Modèle micromécanique à l’échelle cristalline

Modèle micromécanique à l’échelle cristalline

Afin d’étudier les propriétés mécaniques à l’échelle macroscopique des aciers inoxydables austénitiques aux états non-irradié et irradié, on envisage de développer une approche multi-échelles s’appuyant sur des calculs mécaniques d’agrégats de grains par la méthode des éléments finis. L’objectif ici est alors de fournir à cette modélisation une loi de comportement cristalline en grandes transformations en tenant compte de l’évolution microstructurale des densités de dislocations et des défauts d’irradiation, pour une température et une dose d’irradiation données. L’implémentation numérique de cette loi cristalline a été réalisée dans les codes de calcul par éléments finis ZéBuLoN [Besson et Foerch (1998) et Besson et al. (1998)] (code développé par l’école des Mines Paris) et Cast3M (code développé par le CEA).

Formalisme en grandes transformations

Dans cette partie, on présente la cinématique et la plasticité du monocristal en grandes transformations. Les notations tensorielles et les formules utilisées dans ce chapitre sont présentées dans l’Annexe I. 1. On définit C0 et Ct les configurations d’un milieu continu à l’état initial et à l’instant t. Pour une transformation, on définit X la position d’un point dans la configuration initiale C0 et x la position d’un point dans la configuration actuelle Ct . Le tenseur gradient de la transformation s’écrit comme : F  x /X . Soit v  x  le champ de vitesse du point x dans la configuration actuelle. Le tenseur gradient du vecteur vitesse est donné par : 1       F F x x L gradv   . Dans le cas de la plasticité cristalline, on utilise une décomposition multiplicative du tenseur gradient de la transformation F en deux parties : une transformation plastique P qui correspond à l’écoulement plastique induit par les cisaillements entre différents systèmes de glissement, et une transformation élastique E , qui décrit une déformation pure élastique et une rotation de corps rigide du réseau cristallin. Mandel [Mandel (1973)] a proposé une configuration intermédiaire relâchée isocline Ct (la configuration qui possède la même orientation du réseau cristallin initial), qui permet de réaliser premièrement une transformation plastique depuis la configuration initiale vers la configuration relâchée isocline, et suivie d’une transformation élastique depuis la configuration relâchée isocline vers la configuration actuelle (Figure 2.1) : Modèle micromécanique à l’échelle cristalline CHAPITRE 2 : Modèle micromécanique à l’échelle cristalline 52 Figure 2.1 : Décomposition du tenseur gradient de la déformation : configurations initiale, relâchée isocline et actuelle. Le gradient du vecteur vitesse peut s’exprimer :     les gradients de la transformation associés respectivement aux deux parties de la transformation, alors le tenseur L peut s’écrire comme la somme de sa composante élastique et de sa composante plastique transportée dans la configuration actuelle. On définit le tenseur vitesse de déformation par :   . Dans la configuration intermédiaire, on définit le tenseur des dilatations élastiques Cauchy-Green droit par :    . La déformation élastique de Green-Lagrange est donc définie comme :    1 2  . Ici, on note  le tenseur des contraintes de Cauchy défini dans la configuration actuelle. Le second tenseur (symétrique) de Piola-Kirchhoff défini dans la configuration intermédiaire e  s’exprime :        0 1     , avec  det  Équation 2.2 avec respectivement ρ0, ρi et ρ les densités dans les configurations initiale, intermédiaire et actuelle, étant donné que les déformations plastiques ont lieu à volume constant pour un matériau non endommagé : ρ0=ρi.. Pour une transformation complète, la puissance développée par les contraintes s’exprime :    D’après le calcul présenté dans l’Annexe I. 2, on peut obtenir deux composantes exprimées dans la configuration intermédiaire : p i e GL e i P E M : L 1 : 1       Équation 2.4 Enfin, selon cette formule, on peut en déduire que le second tenseur de Piola-Kirchhoff (PK2) e  (qui est symétrique contrairement au tenseur PK1) peut être utilisé pour la loi élastique et un tenseur des contraintes conjugué à la vitesse de déformation plastique – le tenseur de Mandel     doit être utilisé pour décrire la loi d’écoulement. On choisit la loi d’élasticité : e GL e    : E , avec  le tenseur d’élasticité d’ordre 4. Et le tenseur de Mandel peut s’exprimer :  . Dans la configuration intermédiaire, pour un modèle de plasticité cristalline, le tenseur gradient du vecteur vitesse associé au glissement plastique en grandes déformations p L sur les différents systèmes de glissement dits octaédriques pour les matériaux CFC (12 systèmes de type {111}<110>) peut être défini comme : s s s s s p s L   N N  m  n  , avec 1 2 1  Équation 2.5 Le tenseur de Schmid du système de glissement s est défini par le produit tensoriel entre la direction de glissement m s et la normale aux plans de glissement n s , dans la configuration isocline. On remarque que le tenseur de Schmid est un tenseur généralement non-symétrique.

Loi de comportement du monocristal retenu

En prenant en compte l’évolution des densités de dislocations et de défauts d’irradiation, on présente dans cette section les lois de comportement adoptées pour les aciers inoxydables austénitiques non irradiés et irradiés, à l’échelle monocristalline. Comme présenté dans la Section 1.4.3, afin d’étudier numériquement le comportement d’un matériau à l’échelle monocristalline, en général, deux lois sont utilisées pour décrire la plasticité cristalline : une loi d’écoulement permettant de vérifier l’activation d’un système de glissement, et le cas échéant, de déterminer la vitesse de glissement de ce système ; en outre une loi d’écrouissage pour décrire le durcissement sur chaque système activé suite à un glissement, en prenant en compte l’évolution des défauts étendus créés au sein du matériau. La loi d’écoulement adoptée pour les matériaux à l’état irradié est identique à celle à l’état nonirradié : le modèle de Cailletaud d’une manière simple [Hoc et al. (2001)], sous forme d’une loi puissance de type Norton, sans le terme d’écrouissage cinématique, cette étude ne s’intéressant qu’au chargement monotone : sign( ) sign( ) 0 0 s n s s eff n s c s s K K           Équation 2.7 où s (s=1…12) est le numéro du système de glissement présenté dans le Tableau 1.11, n et K0 sont les paramètres de Norton qui caractérisent la viscosité. s c  représente l’écrouissage isotrope, décrit par une évolution de la cission critique sur chaque système de glissement. s c s s eff     est la contrainte dite effective, pour décrire la viscosité,   () si   0 ,   0 sinon. Les lois d’écrouissage retenues sont basées sur l’évolution des densités de dislocations et/ou de boucles de Frank, pour les matériaux aux états non-irradiés et irradiés. Par conséquent, on va les présenter respectivement comme suit :

Pour les matériaux à l’état non-irradié

Il n’y a que les dislocations qui interviennent dans le durcissement du matériau. La cission critique s’écrit donc :      u u D su D s  c  0    0 b a  Équation 2.8 avec u  D la densité de dislocations du système u, bD la norme du vecteur de Burgers des dislocations de 110 2 1 a , a su la matrice d’interaction entre dislocations, µ le module de cisaillement.  On distingue que, 0  est la contrainte de friction du réseau cristallin, qui dépend de la température et reste constante pour une température donnée, et   représente la contrainte athermique, qui décrit les interactions à longue distance dues à la présence des dislocations de forêt. La loi d’évolution de la densité de dislocations retenue est sous la forme classique, avec un terme de multiplication et un terme d’annihilation, en ajoutant une matrice d’interaction b su qui possède la même forme que la matrice a su avec 6 coefficients indépendants, pour décrire l’interaction entre dislocations sur l’évolution de la densité de dislocations : Équation 2.9 où κ est le facteur de proportionnalité qui compte le nombre des obstacles franchis par une dislocation avant son arrêt, et gc est le facteur de proportionnalité qui dépend du mécanisme d’annihilation des dipôles de dislocations.

Pour les matériaux à l’état irradié

Les lois d’écrouissage retenues pour les matériaux à l’état irradié sont basées sur l’évolution des densités de dislocations et de boucles de Frank (boucles de dislocations fautées de type interstitiel créées sous irradiation). Les dislocations et les boucles de Frank interviennent simultanément dans le durcissement du matériau. Selon l’étude bibliographique dans la Section 1.4.3.3, la cission critique s’exprime soit par la racine carrée de la somme de deux mécanismes durcissants par dislocations et par boucles de Frank, soit par la somme des racines carrées de ces deux mécanismes durcissants : a. Modèle « la racine de la somme »     Équation 2.10 où bL est la norme du vecteur de Burgers des boucles de Frank de 111 3 1 a , ϕL est le diamètre de boucles de Frank, αL est la force d’obstacle effective des boucles de Frank, p (p=1…4) représente le numéro du plan de glissement présenté dans le Tableau 1.11, p  L est la densité de boucles de Frank sur le plan de glissement p. D’une part, la loi d’évolution de la densité de dislocations du matériau à l’état irradié adopte la même forme que celle dans le cas du matériau à l’état non-irradié, en rajoutant un terme décrivant l’interaction entre dislocations et boucles de Frank qui intervient dans la multiplication des dislocations, dont le mécanisme a été présenté dans la Section 1.3.1 .

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