L’EUROPEANISATION DES CONCEPTS AU SERVICE DE LA MISE EN ŒUVRE DU MANDAT D’ARRET EUROPEEN

L’EUROPEANISATION DES CONCEPTS AU SERVICE DE LA MISE EN ŒUVRE DU MANDAT D’ARRET EUROPEEN

Depuis longtemps, la Cour a affirmé dans sa jurisprudence que « sauf renvoi, explicite ou implicite, au droit national, les notions juridiques utilisées par le droit communautaire doivent être interprétées et appliquées de façon uniforme dans l’ensemblede la Communauté »659. Ce rôle de « juge-traducteur » confié à la Cour va d’abord mettre en évidence les difficultés liées à l’interprétation des termes de la décision-cadre 2002/584 instituant le mandat d’arrêt européen rendant délicate l’application du droit de l’Union dans et par les ordres juridiques internes. Les résistances étatiques contre le développement de l’espace pénal révèlent les carences de la décision-cadre ce qui conduit la Cour à définir certaines notions afin de permettre l’exécution du mandat sans pour autant négliger le respect des droits fondamentaux des individus. Cette conciliation des intérêts en présence et des ordres juridiques internes va finalement offrir à la Cour la possibilité de contrôler l’effectivité de la mesure. Pour cela, elle peut avoir recours à plusieurs méthodes d’interprétation lui permettant de créer du droit. D’une part, elle peut utiliser la méthode subjective qui consiste à rechercher l’intention du législateur sur la base des travaux préparatoires. Et d’autre part, existe la méthode plus objective, textuelle. C’est-à-dire que le législateur interprète le texte en s’inspirant des interprétations linguistiques internes. Le juge peut également utiliser la méthode téléologique. Il recherchera alors l’esprit du texte et les objectifs assignés par son auteur pour ensuite les adapter aux évolutions politiques, économiques et sociales tout en restant le plus fidèle possible à la volonté de l’auteur du texte. Les notions sont donc clarifiées à la lumière de la construction et de l’intégration européenne. Cette troisième méthode est celle qui offrira la plus grande marge de manœuvre au juge pour lui permettre de créer du droit et, proposer une lecture claire et actuelle du texte en vue d’assurer une application uniforme de la décision-cadre. Si ces techniques sont relativement classiques, une autre méthode d’interprétation, découlant des précédents, est appliquée par la Cour : celle de l’européanisation des concepts. Utilisée pour renforcer la construction de l’espace pénal européen, cette européanisation va favoriser l’application uniforme de la décision-cadre. Il s’agit alors de conférer une dimension supranationale, européenne à des notions classiquement attachées aux droits internes. Cette européanisation se décline de deux manières. S’agissant des notions liées à la procédure pénale, la Cour en fera des « notions autonomes du droit de l’Union ». En revanche pour les notions liées à la mise en œuvre du droit pénal de fond, la Cour ne peut leur conférer une dimension européenne, car elle relève du droit pénal, attribution régalienne. La doctrine opère une sorte de classifications des notions661. D’une part, elle regroupe les notions redéfinies par la Cour indépendamment de toutes significations nationales et qui sont des concepts relativement généraux. D’autre part, elle identifie des concepts plus matériels, issus, dans la plupart des cas, du droit dérivé. Dans ce cadre, l’intervention de la Cour de justice est déterminante pour assurer une application homogène de la décision-cadre. Elle contribue ainsi à l’effectivité d’une telle mesure et au développement de l’espace pénal européen.

L’européanisation des notions tenant à l’émission du mandat d’arrêt européen

Le contentieux du mandat d’arrêt européen met en évidence plusieurs difficultés tenant à l’interprétation des notions contenues dans la décision-cadre. Nombreuses sont les décisions dans lesquelles il a été demandé à la Cour de combler les carences de la décision-cadre. Pour interpréter la décision-cadre et assurer une application cohérente et commune du texte, la Cour va combiner différentes méthodes d’interprétation lui permettant de parvenir à une européanisation des notions tenant à l’émission du mandat. Sur ce point, la Cour a essentiellement été confrontée à des questions de procédure ce qui lui a permis dans la majorité des cas de dégager des « notions autonomes du droit de l’Union » en l’absence de références faites aux droits internes. Lorsqu’elle ne pouvait créer de véritables concepts autonomes en raison du fait que la notion méritant d’être éclaircie relevait de la compétence pénale des États, la Cour a néanmoins pu débuter un important travail de clarification textuelle en matière pénale. Conforté par l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne et l’amorce d’une compétence pénale de l’Union, ce contentieux montre les prémisses du travail de la Cour en matière pénale.

Elle a donc expliqué le sens et la portée à donner des notions liées à l’infraction justifiant l’émission du mandat (Paragraphe 1) tout en précisant les contours du mandat, c’est-à-dire, en apportant des précisions quant à sa nature. Cependant, l’émission d’un mandat d’arrêt européen peut avoir des conséquences sur les droits fondamentaux et c’est sur les aspects procéduraux de l’infraction que la Cour est intervenue (Paragraphe 2). Ainsi, elle donne une grille de lecture permettant aux États d’émettre un mandat tout en respectant les droits fondamentaux de l’individu concerné.

Cours gratuitTélécharger le document complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *