LE SYSTEME VERBAL DU DIOLA FOGNY

LE SYSTEME VERBAL DU DIOLA FOGNY

 ANALYSE DU SYSTEME VERBAL : CADRE THÉORIQUE 

Nous pensons qu’aborder la question de la langue dans un contexte énonciatif c’est d’abord remettre en question la définition de la langue en tant qu’un code. En effet, le code réduit l’activité humaine à l’intuition et à l’application stricte des règles. Le domaine énonciatif relève de l’activité langagière, lieu de production des énoncés et de leur interprétation. Il dépasse le cadre cognitif. Pour Paillard D. et J. J. Franckel (1998 : 58) « le cognitif réduit le langage à la pensée » alors que l’énonciatif est une activité de construction et d’interaction verbale. S. de Voguë (1992:99-100) voit dans « le langage est une machine propre à construire de la signification […] Si le langage est une activité […], il ne saurait être appréhendé qu’à partir de ce que cette activité produit : des énoncés ». Le langage est constitué de règles autonomes mais d’un espace aussi de régulation et d’ajustement sémiotique puisque l’énoncé, unité du langage, est « un système souple et ajustable » qui fait l’objet d’un glissement d’une linguistique des états à une linguistique des opérations (A. Culioli 1999a : 48) où les phénomènes immatériels et matériels s’intègrent dans le processus de construction et des conditions d’interprétation. L’énonciateur, dispose d’une marge de liberté de construction étant donné que les parties du discours entretiennent des relations non préétablies mais bien choisies selon les besoins de l’énoncé. Celui-ci n’est pas « le résultat d’un acte de langage ancré dans un quelconque hic et nunc par un quelconque énonciateur mais comme un agencement de formes à partir desquelles les mécanismes énonciatifs qui le constituent comme tel peuvent être analysés dans le cadre d’un système de représentation formalisable comme un enchaînement d’opérations dont il est la trace » (Ibid.). La signification ou la valeur référentielle n’est pas transparente car l’activité langagière est faite d’ajustements des énonciateurs. Ces ajustements obligent les sujets parlants à chercher à se comprendre, par le biais d’autres paramètres pour ce faire, ils s’accorde à coopérer, à négocier, à réguler et à choisir les marqueurs pertinents sur lesquels reposeront les calculs. L’ajustement vise à permettre les interactants de maintenir le fil conducteur de l’échange. Ce fil est maintenu à chaque fois que la signification des énoncés se construit non pas instantanément mais 18 selon un processus dynamique et non linéaire qui interpelle plusieurs opérations. La signification relève des données observables situées à la surface matérielle des énoncés : « L’activité de langage renvoie à une activité de production et de reconnaissance de formes, or, ces formes ne peuvent être étudiées indépendamment des textes, et les textes ne peuvent être indépendants des langues » (A. Culioli 1990 : 14). Les énoncés disposent des mécanismes d’interprétations propres qui déterminent leurs valeurs référentielles d’où le rejet chez par A. Culioli (1999a : 19) de la « conception outillère du langage, conçu comme un instrument dont la finalité explicite serait la communication entre des sujets universels qui, comme on le sait, se partagent le bon sens ». Le processus de construction de la valeur référentielle de l’énoncé englobe trois niveaux : le prélinguistique, l’épilinguistique et le métalinguistique qui informent sur « les unités linguistiques, leurs agencements dans les énoncés et l’intonation des énoncés » (J. J. Franckel 1998). L’énoncé crée son propre contexte. Pour E. Benveniste l’énoncé se réfère à la situation d’énonciation ou aux réalités extralinguistiques. Mais à la suite de Culioli, notre objectif telle que se construit notre problématique, nous ne cherchons pas à déterminer le référent de l’énoncé mais sa valeur référentielle. Celle-ci doit se construite de façon empirique et heuristique selon une myriade d’opérations considérée comme des représentations métalinguistiques posées à partir des marqueurs en tant qu’opérateurs de repérage. La valeur référentielle pour la distinguer du référent est nommér par Culioli la « globale référentielle » (A. Culioli 1985 :82) c’est-à-dire une relation d’intrication entre la relation prédicative et la relation énonciative où des « énonciateurs en tissant un jeu de références, produisent un surplus d’énoncés et repèrent une pluralité de significations » (A. Culioli 1999 T 2: 48). La « valeur référentielle » traduit « la relative autonomie des langues vis-à-vis du monde » (A. Culioli et J. P. Desclés, 1980 :20). La valeur référentielle ne peut se construire sans les énonciateurs car ce sont eux-mêmes produisent les énoncés et cherchent par un processus à reconnaître leurs significations (A. Culioli 1976 :100). Celles-ci varient en fonctions des intentions ou des visées des énonciateurs.  Les marqueurs sont importants dans la construction des valeurs référentielles. Les agencements qu’offrent les marqueurs provoquent de multiples interprétations. Ils sont régulés par le contexte et les repérages via les coordonnées spatio-temporelles, intersubjectives. Les marqueurs sont des scènes énonciatives calculables dans les énoncés. Chaque marqueur est un opérateur de repérage qui détermine le type d’opération à poser. Les marqueurs relient le niveau prélinguistique et le niveau métalinguistique. Les déterminations prélinguistiques renvoient « aux données antérieures à la mise en langage. Nous posons l’hypothèse selon laquelle que la valeur référentielle des énoncés dépend des marquers (temporels, aspectuels, modaux, diathèse, modalités…). En effet, les marqueurs sont soit des unités linguistiques ou des marques prosodiques car l’intonation fait partie des données interprétatives : « Le marqueur renvoie à toute trace matérielle qui permet de classer, de manipuler, et traiter. Il vous faut pouvoir isoler i.e., trier, pour classer, ensuite vous manipulez et enfin vous traitez. Les marqueurs, ça pourrait être un changement dans la prosodie, un changement intentionnel, une particule, un morphème quelconque ou un ensemble de morphème. » (A. Culioli, DEA 1983- 1984 :16). Les marqueurs sont des représentations métalinguistiques de niveau 3. Le métalinguistique est le domaine où les phénomènes observés sont décrits, symbolisés et organisés sous formes de modèles, où les gloses (commentaires des données linguistiques) orientent et construisent les systèmes de représentation.Tout tourne autour des marqueurs parce que ce sont eux en tant qu’opérateurs de repérage qui déclenchent les systèmes de représentations métalinguistiques. Les marqueurs sont des unités polysémiques situées à la surface des énoncés. Les opérations qu’ils posent, peuvent varier d’un énoncé à un autre. Cela explique la variation des valeurs référentielles. L’énoncé découle d’une activité d’orientation, de détermination, d’instanciation, de prédication et d’énonciation :

La relation prédicative

La relation prédicative est l’espace du formulable ou du validable. Nous nous intéressons dans cette partie à la notion d’instanciation, de terme de départ, de familles paraphrastiques parce que dans notre perspective d’analyse du système verbal du diola fogny, nous voulons montrer les liens qui existent entre la diathèse, la transitivité et l’aspect, les modalités, les types de procès. La relation prédicative est le domaine de l’instanciation qui est le processus de remplissage des places vides du schéma de la relation primitive (C0 r C1) par des unités lexicales. Ce remplissage se réalise de façon ordonnée et non-orientée par des unités lexicales symbolisées par a (source) r (relateur) b (but). Des associations naturelles entre les deux termes permettent d’établir le type de relation autorisée. Il peut s’agir d’une relation de localisation spatiale (comme dans les derniers exemples ci-dessus) ou d’une relation de repérage (identification ou différenciation) ainsi que d’une relation inter-sujets (impliquant l’agentivité) (A. Culioli 1976 : 40). La relation prédicative (parmi d’autres), se construit par une orientation du paquet de notions constituées en lexis autour d’un premier argument considéré comme l’origine de la relation orientée.3 3 URL: http://www-01.sil.org/linguistics/glossary_fe/defs/TOEFr.asp, consulté le 19 février 2014. 21 « Une lexis est donc à la fois ce qu’on appelle souvent un contenu propositionnel […] et une forme génératrice d’autres formes dérivées (famille de relations prédicatives, d’où constitution éventuelle d’une famille paraphrastique d’énoncés) » (A. Culioli 1999a : 101). La lexis n’est pas un morphème (signe linguistique minimal), mais une unité fonctionnelle regroupant plusieurs morphèmes. Elle représente le passage de la relation entre deux notions qui entretiennent des relations primitives (relation intérieur/ extérieur, agent/patient, tout/partie) à une relation prédicative schématisée par une structure à trois places dont deux arguments et un relateur. La relation prédicative est ordonnée et orientée (Cf. A. Culioli, 1982 :9). L’ordre n’est pas un positionnement linéaire des termes de l’énoncé mais une opération dont les termes sont organisés les uns par rapport aux autres de façon hiérarchique. Le « terme de départ » organise la relation prédicative. Il est : « à la fois extérieur à la relation en tant que terme repère » et en même temps intérieur à la relation en tant que source a qui est le terme identifié, identifiable comme le complément de rang zéro (C0) dans la relation (C1 C0 r) » (1975 : p.122). Le « terme de départ » oriente la relation prédicative sans pour autant se confondre au premier argument… En effet, à partir d’une relation primitive par exemple , on peut construire plusieurs énoncés et à partir de chaque construction peut ressortir plusieurs opérations (la diathèse, la thématisation, la détermination des arguments nominaux, l’aspect, le temps…) : « Les énoncés de type actif se dériveront donc d’une formule dans laquelle le terme de départ coïncide avec le terme source de la relation primitive » (A. Culioli, 1976: 120). Le terme de départ coïncide en général avec le complément de rang zéro ou le sujet syntaxique en tant que source ou agent du procès exprimé par le prédicat. Il arrive cependant par moment que le terme de départ soit distinct des termes de la relation prédicative par exemple dans une interrogation portant sur le sujet du prédicat. Selon l’interrogation qui a mangé la mangue ? On arrive à la forme schématique suivante : << () manger mangue ∋> 22 < a r b> ou bien < b ř a > (b peut être choisi comme terme de départ4, mais il conserve son rôle de but). Au passif, la source de la relation prédicative peut ne pas être mentionnée du tout (ex. La mangue a été mangée). Quand la source a est repérée, c’est sous la forme d’un complément prépositionnel (La mangue a été mangée par Amadou). La diathèse passive accorde l’opportunité mais avec une limite à l’énonciateur d’inverser l’ordre de la relation primitive. L’orientation peut changer en temps, en aspect, en mode, en ordre, la relation prédicative. Le choix du terme de départ change l’organisation syntaxique et entraîne une variation de la relation paraphrastique. L’orientation de la relation primitive peut être différente de celle de la relation prédicative si l’on tient compte de la possibilité de générer des familles paraphrastiques par le sujet parlant. On peut assister à une inversion de l’ordre entre la diathèse active et la diathèse passive. L’orientation peut aussi dépendre du choix entre l’opérateur epsilon (∈) lorsque, a est le terme de départ et l’opérateur epsilon-miroir (∋) si b est le terme de départ.

Table des matières

INTRODUCTION
PREMIÈRE PARTIE PROBLÈMATIQUE, CADRE THÉORIQUE ET MÉTHODOLOGIQUE
CHAPITRE 1 : PROBLÉMATIQUE
CHAPITRE 2 : ANALYSE DU SYSTEME VERBAL : CADRE THÉORIQUE
CHAPITRE 3 : MÉTHODOLOGIE
DEUXIÈME PARTIE
ANALYSE DU SYSTÈME VERBAL DU DIOLA FOGNY
CHAPITRE 4 : PROCÈS, PÉRIPHRASES, CONSTRUCTIONS ET DIATHÈSES
CHAPITRE 5 : LES PRONOMS
CHAPITRE 6 : TEMPS, ASPECTS ET MODES
SYNTHÈSE
TROISIEME PARTIE :TEXTUALITE ET GENERICITE
CHAPITRE7 : CADRE THÉORIQUE ET MÉTHODOLOGIQUE : ANALYSE TEXTUELLE DES DISCOURS
CHAPITRE 8 : ANALYSE DE LA TEXTUALITÉ EN DIOLA FOGNY
SYNTHÈSEERREUR ! SIGNET NON DEFINI.
CHAPITRE 9 : TEXTUALITÉ ET GÉNÉRICITÉ DES PROVERBES ET DEVINETTES DU DIOLA FOGNY
SYNTHÈSE
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUE
INDEX DES NOMS D’AUTEURS

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