Du post-réseau à l’hyper-connexion la place du réseau dans le futur énergétique des territoires urbains en question

Du post-réseau à l’hyper-connexion la place du réseau dans le futur énergétique des territoires urbains en question

En point de départ de cette thèse et, dès lors, au cœur du propos de ce chapitre, se trouve une ambivalence quant au devenir des réseaux urbains de distribution d’énergie, pourtant considérés depuis maintenant plus de cent cinquante ans comme indissociables du fonctionnement des villes. En effet, d’un côté, les discours institutionnels et réglementations qui prennent pour cadre un objectif de transition énergétique promeuvent l’usage d’énergies décentralisées, renouvelables ou de récupération, dont le développement tend à affaiblir le rôle du grand réseau centralisé tel qu’il existe aujourd’hui. De l’autre, un discours émerge quant à la difficulté de trouver une adéquation entre ces productions locales et les besoins individuels de ceux qui les produisent. En d’autres termes, la possibilité de leur autonomie est mise en doute. Pour améliorer l’efficacité du système énergétique, les discours promeuvent alors des échanges de flux d’énergie entre des activités qui, traditionnellement, ne sont pas reliées sur le plan énergétique. Ces échanges passent par la création de nouvelles liaisons matérielles, c’est-à-dire par de nouvelles mises en réseau. Ainsi, l’évolution du rôle de la forme réticulaire dans l’approvisionnement énergétique des villes est incertaine, au sens où son affaiblissement comme son renforcement sont concomitamment considérés, les implications urbaines de cette ambivalence étant insuffisamment explorées. Dans ce chapitre, nous commençons par révéler cette ambivalence et les principes techniques et fonctionnels sur lesquels elle repose (I). Nous donnons ensuite à voir les discours institutionnels qui, de l’échelle européenne à celle de collectivités locales, promeuvent ces nouvelles formes de mise en réseau, afin de montrer l’épaisseur qu’elles prennent dans les stratégies de transitions énergétiques (II). Nous montrons alors que les approches académiques de ces formes par la littérature explicitement urbaine ne les considèrent que pour leur dimension matérielle (III). De là, nous avançons qu’elles doivent au contraire être construites comme une combinaison de flux, d’objets techniques et d’acteurs organisés dans l’espace et ouvrons sur les champs de recherche qui peuvent aider à les conceptualiser en ce sens (IV).

Le réseau dans les transitions énergétiques urbaines : un statut ambivalent

L’idée de transition énergétique urbaine est un concept aux contours flous, bien souvent utilisé comme expression signifiante puisqu’appartenant aujourd’hui au débat public. Elle est parfois présentée comme la passage d’une dépendance aux énergies fossiles à un usage d’énergies renouvelables dans le fonctionnement urbain (Droege, 2011) ou bien est « prioritairement conçue comme impliquant l’utilisation accrue d’énergies renouvelables » (Bolzon, Rocher et Verdeil, 2013). Elle est encore décrite, en un sens élargi, comme « un changement radical, systémique et dirigé vers des approvisionnements et usages « plus soutenables » et « plus efficaces » de l’énergie »3 (Rutherford et Coutard, 2014). La notion est donc plurielle et touche, de près ou de loin, à tout ce qui a trait à la vie et aux fonctionnements urbains. Nous abordons ici cette question, dans une première approche, par un sous ensemble de ce qui compose les systèmes énergétiques urbains : les réseaux, qui ne sont pour le moins pas au cœur des recherches sur les transitions énergétiques urbaines (Rocher, 2013). Invisibles dans leur majorité aux usagers, ils innervent pourtant les villes pour distribuer l’énergie et les relier à des macro-systèmes techniques transfrontaliers et jouent un rôle depuis maintenant plus d’un siècle dans le fonctionnement urbain. Malgré cela, ils sont aujourd’hui mis en cause dans des critiques qui semblent dessiner une ville sans réseaux et qui s’appuient sur les mêmes arguments qui fondent la défense de la nécessité d’une transition énergétique (A). Pour autant, et c’est là le point de départ de notre investigation, la mise en réseau de l’urbain par des échanges énergétiques apparaît quant à elle toujours valorisée, mais sous des formes renouvelées qui visent précisément à favoriser une transition énergétique (B).

 

Cours gratuitTélécharger le document complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *