Calcifications aortiques et TAVI

Rigidité aortique

Le système vasculaire est complexe et les connaissances à son sujet ont beaucoup évolué au travers les âges . Parmi les paramètres étudiés, la rigidité artérielle tient une place prépondérante. Elle correspond à l’inverse de la compliance artérielle , La rigidité artérielle équivaut à une diminution de la capacité des parois artérielles à amortir la pulsatilité du flux sanguin et à le transformer en flux continu aux abords des artérioles et des capillaires, processus nécessaire à la protection des organes cibles. Il existe physiologiquement un gradient de rigidité artérielle qui augmente depuis l’arche aortique jusqu’aux petites artères. Le gold standard pour analyser la rigidité aortique reste la mesure en routine de la VOP . Plus elle est élevée, plus le remodelage aortique est important. Celle-ci augmente naturellement avec l’âge .
Il existe de manière physiologique un phénomène d’amplification artérielle. Chez les sujets jeunes, la pression artérielle systolique (PAS) périphérique est plus importante que la PAS centrale du fait de la réflexion de l’onde de pouls . L’onde réfléchie vient se superposer précocement à l’onde incidente en périphérie, alors qu’au niveau aortique cette superposition peut être plus ou moins retardée. L’augmentation de la rigidité aortique, en augmentant la VOP, induit un retour plus rapide de l’onde réfléchie . La PAS centrale en est augmentée alors que la pression artérielle diastolique reste identique, ce qui induit une augmentation de la pression pulsée (PP). La post charge est plus élevée conduisant à une augmentation de la consommation en oxygène du myocarde, en sus d’une hypertrophie ventriculaire gauche et d’une baisse de la perfusion coronaire.

Calcifications aortiques

Physiopathologie : Longtemps considérées comme un phénomène de dégénérescence passif de cristallisation du phosphate et du calcium, il est admis aujourd’hui que les calcifications artérielles résultent d’un processus actif mettant en jeu de nombreux mécanismes biologiques. On distingue 3 classes de calcifications . Les calcifications de l’intima, à médiation inflammatoire, sont reliées à l’athérome. Les calcifications de la média, à médiation métabolique, sont préférentiellement retrouvées chez les patients diabétiques ou insuffisants rénaux. Enfin, la troisième classe est représentée par les calcifications secondaires à des maladies génétiques. Leur processus de formation est complexe, partiellement élucidé, et met en jeu de nombreux médiateurs biologiques. Elles partagent néanmoins toutes des mécanismes parallèles. Les calcifications s’accumulent préférentiellement dans les régions riches en fibres d’élastine. Il s’agit de la couche profonde musculo-élastique pour l’intima et de la couche moyenne pour la média . C’est à ce niveau que se produit l’élastocalcinose. Ces différentes classes de calcifications partagent également des mécanismes parallèles à l’ossification du squelette osseux. En effet, les cellules musculaires lisses vasculaires subissent une différenciation en ostéoblastes conduisant à une ostéogénèse ectopique au sein de la paroi artérielle .
Au niveau aortique, la partie thoracique contient préférentiellement des calcifications au sein de la média, alors qu’il s’agit préférentiellement de calcifications intimales au niveau abdominale. Ces 3 différentes classes de calcifications peuvent bien sûr coexister chez un même patient, mais aussi sur une même artère et sur un même site artériel. Les techniques d’imagerie actuelles ne permettent pas de différencier la localisation des calcifications au sein de la paroi artérielle.

Relation entre rigidité et calcifications aortiques

Les mécanismes de rigidification de la paroi artérielle sont complexes et incomplètement élucidés. Ils sont médiés par des contraintes mécaniques pariétales, des signaux cellulaires, des déterminants génétiques, des processus neuroendocriniens et hormonaux multiples. Un des mécanismes prépondérants est le déséquilibre s’installant entre fibres d’élastine et de collagène . Alors que la production de collagène est augmentée au sein de la média, les fibres d’élastines sont dégradées, altérées ou fragilisées.
L’accumulation de calcium au niveau des fibres d’élastine de la média, appelée élastocalcinose, participe à cette dégradation.
Deux expérimentations animales, sur des rats normotendus, ont montré qu’induire pharmacologiquement chez eux une élastocalcinose conduisait, à une destruction des fibres élastiques, à une augmentation de la rigidité artérielle, à une hypertension artérielle systolique (HTA) isolée, et à terme pour la première étude seulement, à une hypertrophie ventriculaire gauche. Une autre étude australienne, chez des rats génétiquement modifiés pour être porteurs d’une polykystose rénale, a montré après étude de l’aorte, une rigidité artérielle plus importante, associée à des taux de calcium au sein de la média 6,5 fois supérieur au groupe témoin, au dépens des fibres d’élastine . Chez l’homme, la relation entre calcifications aortiques, mesurées le plus souvent par scanner, et rigidité artérielle a d’abord été démontrée chez les patients insuffisants rénaux chroniques . Puis, les calcifications aortiques sont apparues comme significativement et indépendamment liées à l’augmentation de la vitesse de l’onde de pouls dans la population générale, hypertendue ou non, et ce quelques soient les ethnies . La rigidité aortique peut donc être estimée par le volume de calcification aortique. A la différence de l’artériosclérose, la VOP n’est pas associée de manière significative aux volumes de plaques d’athérome, quand celles-ci ne sont pas calcifiées.

Interactions entre rigidité aortique et rétrécissement aortique

Le phénomène de recouvrement de pression : La sévérité d’un RA, selon les recommandations européennes et américaines, repose sur les valeurs de la surface valvulaire effective (SVE) et le gradient moyen transvalvulaire aortique (GM), mesurés en échocardiographie trans-thoracique (ETT) ou en cathétérisme cardiaque. Le RA est jugé serré si la SVE≤1cm2 (ou ≤0,6cm2/m2) et si le GM≥40mmHg. Il existe cependant souvent une discordance entre les mesures réalisées par ETT et celles réalisées per cathétérisme. Une des explications est le phénomène de recouvrement de pression . En effet, pour une même SVE, c’est à dire pour un même degré de sévérité du RA selon les recommandations, la perte d’énergie induite par la sténose varie en fonction de la surface de section de l’aorte ascendante (SAA). Les turbulences engendrées dans le jet transvalvulaire provoquent une perte d’énergie potentielle de la pression sanguine. Si la racine aortique en aval est de petite taille les turbulences cèdent rapidement et une partie de l’énergie perdue en amont est récupérée en aval. Au contraire si la racine aortique est grande, le jet se disperse, les turbulences s’accroissent et la récupération d’énergie est presque nulle. Le GM et la SVE mesurés par cathétérisme prennent en compte ce recouvrement de pression car le capteur de pression est au sein de la racine aortique quelques centimètres en aval de la sténose. Le GM et la SVE estimés par ETT sont fondés sur l’enregistrement de la vélocité du jet à hauteur de la vena contracta, avant que se produise le recouvrement de pression. Ainsi, la sévérité d’un RA, ou la perte d’énergie ventriculaire liée à la valvulopathie, peut être surestimée en ETT, lorsque le patient est porteur d’une racine aortique de petit diamètre.

L’impédance valvulo-artérielle

L’étiologie la plus fréquente de RA dans nos pays développés est la maladie de Mönckeberg . Sa prévalence croit avec le vieillissement de la population. Comme le phénomène de rigidification aortique, elle a longtemps été considérée comme résultante de phénomènes passifs de dégénérescence. On sait maintenant qu’elle résulte de mécanismes actifs dont certains sont similaires à ceux de la perte de compliance artérielle. Ces deux pathologies sont donc fréquemment associées dans notre population. Environ 40% des patients porteurs d’un RA moyennement serré ou serré, souffrent de manière concomitante d’hypertension artérielle systolique dû à une augmentation de la rigidité aortique . Chez ces patients, une double post charge s’exerce sur le ventricule gauche, l’une valvulaire et l’autre artérielle. Souvent l’exploration ETT de cette population retrouve une SVE≤1cm² mais un GM<40mmHg, malgré une fraction d’éjection du ventricule gauche (FEVG) préservée. Cela s’explique par un volume d’éjection systolique indexé (VEi) abaissé. On appelle cette classe de RA, les RA bas gradients paradoxaux. Leur profil tensionnel peut être trompeur, car la PAS, elle-même, peut être paradoxalement normale du fait du VEi diminué. Pour mieux évaluer la post charge globale infligée au ventricule gauche, un nouvel indice a été proposé par le Pr Pibarot (Québec, Canada) et son équipe .

Table des matières

INTRODUCTION
REVUE BIBLIOGRAPHIQUE – LES CALCIFICATIONS AORTIQUES REFLET DE LA RIGIDITE AORTIQUE
1. Rigidité aortique
1.1. Définition
1.2. Conséquences cliniques
2. Calcifications aortiques
2.1. Physiopathologie
2.2. Relation entre rigidité et calcifications aortiques
3. Interactions entre rigidité aortique et rétrécissement aortique
3.1. Le phénomène de recouvrement de pression
3.2. L’impédance valvulo-artérielle
OBJECTIFS DE L’ETUDE
PATIENTS ET METHODE
1. Population
2. Suivi et critères de jugements
3. Angioscanner cardiaque et de l’aorte
4. Anonymisation des scanners et transformation en format MHD
5. Calcul du volume des calcifications de l’aorte
6. Analyses statistiques
RESULTATS
1. Logiciel Creatis (cohorte lyonnaise)
1.1. Caractéristiques de base de la cohorte lyonnaise
1.2. Corrélation entre le logiciel Creatis et le logiciel Philips
1.3. Reproductibilité intra et inter-observateur du logiciel Creatis
2. Impact des calcifications aortiques sur la mortalité et l’insuffisance cardiaque (cohorte
rouennaise)
2.1. Caractéristiques de base de la cohorte rouennaise
2.2. Répartition des volumes de calcifications de l’aorte dans la population
2.3. Calcifications de l’aorte et mortalité
2.4. Calcifications de l’aorte et insuffisance cardiaque clinique
2.5. Calcifications de l’aorte et insuffisance cardiaque biologique
DISCUSSION
1. Utilisation d’un logiciel automatisé
2. Relation entre le volume de calcifications de l’aorte et la mortalité post TAVI
3. Relation entre le volume de calcifications de l’aorte et l’insuffisance cardiaque post TAVI
4. Implications pratiques pour les patients éligibles à un TAVI
5. Limites de l’étude
CONCLUSIONS

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