Analyse critique de la pédagogie convergente et du curriculum bilingue

Analyse critique de la pédagogie convergente et
du curriculum bilingue

 Le bilinguisme

Dans le Dictionnaire de didactique du français langue étrangère et seconde (2010, p.36), le bilinguisme est « la coexistence au sein d’une même personne ou société de deux variétés linguistiques… » 17 Verdelhan-Bourgade, citant le Dictionnaire de didactique (2003, p. 36), reprend la définition ci-dessus. Elle continue en citant GALISSON et COSTE (1976) p. 69 qui présentent le concept comme une « situation qui caractérise les communautés linguistiques et les individus installés dans des régions, des pays où deux langues (bilinguisme) et plus (multilinguisme = plurilinguisme) sont utilisées concurremment ». Est dit bilingue, selon SHAKER (2011), celui qui possède des compétences dans deux langues. Georges Mounin (2006, p.52), dans le Dictionnaire de la linguistique, définit le bilinguisme comme « le fait pour un individu de parler indifféremment deux langues … ». L’auteur ajoute qu’il est également la coexistence de deux langues dans la même communauté, pourvu que la majorité des locuteurs soit effectivement bilingue. Selon Antoine Meillet (1987), le bilinguisme naît chaque fois qu’une « grande langue de civilisation » côtoie un « vieil idiome local ». L’objectif visé par la PC au Mali est l’instauration d’un bilinguisme fonctionnel. Or la pratique aboutit à un bilinguisme de transition. Car l’enseignement de la langue nationale permet de faciliter l’acquisition du français. Puis au bout de quelques années de pratique, la langue nationale cède la place au français. Il faudrait donc revoir les pratiques langagières des LN à l’école afin d’aller à un bilinguisme fonctionnel. Après le premier cycle, elles doivent continuer au niveau des autres ordres d’enseignement comme objet et médium. 

Le multilinguisme

SHAKER (2011) parlant du multilinguisme dit que c’est le fait pour plusieurs langues de coexister et d’être utilisées par diverses communautés dans un même espace. Dans Tréma (2007) N° 28, Michèle Verdelhan-Bourgade définit le multilinguisme comme la cohabitation de plusieurs langues sur le même territoire. Pour elle, le 18 multilinguisme et le plurilinguisme avaient la même signification. C’est après 1976 que le multilinguisme s’est détaché du sens commun pour se forger un chemin. Bruno Maurer dans Les Cahiers de l’Acedle (2010) s’appuie sur Chaudenson (1991) pour dire que le multilinguisme serait la « présence, dans le continent ou dans une de ses régions, de plusieurs langues dont les aires d’usage dépassent les frontières nationales.». A la lumière des définitions ci-dessus, nous soutenons que l’Afrique est un continent multilingue. Par conséquent la situation sociolinguistique du Mali se caractérise par un multilinguisme. Le français cohabite avec treize langues nationales. La gestion de ce multilinguisme à l’école doit tenir compte de certains facteurs, notamment le statut des langues en présence. 3 – Le plurilinguisme Le Dictionnaire de didactique du français langue étrangère et seconde (2010, p.195) précise : « On appelle plurilinguisme la capacité d’un individu d’employer à bon escient plusieurs variétés linguistiques, ce qui nécessite une forme spécifique de la compétence de communication. Celle-ci consiste à gérer le répertoire linguistique en fonction d’un éventail large de facteurs situationnels et culturels…» Maurer (2010) trouve que le plurilinguisme renvoie à une situation de« coexistence de plusieurs langues au sein d’un même Etat » Le Dictionnaire de linguistique (2006, p. 264), décrivant le plurilinguisme, parle de la présence de plus de deux langues. Verdelhan-Bourgade reprenant CUQ, (dir. 2003, p. 197) écrit que le plurilinguisme est la «capacité d’un individu d’employer à bon escient plusieurs variétés linguistiques ». Il comporte « une dimension linguistique (contacts de langues), sociolinguistique (rôle des contextes de l’alternance codique), psychologique (raisons des choix des locuteurs, rôle des émotions, de l’affectivité). 19 SHAKER (2011) confirme la conception de Verdlhan-Bourgade lorsqu’il écrit qu’un locuteur est plurilingue lorsqu’il a des compétences dans trois langues ou plus. Généralement, l’enfant africain est plurilingue avant d’aller à l’école. Particulièrement, tout enfant malien parle une ou plusieurs langues avant d’aller à l’école. Donc au cours de sa formation on doit s’appuyer sur les acquis de sa langue première. Par ailleurs, tout au long de notre travail, nous ne ferons pas de différence entre le bilinguisme, le multilinguisme et le plurilinguisme car ils renvoient tous à la présence de plus d’une langue dans un environnement linguistique donné. A partir du moment où le sujet parlant a une compétence dans plus d’une langue il est bi-plurimultilingue. 4 – La langue maternelle L’UNESCO (2003), citée par SHAKER (2011, p. 16) définit ainsi la LM : Le terme de ‘langue maternelle’, largement employé, peut désigner des situations différentes. Elle se définit souvent comme : la (les) langue(s) que l’on a apprise(s) en premier ; la (les) langues(s) [à la/auxquelle(s)] on s’identifie – ou [à la/auxquelle(s)] les autres vous identifient – comme un locuteur natif ; la langue que l’on connaît le mieux et la (les) langue(s) que l’on emploie le plus. A la lumière de la définition de l’UNESCO l’auteur, à son tour, écrit : « La langue maternelle, quelle qu’elle soit, est la langue qui, pour tout être humain, a assumé pendant la tendre enfance, et toujours efficacement, les fonctions de moyen de communication et de médium de réflexion et d’apprentissage ». Pour définir la notion de langue maternelle, le Dictionnaire de didactique du français langue seconde et étrangère (2010, 151) insiste sur deux facteurs : l’ordre d’acquisition et l’ordre du contexte. Ainsi serait-elle « la langue acquise la première par le sujet parlant dans un contexte où elle est aussi la langue utilisée au sein de la communication. » 20 Dans Cours de didactique du français langue étrangère et seconde (2011,90), JP CUQ et I GRUCA abordant la notion de langue maternelle écrivent qu’elle est la première langue s’imposant à chacun c’est-à-dire celle de la socialisation de l’enfant. Le Dictionnaire de la linguistique (2006, p. 198) définit la langue maternelle comme la « langue de la mère ». Il admet que par abus de langage elle renvoie à la langue première d’un individu, même si elle n’est pas la langue de sa mère. La loi d’orientation sur l’éducation au Mali dans son article 3 déclare que la langue maternelle est celle parlée couramment par l’enfant, la langue dominante de son milieu de vie. Selon Ouane (1995, p. 65) « est langue maternelle celle qui véhicule la socialisation de l’individu au sein de la communauté la plus petite, habituellement la famille. ». RASHIDI (2005, p. 19) donne une définition contextualisée des langues maternelles en précisant qu’elles sont « celles apprises par les enfants africains par interaction sociale avec les membres des communautés auxquels ils sont liés par parenté. ». Cette contextualisation limite la notion de LM qui ne sont pas propres aux seuls africains. WAMBA et NOUMSSI soulignent que la langue maternelle est celle de la première socialisation de l’enfant. BESSE (1987, p. 13) définit la LM comme celle apprise « dès le plus jeune âge par simple interaction avec la mère et plus largement avec l’environnement familial, langue qui est supposée mieux maîtrisée que toute autre acquise ou apprise ultérieurement. » DEFAYS (2003, p. 28), dans sa conception, met en valeur l’aspect psychologique de la LM : « … elle détermine le développement affectif, cognitif, social de chaque individu, conséquemment ses motivations et ses capacités à apprendre d’autres langues par la suite. ». CUQ (2000, p. 50) donne plus de précisions sur la notion de langue maternelle : « Une situation de FLM prototypique serait par exemple une classe d’un pays de 21 langue maternelle française dans laquelle le répertoire verbal initial de tous les enfants serait constitué de français» A la lumière des réflexions ci-dessus, nous concluons que le français qui a été longtemps perçu comme une langue étrangère pourrait être une langue maternelle au Mali car il existe une minorité d’enfants qui commence à le parler dès le bas âge. Nous nous opposons à Maurer (2007, p. 11) qui écrit : « On peut dire que le français n’est la langue maternelle d’aucun groupe humain au Mali, puisque jusque dans les plus hautes sphères sociales, les parents s’adressent à leurs enfants dans une de leurs langues maternelles. ». DIALLO (2011, p. 2) certifiant que « Le FLM ne concerne que les pays où le français est parlé dans la famille, à l’école, dans les institutions administratives, politiques et pour la communication internationale » ne prend pas en compte l’existence des minorités linguistiques. Dans le contexte malien, le français n’est pas dans le vécu quotidien de toute la population cependant il pourrait y être une langue maternelle. 5 – La langue nationale HALAOUI (1995) donne deux définitions du concept de LN : la première dit qu’une langue nationale est une langue traditionnellement parlée sur le territoire national. La deuxième plus ouverte prend en compte toutes les langues négro-africaines parlées sur un territoire africain précis. Mais l’auteur précise que ce cas est seulement une réalité en Côte – d’Ivoire où « (…) toute langue négro-africaine, ivoirienne ou étrangère, parlée sur le territoire ivoirien par une communauté négro africaine, ivoirienne ou étrangère, vivant sur ce territoire, est une langue nationale. » (HALAOUI, 1995, p. 22). Elle est celle qui « véhicule des valeurs nationales, d’ordre culturel » selon CUQ, (2010, p.152) qui ajoute que les langues nationales africaines ont généralement fait l’objet d’une reconnaissance officielle. L’article 25 de la constitution du Mali stipule : « La loi fixe les modalités de promotion et d’officialisation des langues nationales. ». 22 RASHIDI (2005, p. 2) écrit que «les langues indigènes ayant obtenu un statut par décret ou, plus généralement, toutes langues indigènes » sont appelées langues nationales. Mohammed Hassan Abdulaziz (1995, p. 169) affirme « la langue nationale est normalement la langue qui identifie l’Etat, elle est la base de la culture et de l’unité nationales. ». Au Mali, les langues nationales et maternelles se confondent : les treize langues nationales sont des langues maternelles de la quasi-totalité des maliens. Nous ne considérerons pas l’opposition entre elles. Il ne sera plus étonnant que nous utilisions les deux termes pour désigner la même réalité. Même si les textes officiels ne lui accordent pas le privilège, le français pourrait être considéré comme une langue nationale au Mali. Certes la loi N° 96 – 049 du 02 août a élevé au rang de langues nationales treize langues à savoir le bamanankan (bambara), le bomu (bobo), le bozo (bozo), le dɔgɔsɔ (dogon), le fulfulde (peul), le hasanya (maure), le mamara (miniyanka), le maninkakan (malinké), le soninke (sarakolé), le sɔngoy (songhoy), le syenara (sénoufo), le tamàsàyt (tamsheq), le xaasongaxango (khassonké). Mais à partir du moment où il est une langue maternelle pour une partie de la population, il se rangerait un jour dans le registre officiel des langues nationales

Table des matières

Introduction
Première Partie : Cadre Théorique
Chapitre I : Présentation du système éducatif
Chapitre II : Cadre Conceptuel
Chapitre III : Revue de la Littérature
Chapitre IV : Méthodologie de la Recherche
Deuxième Partie : Cadre Empirique
Chapitre V : Présentation des Résultats
Chapitre VI: Analyse et Interprétation des Résultats
Troisième Partie : Convergence didactique
Chapitre VII : Transcription et Traduction des Textes
Chapitre VIII : Présentation de textes écrits en français
Chapitre IX : Analyse critique des manuels scolaires
Chapitre X : Bi-grammaire
Conclusion
Bibliographie

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