Physiopathologie de la rétinopathie hypertensive

La vascularisation artérielle des couches internes

Elle est assurée par l’artère centrale de la rétine, ses branches et accessoirement l’artère cilio-rétinienne.

L’artère centrale de la rétine (ACR)

Origine : artère ophtalmique dans 50% des cas qui est issue de la carotide interne ou artère ciliaire longue médiale ou latérale et artère musculaire inférieure.
Trajet : l’artère présente quatre segments : intra orbitaire, intra dural, intra neural et rétinien.

Les branches collatérales de l’ACR

L’ACR se divise en quatre branches terminales après son émergence de la papille : supérieure, inférieure, nasale et temporale. Ces artères s’étalent sur la rétine en se divisant dichotomiquement jusque vers la périphérie en donnant des artérioles et des capillaires. Ces branches terminales sont visibles à l’ophtalmoscopie.
Les artérioles rétiniennes sont des artérioles de petit calibre de 0,1mm de diamètre au niveau de la papille, 8 à 20µ en périphérie. Elles possèdent trois couches : une intima, une media et un adventice.

L’artère cilio-rétinienne

Emanant du cercle artériel de Zinn, elle émerge le plus souvent le long du bord temporal de la papille en y faisant un véritable « crochet ». Plus ou moins longue, elle se dirige vers le pôle postérieur et peut prendre en charge une partie plus ou moins étendue de la vascularisation de la région maculaire. Leur existence prend toute son importance lors de l’oblitération du tronc de l’ACR permettant une éventuelle épargne maculaire.

Vascularisation veineuse

Le drainage veineux de la rétine est assuré principalement par la veine centrale de la rétine.

Histologie de la rétine (figure 4)

La rétine présente du point de vue histologique dixcouches, de l’extérieur vers l’intérieur, on trouve :
– l’épithélium pigmentaire ;
– la couche des photorécepteurs : cônes et bâtonnets ;
– la membrane limitante externe ;
– la couche nucléaire externe (formée par les noyaux des cellules photoréceptrices) ;
– la couche plexiforme externe ;
– la couche nucléaire interne ;
– la couche plexiforme interne ;
– la couche des cellules ganglionnaires ;
– la couche des fibres optiques ;
– la membrane limitante interne.

PATIENTS ET METHODES

Recrutement des patients

Nous avons recruté les patients vus en consultation à l’Institut de la Vision Madagascar pour une rétinopathie hypertensive.
Nous avons consulté les dossiers cliniques de ces patients et recueilli les données sur les registres et les fiches individuelles pré-établies.

Centre d’étude

L’Institut de la Vision Madagascar (IVM) est un centre de sante oculaire fondé par une organisation non gouvernementale confessionnelle étrangère appelée Adventist International Eye Services of Madagascar (AIESM).
L’ouverture de l’IVM s’était faite en janvier 2004.
Cet institut a son siège à Ambatomaro Antananarivo.
La mission de l’IVM porte sur deux axes : les activités de soins et les campagnes de masse.

Les activités de soins

Consultation sur rendez-vous avec des considérations des cas sociaux cas par cas.
Education oculaire : un conseil systématique est dispensé aux patients, notamment durant les campagnes de consultation de masse. Des supports destinés à cet effet sont utilisés (prospectus, projection sur Power point des conseils simples).
Consultation : un examen approfondi de l’état de l’œil est effectué. Ceci nécessite un temps plus ou moins long, allant jusqu’à une heure entraînant souvent un problème de rendez-vous non honorés.
Lunettes : L’IVM facilite l’obtention de lunettes. Il délivre des lunettes à prix modique pour les cas sociaux.
Imagerie : regroupe l’échographie, le champ visuel et l’angiographie. Ces examens complémentaires contribuent à poser le diagnostic d’une maladie donnée.
Laser : Le traitement au Laser est de deux sortes :Le Yag et Argon. Le Yag pour la capsulotomie postérieure (cataracte secondaire) et l’iridotomie (en cas de glaucome par blocage pupillaire). Le laser Argon pour le traitement de la rétinopathie diabétique, hypertensive et l’occlusion veineuse ou artérielle de la rétine.
Chirurgie mineure : la plus fréquente est la chirurgie de ptérygion, suivi du chalazion.

Concernant les campagnes de masse

Cette activité comporte trois phases 

o Phase 1 : Information Education Communication oculaire de masse afin d’adopter un comportement préventif à la santé des yeux (personne à risque, style de vie, prévention). Ainsi, des séances d’éducation radio-télévisée sur la santé des yeux ont été effectuées.
o Phase 2 : consultation proprement dite
o Phase 3 : délivrance de lunettes à coût abordable et de médicaments gratuits.

Sélection des dossiers

Critères d’inclusion

Ont été inclus :
• les dossiers de patients vus en consultation externe pour la première fois entre janvier 2004 et décembre 2008 et pour lesquels une rétinopathie hypertensive a été diagnostiquée
• les dossiers complets comportant les examens ophtalmologiques et ophtalmoscopiques nécessaires pour diagnostiquer une rétinopathie hypertensive (mesure de l’acuité visuelle, examen à la lampe à fente, ophtalmoscopie). Au total, 118 cas ont été retenus.

Critères d’exclusion

Nous avons exclu les dossiers incomplets et les dossiers de patients hypertendus sans aucun signe ophtalmoscopique de rétinopathie hypertensive.

Les paramètres étudiés

Ont été :
• l’âge
• le sexe
• les antécédents personnels et familiaux de maladies cardiovasculaires et surtout d’hypertension artérielle
• l’aspect ophtalmoscopique
• le stade de la rétinopathie hypertensive suivant la classification de KIRKENDALL
Le traitement des données a été fait par le logiciel Excel de Microsoft Office version 2007.

RESULTATS

118 patients ont été répertoriés durant une période de 5 ans de janvier 2004 à décembre 2008.

COMMENTAIRES ET DISCUSSIONS

L’hypertension artérielle (HTA) est une pathologie fréquente et constitue un véritable problème de la santé publique. Dans le monde, elle touche 15% de la population adulte (13) (14).

Concernant l’âge 

Dans notre étude, les patients hypertendus présentant une rétinopathie hypertensive étaient âgés de 36 à 81 ans avec un âge moyen de 58,5 ans. La tranche d’âge de 50 à 60 ans était la plus touchée, 33,89%.
Cette prédominance de tranche d’âge de 50 à 60 ans est également retrouvée dans la littérature malgache.
Une étude faite par RANDRIANARISOA au service Médecine de l’hôpital CHUA-JRB en 2004 avait révélé que 30,20% ont été dans cette tranche d’âge (6).
Une autre étude faite par RAJAONARISINA en 2001 avait estimé que 22% de la population adulte malgache sont hypertendus (19). Par contre, une étude menée par TUIL et coll, en France, ont retrouvé que 40% des hommes et 50% des femmes âgés de plus de 65 ans sont hypertendus (17).
Cette constatation serait probablement liée au fait que dans les pays développés, les personnes âgées consultent beaucoup plus et sont mieux suivies que dans les pays en voie de développement où elles sont souvent livrées à leur propre sort.
L’âge moyen de survenue de rétinopathie hypertensive était plus jeune dans notre série, 58,5ans, par rapport à celui retrouvé dans la littérature, estimé supérieur ou égal à 60 ans (19) (26).
Quelques hypothèses peuvent être avancées pour expliquer l’apparition précoce de la rétinopathie hypertensive dans notre série :
• retard ou absence de prise en charge de l’hypertension artérielle ;
• découverte tardive de l’hypertension artérielle ;
• une influence raciale : il semblerait que le nombre des hypertendus atteints d’une vasculopathie rétinienne est deux fois plus élevé chez les sujets de race noire par rapport à ceux de race blanche. (24) (25)

Concernant le sexe 

Dans notre série, la rétinopathie a été retrouvée dans les deux sexes avec une légère prédominance féminine. Le sexe ratio est égal à 0,76.
Cette constatation est également retrouvée dans la littérature à propos du nombre de patients atteints d’hypertension artérielle :
Une étude faite par RANDRIANARISOA avait montré que plus de 65% des patients sont de sexe féminin.
Une autre étude faite en France par KULKARNI et coll avait révélé que les femmes sont deux fois plus hypertendues que les hommes et que les femmes de race noire sont plus exposées par rapport aux femmes de race blanche. (30)

Concernant les antécédents familiaux d’hypertensionartérielle 

La majorité de nos patients, 70,33%, avait présenté une notion d’antécédents familiaux d’hypertension artérielle.
En effet, une notion d’antécédent constitue un facteur de risque important dans la survenue des signes de la rétinopathie hypertensive. (18)
La présence d’antécédents familiaux multiplie par deux à quatre fois les risques de développer une rétinopathie hypertensive. (20)

Concernant la durée d’évolution de l’hypertension artérielle 

Dans notre étude, 24,57% des patients avaient une évolution chronique de plus de dix ans de l’hypertension artérielle. Il semble que ce groupe de patients développait moins une rétinopathie hypertensive que celui dont la durée d’évolution est moins de dix ans.
Cette constatation pourrait s’expliquer par l’adaptabilité des vaisseaux sanguins à plusieurs poussées hypertensives dans le temps.
Notre résultat se rapproche des résultats retrouvésdans la littérature :
Une étude faite par RANDRIANARISOA elle-même avait montré que 30,20% seulement des hypertendus chroniques évoluant de plus de dix ans avaient présenté une rétinopathie hypertensive (6).
L’étude faite en Inde par KULKARNI et coll avait révélé que la rétinopathie hypertensive avait atteint 29,4% des hypertendus chroniques.

Concernant l’incidence 

Le nombre des patients atteints de rétinopathie hypertensive augmentait chaque année. La plus forte incidence a été enregistrée en 2008.
Cette constatation pourrait s’expliquer par l’augmentation progressive des nombres de consultant annuels. En effet, en 2004, il y avait 18 consultants diagnostiqués pour rétinopathie hypertensive contre 29 consultants en 2008.

Concernant le stade de la rétinopathie hypertensive:

Dans notre série, la rétinopathie hypertensive au stade 1 a été la plus fréquemment retrouvée, 68,51%.
Cette prédominance du stade 1 pourrait s’expliquer par le fait que les patients, dès la découverte de leur maladie, ont reçu un traitement adéquat et suivi régulièrement.
En effet, il a été démontré que l’efficacité d’un traitement instauré à temps et d’une façon régulière entraîne une diminution significative de la fréquence de rétinopathie hypertensive.
Une étude effectuée par WONG et coll à Singapour avait montré que la fréquence de la rétinopathie hypertensive est presque diminuée de moitié (40%) chez des malades hypertendus suivis et traités durant 6 ans (24).
Par ailleurs, une étude effectuée en Suisse par GUELPA et coll avait révélé que le taux de survie des patients hypertendus avec unerétinopathie au stade 3 ne cesse de croître au cours d’un traitement antihypertenseur suivi régulièrement. Ce taux peut passer de 35% à 72% en l’espace de 10 ans (28).
Une étude d’une autre équipe Suisse (NARDO et coll) avait montré qu’une bonne prise en charge initiale des malades hypertendus avec une surveillance régulière basée sur les recommandations établies par les sociétés européennes de cardiologiediminue le risque de complications de l’hypertension artérielle (29).

CONCLUSION ET SUGGESTIONS

Notre étude nous permet de conclure que l’hypertension artérielle source de vasculopathies rétiniennes, constitue un véritable problème de santé publique. 31,47% de nos patients étaient vus à un stade évolué (stades 2 et 3). La rétinopathie hypertensive concernait surtout le sexe féminin. et intéressait 33,89% des patients âgés de 50 à 60 ans. Elle touchait fréquemment les patients avec des antécédents familiaux d’hypertension artérielle(70,33%).
L’âge moyen de survenue des complications rétiniennes de l’hypertension artérielle était un peu plus jeune par rapport à celui retrouvé dans la littérature. 75,42% des patients avaient une hypertension artérielle avec une durée d’évolution de moins de dix ans.
Nous avons adopté la classification de KIRKENDALL, ce qui nous a permis de découvrir que la plupart des patients avaient une rétinopathie hypertensive stade 1. A Madagascar, comme dans les autres pays, le traitement antihypertenseur doit être instauré à temps avec un suivi régulier des patients hypertendus et surveillance de la population sans rétinopathie hypertensive mais avec des antécédents familiauxd’hypertension artérielle.

Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE
1- Rappels anatomiques sur la rétine
1.1- Définition
1.2- Anatomie
1.3- Vascularisation
1.3.1- Vascularisation artérielle
1.3.2- Vascularisation veineuse
1.4- Histologie de la rétine
1.5- Physiopathologie de la rétinopathie hypertensive
1.5.1- Autorégulation
1.5.2- Rupture de la Barrière
2- Rappels sur l’hypertension artérielle
2.1- Définition
2.2- Facteurs influençant la pression artérielle
2.3- Etiologies de l’HTA
2.4- Complications
2.5- Classification
3- Diagnostic de la rétinopathie hypertensive
3.1- Circonstances de découverte
3.2- Interrogatoire
3.3- Signes fonctionnels
3.4- Moyens de diagnostic
3.4.1- Examen ophtalmologique
3.4.2- Examens complémentaires
3.4.3- Classification de la rétinopathie hypertensive
3.5- Prévention
DEUXIEME PARTIE : NOTRE ETUDE
1. Objectifs
2. Patients et Méthodes
2.1- Recrutement des patients
2.2-Centre d’étude
2.2.1- Les activités de soins
2.2.2- Concernant les campagnes de masse
2.3- Sélection des dossiers
2.3.1- Critères d’inclusion
2.3.2- Critères d’exclusion
2.4- Paramètres étudiés
2.5- Traitement des données
3. Résultats
3.1- Répartition selon l’âge
3.2- Répartition selon le sexe
3.3- Répartition selon la présence des ATCD familiaux d’HTA
3.4-Répartition selon la durée d’évolution de l’HTA
3.5- Répartition de la RH selon l’incidence
3.6- Répartition selon le stade
TROISIEME PARTIE : COMMENTAIRES ET DISCUSSIONS
1. Concernant l’âge
2. Concernant le sexe
3. Concernant les antécédents familiaux d’hypertensionartérielle
4. Concernant la durée d’évolution de l’hypertension artérielle
5. Concernant l’incidence
6. Concernant le stade de la rétinopathie hypertensive
7. Concernant la classification
CONCLUSION ET SUGGESTIONS
ANNEXE
BIBLIOGRAPHIE

projet fin d'etude

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