La manipulation du matériel Picbille

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Difficultés précises des élèves en numération

Nolwenn Guedin, doctorante en psychologie du développement, considère à juste titre que le nombre est un « outil universel »4 mis en place de façon contrainte par les sociétés pour résoudre toute situation de la vie courante et que les solutions trouvées par ces différentes sociétés sont le plus souvent relatives au corps humain en lui même. Ainsi, il est très naturel pour nous de compter sur nos doigts qui offrent la possibilité d’établir une base dix.

La suite orale des nombres

Cette solution est également adoptée par ces élèves en difficulté qui l’utilisent de façon systématique lors d’additions et parfois lors de multiplications. Ce système montre ses limites lorsqu’il s’agit d’additionner des grands nombres. Cela montre néanmoins qu’ils savent compter et dénombrer. Ils connaissent la suite numérique dans l’ensemble. L’apprentissage du dénombrement à été effectué de façon efficace puisqu’ils comprennent que le nombre d’objets est associé à la quantité. Ils ont atteint le niveau de la chaîne sécable. Ils peuvent compter à partir d’un nombre différent de 1 jusqu’à un autre nombre fixé à l’avance. On pourrait s’attendre à ce qu’ils soient en mesure de compter facilement à rebours mais ça n’est pas forcément le cas. Cela se fait au prix d’une certaine concentration. Cela correspond à un niveau de cours préparatoire. La maîtrise n’est pas assez bonne pour atteindre le niveau de chaîne terminale. Il est difficile pour eux d’avancer ou de reculer de n nombres. Ainsi, le jeu du furet ne fonctionne que très rarement avec eux. Sarah éprouve également de grandes difficultés à compter au-delà de 60 et se retrouve bloquée arrivée à 70, qu’elle à le plus grand mal à lire en chiffre. Elle et Tom sont confrontés à la difficulté de dénomination des nombres de six à neuf dizaines. La lecture et l’écriture de ces nombres est très difficile. Lorsqu’ils doivent écrire le nombre 84 par exemple, ils commencent toujours par écrire un 4. L’obstacle reste fort pour eux malgré l’explicitation des règles syntaxiques de composition de ces nombres. Ainsi, ils ne comprennent pas encore que ces nombres sont formés à partir de trois associations différentes :
la somme : trente-deux correspond à la somme trente + deux.
Le produit : quatre-vingt correspond au produit quatre fois vingt.
La combinaison de sommes et de produits : trois-cent-vingt-quatre correspond à 3×100 +20+4.
Ces difficultés posent problème pour la mise en place de la construction des nombres en général.

La suite écrite des nombres et leur composition

Les principes de la numération écrite ne sont pas encore parfaitement acquis et maîtrisés chez Tom et Sarah. Les regroupements de dizaines sont encore trop abstraits pour eux, malgré la manipulation d’objets et d’unités physiques qui ont tout de même permis de gros progrès. Le code positionnel des chiffre n’est pas assez clair pour eux et pas toujours associé aux dizaines ou au centaines. Le nombre ne représente pas encore forcément une quantité précise, décomposable en unités, dizaines, centaines. Il est difficile pour eux d’exprimer ce que représente 3 dizaines ou 4 centaines. Ils reconnaissent la position des chiffres dans le nombre, savent désigner le chiffre des unités, dizaines et des centaines si je leur demande mais ne l’associent pas encore à leurs valeurs. Cela a été le cas notamment lors d’activités sur la monnaie et ses décompositions en euros ou en centimes d’euros. Ce problème s’est retrouvé également dans toutes les situations nécessitant des calculs pour atteindre la dizaine supérieure. Là encore, la suite numérique de dix en dix est connue. Ils la récitent de manière assurée mais n’y accordent pas de sens. Cela pose des problèmes pour eux dans la décomposition des nombres et donc dans les calculs en ligne, aussi bien en addition qu’en multiplication mais aussi en calcul mental.

Le calcul mental

Plusieurs études donnent au calcul mental un rôle décisif pour la réussite des élèves en mathématiques. Il permet à l’élève d’alléger sa charge cognitive lors d’activités nécessitant la manipulation d’opérations. Il est très important de le maîtriser lors de calculs effectués avec des algorithmes posés ( additions, soustractions, multiplications et divisions ) mais aussi dans la résolution de problèmes, soit pour estimer un ordre de grandeur dans un résultat mais aussi pour mener à bien des procédures mathématiques de résolution de problèmes. Il est important pour l’élève de mémoriser les résultats (tables d’additions et de multiplications) mais aussi de comprendre le fonctionnement du calcul ( passage à la dizaine supérieure, multiplications ). Certains résultats peuvent être mémorisés plus rapidement que d’autres comme les doubles, les moitiés, les compléments à dix ou encore les tables de deux, quatre ou cinq. Certaines tables de multiplication nécessitent plus de mémorisation de résultats notamment la table de deux qui impose d’en mémoriser huit. Par la suite, du fait de la commutativité de la multiplication, de moins en moins de résultats sont à mémoriser par table. Encore une fois, il est très important de construire le sens d’une opération, quelle qu’elle soit, avant d’en mémoriser les résultats. L’élève doit comprendre que la table d’addition de quatre revient à additionner un nombre par quatre ou à se déplacer de quatre en quatre sur la droite numérique. Une table de multiplication doit aussi faire sens pour l’élève. Cinq fois trois revient à faire cinq groupes de trois unités soit une addition itérée comprenant cinq fois le nombre trois. Cette souplesse d’esprit a été difficile à obtenir pour ces deux élèves. Le vocabulaire aussi pose problème. L’usage de mots comme ajouter ou additionner ne fait pas forcément sens. Dans ce contexte, les séances de calcul mental se révèlent très difficiles. Les élèves restent sur leurs schémas de résolution classiques à savoir le surcomptage sur les doigts. Cela rend totalement abstrait le passage à la dizaine supérieure puisqu’ils ne mobilisent pas les bons outils. Ils ne se font pas les bonnes représentations des nombres et cela est inefficace en multiplication. De même, lors de calculs entre nombres supérieurs à dix, cette solution est inadaptée et plonge Sarah dans un mutisme profond. L’étape de la construction du sens de l’addition et de la composition du nombre n’a pas été acquise et cela rend très difficile le calcul mental. Les tables de multiplications offrent plus de confort pour ces élèves qui peuvent apprendre les résultats par cœur. La signification de l’opération est cependant plus obscure même s’ils arrivent à en comprendre le sens littéral : « je vois cinq fois le nombre trois ». Cette incompréhension du nombre et de l’opération les amènent parfois à ne pas trouver le même résultat entre six fois trois et trois fois six. Pour Sarah, le lien entre trois fois deux et trois plus trois n’est pas fait. Cela rend les séances de calcul mental très laborieuses car aucune procédure de résolution n’est appliquée. Seul l’apprentissage par cœur fonctionne pour les tables de multiplications avec elle mais empêche l’utilisation de procédures de commutativité, de distributivité et d’associativité. Ainsi, même si le principe est compris, il n’est pas ou très peu appliqué, au prix d’un étayage constant.

L’apport de la recherche sur ces difficultés d’apprentissage

Diagnostique

Les difficultés d’apprentissage

Il est donc primordial de s’intéresser aux raisons de ces difficultés, d’essayer de les diagnostiquer pour mieux pouvoir les réduire voir les supprimer. Ces difficultés sont communes à la plupart des élèves et ne sont pas insurmontables, encore faut-il savoir comment les traiter. Selon Le dictionnaire des besoins éducatifs particuliers5, « la difficulté est une étape normale de l’apprentissage qui nécessite une analyse pour trouver les remédiations pertinentes ». Ainsi, en partant du prédicat d’éducabilité, n’importe quel élève peut surmonter ses difficultés d’apprentissage d’autant plus que selon la circulaire n°90-082 du 9 avril 1990, la difficulté scolaire doit-être prise en charge par le corps éducatif. L’école doit s’adapter aux « caractéristiques des élèves, notamment de ceux qui ont des difficultés dans l’acquisition et la maîtrise des apprentissages fondamentaux »6. La difficulté n’est pas forcément synonyme de mauvais comportement et se détache de l’échec qui juge un écart trop important entre ce que sait faire un élève et ce qu’il devrait savoir faire. Les causes de ces difficultés sont nombreuses : familiales, sociales, physiques ou mentales. Elles peuvent également se cumuler. Il est apparut très tôt que Tom et Sarah étaient en grande difficulté notamment en mathématiques, comme nous l’avons vu précédemment. En apprenant à connaître nos élèves, nous avons pu mettre en avant des causes possibles pour ces difficultés, en particulier les causes familiales qui ont pu générer un blocage au niveau des apprentissages. En tant qu’enseignant, nous ne sommes qu’un maillon parmi d’autres qui peuvent apporter une partie du diagnostique.

Le diagnostique des difficultés

Ce dernier doit être confié à du personnel compétent qui est en mesure d’identifier clairement les causes des troubles et capable d’apporter une réponse pédagogique. Cela a été fait pour Sarah. Un suivi psychologique a été mis en œuvre l’année précédente. Elle entrait alors en CE1 à la suite d’une année de CP pendant laquelle de nombreux acquis n’avaient pas été validés. Ce suivi a permis d’établir que cette élève dispose d’une « intelligence normale, dans la moyenne des enfants de son âge » mais qu’on observe de fortes différences de performance entre « les indices de compréhension verbale et la mémoire de travail ainsi que la mémoire de traitement ». La psychologue note également qu’elle est en difficulté dans « l’organisation de l’espace et de l’analyse de la structure ». En ce qui concerne la mémoire de travail, elle se situe dans la moyenne des enfants de son âge, notamment sur la partie « mémoire des chiffres » mais échoue pour la partie « mémoire en ordre inverse », ce qui appuie les difficultés mise en avant plus haut. Elle est capable « d’effectuer rapidement une tâche et de mobiliser son attention ». C’est dans « l’indice de raisonnement perceptif » que les écarts sont plus importants. Cet indice mesure la fluidité du raisonnement, le niveau d’abstraction et la l’intelligence fluide ( indépendance par rapport aux acquis ). Si elle se montre à l’aise dans l’identification des concepts, elle chute sur le raisonnement analogique et sur la constitution de séries. Cela la pénalise dans la résolution de problèmes et dans le maniement fluide de la suite numérique. Ces conclusions ont été donc établies l’année dernière par une psychologue. En joignant l’orthophoniste, nous avons pu avoir ma binôme et moi d’autres informations diagnostiques. Il apparaît selon elle, au terme de plusieurs séances de travail, que cette élève à un souci dans la fixation des connaissances. Lorsque le concept lui est expliqué, avec plus ou moins d’étayage, il apparaît maîtrisé. Sarah peut alors être laissée seule pour effectuer le travail en classe (travail adapté à ses besoins). On peut constater parfois quelques petites erreurs mais dans l’ensemble, l’exercice est globalement réussi. Cependant, et le propos est confirmé par l’orthophoniste mais également par notre directeur, si un même exercice est proposé le lendemain, la réussite de celui-ci est tout à fait incertaine. Il faut dès lors réexpliquer la consigne ou le concept, ou faire réexpliciter par l’élève pour que l’exercice se fasse. Il y a donc un problème de mémoire qui n’est pas exploitée ou utilisée comme il le faudrait malgré le fait qu’elle se situe dans la moyenne pour les élèves de son âge.
La mémoire
Il faut ici parler de plusieurs types de mémoires notamment la mémoire à long terme et parmi elle, la mémoire procédurale et la mémoire de travail, qui sont liées. La mémoire procédurale renvoie « aux informations relatives aux procédures cognitives et motrices »7. Cette mémoire est rattachée à la mémoire à long terme puisqu’elle permet de mobiliser quand il le faut une procédure ou un acquis cognitif ou moteur. L’exemple donné couramment est celui du vélo. Une fois que la procédure est acquise, la capacité à faire du vélo ne se perd plus jamais. Il en va de même pour certaines procédures en mathématiques qui nécessitent également la mémoire de travail. Cette dernière permet de retenir des informations pour un temps court afin d’effectuer une activité parallèle. Elle et la mémoire procédurale sont utilisées par l’élève lors d’algorithmes de calculs posés comme la multiplication par exemple ou encore le calcul mental. Ces deux types de mémoire font défaut à cette élève puisqu’elle n’arrive pas à fixer les procédures et ne retient pas les résultats intermédiaires nécessaires au calcul ou à la résolution de problèmes mathématiques. Toutes ces difficultés peuvent amener à diagnostiquer un trouble précis, la dyscalculie.

La dyscalculie

Selon Le dictionnaire des besoins éducatifs particuliers, « le préfixe dys désigne les difficultés de fonctionnement. La dyscalculie est un trouble du langage qui apparaît à l’école et porte plus spécifiquement sur les chiffres et le calcul. Les enfants ont des difficultés à comprendre et à utiliser les nombres ». Les symptômes de la dyscalculie sont une très forte incompréhension voir une incompréhension totale des « structures logico-mathématiques ».
Les élèves qui en souffrent sont difficilement capables d’établir une notion de quantité, éprouvent de grandes difficultés à raisonner logiquement face à un problème mathématique, ont une « déficience au niveau spatial » ce qui les gênent en géométrie et montrent un « retard dans l’apprentissage des opérations arithmétiques de base ( addition, soustraction, multiplication et division ) ». Ces élèves, comme mentionné plus haut, continuent de compter sur leurs doigts pour résoudre des opérations simples et ne les comprennent pas forcément. Les symboles de quantités <, > ou = n’ont pas le sens voulu et ne sont pas utilisés correctement lors d’exercices dédiés. Il est vrai que plusieurs de ces symptômes sont présents, notamment pour Sarah mais la dyscalculie, comme tous les troubles en dys, ne peut être diagnostiquée que par des professionnels et il serait inapproprié de notre part de cataloguer l’enfant sans avis expert. Cela permet néanmoins de mettre en avant les difficultés et de trouver des réponses appropriées pour faire progresser les élèves. Il est possible de s’inspirer de solutions et de méthodes issues de la recherche pour les utiliser auprès de nos élèves. Cette recherche est riche en propositions, variée et pertinente et permet à l’élève en difficulté qui en bénéficie de ne pas se sentir exclu, à condition d’être adaptée et réfléchie en amont.

Les propositions de la recherche en terme de différenciation et de remédiation

Apport de la recherche en différenciation

“Aucun élève n’apprend de la même manière et au même rythme, mais tous doivent maîtriser les connaissances et les compétences du socle commun. Pour faire face à cet enjeu, il n’existe pas une « recette pédagogique » unique qui s’imposerait à tous les enseignants, pour tous les âges des élèves et quelle que soit la discipline enseignée. Derrière la notion de différenciation pédagogique se cache une multiplicité de pratiques et de dispositifs pertinents pour faire face à l’hétérogénéité dans les classes. La conférence de consensus a montré que certaines conditions sont indispensables pour que ces pratiques et ces dispositifs soient efficaces.” 8
Il est important de préciser également que cette aide à apporter fait partie du référentiel de compétence propre à chaque enseignant. Ainsi, tous les élèves doivent pouvoir bénéficier de ces différentes pratiques afin que chacun puisse atteindre les objectifs et les compétences visées.

La différenciation en mathématiques

Comme dans toutes les matières enseignées, la différenciation peut se faire auprès de l’élève par le biais de différentes variables. Evelyne Touchard, conseillère pédagogique départementale en mathématiques et en sciences pour l’académie de Grenoble évoque ainsi six leviers par lesquels il est possible de différencier9 : l’organisation de la classe, le temps accordé à l’activité, les outils mis à disposition, les supports et les démarches, la tâche en elle-même et enfin l’étayage de l’adulte. L’organisation de la classe peut permettre la formation d’un groupe homogène où les élèves en difficulté peuvent s’entraider. A l’inverse, un groupe hétérogène peut permettre la mise en place de tutorat. Ce dernier doit être parfaitement défini pour les deux élèves concernés.
Le temps dédié à une activité est une variable importante. Du temps supplémentaire peut être accordé à l’élève pour terminer un exercice. Ce temps peut être réduit pour un élève éprouvant des facilités. Pour développer l’autonomie d’un élève, ce temps peut être fixé à l’avance pour chaque activité. Une sorte de contrat est passé avec l’apprenant et il doit faire son possible pour l’honorer. Les outils mis à disposition sont très importants. Pour ne pas risquer la surcharge cognitive d’un élève, il est possible de lui fournir des outils pour faciliter les étapes de la résolution d’une activité. Ces outils doivent être maîtrisés et utilisés à bon escient. Les progrès seront visibles lorsque petit à petit, l’élève utilisera de moins en moins ces outils. Parmi eux, on peut trouver la calculatrice, les tables de multiplication, le cahier de leçons, l’affichage de la classe ou encore du matériel de numération multibase.
Les supports comme les logiciels informatiques, les fichiers autocorrectifs, les jeux de classe ou les supports audiovisuels sont utilisés pour varier les usages, favoriser les manipulations, développer l’autonomie et remobiliser les connaissances. Il est donc important de faire varier autant que possible ces supports qui à terme, développeront l’abstraction.
La tâche peut être plus ou moins longue comme nous l’avons vu plus haut mais également, différente pour certains élèves. Il est nécessaire cependant qu’elle vise les mêmes objectifs d’apprentissage. Elle peut être d’un niveau moins élevé ou nécessiter moins de compétences à mobiliser pour l’élève.
Enfin, l’étayage du professeur se fait dès l’explicitation du vocabulaire, par la reformulation de la consigne notamment. Il n’est pas question de donner la réponse directement à l’élève, aussi l’étayage se fait par le biais de questionnements qui le guident et l’amènent à trouver la solution par lui même. Cet étayage passe aussi et surtout par la valorisation du travail accompli et par un encouragement constant. Par ce moyen, le professeur motive l’élève et l’implique dans la tâche à accomplir. Là encore, cet étayage doit se réduire en fonction de la progression de l’enfant.

Comment différencier ?

Pour rendre cette différenciation efficace, Evelyne Touchard préconise une bonne connaissance de ses élèves, de savoir quels leviers utiliser avec chacun d’entre eux. De plus, il est primordial de déterminer quels savoirs sont à travailler, quelles disciplines mettent les élèves en difficultés. Pour cela, l’enseignant doit s’appuyer sur les évaluations diagnostiques et formatives qui indiquent à différents moments quel est l’état de connaissances de l’élève. Utilise-t-il les bonnes procédures? Son raisonnement est-il logique? A-t-il encore besoin d’aide? En prenant en compte ces données, l’enseignant peut mettre en place une procédure propre à l’élève et lui proposer une progression adaptée.
Après l’évaluation sommative censée évaluer les savoirs à la fin d’une séquence d’apprentissage, l’élève en difficulté peut avoir besoin d’un suivi sur les notions vues. Ainsi, la différenciation a encore un rôle à jouer. L’enseignant peut mettre en place différentes modalités pour ancrer les savoirs. Evelyne Touchard parle de prolonger les groupes de besoins où l’élève serait confronté à des exercices plus complexes, des ateliers où l’élève pourrait continuer ses entraînements de façon autonome ou tout simplement de maintenir l’aide personnalisée pratiquée avec l’élève. Tous ces éléments mis ensembles amènent à la construction de ce que l’on appelle la remédiation.

Apport de la recherche en remédiation

Une définition de la remédiation

Selon le CEPEC (Centre d’Etudes Pédagogiques pour l’Expérimentation et le Conseil International), la remédiation est : « Un dispositif plus ou moins formel qui consiste à fournir à l’apprenant de nouvelles activités d’apprentissage pour lui permettre de combler les lacunes diagnostiquées lors d’une évaluation formative. On a recours pour cela à différentes propositions pédagogiques, qui pour être efficaces, doivent être sensiblement différentes des méthodes utilisées lors de la phase d’enseignement: aides audiovisuelles, informatiques, petits groupes de travail, enseignement individualisé, enseignement mutuel, nouveaux cahiers d’exercices, nouveaux documents à étudier, situations différenciées… ». D’où le lien étroit entre remédiation et pédagogie différenciée. »
Il s’agit donc, selon le dictionnaire des besoins éducatifs particulier, d’apporter des solutions à des problèmes, des difficultés rencontrées par un élève par de nouvelles activités d’apprentissage afin de combler les manques et finaliser les apprentissages. Pour cela, l’enseignant doit combiner les différentes options utilisées au cours des activités différenciées, utiliser les plus adaptées selon lui et les appliquer lors de séances décrochées dans le but de “faire comprendre avec une approche complémentaire”.

Rendre la remédiation efficace

Pour qu’elle soit efficace, Nolwenn Guedin recommande à l’enseignant d’être au courant de tous les obstacles inhérents aux savoirs. Cela suppose que l’enseignant doit être capable d’analyser tous les types d’erreurs produites par ses élèves afin de trouver une ou plusieurs réponses adaptées à chaque situation. Il faut donc y avoir une certaine progression dans l’application des ces réponses.
Le rôle de l’erreur
Premièrement, il faut être capable de s’appuyer sur l’erreur en l’analysant et en comprenant sa source. Il est possible de faire verbaliser l’élève sur la procédure qu’il a utilisé pour répondre à la situation problème. Le dictionnaire des besoins éducatifs particuliers préconise d’apporter une correction immédiate afin d’éviter l’installation d’erreurs. Cette correction doit être amenée par des questions ouvertes et des réponses partielles qui aident l’enfant dans son cheminement de pensée. Il est important également d’établir un ordre dans les procédures à mobiliser par l’élève et s’assurer qu’il comprenne chaque étape. Il pourra ainsi verbaliser chacune de ses actions et ancrer les étapes en y ajoutant du sens. Il ne faudrait pas que cette procédure soit faite de façon mécanique, exempte de sens. Par exemple, lors d’une multiplication en ligne, l’élève doit pouvoir réaliser chaque étape de l’opération en s’appuyant sur les principes de numération, décomposer le nombre à multiplier en centaines, dizaines et unités, utiliser ses tables de multiplications pour les calculs intermédiaires puis effectuer correctement les additions. Ces étapes s’acquièrent assez vite par la plupart de nos élèves mais pas par ceux en difficulté. Il nous faut donc comprendre où se font les erreurs, les faire verbaliser par les élèves puis les faire décomposer de façon méthodique le nombre à multiplier. Tout cela doit avoir du sens pour l’élève afin qu’il puisse l’appliquer systématiquement par la suite puis s’en passer.
Le rôle des supports
Nolwenn Guedin indique que le rôle du support pédagogique est primordial lors d’activités de remédiations. Le but est de le rendre le plus accessible possible afin d’alléger la charge cognitive de l’élève. On peut selon elle tout d’abord rendre le support le plus épuré et concis possible, en enlevant notamment toute illustration inutile qui pourrait parasiter le regard et l’attention de l’élève. Toujours selon ses conseils, il est possible de rendre le document plus lisible en changeant la taille des caractères (Arial 16) et augmenter le contraste de la feuille en imprimant l’exercice sur une feuille de couleur jaune pâle. Dans la même idée, il peut être utile de surligner les mots importants afin que l’élève se concentre dessus en priorité. Cela peut permettre d’amener une compréhension d’énoncé de problème, indiquant à l’élève à quoi s’intéresser dans le texte. Il est également indiqué dans son ouvrage que les supports informatiques peuvent être utilisés, lorsque l’écriture manuelle est peu lisible ou bien lorsqu’elle est lente car non automatisée. Cela peut soulager la charge cognitive à condition que l’écriture au clavier ait été travaillée en amont. De même, le but de la scolarité étant de travailler l’écriture manuelle, on veillera à ne pas trop utiliser ce support. Enfin, le support peut avoir un rôle également dans les modes de réponses.
Le rôle de l’enseignant
Une réponse peut donc être donnée à l’oral directement à l’enseignant, avec des réponses partiellement écrites, avec des étiquettes à placer au bon endroit, en entourant la bonne réponse ou en dictant à l’adulte. Là encore, il s’agit de ne se concentrer que sur la réponse et la procédure mise en place afin de soulager l’élève dans sa charge de travail. De plus, cela apporte une immédiateté dans la réponse ce qui peut valoriser l’élève si elle est positive. L’enseignant peut féliciter l’élève aussi bien sur la procédure utilisée que sur le résultat obtenu. Cela implique à l’enseignant d’être présent de façon continue avec l’élève, lors d’activités de soutien en petit groupe par exemple. Dans ces conditions, il peut soulager la lecture de l’élève, l’aider à centrer son attention sur les termes à lire en priorité ou sur les procédures à mettre en place par des questions ouvertes, des demandes de verbalisation ou des encouragements.
Toutes ces actions préconisées réclament une expérience importante afin d’apporter le plus rapidement possible une ou plusieurs réponses appropriées. Cela implique également d’identifier rapidement les sources des difficultés d’apprentissage. Au cours de cette année, plusieurs éléments de différenciation et de remédiation ont été mis en place mais il est évident qu’ils seront de plus en plus variés et adaptés au cours des prochaines années de travail. Nous allons donc voir quelles actions ont été menées depuis le début de cette année, dès l’instant où des difficultés sont apparues.

Les principales actions menées depuis le début de l’année

La manipulation du matériel Picbille

Suivre le projet du manuel

Le manuel et le fichier J’apprends les maths édité chez Retz sous la direction de Rémi Brissiaud, mathématicien et docteur en psychologie cognitive, ont été utilisé au début de l’année scolaire. Nous avons choisi ces outils ils étaient utilisés depuis le CP dans notre école et donc familiers pour nos élèves. De plus, n’étant pas encore complètement à l’aise avec l’enseignement des mathématiques, nous avons jugé préférable de nous raccrocher au matériel pédagogique disponible dans la classe et d’adapter nos leçons en fonction de ce que nous trouvions dans ces manuels. Le choix de cet outil par l’école est intéressant. J’apprends les maths a été rédigé sous la direction de Rémi Brissiaud qui a montré qu’il était préférable d’enseigner la décomposition des nombres et le comptage-dénombrement, comme indiqué sur sa biographie du site des éditions Retz.

Comprendre l’écriture d’un nombre

Le livre du maître insiste énormément sur le fait d’enseigner la compréhension de l’écriture d’un nombre à plusieurs chiffres. Il insiste notamment sur le fait de comprendre qu’un nombre comme 358 est composé de centaines, dizaines et unités mais surtout que l’élève le comprenne et ne se contente pas de fournir des réponses mécaniques, vides de sens. Pour comprendre la composition d’un nombre comme 358, Rémi Brissiaud préconise de comprendre que ce nombre est composé de groupements de 10 et de 100. Ainsi, l’élève peut comprendre que ce nombre est composé de trois groupes de 100, cinq groupes de dix et huit unités. Cette procédure invite l’élève à ne plus effectuer un simple dénombrement, trop compliqué pour de grands nombres comme celui-ci. Dans le même sens, l’élève à terme doit comprendre que 350 est égale à 35 dizaines et que 35 dizaines correspondent à 350.

Les boîtes Picbilles

La composition d’un nombre
Le livre du maître explique l’intérêt de cet outil de numération. Les élèves sont amenés à effectuer des groupements de 10 jetons. Lorsqu’une valise est pleine, ils ferment le couvercle. Cela leur donne un groupe de 10 soit une dizaine. Ils peuvent verbaliser qu’une dizaine est composée de 10 unités, représentées par les petits jetons bleus. Ils peuvent également former une collection de 10 valises fermées, soit 10 groupes de 10 unités, soit 10 dizaines et constater que cela représente un total de 100. Ils peuvent comprendre qu’une centaine est composée de 10 dizaines et donc de 100 unités. Pour nos élèves en difficulté, ce matériel a été utilisé dans ce but mais pas jusqu’à la centaine. Nous avons constaté de grandes lacunes déjà présentes dans la construction d’un nombre inférieur à 100. Nous avons donc utilisé ce matériel comme il est préconisé de le faire mais sans aller jusqu’à la centaine afin d’ancrer le plus possible la décomposition en dizaines et unités. Cela a été efficace pour Tom. A la suite de ces activités, il a compris le sens d’une telle manipulation et a été capable de restituer ce qu’il avait intégré. Cela n’a pas été le cas pour Sarah. Elle n’a pas fait le lien entre l’écriture du nombre et sa composition. Elle arrivait à composer un nombre avec les valises, arrivait à décomposer un nombre lorsque nous le lui demandions mais aucune procédure n’était ancrée. S’il fallait refaire le même exercice le lendemain, il fallait tout reprendre. Comme cela a été évoqué plus haut, il s’agit d’un problème de mémoire associé à un problème de logique mathématique et ce, malgré l’utilisation du matériel.
Les additions et soustractions
Pour cette partie, l’usage de la boîte Picbille a été plus efficace. Le livre du maître insiste beaucoup sur les stratégies « d’appui sur 10 ». Ce procédé est très important pour mémoriser les tables d’addition car comme le précise Rémi Brissiaud, un grand nombre d’élèves entrent en CE2 sans avoir mémoriser les tables d’addition. Les élèves ne sont plus obligés de compter sur leurs doigts. Lorsqu’ils le font pour arriver jusqu’au résultat, ils ont oublié l’opération de départ et le travail de mémorisation ne peut pas se faire. En multipliant les exercices s’appuyant sur le dix comme étape de calcul, les élèves limitent les étapes de surcomptage et peuvent mémoriser plus rapidement et facilement les résultats des opérations. Selon Brissiaud, le calcul 9 + 7 est plus simple à mémoriser en passant par 10 car les élèves ont moins de mots nombres à prononcer pour arriver jusqu’au résultat. 9 + 7 = 9 + 1 + 6.
Le complément à 10
Là où le matériel a été vraiment utile pour nos élèves, c’est pour l’exercice du complément à physique à un énoncé. “sept + combien égale dix ?” Un travail de verbalisation a été fait afin de faire figurer toutes les étapes. “Combien as-tu de jetons bleus dans la boîte? Sept. Combien dois-tu en rajouter pour compléter la boîte? Trois. Vas-y, ajoute-les. Combien as-tu de jetons maintenant? Dix. Donc combien faut-il ajouter à sept pour arriver à dix ? Trois. Quel est le résultat de sept + trois ? 10.” Par la suite, ces exercices ont été repris de nombreuses fois, en utilisant de façon systématique le matériel afin d’ancrer les résultats des opérations.
Le calcul et les opérations
Afin d’apporter une aide lors d’opérations à effectuer, soit en ligne, soit en colonnes, le matériel Picbille a été utilisé par Tom et Sarah. Voici un exemple où les élèves devaient poser des additions en s’aidant du matériel.

Table des matières

Introduction
1.Présentation générale
1.1.Ma classe et mes élèves en difficulté
1.1.1.Niveau général
1.1.2.Difficultés précises des élèves en numération
1.1.2.1.La suite orale des nombres
1.1.2.2.La suite écrite des nombres et leur composition
1.1.2.3.Le calcul mental
1.2.L’apport de la recherche sur ces difficultés d’apprentissage
1.2.1.Diagnostique
1.2.1.1.Les difficultés d’apprentissage
1.2.1.2.Le diagnostique des difficultés
1.2.1.3.La dyscalculie
1.3.Les propositions de la recherche en terme de différenciation et de remédiation
1.3.1.Apport de la recherche en différenciation
1.3.1.1.La différenciation en mathématiques
1.3.1.2.Comment différencier ?
1.3.2.Apport de la recherche en remédiation
1.3.2.1.Une définition de la remédiation
1.3.2.2.Rendre la remédiation efficace
2.Les principales actions menées depuis le début de l’année
2.1.La manipulation du matériel Picbille
2.1.1.Suivre le projet du manuel
2.1.1.1.Comprendre l’écriture d’un nombre
2.1.1.2.Les boîtes Picbilles
2.1.2.Rendre compte des résultats
2.2.La manipulation du matériel multibase
2.2.1.Description et utilisation du matériel
2.2.1.1.Description
2.2.1.2.Utilisation
2.2.2.Résultats obtenus
2.3.Les cours de soutien chez le directeur
2.3.1.Mise en place et activités
2.3.1.1.Activités
2.3.2.Résultats obtenus
2.3.2.1.Des résultats divergents
3.La remédiation par le numérique
3.1.L’attrait pour l’outil numérique
3.1.1.Point de vue contrasté de la recherche
3.1.1.1.La motivation d’apprendre avec le numérique
3.1.2.Les observations dans ma classe
3.1.2.1.La mise en place
3.1.2.2.La motivation
3.2.L’utilisation de Calcul@tice et laclassenumérique
3.2.1.Description des applications
3.2.1.1.Calcul@tice
3.2.1.2.Laclassenumérique
3.2.2.Modalités de mises en place
3.2.2.1.Deux applications pour deux utilisations
3.3.Progrès visibles ?
3.3.1.Recueil des données enregistrées
3.3.2.Bilan comparatif
3.3.2.1.Des progrès inégaux
3.3.2.2.Deux supports pour deux utilités
Conclusion

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