Contrôle de la mort cellulaire par la voie des MAPK1/3 (ERK2/1)

Les différents types de mort cellulaire 

Chez les organismes pluricellulaires des plus simples comme le nématode Caenorhabditis elegans jusqu’aux mammifères, il existe plusieurs processus de mort cellulaire qui sont induits de façon programmée ou qui sont activés par les stimuli de stress extracellulaire. On peut regrouper quatre mécanismes de mort cellulaire : l’apoptose, la nécrose, la nécrose programmée et l’autophagie.

L’apoptose 

L’apoptose est un processus de mort cellulaire programmé et ordonné en différentes étapes qui seront détaillées dans les pages suivantes. L’apoptose a été caractérisée morphologiquement en 1972 par Kerr et Wyllie (208). Cette forme de mort cellulaire conduit à une séquence d’altérations morphologiques comprenant le bourgeonnement de la membrane plasmique, la condensation et la fragmentation du noyau, et le découpage de la cellule en corps apoptotiques qui seront digérés par des macrophages ou par les cellules voisines. L’apoptose exige de l’énergie sous forme d’ATP, et son exécution requiert l’activation d’une famille de protéases, les caspases. L’apoptose joue un rôle essentiel aussi bien pendant le développement embryonnaire que tout au long de la vie de l’organisme adulte. Ce processus de mort programmé permet à l’organisme d’éliminer les cellules cibles sans provoquer l’inflammation du tissu.

La nécrose

A l’inverse de l’apoptose, la mort cellulaire par nécrose est le résultat d’une catastrophe bioénergétique provenant de l’épuisement de l’ATP à un niveau incompatible avec la survie des cellules. La nécrose est induite principalement par des agression extracellulaires comme le stress toxique ou par les dommages physiques. La nécrose est caractérisée morphologiquement par la vacuolisation du cytoplasme et la perméabilisation de la membrane plasmique qui conduit à la perte du contenu cellulaire. La libération des protéines intracellulaires active le système immunitaire et entraîne une réaction inflammatoire autour de la cellule morte. Les cellules qui meurent par la nécrose montrent fréquemment des changements de morphologie du noyau mais pas la condensation et la fragmentation de la chromatine en fragments de 200 pb, caractéristiques de l’apoptose.

La nécrose programmée

Lorsque l’apoptose classique n’arrive pas à complétion, en l’absence de phagocytes ou dans certaines conditions d’infection virale, il se produit une signalisation parallèle conduisant à une mort cellulaire qui s’apparente à de la nécrose. Cette « nécrose programmée » fait intervenir des agents impliqués dans l’apoptose comme les récepteurs de mort Fas et TNFR-1 ou les caspases 1 et 8. La protéine PARP, qui est un substrat des caspases effectrices, semble aussi jouer un rôle important dans l’induction de cette nécrose programmée (pour revue (192)).

L’autophagie et la paraptose 

La mort par autophagie est caractérisée par la formation d’une vésicule cytosolique, l’autophagosome, qui encapsule les organelles entières et notamment les mitochondries. Cet autophagosome va pouvoir fusionnner avec le lysosome où le contenu sera recyclé (257). Contrairement à l’apoptose, l’autophagie nécessite un cytosquelette intact (pour revue (312)). Il a été montré chez la levure, le Dictyostelium et le C.elegans que l’autophagie représente un mécanisme de survie utilisé pour permettre à ces organismes de survivre à des périodes de limitation en sources énergétiques (242). Chez l’homme on observe fréquemment des cellules autophagiques dans les maladies neurodégéneratives tels que les maladies d’Alzheimer et de Parkinson. Il faut noter que les neurones présentent une forme de mort cellulaire nonapoptotique proche de l’autophagie. Cette mort nommée paraptose qui est insensible aux inhibiteurs de caspase et à Bcl-xL, requiert la synthèse protéique. La paraptose n’entraîne pas de dégradation de l’ADN ni de formation de corps apoptotique. Comme l’autophagie, la paraptose est caractérisée par une vacuolisation du cytoplasme qui provient d’un gonflement des mitochondries et du réticulum endoplasmique (414).

Les mécanismes de mort par apoptose

Les caspases 

L’apoptose est caractérisée par l’activation d’une famille de protéases à cystéine, les caspases (pour cystein aspartyl protease), qui compte chez l’homme environ 14 membres. L’ensemble des membres de cette famille d’endoprotéases possède un site catalytique comprenant un résidu cystéine localisé dans un motif Q-A-C-X-G (X pouvant être un résidu R, Q ou G). Les caspases reconnaissent un motif tétrapeptidique, puis clivent la chaîne polypeptidique au niveau d’un résidu aspartate. Les caspases sont synthétisées sous forme de zymogènes inactifs, les procaspases. L’activation des procaspases se fait par des coupures protéolytiques intra ou intermoléculaires. Une caspase active est formée par dimérisation de deux grandes et deux petites sous-unités et comprend donc deux sites catalytiques, à l’exception de la caspase 9 dont la forme dimérique ne présente qu’un seul site actif. Les procapases ont une structure primaire très conservée qui comprend un prodomaine amino terminal de taille variable, un domaine central correspondant à la grande sous-unité et un domaine carboxy terminal qui correspond à la petite sous-unité . L’activation des caspases est séquentielle et débute par le clivage auto protéolytique des caspases initiatrices. Les caspases initiatrices possèdent un prodomaine long, domaine CARD (pour CAspase Recruitment Domain) pour les caspases 1, 2, 4 et 9 ou domaine DED (pour Death Effector Domain) pour les caspases 8 et 10. Ces prodomaines longs permettent aux caspases initiatrices d’être recrutées au sein de complexes multiprotéiques qui servent d’inducteurs de proximité (34) au sein desquels elles pourront être activées par dimérisation et clivage autoprotéolytique. Ces complexes multiprotéiques sont l’apoptosome, qui active la procaspase 9, et le DISC (pour death inducing signaling complex) qui active les procaspases 8 et 10.

Les caspases initiatrices ont pour substrats les caspases effectrices (caspases 3, 6, 7 et 14). Ces caspases ont un prodomaine court et sont activées par le clivage qui sépare les sous-unités. Ce clivage est effectué par d’autres caspases (initiatrices ou effectrices) ou par la protéase granzyme B. Les caspases effectrices reconnaissent chacune des motifs tétrapeptidiques spécifiques et vont cliver à leur tour de nombreux substrats, comme des enzymes de modification de l’ADN (PARP, DNA-PKs), des protéines de signalisation (Akt, Raf) et des protéines de structure (lamine A, fodrine, actine), ce qui va entraîner le démantèlement de la cellule (pour revues (90, 364)). L’activation en cascade des caspases permet une amplification du signal apoptotique et leur clivage représente un point de non-retour du processus apoptotique. Toutefois l’activité des caspases est aussi sujette à une régulation par différentes protéines antiapoptotiques.

Les inhibiteurs de caspases 

Les IAP
Les protéines IAP (pour inhibitor of apoptosis proteins) sont une famille d’inhibiteurs qui agissent comme des pseudosubstrats des caspases 3, 7 et 9. Les IAP appartiennent à la famille des protéines à domaine BIR (pour Baculovirus Inhibitory Repeat). Ce sont des homologues de protéines virales qui inhibent la mort déclenchée lors de l’infection virale. On dénombre chez les mammifères 8 protéines qui sont classées selon leur nombre de domaine BIR et selon la présence d’un domaine RING  .

Les IAPs de classe 1, XIAP, cIAP1, cIAP2, ILP-2 et ML-IAP, contiennent de 1 à 3 domaines BIR et un domaine à doigt de zinc (domaine RING) confèrant à cette famille une activité ubiquitine ligase. La présence du domaine RING entraîne la dégradation par le protéasome des caspases qui sont associées aux IAPs (pour revue (489)). cIAP1, cIAP2 possèdent un domaine supplémentaire, le domaine CARD, qui leur permet de s’associer aux caspases à long prodomaine. XIAP, cIAP1 et cIAP2 inhibent les caspase 3, 7 et 9, ILP-2 inhibe la caspase 9 et ML-IAP inhibe les caspases 3 et 9. La seule IAP de classe 2 est NAIP qui possède trois domaines BIR mais pas de domaine RING. NAIP inhibe les caspases 3 et 7. Les IAP de classe 3 sont Survivin et Bruce qui ne possèdent qu’un domaine BIR. Survivin inhibe la caspase 9 (275). Survivin dont l’expression est augmentée pendant la phase G2/M du cycle cellulaire, pourrait aussi réguler p21, l’inhibiteur des Cdks (pour revue TobakT 9,705). Bruce est une IAP membranaire de haut poids moléculaire (540KDa), qui peut inhiber la caspase 9 mais aussi bloquer l’activité proapoptotique de Smac (352).

Smac et Omi les inhibiteurs d’IAP
L’activité des IAPs est régulée par les protéines proapoptotiques Smac/DIABLO (pour Second mitochondria-derived activator of caspases), Omi/HtrA2 (High temperature requirement A) et XAF1. Les protéines de mort Smac/DIABLO et Omi/HtrA2 sont localisées dans la mitochondrie. Au cours du processus apoptotique elles sont relâchées de la mitochondrie, puis se fixent aux domaines BIR des IAP et inhibent leur fonction de survie. L’association des IAPs avec Smac/DIABLO entraîne leur dégradation par le protéasome, alors que leur association avec Omi/HtrA2 entraîne leur clivage protéolytique (pour revue ((252)). XAF1 est une protéine nucléaire qui se lie à XIAP et la séquestre dans le noyau (251).

Table des matières

INTRODUCTION
A INTRODUCTION SUR LA MORT CELLULAIRE
I Les différents types de mort cellulaire
1 L’apoptose
2 La nécrose
3 La nécrose programmée
4 L’autophagie et la paraptose
II Les mécanismes de mort par apoptose
1 Les caspases
2 Les inhibiteurs de caspases
2.1 Les IAP
a) Smac et Omi les inhibiteurs d’IAP
2.2 Les protéines p35 et CrmA
III Les voies d’activation des caspases
1 L’activation des caspases par la voie extrinsèque ou voie des récepteurs de mort
1.1 Les récepteurs de mort
a) Les récepteurs du groupe I
b) Les récepteurs du groupe II
1.2 L’exécution de la voie caspase 8
1.3 L’inhibition des récepteurs de mort
a) Les récepteurs leurres
b) La protéine FLIP
2 La voie mitochondriale ou voie intrinsèque
2.1 Les effets caspase indépendant de la voie mitochondriale
2.2 Les protéines de la famille Bcl-2 et la mitochondrie
a) La perméabilisation de la membrane externe mitochondriale
2.3 L’apoptosome
a) Le contrôle de l’apoptosome
3 L’apoptose et les tumeurs
3.1 Les voies proapoptotiques sont inhibées dans les cellules tumorales
a) p53
3.2 Relations entre les voies de signalisation et l’apoptose
B LES VOIES DE SIGNALISATION DES MAPK
I Les voies de signalisation de JNK et p38
1 La voie JNK
2 La voie p38
II La voie Ras/Raf/MAPK
1 L’activation de Ras par les récepteurs à activité tyrosine kinase
2 La kinase Raf
2.1 L’activation de Raf
a) La fixation de Ras
b) La phosphorylation du domaine CR2
c) La phosphorylation du domaine kinase
d) L’inhibition de Raf
3 Les kinases MEK1 et MEK2
3.1 L’activation des MEK
3.2 Les inhibiteurs pharmacologiques de MEK et leurs limites
4 Les MAPK1/3
4.1 L’activation des MAPK
4.2 Le contrôle de l’activité des MAPK par les phosphatases
4.3 Localisation des MAPK
4.4 La durée d’activation des MAPK
5 Les protéines d’échafaudage de la voie Raf/MAPK
5.1 14-3-3
5.2 MP-1
5.3 Sur-8
5.4 RKIP
5.5 KSR
5.6 β-arrestine
6 Les fonctions de la voie des MAPK
6.1 MAPK et prolifération cellulaire
6.2 La différenciation cellulaire
6.3 La migration cellulaire
6.4 Fonctions neuronales
C CONCLUSION

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