Pneumopathies nosocomiales 

Agents pathogènes

Tous les microorganismes (bactéries, virus, parasites et champignons) peuvent être responsables d’une infection nosocomiale. Ils proviennent soit de la flore endogène (principalement digestive), soit de la flore exogène, et affectent les malades après une étape de colonisation.
Les germes en cause varient en fonction du type d’infection. Cependant, dans tous les cas, les bactéries sont les plus fréquemment incriminées (90 à 95% des cas). Pour les infections urinaires, Escherichia coli est le plus fréquemment rencontré (19 à 64% des cas), suivi par Pseudomonas aeruginosa (14 à 30%). Proteus, Klebsiella et Citrobacter sont cités à 7,1% chacun. Pour les infections respiratoires, ce sont surtout Staphylococcus aureus, Pseudomonas aeruginosa, Enterobacter cloacae et Klebsiella pneumoniae qui représentent les germes les plus fréquemment mis en évidence. Concernant les infections nosocomiales virales, et en particulier à virus respiratoire syncytial (VRS) en rénimation pédiatrique, 2,5 à 7% des patients hospitalisés vont développer en période épidémique une infection respiratoire basse à VRS liée aux soins.
Pour les infections du site opératoire, les germes en cause sont des cocci à gram positif dans près de 50% des cas avec du Staphylococcus aureus pour 36 à 50% des cas retrouvés. Les bacilles à gram négatif sont en cause dans 40 à 50% des cas (Pseudomonas, Klesbsiella, Enterobacter…) et Candida albicans dans 5% des cas [12]. Pour les bactériémies, les résultats des recherches ne sont pas uniformes. Certains ont vu prédominer les germes à gram positif et parmi eux, Staphylocoque à coagulase négative qui l’emportent sur les Staphylocoques dorés.

Modes de transmission

Il existe 4 principaux modes de transmission d’une infection nosocomiale [13].

Auto-infection

C’est lorsque le malade s’infecte soit par ses propres germes in situ, soit à partir de l’environnement immédiat (surface de la peau, vêtement, lit). Les complications respiratoires infectieuses liées au décubitus peuvent également être des auto-infections.

Hétéro-infection

Il s’agit d’une infection dont l’agent infectieux est transporté d’un malade à un autre provoquant une infection dite « croisée ». La transmission directe ou par voie aérienne est rare. Le personnel soignant est le plus souvent le vecteur, par ses mains ou des instruments de travail.

Exo-infection

L’infection est due au dysfonctionnement technique des matériels (filtres à air, conduite des fluides, boites à oxygène), ou au traitement des matériels surtout chirurgicaux.

Xéno-infection

Ce sont des infections qui sévissent sous forme endémique ou épidémique dans la population extrahospitalière. Les agents infectieux sont importés à l’hôpital par les malades, le personnel soignant, et les visiteurs qui en sont atteints ou qui sont en phase d’incubation. Ils se transmettent par voie aérienne, par contact direct ou indirect et trouvent à l’hôpital des victimes particulièrement réceptives avec des conditions de transmission facilitées.

FACTEURS DE RISQUE

Facteurs intrinsèques

L’âge

La prématurité et le faible poids à la naissance majorent le risque d’infection. Ainsi, le risque d’attraper une infection nosocomiale est de 46% chez le prématuré de moins de 1000g et 25% chez le prématuré de 1000 à 2500g [14, 15].

La réceptivité du patient

Les patients hospitalisés ont souvent, par nature, des défenses immunitaires altérées du fait de pathologies portant directement atteinte à leur compétence immunitaire (diabète, insuffisance respiratoire, pathologies immunitaires, grands brûlés…), ou en raison de leur état général. Ils sont ainsi plus réceptifs aux infections en général, et nosocomiales en particulier [16].

Facteurs extrinsèques

L’environnement

L’hôpital héberge de nombreuses bactéries multirésistantes provenant :
– des différents malades hospitalisés,
– des matériels usagés de propreté non satisfaisante (la literie, le mobilier, les poignées de porte, les téléphones, les commandes de télévision, les claviers d’ordinateurs, les stéthoscopes, les brassards à tensiomètre, le thermomètre, etc.),
– du personnel de santé,
– des visiteurs … [17].

Le séjour en unité de soins intensifs (USI)

Plus le séjour en USI est long, plus le risque de contracter une infection nosocomiale est élevé car le patient aurait été l’objet de gestes diagnostiques et thérapeutiques plus invasifs et/ou répétés [16].

Le traitement

Les traitements immunosuppresseurs et les corticoïdes entraînent une baisse de l’immunité des patients les rendant très sensibles aux infections même minimes. Par ailleurs, l’utilisation abusive et les prescriptions irrationnelles des antibiotiques favorisent l’émergence de bactéries multirésistantes [18].

Les dispositifs invasifs

L’utilisation des dispositifs invasifs accélère la survenue de l’infection nosocomiale si l’asepsie n’est pas respectée ou si des lésions muqueuses sont installées au cours de leur mise en place, surtout en cas de durée prolongée. La ventilation artificielle et la nutrition parentérale totale étant les deux principaux facteurs de risque [10, 18, 19].

Les facteurs liés à l’intervention chirurgicale

Les interventions longues, le mouvement des personnes dans la salle d’opération, le type de champ utilisé, l’expérience de l’équipe chirurgicale, la qualité de l’hémostase, la chronologie de l’acte opératoire, le matériel chirurgical, le contexte d’urgence (chirurgie non programmée), le fait qu’il s’agisse d’une réintervention, le type de chirurgie selon la classification d’Altemeier (cf. Tableau I), l’état de santé du patient selon le score ASA (American Society of Anesthesiologist) (cf. Tableau II) sont des facteurs de risqueimportants [8, 17].

METHODES

Cadre d’étude

Cette étude a été effectuée au sein du service de Réanimation Chirurgicale du Centre Hospitalier Universitaire Joseph Ravoahangy Andrianavalona (CHU-JRA) situé à Ampefiloha, dans le premier arrondissement de la commune urbaine d’Antananarivo Renivohitra de la région Analamanga. C’est le plus grand service d’Anesthésie et Réanimation Chirurgicale d’Antananarivo et de Madagascar.
Le service est composé de : un professeur agrégé en anesthésie-réanimation chef de service, cinq médecins assistants spécialistes en anesthésie-réanimation, cinq médecins assistants, deux majors de service, huit infirmiers et six personnels d’appui. Le service est équipé de 40 lits répartis dans 10 salles dont 6 lits réservés pour les cas pédiatriques.

Type d’étude

Il s’agit d’une étude rétrospective, descriptive et analytique, de type cas-témoin, monocentrique menée sur les dossiers des enfants hospitalisés au sein du service de réanimation chirurgicale.

Période et durée d’étude

Notre étude s’est déroulée sur une période de 36 mois s’échelonnant du 01 er janvier 2011 au 31 décembre 2013.

Population d’étude

La population source de cette étude est constituée de tous les enfants admis dans le service de Réanimation Chirurgicale du CHU-JRA. La population d’étude est constituée par les enfants post-opérés ou ayant reçus des soins sous anesthésie (cas des brûlés graves), tout genre confondu, quelle que soit la nature de l’intervention, admis durant la période d’étude.

Critères d’inclusion

Sont inclus dans notre étude, les dossiers des enfants âgés de la naissance à 14 ans admis durant la période d’étude, ayant séjourné au minimum 48 heures dans le service de Réanimation Chirurgicale, et qui ont présenté une fièvre plus de 48h après son admission.
Pour constituer les deux groupes, cas et témoins, nous avons élaboré des critères d’inclusion basés sur les examens complémentaires.
– Définition des cas : les cas sont constitués par les enfants post-opérés ayant remplis les critères d’inclusion, et qui ont une infection nosocomiale documentée (par la recherche de germes et l’antibiogramme).
– Définition des témoins : les témoins sont constitués par les enfants post-opérés remplissant les critères d’inclusion mais dont la recherche de germes s’avère être négative.

Critères d’exclusion

Les patients dont les dossiers sont incomplets ou inexploitables ont été exclus.

Mode d’échantillonnage

L’échantillonnage a été obtenu après appariement sur l’âge et le type d’intervention. Nous avons ainsi apparié 1 témoin pour chaque cas.

Taille de l’échantillon

Le calcul du nombre de patients à inclure a été effectué en émettant l’hypothèse d’une différence d’au moins 30% entre les deux groupes exposés au facteur de risque présumé, avec un risque α à 5% et un risque β à 20% (puissance relative de l’étude à 80%). En choisissant un rapport cas/témoin de 1/1, l’effectif minimum nécessaire est donc de 68 patients (34 patients dans chaque groupe).

Mode de collecte des données

Tous les paramètres nécessaires à notre étude ont été transcrits sur une fiche de collecte des données préétablie. Par la suite, ces données ont été saisies avec le logiciel EpiData, puis exportés sous un tableur (Excel) pour y être préparées.

Mode d’analyse des données

L’analyse statistique a été réalisée avec le logiciel SPSS 13.0 pour Windows. Une analyse comparative des variables de l’étude a été réalisée dans les groupes cas et témoins. Une valeur de p< 0,05 a été considérée comme significative. Les données quantitatives sont exprimées en moyenne et écart-type. Les données qualitatives sont exprimées en nombre et en pourcentage de patients. La recherche des facteurs associés à l’infection nosocomiale a été effectuée par une analyse univariée puis multivariée.

Analyse univariée

Un test de Chi-deux de Pearson pour série appariée est réalisé pour chaque variable qualitative et un test de Student pour les variables quantitatives. Les Odds-ratio et leur intervalle de confiance à 95% sont obtenus par le test exact de Fisher. Une variable est retenue pour la construction d’un modèle multivarié par régression logistique lorsque le degré de signification p-value est inférieur à 0,25.

Analyse multivariée

Un modèle de régression logistique est réalisé pour expliquer la survenue d’une infection nosocomiale chez les patients cas. Le seuil de significativité statistique est fixé à 0,05.

Critères de jugement

Critère de jugement principal

Le critère de jugement principal de l’étude est la détermination de l’Odds-ratio (OR) des facteurs jugés à risque de survenue de l’infection nosocomiale.

Critères de jugement secondaire

Les critères de jugement secondaires étaient la nature des germes retrouvés et les impacts socio-économiques (évolution et charge économique) de la maladie.

Limites de l’étude

Les résultats de notre étude ne reflètent pas les différentes situations dans tout Madagascar. De plus cette étude ne prétend pas étudier tous les aspects de l’infection nosocomiale, elle se limite à analyser les principaux facteurs de risques et établir le profil évolutif de cette pathologie. Par ailleurs, comme il s’agit d’une étude rétrospective réalisée à partir d’un dépouillement de dossiers, nous avons dû nous contenter de ce qui a été écrit. Ainsi, la recherche des facteurs associés aux infections nosocomiales était très limitée du fait du manque de certaines informations.
De plus, le diagnostic des cas d’infection nosocomiale observés dans notre étude est basé uniquement sur la clinique (présence de fièvre plus de 48h après l’admission dans le service, les points d’appel de l’infection), et sur l’examen bactériologique des prélèvements à la recherche de germes. Toutefois, l’examen bactériologique pour chaque cas n’a pas été réalisé dans un même laboratoire, pouvant constituer ainsi un biais de sélection des cas.

Considération éthique

Il a fallu une autorisation du chef du service de Réanimation Chirurgicale du CHU-JRA avant d’entamer l’enquête et le dépouillement des dossiers médicaux des patients. Des photos ont été également prises pour illustration (cf. Figures 1 et 2) sur autorisation du Directeur d’Etablissement du CHU-JRA, dans le respect total des malades et des utilisateurs. Tout au long de cette étude, le secret professionnel, l’anonymat et la confidentialité ont été respectés.

RESULTATS

Sélection des patients

La population source est composée de 789 patients âgés de moins de 14 ans admis dans le service durant la période d’étude. Parmi ces patients, 244 patients sont des cas médicaux, 362 patients ont séjourné moins de 48h dans le service, et 45 patients ont des dossiers incomplets. Sur les 138 patients restant, quarante-et-un patients ont présenté une fièvre dès leur admission les excluant ainsi de notre étude. Ainsi, parmi les 97 patients sélectionnés et remplissant tous les critères d’inclusion, trente-six patients ont présenté une infection nosocomiale documentée, constituant ainsi les patients-cas. Les 36 patients-témoins ont été ensuite sélectionnés selon les critères d’appariement (âge et type d’intervention) avec un ratio un témoin pour un cas. La sélection des patients pour l’étude a été faite et présentée dans la figure 2 ci-dessous.

Table des matières

INTRODUCTION 
PREMIERE PARTIE : RAPPELS
I. DEFINITION
II. EPIDEMIOLOGIE
III. MECANISME PHYSIOPATHOLOGIQUE
III.1. Agents pathogènes
III.2. Modes de transmission
III.2.1. Auto-infection
III.2.2. Hétéro-infection
III.2.3. Exo-infection
III.2.4. Xéno-infection
IV. FACTEURS DE RISQUE
IV.1. Facteurs intrinsèques
IV.1.1. L’âge
IV.1.2. La réceptivité du patient
IV.2. Facteurs extrinsèques
IV.2.1. L’environnement
IV.2.2. Le séjour en unité de soins intensifs (USI)
IV.2.3. Le traitement
IV.2.4. Les dispositifs invasifs
IV.2.5. Les facteurs liés à l’intervention chirurgicale
V. FORMES CLINIQUES
V.1. Pneumopathies nosocomiales
V.2. Infections sur cathéter vasculaire
V.3. Les infections du site opératoire (ISO)
V.4. Les infections urinaires
V.5. Autres infections
VI. PRISE EN CHARGE
VI.1. Mesures préventives
VI.1.1. Mesures d’hygiène
VI.1.2. Soins
VI.1.3. Patient
VI.2. Traitement curatif
VI.3. Surveillance
VI.3.1. Objectifs
VI.3.2. Principes généraux
DEUXIEME PARTIE : METHODES ET RESULTATS
I. METHODES
I.1. Cadre d’étude
I.2. Type d’étude
I.3. Période et durée d’étude
I.4. Population d’étude
I.4.1. Critères d’inclusion
I.4.2. Critères d’exclusion
I.5. Mode d’échantillonnage
I.6. Taille de l’échantillon
I.7. Variables étudiées
I.7.1. Variables quantitatives
I.7.2. Variables qualitatives
I.8. Mode de collecte des données
I.9. Mode d’analyse des données
I.9.1. Analyse univariée
I.9.2. Analyse multivariée
I.10. Critères de jugement
I.10.1. Critère de jugement principal
I.10.2. Critères de jugement secondaire
I.11. Limites de l’étude
I.12.Considération éthique
II. RESULTATS
II.1. Sélection des patients
II.2. Fréquence de l’infection nosocomiale
II.3. Caractéristiques sociodémographiques des patients
II.4. Caractéristiques cliniques des patients
II.5. Mode évolutif des patients
II.6. Analyse des différents facteurs
II.6.1. Genre
II.6.2. Tares associées
II.6.3. Procédures techniques de soins
II.7. Analyse multivariée par régression logistique
II.8. Charge économique de l’infection nosocomiale
TROISIEME PARTIE : DISCUSSION
I. ASPECT EPIDEMIOLOGIQUE DE L’INFECTION NOSOCOMIALE
II. FACTEURS DE RISQUE DE L’INFECTION NOSOCOMIALE
II.1. Risques liés à l’âge
II.2. Risques liés au genre
II.3. Risques liés aux tares associées
II.4. Risques liés au motif d’hospitalisation
II.5. Risques liés à la durée d’hospitalisation
II.6. Risques liés aux processus techniques de soins
II.7. Risques liés aux germes
II.8. Risques liés au traitement
III. MISES EN PERSPECTIVE
CONCLUSION 
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXE

projet fin d'etude

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