agit d’une même souche évoluant dans le temps, ou bien d’une succession de souches de génotypes différents ? Dans les poumons de patients atteints de mucoviscidose, plusieurs études montrent une persistance de S. aureus de même ST après 2 ans dans plus de 75% des cas, et après 10 ans dans 41% des cas. (49,158,159) La persistance moyenne d’une même souche de S. aureus dans les poumons de patients atteints de mucoviscidose est estimée à 8,25 ans. (158) Les études analysant uniquement les SARM sont rares, mais sont en accord avec les observations faites pour l’ensemble des S. aureus. Dans leur étude portant sur 76 patients, utilisant les techniques de spa typing et MLVA, Gilpin et al. montrent une persistance d’un même ST de SARM dans 76,3% des cas après 2 ans. De leur côté, Molina et al. montrent cette persistance dans 67% des cas après 2 à 5 ans de colonisation, après analyse des échantillons de 77 patients par PFGE. (136,138) Bien qu’il existe de nombreuses souches différentes de S. aureus pouvant être isolées, il ne semble pas y avoir de lien entre ST et évolution clinique chez les patients atteints de mucoviscidose. 

Modifications génotypiques 

Du fait de la chronicité du portage du SARM chez certains patients atteints de mucoviscidose, il existe une adaptation à leur environnement par des modifications de leur patrimoine génétique. Ces modifications ont par exemple été mises en évidence dans l’étude sur 13 ans d’un patient colonisé à SARM, chez lequel le spa-type change à 6 reprises (souche de même ST et ayant un même type de SCCmec durant toute l’étude). (159) Il a été montré que les S. aureus colonisant ces patients mutent significativement plus que chez un patient sain, pouvant donner lieu à l’apparition de SCV ou de résistances aux antibiotiques. Dans leur étude, Vu-Thien et al. ont étudié par MLVA et spa typing 278 souches de S. aureus provenant de 108 patients, isolées précocement et tardivement (jusqu’à 2 ans d’intervalle) au cours de la colonisation chronique à S. aureus. Ils ont observé dans la majorité des cas la persistance d’une même souche au cours du temps. D’autres patients pouvaient avoir plusieurs souches de CC différents simultanément : c’est notamment le cas d’un patient chez qui 4 CC différents ont été mis en évidence, mais 1 seul a été détecté plus d’une fois au cours de l’étude. (49) Cette observation est en adéquation avec l’étude de Kahl et al. suggérant une compétition entre S. aureus dans les poumons de patients atteints de mucoviscidose. (133) Chez d’autres patients, la présence de populations bactériennes diversifiées avec coexistence de plusieurs variants chez un même patient est observée, à travers la présence de plusieurs bandes suite à l’électrophorèse sur gel d’agarose des VNTRs. (49) Les souches appartenant au CC8 se sont montrées être très stables à 2 ans. En revanche, les souches appartenant aux CC5 et CC45 avaient subi plus de mutations au cours de l’évolution, avec apparition de colonies variantes. 

Variants à petites colonies (SCV) 

Il est observé l’apparition de variants à petites colonies de S. aureus (SA-SCV) dans le poumon de patients atteints de mucoviscidose dans un quart des cas de colonisation chronique. (158) Cette observation est à mettre en lien avec la pression de sélection exercée par P. aeruginosa, mais également par un traitement prolongé par sulfaméthoxazole-triméthoprime. (127,133,162) 49 Ces souches posent un problème important car leur croissance peut être plus lente (jusqu’à 72h) et l’aspect des colonies peut être atypique (aspect très fin, non hémolytique…), rendant ainsi leur détection plus compliquée au laboratoire, où il est estimé qu’environ 1% des S. aureus isolés sont des SCV. Elles produisent également moins de pigments et sont plus fréquemment intracellulaires, rendant leur détection d’autant plus difficile. D’une façon générale, les SA-SCV sont également plus souvent résistants aux antibiotiques comme le sulfaméthoxazole-triméthoprime, les aminosides, la fosfomycine, ou encore la ciprofloxacine. Ils sont également associés à des recours plus fréquents à des antibiotiques par voie intraveineuse, ainsi qu’à une dégradation respiratoire plus importante objectivée par un VEMS plus bas. Il a également été montré que ces souches présentaient des taux de mutation plus importants. 

Biofilm

Les bactéries cherchent constamment à se mettre à l’abri d’un environnement hostile, et notamment du système immunitaire. Ainsi, l’un des mécanismes permettant cette protection au cours de la colonisation est la production de biofilm. Cette production est complexe, et dépend à la fois de caractéristiques génotypiques et phénotypiques. Ainsi, chez le S. aureus, le gène ica est au centre de ce mécanisme en produisant deux protéines : polysaccharide intercellular adhesin (PIA) et poly-N-acetyl-b-(1-6)-glucosamine (PNAG), nécessaires à la formation du biofilm. (127,164) Une production accrue de biofilm peut exister dans certains cas de figures apparaissant au cours de la colonisation : i) il peut notamment exister une délétion au sein de l’opéron ica, permettant une production plus importante des protéines PIA/PNAG ; (165) ii) un deuxième cas de figure peut apparaître dans le cas particulier des patients atteints de mucoviscidose, chez lesquels la présence de mucus pulmonaire épais peut entrainer localement des conditions de microaérobiose ou d’anaérobiose. (166,167) Dans ce contexte d’anaérobiose, il existe un système à deux composants appelé « staphylococcal respiratory response AB » (SrrAB) qui va réguler l’expression de plusieurs gènes. Ce régulon va notamment entraîner une plus forte expression du gène ica, augmentant ainsi la production de biofilm et permettant une persistance du S. aureus. (168) A noter que ce système serait également responsable de variations de production de facteurs de virulence comme la TSST-1 ou la protéine A.

Table des matières

Liste des figures
Liste des tableaux
Liste des annexes
Liste des abréviations
INTRODUCTION
PARTIE 1 : ETUDE BIBLIOGRAPHIQUE
I. Le SARM en France
1) Apparition de la résistance à la méticilline
2) Méthodes de typage
3) Principaux clones et répartition géographique
4) Principaux profils de résistance
II. Le SARM chez les patients atteints de mucoviscidose
1) Généralités
2) Prévalence
3) Particularités du SARM par rapport au SASM
4) Acquisition et importance
5) Co-infection
6) Typage moléculaire et étude des liens épidémiologiques entre souches de SARM
7) Facteurs de virulence
8) Traitements antibiotiques
9) Cas particulier des fratries
III. Persistance et évolution adaptative de Staphylococcus aureus au cours de la persistance chez les patients atteints de mucoviscidose
1) Généralités
2) Modifications génotypiques
3) Variants à petites colonies (SCV)
4) Biofilm
5) Autres adaptations
PARTIE 2 : ETUDE EXPERIMENTALE
I. Introduction
II. Matériels et méthodes
1) Patients et échantillons
2) Souches bactériennes et analyses microbiologiques
3) Multi-Locus Sequence Typing (MLST)
4) Production de biofilm
5) Analyse des données
III. Résultats.
1) Population étudiée
2) Génotypes de SARM identifiés chez les patients du CRCM de Montpellier en 2016
3) Nouveaux génotypes
4) Répartition des génotypes de SARM isolés par patient, en 2016
5) Comparaison des résultats aux données de la base PubMLST
6) Lien avec les données cliniques et microbiologiques
7) Distance allélique entre les sequence types des souches de SARM étudiées
8) Étude longitudinale
9) Biofilm
IV. Discussion
1) Prévalence du SARM
2) Données cliniques
3) Épidémiologie moléculaire
4) Diversité intra-échantillon
5) Étude longitudinale
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES

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