GENERALITES SUR ANGUILLICOLA CRASSUS

Généralités sur l’anguille européenne Anguilla

Taxonomie : Le nombre d’espèces d’anguille est variable selon les auteurs. Ainsi Tsukamoto et Aoyama (1998) et Dijkstra et Jellyman (1999) parlent de 14 espèces ; Gibrat et Nielsen (1985) de 18, Lecomte-Finiger (1983a) et Brusle (1989a) en citent 19. En utilisant des critères morphologiques et génétiques, Watanabe et al., (2005) démontre l’existence que de 15 espèces au niveau mondial. En réalité, il existe toujours des controverses quant à leur séparation phylogénétique (Bastrop et al., 2000 ; Aoyama et al., 2001 ; Aoyama, 2003) et leurs aires de ponte ne sont pas toutes localisées avec certitude (Miller, 2003 ; Tsukamoto et al., 2003). Les deux espèces atlantiques A. anguilla et A. rostrata occupent l’hémisphère Nord. On les distingue d’après leur nombre de vertèbres et de myomères (Tesch, 1977; Lecomte-Finiger, 1985). De plus, les anguilles possèdent des aires de répartition bien distinctes :
L’anguille américaine A. rostrata (Lesueur, 1817) colonise le Nord-Est du continent américain (Sud du Groenland au Venezuela), tandis que l’anguille européenne A. anguilla (Linnaeus, 1758) est essentiellement localisée dans la partie Ouest de l’Europe.
Morpho-anatomie : Le corps de l’anguille est serpentiforme, très allongé, cylindrique de section arrondie dans sa partie antérieure. La tête petite et conique se termine par une grande bouche dont les mâchoires puissantes sont garnies de petites dents pectinées disposées sur plusieurs rangées, l’inférieure dépassant largement la supérieure. La disposition des dents vomériennes est susceptible d’être utilisée comme critère différentiel spécifique. Les yeux sont petits tandis que les quatre narines bien marquées sur le museau jouent un rôle important de l’odorat. Ses nageoires dorsale, caudale et anale sont soudées appelées nageoire impaire, la distance entre l’origine de la nageoire dorsale et celle de la nageoire anale est un critère morphométrie important pour la détermination des espèces (Ege, 1939). Ce poisson se caractérise aussi par des nageoires pectorales bien développées et par l’absence de nageoires pelviennes. Sa peau est recouverte d’un abondant mucus. Les petites écailles qui sont de forme ovale et incrustées profondément dans la peau apparaissent tardivement chez les anguilles mesurant plus de 18 cm de long. La coloration varie en fonction de l’âge. Les anguilles argentées (forme migratrice) ont le dos gris foncé et le ventre argenté. Au cours du développement ontogénétique en eau douce ou saumâtre, leur dos devient brun foncé vert et leur ventre blanchâtre (anguille jaune).

Généralités sur Anguillicola crassus

L’anguillicolose est provoquée par le parasite Anguillicola crassus. Originaire du Sud Est Asiatique et de l’Australie, ce nématode endoparasite hématophage colonise généralement la cavité abdominale de l’anguille avant de se fixer à l’intérieur de la vessie natatoire. En Europe et en Amérique, l’apparition du déclin du recrutement de l’anguille européenne et américaine est antérieure à celle d’A. crassus. Ce dernier ne peut donc pas être la raison initiale, mais contribuerait actuellement à la régression des stocks naturels.
Taxonomie d’Anguillicola crassus : Les différents critères systématiques de différenciation entre les espèces de ce genre sont principalement d’ordre morpho-anatomique : forme de l’œsophage, nombres des larges glandes rectales unicellulaires et des papilles caudales du mâle (Moravec et Taraschewski, 1988).
Actuellement cinq espèces sont connues :
Anguillicola globiceps (Yamaguti, 1935) chez Anguilla japonica au Japon, en Chine, en Australie, en Nouvelle-Zélande et chez Anguilla anguilla en Europe (en Italie).
Anguillicola crassa (Kuwahara et al., 1974, renommée Anguillicola crassus par Moravec et Taraschewski, 1988) chez Anguilla japonica et Anguilla anguilla, au Japon, en Europe, en Afrique du Nord, en Amérique du Nord, en Australie et en Nouvelle-Zélande.
Anguillicola australiensis (Johnson et Mawson, 1940) chez Anguilla reinhardtii en Australie et chez Anguilla anguilla en Europe (seulement en Italie, Paggi et al., 1982).
Anguillicola novaezelandia chez Anguilla australis et Anguilla dieffenbachii en Nouvelle-Zélande et chez Anguilla anguilla en Europe (mentionnée en Europe par Moravec et al., 1994).
Anguillicola papernai (Moravec et Taraschewski, 1988 ; Moravec et Rohde, 1992) chez Anguilla mosambica en Afrique du Sud.
Diagnose et description du parasite : Anguillicola est un nématode hématophage qui se localise, au stade adulte, dans la vessie gazeuse de l’anguille. Ce nématode peut infester l’anguille dès le stade civelle (Nimeth et al., 2000). L’absence de symptômes typiques, complique très souvent la diagnose de cette anguillicolose. Cependant, les anguilles à forte intensité parasitaire montrent un abdomen flasque avec un ballonnement abdominal plus ou moins prononcé et un anus hémorragique (Blanc, 1989).
Après ouverture de la cavité abdominale, la vessie gazeuse apparaît opaque, nacrée et bosselée dans le cas d’infestation massive et renferme peu ou pas de gaz. Les parasites bruns foncés, bien visibles et généralement vivants et libres, baignent, le plus souvent, dans un liquide hémorragique rouge brunâtre, peu ou très abondant .
Selon Moravec et Taraschewski (1988), A. crassus présente un corps lisse et sombre (brun foncé), fusiforme, dodu et effilé aux deux extrémités . L’extrémité apicale est arrondie avec une bouche circulaire cernée par quatre grosses papilles céphaliques dorso-latérales et ventro-latérales et de deux petites amphides latérales.

Caractéristiques d’Anguillicola crassus

Les populations méditerranéennes d’A. crassus se différencient génétiquement des autres populations de l’Atlantique et semblent donc provenir d’un évènement d’introduction différent (Rahhou et al., 2005). Ce parasite nématode s’est remarquablement adapté aux milieux aquatiques européens. Plusieurs caractéristiques lui permettent de maximiser l’efficacité de sa transmission et lui donne un potentiel exceptionnel de colonisation :
Une grande diversité d’hôtes intermédiaires et parénétiques présents dans le spectre trophique de l’anguille (Blanc, 1998).
La capacité d’infester les anguilles de toutes tailles (dès qu’elles se nourrissent de zooplancton) en adaptant sa taille à la taille de la vessie de l’hôte . Possède un cycle rapide : 2 à 4 mois (Benajiba et al., 1994) jusqu’à 6 mois (Lefebvre et al., 2002a). Un fort potentiel reproducteur, une femelle d’A. crassus pond jusqu’à 150000 œufs (Vigier, 1997).
L’adaptation du parasite à son hôte euryhalin est matérialisée par l’osmoconformation avec le plasma de son hôte (Kirk et al., 2002). Anguillicola crassus est considéré comme étant heuryhalin (Kirk et al., 2000a; Maillo et al., 2005).
Il a été démontré récemment l’impact du parasite A. crassus sur l’activité natatoire (EELREP, 2005). Les anguilles fortement infestées, indépendamment de leur gamétogénèse, ne pourront jamais atteindre leur aire de ponte.
Le parasite réduit les niveaux de résistance de l’anguille qui devient plus vulnérable aux différentes pressions environnementales (Lefebvre et al., 2007).
Le stade de contamination le plus sévère ne dépend pas du nombre de parasites dans la vessie mais de son état (déformations anatomiques et dysfonctionnement physiologique résultant de l’infestation) .

Facteurs influençant les indices épidémiologiques

Les indices épidémiologiques varient selon plusieurs facteurs biotiques et abiotiques. Taille de l’anguille:  Certaines études ont mis en évidence une diminution de l’intensité du parasite avec l’augmentation de la taille des anguilles (Loukili et Belghyti, 2007). Ce phénomène peut s’expliquer par le régime alimentaire des jeunes anguilles qui consomment plus d’hôtes intermédiaires comparativement aux grandes anguilles qui se nourrissent de proies ichtyologiques et carcinologiques. Au contraire, Lefebvre et al., (2002a) trouvent une corrélation positive entre la taille de l’anguille et l’intensité et l’abondance du parasite, mais pas avec sa prévalence. Cette relation pourrait s’expliquer par une plus longue exposition de l’hôte en milieu parasité, une surface à infester plus grande ou une consommation plus grande compte tenu de sa taille.
Alimentation : Il a été démontré une corrélation positive entre le taux d’infestation et l’activité trophique de l’hôte .
Variations saisonnières : L’effet des variations saisonnières sur le cycle biologique du parasite a été mis en évidence par Gargouri Ben Abdallah et Maamouri (2006). Plusieurs explications sont avancées par ces auteurs :
Les changements de températures : les basses et hautes températures, empêchent le développement du cycle parasitaire (développement impossible dans l’hôte intermédiaire copépode).
L’anguille arrête de se nourrir en été lorsque la température est supérieure à 30 C° et en hiver lorsque les valeurs sont inférieures à 10 C° (Lecomte-Finiger, 1983) limitant ainsi l’infestation. Le changement de proies : le développement de A. crassus est dépendant de la température en milieu expérimental. A basse température (4C°), le développement larvaire est ralentit, et les adultes, eux, sont sévèrement touchés avec une mortalité accrue et une baisse de la croissance et de la reproduction (Knopf et al., 1998).
Salinité : Les niveaux d’infestation diminuent avec l’augmentation de la salinité (Kirk et al., 2000a), cependant, même en eau de mer, l’éclosion des œufs des parasites est diminuée mais pas totalement inhibée (Kennedy & Fitch, 1990). Lefebvre et al., (2003) mettent en évidence une relation négative entre les indices parasitaires des anguilles argentées et la salinité (prévalence de 52% en eau saumâtre à 77% en eau douce). La même tendance est observée dans 4 lagunes de Tunisie.

Table des matières

INTRODUCTION 
PARTIE I : SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE 
I. PRESENTATION DU MILIEU D’ETUDE : LAC TONGA
1. Caractéristiques morphométriques
1.1. Localisation et description
1.2. Bathymétrie
2. Caractéristiques physico-chimique
2.1. Géologie
2.2. Pédologie
2.3. Hydrologie
2.4. Température
2.5. Oxygène dissous
2.6. pH
3. Caractéristiques écologiques
3.1. Diversité floristique
3.2. Avifaune aquatique
3.3. Entomofaune
3.4. L’ichtyofaune
II. GENERALITES SUR L’ANGUILLE EUROPEENNE : ANGUILLA ANGUILLA 
1. Taxonomie
2. Morpho- anatomie
3. Cycle biologique
4. Distribution géographique
5. Comportement
6. Alimentation
7. Importance ichtyologique
8. Importance écologique
9. Importance économique
10. Parasitoses
III. GENERALITES SUR ANGUILLICOLA CRASSUS 
1. Taxonomie
2. Diagnose et description du parasite
3. Cycle biologique
4. Caractéristiques d’Angullicola crassus
5. Facteurs influençant les indices épidémiologiques
PARTIE II : EXPERIMENTALE
I. MATERIEL ET METHODES
1. Echantillonnage
2. Régime alimentaire
2.1. Prélèvement et conservation des tubes digestifs
2.2. Analyse du contenu des tubes digestifs
2.3. Analyse qualitative
2.4. Analyse quantitative
2.4.1. Coefficient de vacuité digestive
2.4.2. Fréquence des proies
2.4.3. Pourcentage numérique d’un groupe de proies
2.4.4. Pourcentage pondéral d’un groupe de proies
2.4.5. Nombre moyen de proies par tube digestif
2.4.6. Poids moyen de proies par tube digestif
2.4.7. Classement des proies
2.5. Variations saisonnières, ontogénétiques et sexuelles
3. Parasitisme
3.1. Prélèvement et conservation des vessies natatoires
3.2. Indices épidémiologiques
3.2.1. Prévalence
3.2.2. Intensité
3.2.3. Abondance
3.3. Variations mensuelles, saisonnières, ontogénétiques et sexuelles
4. Indice de condition (k)
4.1. Indice de condition
4.2. Variations mensuelles, saisonnières, ontogénétiques et sexuelles
4.3. Impact du parasitisme sur la croissance de l’anguille
II. RESULTATS
1. Régime alimentaire
1.1. Coefficient de vacuité
1.2. Composition de l’alimentation
1.3. Analyse quantitative
1.3.1. Fréquence et pourcentages numériques et pondérales
1.3.2. Classement des proies
1.3.3. Variations du régime alimentaire
1.3.3.1. Variations saisonnières
1.3.3.2. Variations ontogénétiques
1.3.3.3. Variations sexuelles
2. Parasitisme
2.1. Variations des indices épidémiologiques
2.1.1. Variations temporelles
2.1.2. Variations sexuelles
3. Embonpoint
3.1. Indice de condition (k)
3.1.1. Variations mensuelles et saisonnières de l’indice de condition
3.1.2. Variations de l’indice de condition en fonction du sexe
3.1.3. Variations de l’indice de condition en fonction des stades de développement
3.2. Impact du parasitisme sur la croissance de l’anguille
III. DISCUSSION 
1. Régime alimentaire
2. Parasitisme
3. Indice de condition (k)
CONCLUSION & PERSPECTIVES 
BIBLIOGRAPHIE

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