Caractérisation des réponses racinaires au phosphore chez le mil

Caractérisation des réponses racinaires au phosphore chez le mil

Généralités sur le mil 

Importance socio-économique

La culture du mil est particulièrement importante du fait qu’elle est l’une des rares céréales que l’on peut cultiver dans des zones d’Afrique et d’Asie (FAO, 1997a). En effet, le mil est l’une des céréales les plus résistantes à la sécheresse et aux fortes températures. Il constitue la principale céréale alimentaire pour plus de 150 000 000 de personnes vivant dans les régions arides et semi-arides d’Afrique et du sous continent indien (FAO, 1990). L’Inde est le premier producteur avec un tonnage qui s’élevait à 11 433 500 en 2001 suivi par la Chine avec 1 966 779. A la même année, la production au Sénégal était environ de 470 109 t onnes. L’Afrique ne produit que 40 % de la production mondiale dont 80 % proviennent de l’Afrique de l’Ouest (FAO, 1997). Le mil est cultivé pour ses grains très nutritifs et très riches au plan énergétique. La teneur en calories (780 calories kg-1 ) est parmi les plus élevées chez les céréales, et sa teneur en protéines (15%) est comparable à celle du blé. Sa consommation est préférée à celle du sorgho par les populations. Ces dernières en font des usages multiples : couscous, bouillie liquide ou pâ teuse etc. L’industrialisation de sa transformation au cours de ces dernières années a étendu davantage sa consommation au niveau des populations urbaines du Sénégal. La paille du mil sert à l’alimentation du bétail et pour la construction de palissades. Ces résidus peuvent atteindre 6 à 6,5 T ha-1(ROCAFREMI, 2002). Au Sénégal, selon l’analyse du bilan céréalier actuel, on peut constater que le taux moyen de couverture des besoins se situe à environ 52 % , traduisant une production insuffisante. Le taux de couverture moyen des besoins nationaux en mil est environ de 75 %. Les superficies emblavée en mil ont augmenté en moyenne de 11 % par an, tandis que les productions ont baissé en moyenne de 12% par an entre 1994/1995 et 1997/1998 (ROCAFREMI, 2002). Cela s’explique par la faiblesse et la variabilité des rendements. Pour résorber le déficit vivrier, le gouvernement du Sénégal est obligé de procéder à des importations élevées de céréales (blé, riz, fonio, maïs, mil, sorgho). Ces importations représentent en moyenne 10 % des importations totales et elles ont augmenté à un rythme de près de 4 % par an pour atteindre un volume d’environ 500 000 tonnes ROCAFREMI (2002). Elles entraînent une sortie importante de devises pour le pays. L’augmentation de la production des céréales et du mil en particulier, pour parvenir à l’autosuffisance alimentaire, est l’un des objectifs prioritaires que s’est fixé le gouvernement sénégalais dans le cadre des plans de développement économique et social. Cependant, pour atteindre cet objectif, il faut en plus de la diversification des cultures vivrières une intensification des recherches menées sur les différentes variétés cultivées pour mieux comprendre leurs réponses aux contraintes environnementales (déficit hydrique, nutrition minérale). Une plus large connaissance sur les mécanismes d’adaptation des différentes variétés aux conditions de cultures défavorables permettra une meilleure recommandation de techniques culturales appropriées.

Origine, Systématique et Caractéristiques botaniques et morphologiques

Le mil pénicillaire est une céréale qui aurait été domestiquée au sud du Sahara où existent les centres primaires de diversité renfermant les espèces cultivées et les espèces sauvages. Actuellement, une très large gamme de variétés, de longueurs de cycle et de caractères morphologiques différents, se rencontre en Afrique occidentale et centrale. Le mil appartient au genre Pennisetum de la famille des graminées, série des Panicoïdes, tribu des Paniceae. Ce genre compte près de 140 espèces. Sur le plan écologique, il résiste aux températures élevées et est adapté à la sécheresse. Au plan physiologique, c’est une plante en C4 (DOWTON et TREGUNA, 1968; MAITI et BISEN, 1990; POUZET et PUARD, 1972) du groupe enzyme malique à NADP+ (LAVERGNE et al., 1979). Il est caractérisé par une haute capacité d’assimilation du CO2 de l’ordre de 2,77 mgCO2 m-2 s-1 (McPHERSON et SLATYER, 1973). Le mil présente un port érigé avec une hauteur pouvant varier de 0,5 et 4 m en fonction de la variété et de l’humidité de la zone. Comme toutes les graminées, sa tige porte des nœuds et des feuilles engainantes. Ces dernières, longues de 20 à 100 cm et larges de 5 à 10 cm, sont parallélinerves, amphistomatées et ont une disposition alterne. Chaque nœud est limité par deux entre-nœuds dont chacun porte un bour geon axillaire. Ce dernier pouvant donner une talle aérienne. Une talle est une tige adventive qui peut être florifère et fructifère. Le mil présente un tallage particulièrement fort et ceci en fonction de la densité de semis, de l’alimentation hydrominérale. Le nombre de talles est considéré comme un bon indicateur des conditions de nutrition du stade 5-6 feuilles jusqu’à la montaison (DIOUF, 1990). Le nombre de talles basales susceptibles de donner des épis, dépend de la n utrition azotée (COALDRAKE et PEARSON, 1985). Ces derniers soulignent que chez le mil, contrairement à d’autres céréales (blé, orge, riz) dont le tallage débute avec l’apparition de la quatrième feuille du brin-maître, l’émergence de la première talle ne se produit qu’avec la formation de la sixième ou septième feuille. Cette première talle ne serait pas issue du bourgeon de la première feuille mais de celui de la deuxième où troisième feuille (LAMBERT, 1983a). L’inflorescence du mil a la forme d’une chandelle ce qui lui a valu le nom de mil à chandelle. Cette inflorescence est une panicule dans la mesure où les épillets sont pédonculés. L’épi de mil a une forme cylindrique, et sa taille varie de 10 à 100 cm en fonction de la variété. Mais on parle souvent d’épi ou de faux-épi. Le mil se reproduit par fécondation croisée (allogamie) puisque ses fleurs sont protogynes. L’épillet comprend deux fleurs dont l’une femelle ou complète généralement fertile et l’autre mâle ou stérile. L’ovaire est uniloculaire et surmonté de deux stigmates plumeux qui retiennent facilement les pollens. L’ovule donne après fécondation un c aryopse. La maturité des grains peut être reconnue par le hile qui devient noir. Cette maturité est l’étape ultime du développement de la plante. Ce développement suit trois phases (FUSSEL et PEARSON, 1978; LA MBERT, 1983a; M AITI et BIDINGER, 1981) (figure 1) : • la phase végétative qui s’étale depuis la levée jusqu’à l’initiation florale et s’achève par la transformation de l’apex végétatif en bouton reproducteur. • la phase reproductive pendant laquelle l’initiation florale se poursuit et aboutit à la floraison. • la phase de maturation des grains au terme de laquelle a lieu la maturité physiologique des grains. Elle dure en moyenne 30 jours dans la zone sahélienne pour l’ensemble des variétés à cycle court (JANSEN et GOSSEYE, 1986). 5 Figure 1 : Différentes phases de développement du mil (Source: CARON & GRANES (1993))

Système racinaire du mil et son évolution au cours du développement de la plante

Le système racinaire du mil est de type fasciculé (figure 2). Il est concentré dans les trente premiers centimètres du sol, mais certaines racines peuvent descendre jusqu’à trois mètres de profondeur (CHOPART, 1980). La racine séminale apparaît vingt quatre à quarante huit heures après le semis. Elle possède un géotropisme positif très prononcé et sa croissance est rapide. Dans les conditions optimales de germination, cinq jours après le début de celle-ci et trois jours après la levée, la longueur de cette racine est de dix centimètres et son diamètre est un millimètre. A ce stade, elle possède déjà un chevelu racinaire assez important mais de faible longueur : la plupart de ces radicelles ont une longueur de l’ordre d’un centimètre et leur diamètre est très faible (CHOPART, 1980). Quand la plante atteint trois feuilles c’est-à-dire neuf à dix jours après le début de la germination, apparaît la première racine adventive juste au-dessus de la surface du sol. Quelques jours après, même si elle peut être dépourvue de racines secondaires, elle possède des poils absorbants. Ensuite, très rapidement, d’autres racines adventives vont apparaître au niveau du collet puis des premiers nœuds, très proches du collet. Deux semaines après la levée, la plante débute son tallage; la racine séminale reste toujours visible mais va bientôt disparaître par un phé nomène de nécrose. Si la plante a bénéficié de conditions de croissance favorables, l’enracinement se compose déjà de plusieurs racines adventives; celles-ci sont en pleine phase d’élongation suivant une direction oblique. Leur longueur maximale est de trente centimètres et elles possèdent encore peu de racines secondaires (CHOPART, 1980). La période d’initiation de racines adventives se situe surtout entre le quinzième (tallage) et le soixantième jour (floraison). A la récolte, chaque pied compte en moyenne deux à trois cent racines soit environ vingt cinq racines par talle (CHOPART, 1980). De nombreux travaux ont d’ailleurs souligné l’importance d’un bon développement racinaire pour la nutrition minérale et hydrique de la plante (MAERTENS et al., 1974 ; BARBER, 1974; TAYLOR et KLEPPER, 1978; DREW, 1979; MAERTENS, 1979; FOEHSE et JUNGH, 1983; DIOUF, 2000). Pour que les racines d’une plante puissent jouer pleinement leur rôle dans les processus d’alimentation hydrique et minérale, surtout lorsque le niveau de richesse chimique du sol est faible et la pluviométrie irrégulière comme c’est le cas dans les 6 pays sahéliens, deux caractéristiques apparaissent fondamentales : il s ‘agit de l’évolution du front racinaire au cours du cycle de la plante et du degré de colonisation du sol. D’après CHOPART (1980), une vitesse rapide de progression du f ront racinaire du mil en début de cycle permet à la plante de dépasser au plus tôt la zone de sol la plus soumise à l’évaporation entre deux pluies. Il souligne également que cette caractéristique est aussi importante par la suite, car le front racinaire règle la profondeur et donc le volume du réservoir d’eau utile pouvant être mis à l a disposition de la plante pendant un intervalle de temps séparant deux pluies. Pour le mil, la vitesse de progression du front est de 1,5 à 2 cm.j-1 au moment de la levée. A partir du quinzième jour jusqu’à la moitié du cycle, elle est de 3 à 3,5 cm j-1 ensuite elle n’est plus que de 1,5 à 1 cm j-1 jusqu’à la fin du c ycle (CHOPART, 1980; DO, 1994). Ceci lui permet d’atteindre rapidement les horizons profonds plus humides non soumis à l’évapotranspiration (DO, 1994). La vigueur des plantes au début de la culture due à une bonne nutrition en phosphore favorise par ailleurs un degré de recouvrement du sol plus élevé qui a pour conséquence une diminution des pertes d’eau par évaporation (BATIONO et al., 1999).

Table des matières

CHAPITRE 1 : SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE
1.1 Généralités sur le mil
1.1.1 Importance socio-économique
1.1.2 Origine, Systématique et Caractéristiques botaniques et morphologiques
1.1.3 Système racinaire du mil et son évolution au cours du développement de la plante
1.2 Facteurs influençant la croissance et le développement racinaire
1.3 Les caractéristiques générales des sols du Sénégal
1.4 Phosphore
1.4.1 Rôles et fonctions physiologiques
1.4.2 Mécanismes de l’absorption du phosphore
1.4.3 Effets du phosphore sur le développement végétatif et sur la croissance, le développement racinaires
1.4.4 Contraintes à la disponibilité du phosphore dans les sols
1.4.5 Mécanismes d’adaptation des plantes au déficit en phosphore
1.5 Généralités sur les cultures hors sols
1.5.1 Historique
1.5.2 Définitions
1.5.3 Domaines d’application
CHAPITRE 2 : MATERIEL ET METHODES
2.1 Matériel végétal
2.2 Conditions climatiques de culture
2.3 CULTURE EN HYDROPONIE
2.3.1 Solutions nutritives
2.3.2 Dispositifs expérimentaux
2.3.3 Traitement phosphoré
2.3.4 Conduite de la culture
2.4 Culture en pots
2.4.1 Caractéristiques du sol et conduite de la culture
2.4.2 Traitement hydrique
2.4.3 Traitement phosphoré
2.4.4 Dispositif expérimental
2.5 Mesures morphologiques
2.6 Analyse chimique du phosphore et de l’azote total
2.6.1 Dosage du phosphore
2.6.2 Dosage de l’azote total
2.7 Mesures physiologiques
2.7.1 Potentiel hydrique foliaire
2.7.2 fluorescence chlorophyllienne
CHAPITRE 3 : RESULTATS ET DISCUSSION
3.1 CULTURE EN HYDROPONIE
3.1.1 Réponses du mil au phosphore
3.1.1.1 Paramètres morphologiques
3.1.1.1.1 Effet du phosphore sur la ramification racinaire
3.1.1.1.2 Effet du phosphore sur la biomasse racinaire
3.1.1.1.3 Effet du phosphore sur le volume racinaire
3.1.1.1.4 Effet du phosphore sur la croissance aérienne
3.1.1.1.5 Effet du phosphore sur le rapport biomasse racinaire/biomasse aérienne
3.1.1.2 Mobilisation du phosphore et de l’azote total
3.1.1.2.1 Phosphore
3.1.1.2.2 Azote total
3.1.1.3 Effet du phosphore sur l’activité photochimique
3.1.2 Réponses variétales à la déficience en phosphore : déficience sévère
3.1.2.1 Paramètres morphologiques
3.1.2.1.1 Croissance et développement des racines
3.1.2.1.2 Biomasse aérienne
3.1.2.2 Mobilisation du phosphore et de l’azote
3.1.2.2.1 Phosphore
3.1.2.2.2 Azote total
3.1.2.3 Activité photochimique
3.2 EFFET DU REGIME HYDRIQUE SUR LES REPONSES AU PHOSPHORE (cas de déficience modérée)
3.2.1 Paramètres morphologiques
3.2.1.1 Nombre de racines adventives
3.2.1.2 Biomasse racinaire
3.2.1.3 Biomasse aérienne
3.2.2 Mobilisation du phosphore et de l’azote
3.2.2.1 Phosphore
3.2.2.2 Azote total
3.2.3 Effet du stress hydrique sur le potentiel hydrique foliaire
3.2.4 Effet du déficit hydrique et de la fertilisation phosphorée sur la photochimie .

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