Une variété de phénomènes grammaticaux

ETUDE DES EXPRESSIONS FIGEES DU FRANÇAIS

Une variété de phénomènes grammaticaux

Insertion Le domaine des expressions figées est un domaine carrefour car on peut y voir converger plusieurs réalités, plusieurs faits. Parmi ces derniers, il y a un phénomène qu’on peut souligner déjà ; il s’agit de l’insertion. Nous parlons d’insertion quand, dans une expression figée donnée, on peut y retrouver d’autres entités linguistiques ‘‘étrangères’’ à celle-ci mais qui ne l’empêchent pas souvent de fonctionner correctement. Ce phénomène d’enchâssement ou d’incise traverse largement notre corpus comme en témoignent les exemples ci dessous: ‘‘La nuit _______________ tous les chats sont gris’’ ‘‘ Rouler_______________ dans la farine’’ ‘‘Casser ___________ du sucre sur le dos de’’ ‘‘Garder ___________ une dent contre’’ ‘‘Un __________ pied de nez’’ ‘‘Un cœur _________ à prendre’’ ‘‘Tient _________ à cœur’’ ‘‘Rend __________ l’âme’’ A propos de cette rubrique, la remarque qu’on peut faire ici est que l’élément en incise se met généralement entre le premier ou les deux premiers mots et le reste de l’expression. Cela c’est juste pour montrer un peu que le phénomène du figement est aussi flexible. Cependant même si le phénomène est fort répandu dans le figement, il faut noter qu’il y a des expressions qui sont rebelles à ce fait, c’est-à-dire qui le 101 refusent, le rejettent. S’il arrive qu’on force l’insertion, le figement disparait et l’expression entre dans le cadre de la syntaxe libre. Parmi ces expressions, nous pouvons citer, entre autres: Le fer de lance/ Le talon d’Achille / Le coup de théâtre / L’été indien / Le printemps arabe / De mal en pis / La petite mort etc. 

Effacement

Ce phénomène est l’inverse du premier évoqué plus haut. Ici, on supprime souvent de manière volontaire des éléments qui sont propres à l’expression ou qui sont proches d’elle et laissant du coup le soin au lecteur, si c’est un texte (ou à l’auditeur si c’est à l’oral), de deviner ces éléments manquants. Il se matérialise à l’écrit le plus souvent par des points de suspension. Ce type de phénomène n’est pas fréquent dans le corpus. Le seul exemple que nous avons eu est le suivant:« charité bien ordonné… ». Un autre exemple également peut être signalé ; il s’agit du cas de l’expression: ‘‘la main dans le tiroir-caisse(…)’’, expression inspirée de la suivante:‘‘ prendre la main dans le sac’’. On peut retenir que l’effacement dans cette expression en question, à la différence de la première citée dans le même cas, semble être superflu puisque replongé dans son contexte d’origine, l’effacement n’a aucun impact sur le sens.

L’expression peut donc bien se comprendre avec cet effacement. Le contexte de l’expression étant le suivant: Mais, il est revenu sur ses pas après avoir à peine tourné le dos. Là, coup de théâtre, il surprend la dame Mboup la main dans le tiroir-caisse(…)  On peut également donner un autre exemple: Vous soufflez le chaud et le froid… Je préfère laisser les gens languir. Je me demande qu’est ce que les gens ont à dire sur ma poitrine sachant qu’elle m’appartient.

Pluriel et singulier

Dans le figement en général, si certaines expressions se plient facilement, acceptant de s’employer indifféremment au singulier comme au pluriel, il y en a d’autres par contre qui sont rebelles à cette règle et ne s’emploient que dans l’un ou l’autre des cas. On peut parler ici d’emplois récalcitrants et les exemples ci dessous peuvent être donnés à ce sujet : ‘‘Voler de ses propres ailes’’; ‘‘ faire avaler des couleuvres à quelqu’un’’ ; ‘‘prendre le taureau par les cornes’’; ‘‘ Tirer les vers du nez à quelqu’un’’ ; ‘‘mettre des bâtons dans les roues’’; ‘‘les carottes sont cuites’’; ‘‘les larmes de crocodile’’ ; ‘‘découvrir le pot aux roses’’;‘’ la chasse aux sorcières’’ etc. Nous savons que l’on dit presque généralement ‘‘revenons à nos moutons’’. Cependant, nous avons rencontré une fois dans nos lectures la même expression mais qui était employée cette fois-ci au singulier. Cela a donné donc: ‘‘revenons à notre mouton’’ expression qui sonne lourd et bizarre du moment qu’on s’est écarté du pluriel largement utilisé.

De même, l’inverse aurait également été bizarre pour des expressions que l’on mettrait au pluriel alors qu’elles ne s’emploient qu’au singulier. C’est le cas des expressions suivantes: Mettre les pieds dans le plat »»»» Mettre les pieds dans les plats La mort dans la l’âme »»»» Les morts dans les âmes. Pour revenir à la norme alors, « pratique de prescription des comportements langagiers» , l’usage voudrait que certaines expressions, comme on le disait plus haut, soient exclusivement au singulier (ou au pluriel cf. supra). C’est le cas des expressions figées suivantes qui ne s’emploient qu’au singulier: La messe est dite; la mort dans l’âme; la petite mort, un ange passe etc. L’infraction de cette norme, c’est-à-dire le fait de forcer une expression pour qu’elle se mette soit au singulier soit au pluriel alors qu’elle ne le peut pas, produirait donc une distorsion de la langue, une incorrection, une faute. 

Formes affirmative et négative

Il est, dans le figement linguistique, certaines expressions qui ne s’emploient que sous une forme bien définie. Ainsi on peut dire que la plupart des expressions figées se présentent sous la forme affirmative mais quelques fois, nous retrouvons la forme négative qui n’est pas en reste. Pour en savoir davantage, nous allons donner les exemples suivants : – Expressions sous la forme affirmative: Faire le pied de grue/ prendre la mouche/ être sur le pied de guerre/ avoir un poil dans la main/ la mort dans l’âme/ les pieds dans le plat / les carottes sont cuites/ mettre de l’eau dans le moulin / montrer patte blanche/ faire chou blanc/ faire bonne figure/ faire main basse sur/ faire bonne presse etc. – Expressions sous la forme négative: ‘‘Ca ne casse pas trois pattes à un canard’’; ‘‘ne savoir sur quel pied danser’’; ‘‘ne plus savoir à quel saint se vouer’’;‘‘ne pas dormir sur ses lauriers’’; ‘‘n’avoir que les yeux pour pleurer’;‘‘ne pas y aller de main morte’’;‘‘ en n’avoir rien à cirer’’ etc. 5/ Verbes, temps et modes Le verbe est un élément généralement incontournable dans la syntaxe de la phrase française notamment dans le figement linguistique. En parlant ici de verbe, il faut signaler d’emblée qu’on a deux (2) grands groupes d’expressions qui ont comme indice de différenciation le verbe, à savoir les expressions verbales (prendre langue, faire des pieds et des mains, passer sous le nez et à la barbe de…etc.) et les expressions non verbales (coup de sang, la mort dans l’âme, corps et âme, la petite mort etc.).

Nous allons donc parler, dans cette rubrique, d’abord des verbes dans les expressions figées puis des temps auxquels ils sont conjugués et enfin des modes auxquels ils appartiennent. 104 A/Verbes Pour ce qui est maintenant des verbes dans les expressions figées, nous les avons observés et avons trouvé qu’il y a une sorte de tendance qui se dégage. Nous pouvons dire en général qu’il y a deux types d’expressions commençant par des verbes: Ceux qui se construisent comme suit :  Verbe support +aucun déterminant ou adjectif possessif ou préposition Exemples : « Faire florès », «Faire feu de tout bois » Ceux qui se construisent également comme suit :  Verbe support + présence de déterminant ou adjectif possessif ou préposition. Exemples : « Etre les dindons dans la farce », « Donner ma langue au chat », «Montrer de quel bois on se chauffe » Nous pouvons remarquer toutefois, s’agissant de ces verbes dans le figement, une forte présence des cas suivants: – Celui des verbes pronominaux: ‘‘s’en frotter les mains’’, ‘‘se fourrer le doigt dans l’œil’’, ‘‘ne plus savoir à quel saint se vouer’’ etc. – Celui des verbes dits du troisième (3ième) groupe, la plupart étant des semiauxiliaires: faire, prendre, aller, mettre etc. – Celui aussi des auxiliaires tout court à savoir: ‘‘être’’ et ‘‘avoir’’ B/ Temps Beaucoup de temps verbaux se retrouvent dans le figement linguistique. On peut y voir et les temps simples et les temps composés et généralement, ils sont au mode indicatif.

Voici quelques uns que nous avons rencontré dans notre corpus: 105 Exemples : -Pour les temps simples: Le linge sale se lave en famille (présent) ; ils se prirent à bras le corps (passé simple) ; ils ne mettaient pas de l’eau dans leur bissap (imparfait);vous ne serez pas sur la même longueur d’ondes (futur). -Pour les temps composés: Babacar Cissé a encore jeté un pavé dans la mare (passé composé) ; qui malheureusement n’aura duré que le temps d’une rose (futur antérieur). C/Modes Le système verbal du français comporte plusieurs modes : indicatif, subjonctif, conditionnel, impératif, infinitif, participes passé et présent. Le gérondif est une tournure particulière du participe présent. Le conditionnel est parfois décrit comme un temps de l’indicatif (le futur dans le passé). Pour parler de ces modes verbaux, il faut noter ici qu’on peut retrouver et les modes personnels et les modes non impersonnels. Pour les premiers, on peut citer: l’indicatif qui est le mode le plus utilisé. Quant au subjonctif, au conditionnel et à l’impératif, on peut dire que ce sont des modes rares dans le figement. On les retrouve généralement quand le verbe de l’expression est conjugué à un temps relatif à ces modes.

En examinant notre corpus, nous n’avons pu trouver que quelques cas d’expressions ayant un verbe conjugué à un temps relatif à un de ces modes. Nous allons donner cependant quelques exemples à titre illustratif. Exemples : – Pour l’indicatif : les étudiants font fi de ; la messe est dite – Pour le conditionnel : Faire profil bas remonterait votre cote – Pour le subjonctif : Que le frangin de Balla Gaye n° 2 vienne à bout du poulain de Yakhya Diop Yékini. – Pour l’impératif : Ne bottez pas en touche et ne faites pas l’autruche Pour ce qui est des seconds, on a l’infinitif, le participe et le gérondif. Nous avons retrouvé, dans notre corpus, quelques cas de verbes employés aux modes cités. 106 Exemples : – Pour l’infinitif : faire florès – Pour le participe : A son corps défendant, leur emboitant le pas, faisant fi de – Pour le gérondif : l’appétit venant en mangeant.

Table des matières

Introduction générale
Première partie: Aperçu sur diverses formes de recherches faites sur le figement linguistique
Chapitre 1: Recherches sur le figement linguistique: recherches antérieures portant sur d’autres
langues en dehors du français
Chapitre 2 : Recherches sur le figement linguistique: recherches antérieures portant sur le français
Deuxième partie : Approche linguistique
Chapitre 3: Exploitation du corpus
Chapitre 4 : Propositions de nouvelles approches d’analyse
Troisième partie : Approche sociolinguistique
Chapitre 5: Analyse du dossier d’enquête
Chapitre 6: Etude statistique du dossier d’enquête
Conclusion générale
Bibliographie

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