L’absentéisme et d’autres caractéristiques individuelles

L’absentéisme au travail: une revue de la littérature

Suite à une recension de plus de 30 articles scientifiques portant sur l’absentéisme, une définition universelle de ce terme n’est pas au rendezvous. D’ailleurs, plusieurs auteurs n’offrent aucune définition conceptuelle. Cette réalité rend difficile l’interprétation de la littérature et la comparaison entre les résultats de recherche. Toutefois, des caractéristiques communes émergent des articles de recherche et des écrits de ceux et celles qui proposent une définition conceptuelle de l’absentéisme. Ces caractéristiques démontrent que le concept d’absentéisme au travail repose sur deux éléments clefs: a) l’absentéisme est un phénomène mesurable et b) l’absentéisme s’explique par la combinaison de plusieurs causes. D’un autre côté, les causes ou motifs qui mènent un travailleur à s’absenter ne font pas l’unanimité chez les auteurs consultés. En outre, et à l’instar de Kaiser (1998), il existe trois tendances observées de recherche. L’absence peut exprimer des comportements individuels, psychosociaux et économiques. Par ailleurs, selon Johns (2003 : 159), un problème essentiel de la recherche est que l’absentéisme « [. . .] is acutally a variety of behaviors with different causes masquerading as a unitary phenomenon (Johns & Nicholson, 1982) ». Par conséquent, c’est un phénomène complexe qui, à l’heure actuelle, ne peut pas s’expliquer par un modèle universel. Cette revue de la littérature sur l’absentéisme au travail est composée de quatre sections. La première section présente les différentes définitions de l’absentéisme proposées par les auteurs ainsi que les notions de mesure de l’absence et de son intentionnalité. La deuxième section présente les trois tendances observées par Kaiser (1998) soit l’approche individuelle, l’approche psychosociale et l’approche économique. De plus, cette section fait état des principaux fondements théoriques et modèles de l’absentéisme, rattachés à leurs approches spécifiques. La troisième section fait état de la synthèse des trois approches proposées en indiquant les aspects divergents et convergents de ces dernières. Enfin, une synthèse nous conduit vers une question de recherche exposée dans la quatrième partie de ce chapitre.

La mesure de l’absence

L’absentéisme se définissant généralement par l’absence d’un employé au travail en fonction d’un horaire entendu et reconnu par l’employé et son employeur, il ressort de la littérature que l’absence s’exprime sous deux types de mesures : la durée et la fréquence. Selon Steel (2003 : 244), ces deux types de mesure « [. . .] have become so ingrained in the lore of absence research that meta analysts chose to frame their discussions a round the two types of metrics (Farrell & Stamm, 1988; Hackett & Guion, 1985; Scott & Taylor, 1985) ». La notion de la durée de l’absence donne une sensibilité chronologique au concept de l’absentéisme. Cette mesure de temps, selon Steel (2003), peut s’exprimer par la somme d’unité de temps, par exemple, les jours, qu’un employé est absent du travail. Cette mesure de temps permet de pouvoir graduer la gravité des absences, par exemple, l’employé qui ne s’absente qu’une seule fois durant 20 jours consécutifs dans une période donnée par opposition à l’employé qui s’absente cinq fois et non consécutivement, une journée à la fois pour la même période. Selon Steel (2003: 244), «[this exemple] would assigna higher absence value to [the first individual] ». Par conséquent, les absences peuvent donc être qualifiées de courte durée ou de longue durée. Cette qualification dépend aussi des organisations touchées par le phénomène.

Une entreprise peut qualifier une absence de longue durée si l’employé s’absente pour plus de sept jours consécutifs tandis qu’une autre peut la qualifier de longue durée si l’individu s’absente pour plus de quatre jours consécutifs. Il n’existe pas de règle précise à cet égard. Cependant, toujours selon Steel (2003), il semble que l’absence de courte durée soit fréquemment représentée par une jou mée d’absence ou moins. Dans un tout autre ordre d’idées, les chercheurs ont aussi fait appel à la notion de fréquence d’absence. Selon Bakker et coll. (2003: 2), la fréquence d’absence se définit par « the number of spe//s or times an individual has been absent during a particular period, regardless of the length of each of those spe//s ». Dans le cas de l’exemple mentionné précédemment, l’individu s’étant absenté à plusieurs reprises lors d’une période donnée obtiendrait une mesure de fréquence plus élevée (soit cinq épisodes d’absence) comparativement au premier individu (soit un seul épisode d’absence). Tout bien pesé, la mesure de l’absence est un élément essentiel à la recherche car selon les constations de Bakker et coll. (2003), les différentes mesures de l’absence sont les résultats de différents procédés. En effet comme le souligne Léonard et coll. (1987 : 775), « [p]lusieurs travaux d’envergure ont montré que l’absence est une variable multidimensionnelle.

Plus exactement, certaines mesures d’absence se sont révélées être totalement indépendantes d’autres (Kerr et coll. , 1951 ; Chadwick-Jones et coll., 1982; Hackett et Guion, 1985)». Ceci signifie que les causes influençant l’individu à s’absenter, seraient différentes selon la mesure de l’absence. D’autre part, la tradition de recherche en absentéisme associe la mesure de l’absence aux intentions, c’est-à-dire à l’absentéisme de volontaire et d’involontaire. ChadwickJones, Brown, Nicholson et Sheppard (1971 , dans Steel, 2003: 244) : « argued that voluntary absence episodes, like « skip days » and « attitude-adjustement da ys » are more like/y to appear in the form of short duration, 1-day absences. [They] propose that frequency measures may be appropriatly viewed as measures of voluntary absenteeism. Time tost measures, in contrast, were sa id to be more indicative of involuntary absenteeism ». En fait, la mesure de fréquence possède la cote de popularité auprès de nombreux chercheurs car d’une part, cette mesure a démontré plus de stabilité dans les résultats de recherche comparativement à la mesure de durée de l’absence (Steel, 2003) et, d’une autre part, « it is believed to indicate volition, because episodes more than duration are re/ated to productivity, and because frequency is taken as a measure of morale and effectiveness » (Farrell et Stamm, 1988 : 212).

L’intentionnalité de l’absence

La tradition de recherche associe les absences de longue durée à des causes ou raisons involontaires et les nombreux épisodes d’absence de courte durée à un processus volontaire de l’employé. Cette notion d’intentionnalité complexifie la compréhension du phénomène de l’absentéisme au travail. Voyons, en premier lieu, ce qui concerne l’absentéisme involontaire. Tout d’abord, l’absence involontaire résulterait d’une cause qui échappe au contrôle de l’individu. Ces causes proviendraient d’un concours de circonstances propre à chacun des individus, par exemple une maladie grave rendant les employés invalides et incapables d’effectuer leur travail ou un embouteillage causé par un accident empêchant ces derniers de se rendre au travail. L’absence involontaire est souvent associée à l’expression d’invalidité de longue durée. Le caractère de longue durée est vérifiable dans ce sens où il n’est pas rare pour l’employeur de demander des pièces justificatives comme un papier du médecin pour justifier une absence prolongée. Dans un tel cas, la maladie est considérée comme une cause qui échappe au contrôle de l’individu.

Toutefois, la notion d’invalidité ne se traduit pas uniquement en matière de longue durée. Les employeurs ne font pas appel systématiquement à un processus de justification externe pour expliquer l’absence. Comme l’indique Steel (2003 : 246), « exceptions exist, but most typical means organizations have for classfying absences [. . .] is to rely on the self-report information provided by the employees themselves». Un employé peut donc être malade et incapable d’effectuer son travail sur une courte durée. Il n’a alors qu’à aviser son employeur, sans pièce justificative médicale. Cela dit, si l’absence peut s’expliquer par des causes involontaires et hors de contrôle de l’employé qui s’absente, cela peut aussi résulter du choix de ce dernier. En effet, les chercheurs s’intéressent aussi à l’aspect volontaire de l’absence et surtout à l’intentionnalité de l’absence, soit les motifs qui conduisent un employé à s’absenter volontairement. Selon Steel et Rentsch (2003), l’approche traditionnelle de recherches sur l’absentéisme repose essentiellement sur le paradigme que l’absence est une décision de l’individu. Plus précisément, selon Fichman (1984, dans Llapasset, 1990), l’absence volontaire résulterait d’un processus de prise de décision voire un processus cognitif conscient. Parallèlement, Foucher (1990, dans Llapasset 1990), rattache des réactions affectives, en plus du processus cognitif, à la prise de décision. L’absence volontaire pourrait donc être le résultat d’un processus cognitif ou émotif selon le cas. Par exemple, selon Steel (2003 : 247), « it is sti/1 usual/y the employee who will decide whether the ma lady is incapacitating enough that it warrants skipping a day’s work ». Ce qui signifie qu’un employé peut volontairement s’absenter du travail et ce, même dans le cas où il est atteint d’une maladie, généralement reconnue comme un motif d’absence involontaire.

Table des matières

Liste des figures
Liste des tableaux
Résumé
INTRODUCTION
CHAPITRE 1 La problématique de l’absentéisme
CHAPITRE2 L’absentéisme au travail : une revue de la littérature
2.1 Définition de l’absentéisme
2.1.1 La mesure de l’absence
2.1.2 L’intentionnalité de l’absence
2.2 Les causes de l’absentéisme : approches et modèles
2.2.1 L’approche individuelle
2.2.1.1 L’absentéisme et l’insatisfaction au travail
2.2.1.2 L’absentéisme et le stress au travail
2.2.1.3 L’absentéisme et d’autres caractéristiques individuelles
2.2.2 L’approche psychosociale
2.2.3 L’approche économique
2.3 Synthèse
2.4 La question de recherche
CHAPITRE 3 Le cadre théorique et la méthodologie de recherche
3.1 Le cadre théorique et son modèle
3.2 La méthodologie de la recherche
3.2.1 L’approche quantitative
3.2.2 Lé terrain de recherche
3.2.3 Les instruments de mesure
3.2.3.1 La variable dépendante
3.2.3.2 Les variables indépendantes et la variable médiatrice
3.2.3.2.1 La mesure de la perception de l’équité distributive
3.2.3.2.2 La mesure de la perception de l’équité procédurale
3.2.3.2.3 La variable de l’engagem.ent affectif envers l’organisation
3.2.3.3 Les variables modératrices
3.3.4 La collecte et l’analyse des données
3.3.4.1 La collecte et sa démarche
3.2.4.2 Les outils d’analyse
3.2.5 Les biais et les limites de cette recherche
CHAPITRE 4 L’analyse des résultats
4.1 Présentation des données
4.1.1 Fiabilité des données
4.1.2 Description des données
4.1.2.1 Données descriptives et relatives à l’absentéisme
4.1.2.2 Données relatives à la perception de l’équité
4.1.2.3 Données relatives à l’engagement affectif
4.1.2.4 Données relatives aux va riables biopsychosociales
4.2 Analyse des résultats
4.2.1 Tests des deux hypothèses principales
4.2.2 Tests des trois hypothèses secondaires
4.2.3 Tests des six hypothèses tertiaires
4.3 Synthèse de l’analyse et discussion
CONCLUSION
ANNEXE 1 Le questionnaire de recherche
ANNEXE 2 Lettre explicative présentée aux employés
ANNEXE 3 Page frontispice (formulaire de consentement)
ANNEXE 4 Distribution des données – contrôle exercé par l’employé
ANNEXE 5 La fréquence des absences sur une période de six mois
ANNEXE 6 Distribution des données – perception de l’équité distributive
ANNEXE 7 Distribution des données- engagement affectif des employés
ANNEXE 8 Distribution des données biopsychosociales
ANNEXE 9 · Résumé des- modèles d’équité distributive/absence
ANNEXE 1 o Résumé des modèles engagement affectif/absence RÉFÉRENCES

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