Cancers de la cavité buccale et de l’oropharynx et troubles de parole

Cancers de la cavité buccale et de l’oropharynx et troubles de parole

Les cancers de la cavité buccale et de l’oropharynx ont une incidence élevée en France1 : plus de 13 500 nouveaux cas ont été déclarés en 2018 (dont environ trois quarts chez les hommes). Il s’agit du troisième cancer le plus incident, notamment chez les hommes avec 18,3 cas pour 100 000 personnes- années (taux standardisé mondial, contre 5,8 chez les femmes). Dans le même temps, la mortalité consécutive aux cancers atteignant les lèvres, la bouche ou le pharynx diminue, avec un taux de 4,9 pour 100 000 en 2018 (contre 13,4 pour 100 000 en 1990) (voir Figure 1). Ainsi, l’allongement de la durée de vie consécutive au cancer fait que les patients vivent désormais plus longtemps avec les séquelles du cancer et des traitements. Associé au fait que ces cancers restent fréquents, les séquelles de la pathologie cancéreuse de la cavité buccale et de l’oropharynx sont un véritable problème de santé publique. En raison de leur localisation, ils ont un impact sur les capacités de parole des sujets atteints (Balaguer et al., 2019b; Mlynarek et al., 2008). Certains facteurs cliniques de gravité du trouble de parole ont d’ailleurs été identifiés : les tumeurs de plus gros volume sont plus délétères (Borggreven et al., 2007; Colangelo et al., 2000), les tumeurs localisées dans la cavité buccale dégradent davantage la parole que les tumeurs oropharyngées (DeNittis et al., 2001; Stelzle et al., 2013) conformément au lieu d’articulation de la majorité des phonèmes, ou encore le traitement entrepris où la chirurgie est la plus délétère (Balaguer et al., 2019a; Barrett et al., 2004) bien que la radiothérapie dégrade aussi les capacités de parole (Vainshtein et al., 2014). Le délai depuis le diagnostic ou le traitement influence la sévérité perçue du trouble de parole par les patients (Bolt et al., 2016; Eadie et al., 2018; Vainshtein et al., 2014). Enfin, l’âge peut influencer les capacités de production de parole après traitement (Matsui et al., 2007).

Dès 2014, l’AFSOS (Association Francophone des Soins Oncologiques de Support) émettait des recommandations quant à la prise en charge des troubles de parole dans le référentiel « Déficiences liées aux cancers des VADS »2. Les troubles de la voix et de la parole doivent être pris en charge précocement en post-opératoire, « dès que la situation du patient le permet », avec pour objectifs l’évaluation du handicap et l’évaluation des besoins de communication. Dans ce contexte, il convient de s’intéresser, au-delà des déficits analytiques et dynamiques, aux répercussions fonctionnelles et psychosociales post-traitement du trouble de parole.  psycho-sociaux ont été développés, permettent de mieux comprendre l’impact des actes thérapeutiques en cancérologie ORL sur la qualité de vie des patients (Borggreven et al., 2007).

Un des modèles les plus connus est la Classification internationale du fonctionnement, du handicap et de la santé (CIF, voir Figure 2) proposée par l’OMS en 2001 (Winance, 2008; World Health Organization, 2001). Dans le champ de la parole, les déficits organiques et anatomiques concernent les capacités motrices et sensitives des organes de la parole et leur coordination dans le cadre de la respiration (au repos et au cours de la parole), la phonation (c’est-à-dire la vibration des plis vocaux au niveau laryngé permettant la production de son, ainsi que la résonance) et de l’articulation des sons (Dykstra et al., 2007). Les limitations d’activités concernent les conséquences des déficits analytiques sur la parole d’une part, mais aussi des limitations induites par le trouble de parole sur les capacités de communication d’autre part. Les restrictions de participation sont relatives à la manière avec laquelle le sujet interagit avec son environnement mais aussi les restrictions induites par le trouble de parole sur sa dynamique psychosociale. Ainsi, outre le trouble de parole à proprement parler, les altérations de la communication et la modification de la dynamique psychosociale sont à envisager de façon spécifique en cancérologie ORL. préciser les différents niveaux en jeu dans la dynamique fonctionnelle et psychosociale, et établir les relations causales pouvant exister entre eux (Murphy et al., 2007; Wilson & Cleary, 1995) : les facteurs biologiques et physiologiques, le statut symptomatique, le statut fonctionnel, les perceptions générales de la santé et la qualité de vie globale (voir Figure 3). trouble de parole sur la communication. De façon générale, les troubles de parole en contexte cancérologique contribuent à l’altération de la dynamique sociale des patients (Reich, 2009), dont la communication est une des parties essentielles. En cancérologie ORL, une corrélation à 0,29 est retrouvée entre l’acceptabilité de la parole ressentie par les patients laryngectomisés totaux et leur participation à la communication (Eadie et al., 2016). Les études menées spécifiquement auprès des patients traités pour un cancer de la cavité buccale ou de l’oropharynx ciblent principalement l’impact psychosocial et non fonctionnel, en retrouvant des liens entre qualité de vie et déficits de parole (Borggreven et al., 2007; Mlynarek et al., 2008; Rinkel et al., 2008).

 

Cours gratuitTélécharger le document complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *