Fonctionnalisation de surfaces de silicium

Fonctionnalisation de surfaces de silicium

Préparation de surfaces hydrogénées 

Choix du substrat 

Depuis le milieu des années 90, la modification des surfaces de silicium hydrogénées a été largement étudiée en raison de ses divers domaines d’application, de la microélectronique aux biocapteurs.3-7 Le silicium (100) est largement utilisé pour la microélectronique en raison des très bonnes propriétés électroniques de l’interface Si(100)/SiO2. Dans le cadre de notre travail, nous privilégierons la face cristallographique (111) qui permet, par dissolution anisotrope du silicium dans NH4F, d’obtenir des surfaces atomiquement planes à l’échelle atomique facilement caractérisables par Microscopie à Force Atomique (AFM).8 Ces surfaces planes constituent un substrat idéal pour des études de chimie de surface bien contrôlées. Le silicium cristallise suivant le système cubique diamant. Son réseau possède donc une symétrie cubique, et on peut le représenter comme deux sous-réseaux cubiques à faces centrées décalés de ¼ l’un de l’autre le long d’une des diagonales principales du cube. Ce réseau possède une famille de plans denses orientés selon la direction [111] dont un exemple est représenté en rouge sur la figure 1. Dans notre cas, la coupe du cristal est légèrement désorientée par rapport à une telle face. Un mode opératoire bien précis, qui sera détaillé par la suite, nous permet d’obtenir une surface vicinale, structurée en réseau de marches régulières dont la hauteur (3,14 Å) correspond exactement à la distance entre 2 bicouches atomiques. Ces marches atomiques, rectilignes et parallèles, séparent les terrasses atomiquement planes. La figure 2 représente le schéma de la « désorientation » (miscut), c’est-à-dire le plan de coupe du cristal par rapport à la face cristallographique (111). Le miscut est défini par 2 angles. L’angle α entre la normale au plan optique et la direction [111] est l’angle de la désorientation. L’angle θ qui définit l’azimut du miscut est formé par la projection des vecteurs [111] et [11 2 ] dans le plan de la surface. Nous travaillons donc avec des substrats présentant une désorientation α faible mais finie de manière à contrôler soigneusement l’azimut de celle-ci (par exemple, pour une désorientation de 0,2°, les terrasses présentent une largeur d’environ 100 nm). Le contrôle de l’azimut pour avoir θ = 180° est crucial pour obtenir des marches rectilignes, alors orientées parallèlement à la direction [1 1 0].  Figure 1 : Maille cubique du réseau de silicium cristallin : les 2 réseaux cubiques à faces centrées sont représentés en noir et en blanc, une face dense (111) est représentée en rouge. Figure 2 : Schéma d’une surface vicinale montrant la désorientation de la face vicinale par rapport au plan dense .

Hydrogénation de la surface

Introduction 

Depuis la fin des années 60, on sait qu’après un traitement désoxydant dans l’acide fluorhydrique HF, le silicium est passivé par une couche contenant des liaisons SiH.9,10 De nombreuses équipes de recherche se sont ensuite intéressées à la caractérisation de ces couches, mettant en évidence la présence d’une monocouche de liaisons Si-H à la surface.11-17 Beaucoup de travaux ont été réalisés pour comprendre le mécanisme de dissolution du silicium.1,15,18-20 En 1995, Allongue a mis en évidence la coexistence de deux voies réactionnelles de dissolution dans NH4F, présentées sur la figure 3.21 La cinétique de la réaction chimique est beaucoup plus rapide sur les sites de crans et de bords de marche que sur les terrasses. Cette réaction est très anisotrope et dépend peu du potentiel électrochimique. Elle consiste à oxyder le silicium par les molécules d’H2O qui réagissent préférentiellement sur les sites de crans et les bords de marche pour des raisons stériques. La seconde réaction, électrochimique, a en revanche lieu de façon presque aléatoire sur la surface et consiste en la rupture électrochimique de la liaison Si-H. L’hydrogène est alors remplacé par un groupement hydroxyle pour former une liaison Si-OH. Le fluor attaque ensuite la liaison Si-OH formée. Des molécules d’eau s’insèrent alors dans les liaisons arrières Si-Si, rendues réactives par la polarité de la liaison Si-F. Ainsi un atome de silicium est détaché de la surface et les liaisons Si-H se reforment à la surface. Afin de favoriser la réaction chimique le traitement doit se faire à des pH compris entre 8 et 9, favorisant ainsi la formation d’une surface atomiquement plane.1,18,19 Il a enfin été montré que l’oxygène dissous affecte notablement la topographie de surface en initiant la formation de piqûres sur les terrasses. L’ajout d’ions sulfites SO3 2- dans la solution, réduisant l’oxygène dissous, permet de s’affranchir de ce problème.22 L’étape d’hydrogénation du silicium est une étape critique, qui nécessite des substrats et produits de grande qualité. Dans le cadre de cette étude, nous avons travaillé avec des échantillons de silicium Si(111) désorientés de 0,2° selon la direction [11 2 ] de type n, dopés au phosphore. Ce silicium présente une résistivité de 5 à 10 Ω cm et une épaisseur comprise entre 500 et 550 µm. Des produits de qualité semi-conducteur ou VLSI Selectipur sont utilisés pour le décapage. 23 Figure 3 : Etape initiale de la dissolution du silicium par voie chimique (en haut) et par voie électrochimique (en bas).21 La qualité des couches obtenues a été contrôlée par AFM et par spectroscopie infrarouge en mode ATR (Attenuated Total Reflection). Le silicium utilisé pour l’AFM ne présente qu’une face polie, pour favoriser la réaction électrochimique sur l’autre face dépolie qui sert alors d’anode sacrificielle. Pour les mesures FTIR (spectroscopie infrarouge à transformée de Fourier), le silicium a les deux faces polies, la zone supérieure de l’échantillon est alors dépolie pour y privilégier l’attaque électrochimique et ainsi garder la planéité atomique lors de l’hydrogénation de la partie polie. Dans le cas des mesures FTIR, on utilise des cristaux de silicium purifiés par le procédé de zone fondue « Float Zone » (FZ), pour minimiser la quantité d’oxygène contenue dans le volume.23-26 

Mode opératoire 

L’étape d’hydrogénation se fait en deux étapes : – Une étape de nettoyage, durant laquelle l’échantillon et la verrerie sont nettoyés à 100°C dans une solution dite de Piranha, 1 : 3 H2O2 : H2SO4 (H2O2, 30% et H2SO4, 96% fournis par Carlo Erba). Cette étape permet de supprimer toutes les impuretés organiques et de former une couche d’oxyde à la surface. Le tout est soigneusement rincé à l’eau ultra pure (MilliQ, 18,2 MΩ cm à 25°C), afin d’éviter toute contamination organique pouvant limiter la dissolution du silicium. – Une étape de décapage, qui consiste ensuite à enlever la couche d’oxyde obtenue à la surface du silicium et à former la monocouche Si(111)-H par dissolution du silicium. L’attaque s’effectue dans une solution de fluorure d’ammonium NH4F 40% (Carlo Erba, pH 8-9). La solution de NH4F dans laquelle une faible quantité 24 de sulfite d’ammonium a été dissoute est préalablement homogénéisée aux ultrasons, pendant 10 mn, dans un bécher en polytétrafluoroéthylène (PTFE). L’échantillon y est ensuite immergé 15 mn, puis retiré et abondamment rincé à l’eau ultra pure. Il est aussi possible de procéder à l’hydrogénation du silicium par immersion de l’échantillon de silicium pendant 10 s dans une solution d’acide fluorhydrique HF 50% (Carlo Erba). La surface obtenue est tout aussi hydrophobe mais présente une rugosité de surface à l’échelle de quelques angström.

Caractérisation par microscopie à force atomique 

La topographie particulière des surfaces de silicium structurées en marches et terrasses est observable par AFM. La figure 4 montre des images AFM à différentes échelles obtenues par dissolution du silicium dans une solution de NH4F à 40% pendant 15 minutes. On retrouve comme prévu la structure en marches d’escalier, on peut y distinguer les terrasses atomiquement planes séparées par des marches monoatomiques, d’une hauteur d’environ 3,14 Å, correspondant à une bicouche de silicium.27 Ces images montrent que le procédé de préparation permet d’obtenir des surfaces de haute qualité, où aucun défaut de surface n’est apparent. 500 nm 1.25 µm a b Figure 4 : Images AFM d’une surface H-Si (111) préparée dans NH4F (a) 2×2 µm2 (b) 5×5 µm2 . d) Caractérisation par spectroscopie infrarouge La spectroscopie infrarouge nous permet d’identifier les fonctions chimiques présentes dans un matériau via la détection des vibrations caractéristiques des liaisons chimiques. Grâce à des substrats de silicium polis sur les deux faces et biseautés manuellement à 45° sur les 2 25 bords, il est possible de procéder à une caractérisation en mode ATR, bénéficiant ainsi d’une meilleure sensibilité. Le faisceau infrarouge peut être polarisé en p ou en s selon la direction du champ électrique, parallèle ou perpendiculaire au plan d’incidence (figure 5). s p Si IR Si IR Figure 5 : Représentation schématique d’un prisme de silicium caractérisé par infrarouge en ATR (Attenuated total reflection). Dans le cas d’une surface idéalement préparée, des monohydrures avec une liaison Si-H perpendiculaire à la surface sont obtenus.1 La figure 6a montre les spectres d’une surface hydrogénée dans NH4F en polarisation p et s, la référence étant la surface oxydée obtenue après nettoyage dans le piranha. L’observation de la vibration d’élongation νSiH à 2083 cm-1 en polarisation p seulement, l’intensité et la finesse du pic (ici limitée par le spectromètre), confirment la perpendicularité des liaisons Si-H. L’aire de ce pic correspond à une concentration d’atomes en surface égale à 7,8. 1014 cm -2 . 0,0003 0,0004 0,0005 0,0006 0,0007 0,0008 0,0009 0,001 1950 2000 2050 2100 2150 2200 Absorbance par réflexion (u. a.) Nombre d’ onde (cm-1) Pol p Pol s Si-H Si-H2 Si-H3 -0,0002 0 0,0002 0,0004 0,0006 0,0008 0,001 0,0012 0,0014 1950 2000 2050 2100 2150 2200 Si-H Absorbance par réflexion (u. a.) Nombre d’ onde (cm-1) Pol p Pol s a b 0,0003 0,0004 0,0005 0,0006 0,0007 0,0008 0,0009 0,001 1950 2000 2050 2100 2150 2200 Absorbance par réflexion (u. a.) Nombre d’ onde (cm-1) Pol p Pol s Si-H Si-H2 Si-H3 -0,0002 0 0,0002 0,0004 0,0006 0,0008 0,001 0,0012 0,0014 1950 2000 2050 2100 2150 2200 Si-H Absorbance par réflexion (u. a.) Nombre d’ onde (cm-1) Pol p Pol s a b Figure 6 : Spectres infrarouges en polarisation p (bleu) et s (rouge) de surfaces de silicium hydrogénées dans NH4F (a) et HF (b). 26 La figure 6b montre une surface préparée dans HF. Le signal obtenu est visible pour les deux polarisations et l’on peut distinguer différents modes de vibration dus aux différents types d’hydrures présents (les monohydrures SiH, les dihydrures SiH2 et les trihydrures SiH3). Ceci confirme la rugosité de surface à l’échelle atomique et l’influence du pH sur la présence en surface des différents types d’hydrures

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