L’évolution de la liberté de communication numérique dans la jurisprudence constitutionnelle

L’évolution de la liberté de communication numérique dans la jurisprudence constitutionnelle

Un renouveau de la démocratie. Au XXIème siècle, l’ère du numérique semble autoriser un renouveau de la démocratie, les nouveaux moyens technologiques d’information et de communication développent, en effet, le système démocratique. Avec la (r)évolution numérique, les communications par internet permettent : les campagnes électorales numériques, la tenue des conférences politiques, le militantisme, le vote électronique, etc.116 D’un outil de communication, le numérique est devenu un « moyen d’éveil politique ». La campagne présidentielle française de 2017 a révélé aux yeux du grand public toute l’ampleur d’un aspect souvent ignoré de la « révolution numérique ». Pour la première fois, l’ensemble des candidats ou presque a clairement assumé le fait de mener une campagne électorale où les agences de stratégie numérique se sont imposées comme un élément incontournable117. Comme on l’a connu sous la IIIème République, le débat sur la valeur qu’il convenait d’accorder aux déclarations de droits est sujet de controverses. La doctrine dominante déniait toute valeur constitutionnelle à la Déclaration de 1789. La dissocier de la Constitution de 1791 revenait à lui confier une valeur supraconstitutionnelle. Le problème de sa place dans la hiérarchie juridique fut de nouveau soulevé pour la Constitution de 1946 qui est précédée par un préambule. La situation n’était pas évidente : si le préambule était formellement incorporé à la Constitution elle-même, et avait été adopté par référendum comme cette dernière, il avait cependant été exclu du contrôle de constitutionnalité des lois prévu par la Constitution. Pour cette raison il n’avait pas de valeur constitutionnelle. La raison inverse a conduit à admettre la valeur constitutionnelle du préambule de la Constitution de 1958, etdes textes auxquels il renvoie 118 . Cette typologie de questions relatives à la valeur constitutionnelle des déclarations de droits se repose aujourd’hui, au XXIème siècle concernant les droits numériques. Pour Marie-Charlotte Roques-Bonnet, l’affirmation de droits fondamentaux applicables aux sciences et aux techniques numériques serait de nos jours à la source d’une transformation du concept des droits de l’homme. Cette transformation imposerait une nouvelle représentation de notre ordre juridique, non plus pyramidale, mais systémique, non plus hiérarchisée mais interactive, c’est-à-dire une dilution presque complète de ses principes et de sa structure fondamentale119. En termes d’efficacité, les droits fondamentaux s’imposent comme un instrument incontournable pour définir le droit du réseau et les droits de l’individu dans l’environnement numérique. Ils sont vecteurs d’une efficacité juridique et d’une souplesse sans lesquelles internet ne pourrait pas se construire.

Le contrôle de la constitutionnalité des lois et la liberté de communication

L’évolution de la protection par le Conseil constitutionnel de la liberté d’expression et de communication des opinions se poursuit aujourd’hui avec les nouvelles technologies d’information et de communication. La communication sur internet favorise le processus démocratique et le choix des élus par les citoyens. Comme l’a écrit Albert Camus : « La démocratie ce n’est pas la loi de la majorité, mais la protection de la minorité » 122 . Internet, permet aux citoyens d’être mieux informés, c’est un moyen complémentaire pour recueillir plus d’informations relatifs par exemple aux candidats à une élection, aux projets de réforme, il permet de consulter et communiquer dans les forums on line afin d’échanger des opinions et des avis et donc, in fine, d’exercer un vote encore plus éclairé. Dans cette logique on analysera la fonction du droit constitutionnel à la libre communication dans les Constitutions des États européens (Section I) pour ensuite étudier les choix de contrôle effectués par le Conseil constitutionnel (Section II).

La fonction du droit constitutionnel à la libre communication dans les Constitutions des États européens

Le droit constitutionnel est un droit à part, conceptuellement et hiérarchiquement supérieur. Une des spécificités du droit constitutionnel est qu’il doit pouvoir s’adapter et résoudre toutes les situations conflictuelles qui se posent dans l’État de droit. Une de ces situations sont les conflits de normes. L’élasticité du droit constitutionnel est une qualité essentielle qui en fait une de ses caractéristiques et sa force. Cette spécificité lui permet d’être de façon continue au cœur de tous les débats relatifs à l’actualité de la Des facteurs historiques et culturels différents. Dans les États membres européens, le droit a évolué selon des facteurs historiques et culturels différents, néanmoins le fond et la garantie constitutionnelle des droits fondamentaux sont protégés de façon similaire. Le droit à la liberté d’expression et de communication est appréhendé de façon hétérogène selon la source de la protection (déclaration, charte, texte de loi, traité, jurisprudence) mais sa consécration dans les Constitutions des États européens (A) est un indicateur d’aptitude à devenir membre de l’Union européenne (B).

En matière de droits fondamentaux, les Constitutions et les droits constitutionnels des États européens présentent beaucoup de similitudes avec les normes de référence qui sont utilisées par le Conseil constitutionnel français. Certes, certains droits sont garantis en des termes absolus. Il s’agit notamment de l’interdiction de la torture et de la peine de mort qui sont consacrées dans toutes les Constitutions des États européens. Néanmoins, on peut souligner aussi la relativité d’une grande partie des droits et libertés fondamentaux et cette logique de relativité et d’absolutisme124 des droits et libertés fondamentaux se retrouve au niveau du droit européen 125 . En effet, au niveau supra national, l’article 15 § 2 de la Convention EDH interdit toute dérogation au droit à la vie, sauf pour les cas d’actes licites de guerre, à l’interdiction de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants, à l’interdiction de l’esclavage et de la servitude et à la règle « pas de peine sans loi », de même est interdite toute dérogation à l’article 1er du Protocole n° 6 à la Convention qui porte abolition de la peine de mort en temps de paix, à l’article 1er du Protocole n° 13 à la Convention relatif à l’abolition de la peine de mort en toutes circonstances, ainsi qu’à l’article 4. À la différence de ces droits absolus126 le droit à la liberté d’expression, tout comme par exemple (et parmi d’autres) : le droit à la vie privée, ou le droit à la propriété, peuvent être encadrés et limités.

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