L’utilisation d’un logiciel de géométrie dynamique

Le mouvement des objets est l’un des phénomènes auxquels s’intéresse la physique; c’est la cinématique qui étudie tout particulièrement ce phénomène avec pour tâche de décrire comment les corps changent de lieu avec le temps (Einstein et Solovine, 1956) ; c’est-à-dire qu’elle s’occupe de décrire le mouvement. Une telle description du mouvement peut se faire à l’aide d’une équation du mouvement ou d’un graphique, par exemple des graphiques x(t) liant la position et le temps ou des graphiques v(t) liant la vitesse et le temps, en d’autres termes, la description mathématique du mouvement peut se faire à l’aide des fonctions cinématiques représentées sous différentes formes, par exemple, sous forme graphique ou par des relations algébriques. Cette recherche s’intéresse à l’interprétation des représentations graphiques de position en fonction du temps lesquelles constituent l’un des registres de représentation sémiotique (Duval, 1988) qui servent à la description mathématique du mouvement .

Depuis longtemps, l’interprétation des représentations graphiques a fait l’objet d’étude de nombreux travaux de recherche. Parmi les réflexions à ce propos on trouve le travail mené par Artigue, Saltiel et Viennot (1981). Ce travail mentionne les constats suivants :
1. L’étudiant moyen de D.E.U.G (L1) ne trace un graphique que lorsqu’il lui est demandé explicitement de le faire et ne pense pas que les représentations graphiques pourraient être utiles dans la résolution de nombreux problèmes en physique et en mathématiques.
2. L’étudiant est incapable d’exploiter une fonction qui n’est pas donnée sous forme algébrique. Or une fonction n’intervient pas toujours sous cette forme : elle peut être donnée par un tableau de valeurs numériques, par sa représentation graphique ou encore définie par un discours en langage verbal mais l’étudiant ne sait absolument pas passer d’une forme à l’autre.
3. Le plus grand nombre des fonctions utilisées en mathématiques et en physique sont données sous forme algébrique.

Vis-à-vis de ces constats les chercheuses font ressortir qu’on peut résoudre graphiquement un problème lorsque cela se révèle plus simple grâce aux renseignements quantitatifs et éventuellement qualitatifs que le graphique fournit sur la fonction qu’il représente. Concrètement, une représentation graphique donne des informations sur le sens de variation, signe de la variable, signe de la fonction, sa continuité, sa dérivabilité, ses extrémums, sa convexité, ses limites, éventuellement sa période et ses symétries. Ces renseignements permettent de résoudre différents problèmes tant en physique qu’en mathématiques. Par exemple, en mathématiques lorsque la courbe de la fonction 1/x est déjà tracée il est possible de donner des informations sur la fonction 1/(x+2) à partir des transformations géométriques, comme translations, homothéties, affinités et symétries, qui permettent de passer d’une courbe à l’autre. Par ailleurs, Artigue, Saltiel et Viennot soulignent que : “On peut espérer d’un travail d’exploitation des représentations graphiques un effet positif sur la compréhension des notions, par exemple de continuité, de stabilité d’un équilibre, de fonction d’état, etc., mais qu’on peut aussi espérer que ce travail permette aux étudiants de se constituer un stock d’images visuelles qui facilitent l’ancrage des concepts correspondants.”  .

Les chercheuses remarquent aussi qu’il est souhaitable de développer chez l’élève l’aptitude à lire et utiliser correctement les graphiques ainsi que de savoir combiner des langages algébriques, graphiques et verbaux. En particulier, il est souhaitable que l’élève sache déduire d’un graphique des informations, trouver l’équation d’une courbe à partir d’un certain nombre de renseignements, comparer une fonction donnée par un tableau de valeurs numériques à des fonctions de références simples; néanmoins Duval (1999) qui nomme ces activités comme « conversion des registres » souligne que celle-ci constitue l’activité cognitive la moins spontanée et la plus difficile à acquérir chez la grande majorité des élèves.

Afin de promouvoir l’exploitation des représentations graphiques et le passage entre les différentes formes sous lesquelles une fonction peut se donner, la recherche conduite par Artigue, Saltiel et Viennot (1981), propose un grand nombre d’activités dans le cadre de l’enseignement de la physique et des mathématiques. D’ailleurs nous notons que l’un de ces activités suggère qu’on peut utiliser un graphique pour réfléchir à un problème de physique en menant :
1. Une description concise des faits qui ressortent simplement du graphique.
2. Une discussion des aspects du graphique qu’on doit être capable de comprendre à partir du phénomène physique de base impliqué.
3. Une explication des informations utiles que l’on peut extraire des caractéristiques du graphique: pentes, courbures, points d’intersections, rebroussements, etc.
4. Une discussion des nouveaux graphiques que l’on pourrait établir à partir des données du premier pour donner une information supplémentaire sur la situation. Ces quatre actions nous semblent englober les démarches possibles que l’on peut mener afin d’exploiter une représentation graphique et avoir des renseignements sur le phénomène physique concerné.

Au regard des bénéfices qui viennent d’être évoqués et de l’importance pour l’enseignement des sciences d’une exploitation adéquate des représentations graphiques, il nous est apparu important de traiter ce sujet. En particulier, nous nous intéressons à l’interprétation de représentations graphiques qui lient le temps et la position dans lesquelles l’objet suit un mouvement rectiligne uniforme (MRU). Cet intérêt est motivé, en particulier, par les travaux de Duval (2002) en didactique des mathématiques qui mettent en évidence la nécessité d’articuler différents registres de représentation sémiotique (langue naturelle, systèmes d’écriture, figures géométriques planes ou en perspective, graphes cartésiens) pour élaborer le sens des concepts, et la recherche menée par McDermott, Rosenquist et Van Zee (1987) qui soutiennent que la facilité à dessiner et à interpréter des graphiques est d’une importance capitale pour développer une compréhension de nombreux sujets en physique.

Table des matières

Introduction
I. Une analyse didactique
1. L’étude des difficultés déjà rencontrées par rapport à l’interprétation des graphiques x(t)
2. L’étude des stratégies qui mettent en jeu l’usage des TICE comme stratégie possible pour dépasser des difficultés dans l’interprétation des graphiques x(t)
3. La grandeur temps au niveau didactique
4. La notion du temps au niveau psycho-cognitif : Le développement de la notion du temps chez l’enfant
II. Une analyse historico-épistémologique concernant des graphiques liant la position et le temps x(t) pour un mouvement rectiligne uniforme
1. Le temps physique
2. À propos des représentations mathématiques du temps et de la vitesse au moyen-âge
3. À propos des représentations mathématiques de l’espace, du temps et de la vitesse au 17e siècle
III. Une analyse institutionnelle concernant des graphiques dans le cadre de l’enseignement de la physique
IV. Début d’un protocole expérimental : construction, passation et analyse d’un pré-test
1. Protocole expérimental
2. Passation du pré-test : conditions de sa mise en place
3. Construction du pré-test : situations-graphiques, arguments pour le choix et quelques éléments d’analyse de résultats
4. Résultats et analyse au pré-test
5. Conclusion des résultats au pré-test
V. Conclusion 

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