Epidémiologie de la césarienne dans le monde

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Une situation encore plus alarmante en Afrique sub-saharienne

L’expérience des pays à revenu moyen et élevé montre que la césarienne présente des risques intrinsèques pour la mère et le nouveau-né dans un contexte où ces risques sont toutefois largement contrôlés par la technologie médicale. En Afrique sub-saharienne où les ressources sont beaucoup moins importantes, les données disponibles montrent que la morbidité associée à la césarienne est plus sévère.

La morbidité et la mortalité maternelles

Une étude de l’OMS a montré que la fréquence des complications maternelles sévères était significativement plus élevée chez les femmes qui ont eu une césarienne (62,5%) comparée à celles ayant eu un accouchement par voie basse (37,5%) (143). Plus de la moitié des complications étaient liées à l’hémorragie du postpartum (27%) et aux désordres hypertensifs 26%) (143). Une étude conduite au Mali et au Sénégal (108) a montré que comparée à l’accouchement spontané par voie basse, la césarienne était associée à un risque plus élevé de mortalité maternelle (OR ajusté 3,2 IC95% 2,45–4,07). En limitant l’analyse aux femmes à bas risque obstétrical, les auteurs ont retrouvé une augmentation significative de la mortalité maternelle chez les femmes ayant eu une césarienne pendant le travail par rapport à celles ayant eu un accouchement spontané par voie basse (OR ajusté 4,9 IC95% 2,55-9,26). Une étude Sud-Africaine (144), analysant les causes des décès maternels a montré que le risque de mourir pour une femme était 3 fois plus élevé en cas d’accouchement par césarienne qu’en cas d’accouchement par voie basse. L’hémorragie était une des principales causes de décès, avec un taux de 5,5 décès par 10 000 césariennes réalisées. Les risques de décès en raison d’un accident embolique ou d’un choc hypovolémique étaient respectivement 4,5 fois plus élevés et 4,8 fois plus élevé en cas d’accouchement par césarienne qu’en cas d’accouchement par voie basse. Les taux de létalité de la césarienne étaient compris entre 10,1 et 31,9 décès pour 10 000 césariennes. De façon générale, l’étude a montré que les complications conduisant au décès maternel après césarienne incluaient l’hémorragie per et postpartum, la pré-éclampsie et l’éclampsie, les accidents en rapport avec l’anesthésie, l’infection liée à la grossesse, le collapsus vasculaire et l’embolie.
L’enquête multi-pays de l’OMS sur la santé maternelle et périnatale a montré que les césariennes sans indication médicale étaient associées à une augmentation du risque de mortalité maternelle, d’admission en unité de soins intensifs, de transfusion et d’hystérectomie avec des risques plus élevés pour la césarienne pendant le travail (OR 14,29 IC95% 10,91 to 18,72) que pour la césarienne programmée (OR 5,93, IC95% 3,88-9.05). Dans l’ensemble, ces risques étaient plus élevés dans les pays africains qu’en Asie ou en Amérique latine (8). Ces résultats interpellent les professionnels de santé et les femmes quant à la pratique des césariennes non médicalement justifiées.

La morbidité et la mortalité néonatales

L’étude de l’OMS conduite en Afrique a montré que l’augmentation globale des taux de césariennes était associée à une augmentation de la morbidité néonatale grave, et l’augmentation des taux de césarienne en urgence était associée à un nombre élevé de mort – nés frais, de décès néonatals et à une augmentation de la morbidité néonatale grave. En revanche, l’augmentation des taux de césarienne élective était associée à de meilleures issues néonatales (10).
L’étude conduite au Mali et au Sénégal (108), a montré qu’après ajustement sur les caractéristiques maternelles, périnatales et hospitalières, le risque de décès fœtal/néonatal immédiat a diminué de façon marquée chez les femmes ayant eu une césarienne programmée comparativement aux femmes ayant eu une tentative d’accouchement par voie basse (OR 0,2 IC95% 0,16 -0,36). En revanche, le risque de mortalité néonatale après le premier jour associé à la césarienne programmée n’était pas significativement différent de celui associé à l’épreuve du travail (OR 1,3 IC95% 0,66-2,72). Le risque de mortalité fœtale/néonatale immédiate était deux fois plus élevé chez les femmes ayant eu une césarienne pendant le travail que chez celles ayant eu un accouchement spontané par voie basse (OR 2,0 IC95% 1,64-2,32). La mortalité néonatale après le jour 1 était cinq fois plus élevée chez les femmes ayant eu une césarienne pendant le travail que chez celles ayant eu un accouchement spontané par voie basse (OR 4,7 IC95% 3,34-6,65).

Conclusion sur la morbidité intrinsèque de la césarienne

Compte tenu d’une morbidité intrinsèque liée à l’acte chirurgical, la césarienne doit être effectuée lorsqu’un bénéfice clair est prévu, un bénéfice qui pourrait compenser les coûts plus élevés et les risques supplémentaires dans le contexte spécifique où l’opération se déroule. Ce risque supplémentaire doit être pris en considération par les professionnels de la santé et les patientes lors de la décision du mode d’accouchement. Dans un contexte comme celui de l’Afrique sub-saharienne où les niveaux de mortalité maternelle et néonatale sont élevés, la césarienne doit être indiquée de façon prudente. Le principal défi lié à la césarienne est de faire le meilleur usage de cette procédure, qui est certainement une ressource importante pour la réduction de la mortalité maternelle et périnatale, mais dont la sur-utilisation peut être associée à un risque accru de complications maternelles et périnatales sévères.

Classification des césariennes

Pourquoi une classification des césariennes ?

L’absence d’un système de classification normalisé et internationalement accepté pour comparer les taux de césariennes entre les pays et les hôpitaux est l’un des facteurs qui a contribué au faible niveau de sensibilisation des gestionnaires de services et des professionnels de santé à l’épidémie de césarienne dans le monde (145).
En effet, pour proposer et mettre en œuvre des mesures efficaces pour contrôler les taux de césariennes, il est essentiel d’identifier les groupes les plus à risque. Cela nécessite l’utilisation d’un système de classification standardisée qui permet de surveiller les taux de césariennes d’une manière fiable, cohérente et orientée vers l’action.
A ce jour, il existe plusieurs systèmes de classification des césariennes parmi lesquelles les plus documentés sont les classifications basées sur: (1) les indications de césarienne ; (2) le degré d’urgence ; et (3) les caractéristiques des patientes (146).

Classification basée sur les indications

Althabe (147) a proposé une définition des principales indications de césarienne telles que la dystocie et la détresse fœtale pendant le travail et des recommandations précises sur la façon de décider ou non d’une césarienne. Anderson a utilisé une approche complémentaire de celle d’Althabe, en précisant les règles sur la façon de classer une césarienne lorsqu’elle a été réalisée pour deux indications et plus (par exemple pour un antécédent de césarienne et une dystocie en cours de travail) (148).
Stanton (149) a proposé une classification basée sur deux catégories d’indication : les indications absolues et non absolues. Selon l’auteur, les indications maternelles absolues sont celles pour lesquelles l’absence de césarienne met en jeu le pronostic vital de la femme. Il s’agit des indications suivantes classées par ordre de priorité : dystocie majeure (incluant les anomalies du bassin et l’échec de l’épreuve du travail), placenta prævia recouvrant, présentation anormale (transverse, oblique ou front) et rupture utérine. Cette classification est très utile dans les pays à faibles ressources car elle permet de vérifier si la majorité des césariennes réalisées le sont pour une indication absolue avec un impact théorique sur la mortalité maternelle (149). La plupart des césariennes réalisées en Afrique sub-saharienne le sont pour une indication maternelle, cependant la contribution des indications absolues varie d’un pays à l’autre (10,39,116,150). Les dystocies restent la première cause de césarienne pendant le travail (30 à 60% des césariennes) (56), mais leur diagnostic reste incertain compte tenu du suivi non optimal du travail et de l’accouchement (57). Il est donc difficile d’affirmer que les césariennes réalisées pour dystocie le sont pour une dystocie majeure.
L’avantage des systèmes de classification basés sur les indications est que l’information concernant les indications de césariennes est régulièrement collectée et disponible dans n’importe quelle maternité. Cette classification est donc facile à mettre en œuvre, y compris dans les pays à faibles ressources. Elle permet l’identification des indications qui contribuent le plus à l’augmentation des taux de césariennes et des causes sous-jacentes. En identifiant les situations cliniques à l’origine d’un grand nombre de césariennes dans un contexte donné, les acteurs de santé peuvent analyser et modifier leurs pratiques pour réduire les taux de césariennes.
L’inconvénient majeur de ces systèmes est l’absence de définition standardisée des principales indications. La dystocie, par exemple, regroupe des situations cliniques très variées liées à une activité contractile utérine insuffisante ou à l’impossibilité pour le fœtus de traverser le bassin maternel pour des raisons mécaniques. La dystocie se rapporte à des situations cliniques variables, comme l’arrêt de la dilatation cervicale, l’échec du déclenchement, l’absence de progression ou d’engagement de la présentation fœtale, l’échec de l’épreuve du travail ou des efforts expulsifs inefficaces etc. L’apparition d’une dystocie n’aboutit pas nécessairement à une césarienne et différentes interventions peuvent être mises en œuvre pour une reprise normale du travail : l’administration de l’ocytocine, la rupture artificielle des membranes (amniotomie), le contrôle de la douleur (par une analgésie péridurale ou des antalgiques), et les manœuvres de rotation de la présentation. L’hétérogénéité de ces pratiques selon les pays et les équipes participe également à la variabilité importante des taux de césarienne parmi les femmes avec une dystocie diagnostiquée. La souffrance fœtale intra-partum est également une indication de césarienne très variable selon les contextes. Plusieurs définitions sont utilisées : anomalie de l’auscultation des bruits du cœur du fœtus, anomalies du tracé du rythme cardiaque fœtal, diminution du pH fœtal et du score d’Apgar à la naissance, nécessité des gestes de réanimation néonatale et des transferts en unité de soins intensifs néonatals etc. (151,152). En cas de souffrance fœtale aigüe diagnostiquée, les taux de césariennes intra-partum varient de 20 à 40% selon les études (153). La méthode diagnostique de la détresse fœtale la plus documentée concerne la surveillance du rythme cardiaque fœtal (153,154). Un tracé anormal suggère l’éventualité d’une souffrance fœtale, mais l’incidence de faux positifs est importante. D’où la nécessité de recourir à d’autres méthodes diagnostiques devant un tracé anormal du rythme cardiaque fœtal. La mesure du pH au scalp améliore la valeur prédictive positive du test de diagnostic de la souffrance fœtale aigüe (155). Cette méthode de diagnostic n’est cependant pas disponible dans la plupart des pays à faible revenu. Cela explique le fait que le diagnostic de la souffrance fœtale demeure incertain dans la plupart des pays avec probablement un nombre important de césariennes réalisées à tort pour souffrance fœtale. Lorsqu’elle est effective, la souffrance fœtale peut provoquer une perturbation des échanges gazeux utéro-placentaires et conduire à une anoxie fœtale. L’altération du métabolisme cellulaire conduit à une acidose métabolique et à une hyperlactacidémie. La souffrance fœtale aigüe peut donc entrainer une défaillance multi viscérale et une encéphalopathie anoxo-ischémique, dont les complications les plus graves sont le décès fœtal, l’infirmité motrice cérébrale et les handicaps neurosensoriels du nouveau-né. Une acidose métabolique avec un pH à la naissance inférieur à 7,0 et un déficit de base supérieur ou égal à 12 mmol/l est susceptible d’entraîner des séquelles neurologiques graves chez le nouveau-né (156). Il est donc normal de chercher à diagnostiquer la souffrance fœtale en temps réel, pour assurer l’extraction rapide du fœtus. Devant le manque d’une méthode diagnostique totalement fiable, la prise de décision demeure basée sur les éléments cliniques et l’auscultation ou le tracé du rythme cardiaque fœtal dans la plupart des pays.

Classification basée sur l’urgence

Une césarienne peut être réalisée avant le début du travail. On parle alors de césarienne programmée ou « elective cesarean section » dans la littérature anglo-saxonne. Les autres césariennes non programmées sont réalisées pendant le travail, le plus souvent dans un contexte d’urgence, pour une souffrance fœtale aigue par exemple. On parle alors de césarienne intra-partum ou, « intra-partum cesarean section » ou « emergency cesarean section » dans la littérature anglo-saxonne.
Les césariennes programmées sont en général pratiquées lorsqu’une pathologie maternelle ou fœtale est diagnostiquée avant l’entrée en travail, et lorsque le travail est potentiellement dangereux ou le risque de césarienne pendant le travail est très élevé. Les césariennes pendant le travail sont réalisées principalement dans deux situations cliniques distinctes : a) lorsqu’une césarienne programmée a été décidée, mais le travail a débuté avant sa réalisation. Par conséquent, la césarienne est pratiquée en tout début de travail; b) lorsque l’accouchement par voie basse a été tenté, mais des complications maternelles ou fœtales sont survenues. La césarienne est alors réalisée en urgence pendant le travail.
La classification basée sur le degré d’urgence est facile à comprendre et à mettre en œuvre en raison du nombre réduit des catégories proposées. Elle a l’intérêt de distinguer trois types de césarienne dont les risques maternels et périnatals sont très différents. Les césariennes programmées réalisées avant le travail ou en tout début de travail ont une morbidité intrinsèque plus faible que les césariennes pendant le travail (9). Réduire les césariennes pendant le travail au profit des césariennes programmées pourrait par conséquent conduire théoriquement à de meilleurs résultats maternels et périnatals. Cependant, aucune étude à notre connaissance n’a été réalisée pour évaluer l’impact d’une telle politique.

Classification basée sur les caractéristiques des patientes

Robson a proposé un système qui classe les femmes en 10 groupes en fonction de leurs caractéristiques obstétricales sans qu’il soit nécessaire de connaitre l’indication de la césarienne. Cinq caractéristiques sont nécessaires pour classer les femmes : 1) la parité (nullipares, multipares avec et sans antécédent de césarienne), 2) le début du travail (spontané, déclenché ou absence de travail lors d’une césarienne programmée), 3) l’âge gestationnel, 4) la présentation du fœtus et 5) le nombre de fœtus (157).
Cette classification peut être appliquée de manière rétrospective ou prospective et ses catégories sont totalement inclusives et mutuellement exclusives. Chaque femme peut être classée sur la base de ces cinq caractéristiques qui sont collectées en routine par les professionnels de santé de par le monde.
Ce système permet la surveillance et l’audit des taux de césariennes au sein de chaque hôpital, et offre une méthode de comparaison standardisée entre les hôpitaux, les pays et entre différentes périodes.
La classification de Robson a été utilisée pour analyser la pratique des césariennes dans des contextes très variés (158–160). Elle a également été utilisée dans les enquêtes internationales de l’OMS sur la santé maternelle et périnatale (161–164). Lorsqu’elle est utilisée régulièrement, cette classification peut fournir des indications très utiles sur l’évolution des pratiques (157,165).
Depuis 2014 (22), l’OMS recommande l’utilisation de la classification de Robson comme norme mondiale pour l’évaluation, la surveillance et la comparaison des taux de césariennes dans les établissements de santé. Cette classification est facile à mettre en œuvre et à interpréter. Les principaux avantages de ce système de classification sont entre autres, sa simplicité et sa pertinence clinique. Elle permet en outre de distinguer les femmes selon plusieurs niveaux de risque obstétrical. Les 4 premiers groupes peuvent être considérés comme les femmes à bas risque de césarienne tandis que les 6 autres sont des femmes à risque élevé.
La classification de Robson dans l’enquête mondiale de l’OMS en 2015 (52) a montré que dans tous les pays quel que soit le niveau de revenu, les femmes nullipares (groupes 1 et 2 de Robson) étaient celles ayant contribué le plus au taux global de césarienne, représentant environ un tiers du taux global de césarienne, suivies des femmes avec antécédent de césarienne (Groupe 5) qui représentaient environ un quart du taux global de césarienne. La contribution relative des groupes 6 à 10 au taux global de césarienne a diminué dans tous les pays, passant d’environ 22,5% pour la période 2004-2008 (23,7% dans les pays à revenu élevé, 20,6% dans les pays à moyen revenu et 24,2% dans les pays à faible revenu) à 20% pour la période 2010-2011 (21,6% dans les pays à revenu élevé, 18,2% dans les pays à moyen revenu et 19,1% dans les pays à faible revenu).
Dans les pays à revenu élevé, le taux global de césarienne parmi les accouchements enregistrés dans les hôpitaux ou cliniques chirurgicales est passé de 34,4% à 40,0%. La proportion de femmes multipares a globalement diminué, avec une augmentation concomitante de la proportion de femmes nullipares. La proportion de femmes ayant un travail spontané (groupes 1 et 3) a diminué de façon significative entre les deux périodes (2004-2008 et 2010-2011) en faveur des femmes qui ont eu un déclenchement du travail ou une césarienne élective avant travail (groupes 2 et 4). Cette diminution a été plus importante chez les femmes multipares (de 28,9% à 25%) que chez les femmes nullipares (de 25, 2% à 24%). Dans tous les groupes, le taux de césarienne est soit resté stable ou a augmenté significativement.
Dans les pays à revenu élevé, l’augmentation globale du taux de césarienne entre les deux périodes était attribuable aux augmentations significatives de la contribution absolue des femmes nullipares (groupe 2: +2,1% IC 95% 1,9 -2,2 ) alors que chez les femmes qui ont eu un travail spontané (groupes 1 et 3) il y a eu peu de changement (groupe 1: +0,3% IC95% 0,2-0,4); (groupe 3: 0,0% IC95 0,0-0,1).
La réduction de la contribution des femmes avec antécédent de césarienne au taux global de césarienne (groupe 5: -0,2% IC 95% -0,4 – 0,0) dans ces pays doit être interprétée avec prudence, à la fois en raison du retour à la nulliparité dans la population et parce que ce groupe a eu la plus grande contribution relative au taux global de césarienne.
Dans les pays à moyen revenu, le taux global de césarienne dans les hôpitaux et cliniques chirurgicales est passé de 28,4% à 32,4% entre les deux périodes. Environ deux tiers des femmes accouchant dans ces structures de santé avaient eu un travail spontané (groupes 1 et 3). La proportion de femmes avec antécédent de césarienne a augmenté (de 6,9% à 8,9%), alors que celle des femmes avec accouchement prématuré (groupe 10) a diminué (de 10,0% à 7,1 %). Les taux de césariennes ont augmenté dans tous les groupes (à l’exception des groupes 2b : nullipares avec grossesse unique, fœtus en présentation céphalique, âge gestationnel ≥ 37 semaines, césarienne avant travail et 4b : multipares sans antécédent de césarienne, grossesse unique, fœtus en présentation céphalique, âge gestationnel ≥ 37 semaines, césarienne avant travail, dans lesquels le taux de césarienne est de 100%). La proportion de femmes ayant eu une induction du travail (à la fois les nullipares et les multipares) a été plus faible dans les pays à moyen revenu que dans les pays à revenu élevé. D’autre part, le taux de césarienne parmi les femmes ayant un antécédent de césarienne était plus élevé dans les pays à moyen revenu que dans les pays à revenu élevé. Les femmes nullipares entrées spontanément en travail et les femmes avec antécédent de césarienne représentaient 50% du taux de césarienne dans ces pays.
Dans les pays à faible revenu, les trois quarts de la population obstétricale avaient eu un travail spontané et près de la moitié étaient des multipares. Le taux de césarienne a augmenté de 6% (de 14,4% à 20,3%) entre les deux périodes. Bien que la proportion de femmes ayant eu une induction du travail ou une césarienne avant travail (groupes 2a et 4a) soit plus faible dans les pays à faible revenu que dans les autres pays, elle a augmenté au fil du temps (de 1,6% à 2, 4% pour le groupe 2a et de 1,9% à 2,1% pour le groupe 4a). Il en a été de même pour la proportion de femmes avec un antécédent de césarienne (groupe 5), augmentant de 4,9% à 7,3%. Les taux de césarienne ont augmenté dans tous les groupes (sauf pour le groupe 9), avec une augmentation très importante chez les femmes avec antécédent de césarienne (de 63,2% à 72,1%). Les variations les plus importantes dans la contribution absolue au taux global de césarienne ont été enregistrées dans le groupe 5 (+2,2% 95% IC 2,1-2,3), le groupe 2b (+1,0% IC95 0,9-1,1) et le groupe 1 (+0,9% IC95% 0,8-1,0). La contribution absolue du groupe 5 (antécédent de césarienne) au taux global de césarienne est passée de 3,1% pour la période 2004-2008 à 5,3% pour la période 2010-2011 dans les pays à faible revenu. La contribution absolue de ce groupe au taux global de césarienne était la plus importante dans ces pays pour la période 2010-2011. En résumé, la classification de Robson dans cette enquête mondiale de l’OMS a montré que la proportion de femmes avec antécédent de césarienne a augmenté dans les pays à moyen et faible revenu, de même que les taux de césarienne chez ces femmes, entrainant une contribution relative de plus en plus importante de ce groupe de femmes au taux global de césarienne.
Les femmes avec antécédent de césarienne constituent ainsi un déterminant de plus en plus important de l’augmentation globale des taux de césariennes dans les pays à faible et moyen revenu. Pourtant la césarienne après une césarienne antérieure ne doit pas être systématique. Dans les pays à revenu élevé, plusieurs études ont montré que sur des patientes à bas risque, correctement sélectionnées, le risque de morbidité maternelle et périnatale n’est pas significativement plus élevé pour les femmes qui bénéficient d’une épreuve du travail que pour celles qui ont une césarienne programmée avant le début du travail (166–168).
Aucune donnée similaire n’est disponible pour les pays à faible revenu. Ce manque d’information peut-il conduire les obstétriciens et leurs patientes à privilégier la césarienne programmée car généralement perçue comme plus sûre ?
La classification de Robson comporte néanmoins certaines limites (145). Elle permet l’identification des groupes qui contribuent à l’augmentation des taux de césariennes, mais ne fournit pas d’informations sur les raisons ayant motivé la réalisation de ces césariennes (les indications), ni d’explications concernant les différences de taux de césariennes observées entre groupes. Il persiste une certaine hétérogénéité dans les groupes car certaines variables importantes qui influencent le taux de césarienne ne sont pas prises en compte dans les analyses de comparaison : l’âge maternel, les conditions cliniques préexistantes, les complications obstétricales, les modalités d’entrée en travail, l’âge gestationnel et l’indice de masse corporelle (IMC). La classification ne permet pas une relation directe entre le taux de césarienne et les résultats maternels et périnatals.

Conclusion sur la classification des césariennes

En conclusion, ces trois systèmes de classification de la césarienne possèdent chacun des avantages et des limites résumés dans le tableau 2. La classification basée sur le degré d’urgence pourrait conduire à de meilleurs résultats maternels et périnatals en privilégiant les césariennes programmées avant l’entrée en travail. Mais elle ne permet pas de savoir si toutes les césariennes programmées sont réalisées pour des femmes qui en ont réellement besoin. La classification de Robson est également simple et pertinente cliniquement. Elle permet d’évaluer la pratique des césariennes pour des groupes de femmes relativement homogènes mais elle ne fournit pas d’information sur les indications de césariennes. La classification basée sur les indications de césariennes a le principal avantage que l’information concernant les indications est disponible partout, et les résultats permettent d’orienter les interventions visant à réduire les taux de césariennes. Malgré ses limites principalement en rapport avec l’absence de définition standardisée, c’est ce type de classification qui a été retenue dans le cadre de ce travail pour identifier les césariennes non médicalement justifiées et proposer des interventions efficaces visant à en réduire le nombre.

Table des matières

Introduction
I. Epidémiologie de la césarienne dans le monde
A. Des taux de césarienne en augmentation
B. Pourquoi les taux de césarienne ne cessent d’augmenter ?
1. Les pays à revenu élevé
2. Les pays à revenu intermédiaire ou pays émergents
3. Les pays à faible revenu
Conclusion sur l’augmentation des taux de césariennes
C. La césarienne est-elle une intervention sans risque ?
1. Morbidité intrinsèque de la césarienne
a. La morbidité maternelle associée à la césarienne
b. La morbidité périnatale associée à la césarienne
2. Une situation encore plus alarmante en Afrique sub-saharienne
a. La morbidité et la mortalité maternelles
b. La morbidité et la mortalité néonatales
Conclusion sur la morbidité intrinsèque de la césarienne
D. Classification des césariennes
1. Pourquoi une classification des césariennes ?
2. Classification basée sur les indications
3. Classification basée sur l’urgence
4. Classification basée sur les caractéristiques des patientes
Conclusion sur la classification des césariennes
II. La qualité de la césarienne
A. Définition du concept et cadre d’analyse de la qualité de la césarienne
B. Interventions visant à réduire les taux de césariennes
Conclusion sur la qualité de la césarienne
III. Hypothèses
IV. Objectifs
V. Méthodes
A. Contexte
1. Généralités sur le Burkina Faso
a. Caractéristiques géographiques, démographiques et administratives
b. Situation économique et sociale
c. Organisation du système de santé
d. Santé des mères et des enfants
2. Généralités sur le Mali
a. Caractéristiques géographiques, démographiques et administratives
b. Situation économique et sociale
c. Organisation du système de santé
d. Santé des mères et des enfants
3. Généralités sur le Sénégal
a. Caractéristiques géographiques, démographiques et administratives
b. Situation économique et sociale
c. Organisation du système de santé
d. Santé des mères et des enfants
4. Synthèse de la situation de la santé maternelle et infantile des trois pays
B. Collecte des données
1. Evaluation des connaissances des professionnels de santé au Burkina Faso.
a. Elaboration des vignettes cliniques
b. Critères d’inclusion des hôpitaux et des professionnels de santé enquêtés
c. Méthode de collecte des données
d. Mesure du score de connaissance
2. Evaluation de la pratique des césariennes au Burkina Faso
a. Définition des critères de césariennes non médicalement justifiées
b. Critères d’inclusion des hôpitaux et des femmes césarisées
c. Méthode de collecte des données
d. Méthode d’identification des césariennes non médicalement justifiées
3. Evaluation des complications maternelles et périnatales chez les femmes avec antécédent de césarienne au Mali et au Sénégal
a. Critères de morbidité maternelle et périnatale.
b. Critères d’inclusion des femmes et des nouveau-nés.
c. Méthode de collecte des données
C. Méthodes d’analyse
1. Analyse des facteurs associés au score de connaissance des professionnels de santé.
2. Déterminants des césariennes non médicalement justifiées
3. Comparaison des complications maternelles et périnatales chez les femmes avec antécédent de césarienne selon le mode d’accouchement
VI. Résultats
1. Quality performance among healthcare professionals performing caesarean deliveries in Burkina Faso
2. Determinants of non-medically indicated cesarean deliveries in Burkina Faso
3. Maternal and perinatal outcomes associated with a trial of labour after previous caesarean section in sub-Saharan countries.
4. DECIDE : un essai contrôlé randomisé en grappe associé à une analyse de mise en oeuvre pour réduire les césariennes non médicalement justifiées au Burkina Faso
VII. Discussion générale
A. Synthèse des résultats
B. Forces et limites de ce travail
C. Interprétation des résultats
D. Implications pour la santé des mères et des enfants
E. Perspectives de recherche
Conclusion générale

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