Déterminants des comportements de santé chez les usagers de la cigarette électronique se sevrant du tabac

Déterminants des comportements de santé chez les usagers de la cigarette électronique se sevrant du tabac

La CE et son usage

Le produit

La cigarette électronique (CE) est un système de délivrance de la nicotine, apparu au début des années 2000. Elle a connu un essor marqué dans les années 2010 avec l’accroissement des ventes, des commerces spécialisés, ainsi que les associations de consommateurs et de professionnels (1). L’e-cigarette est un dispositif comportant une batterie et une cartouche dans lequel on introduit un liquide (appelé e-liquide) composé de propylène glycol (PG), de glycérine végétale (GV), d’arôme et souvent de nicotine. Après inhalation, un atomiseur permet la transformation du liquide en aérosol. Il existe plusieurs types de système à ce jour offrant de multiples possibilités de personnalisation aux usagers. En Europe, la directive européenne 2014/40/UE réglemente le commerce de la CE et la considère comme un produit connexe au tabac. La cigarette électronique doit ainsi répondre à un ensemble de critères de sécurité, de qualité et d‘information. Le taux de nicotine est limité à 20mg/ml (2). En France, il n’y pas d’AMM (Autorisation de Mise sur le Marché) pour la CE. La vente ou l’offre aux mineurs est interdite, tout comme la publicité hors des lieux de commerces spécifiques. L’utilisation est depuis 2016, interdite dans certains lieux à usage collectif, dans les moyens de transports collectifs fermés et lieux de travail fermés et couverts à usage collectif. Certains lieux, interdits pour l’usage de la cigarette, sont autorisés (hôtels, restaurant, etc.…) mais un règlement intérieur peut en interdire l’usage. Des amendes peuvent être appliquées à l’égard des contrevenants si non-respect de l’interdiction d’usage ou de l’obligation de signalétique apparente dans les lieux dédiés (3,4). 20 2. Les usagers Les personnes ayant essayé au moins une fois la CE sont appelées « expérimentateurs ». Les usagers actuels de la CE, occasionnels ou quotidiens, sont appelés « vapoteurs ». Les « vapofumeurs » ou usagers dualistes utilisent à la fois la CE et le tabac. Les « fumeurs » utilisent exclusivement le tabac. En 2019 en France chez les 18-75 ans, on comptabilisait 34.4% d’expérimentateurs, 5.7% de vapoteurs dont 4.4% quotidiens, cette dernière proportion ayant augmentée comparativement à 2014 (5). La CE attire principalement les fumeurs. La grande majorité des fumeurs l’a d’ailleurs déjà essayée. La motivation principale rapportée était la diminution ou l’arrêt du tabac (6). Pour certaines personnes, la CE a été perçue comme un outil efficace dans leur tentative d’arrêt du tabac. Les données précises du marché et de la consommation de la CE en Europe étant difficile d’accès, une estimation de la prévalence de consommation a été faite grâce à plusieurs sources (7). En 2017 en Europe, on estimait à 2% la prévalence de vapoteurs dont 1% d’usagers quotidiens. Entre 2013 et 2017, le nombre d’usagers estimé avait doublé, passant de 6 à 12 millions d’utilisateurs (figure 1). L’usage était majoritairement quotidien avec près de 10 millions estimés. En 2017, les principaux pays consommateurs étaient le Royaume-Uni et la France avec des prévalences estimées entre 4 et 5%. Comparativement, les autres pays avaient une prévalence de l’ordre de 1 à 2%. L’impact économique était important avec un marché estimé à 2,54 milliards d’euros en 2017, dont 776 millions et 544 millions pour respectivement le Royaume-Uni et la France (figure 2). 21 Figure 1 : Tendances du marché des cigarettes électroniques dans l’UE Figure 2 : Valeur marchande estimée des cigarettes électroniques dans les États membres (en millions d’euros) 

La controverse sociotechnique

L’efficacité de la CE dans l’aide à l’arrêt ou la diminution du tabac n’est pas établie. L’usage quotidien et non dualiste, permettrait à moyen terme de favoriser le nombre de tentatives d’arrêt et de diminution de tabac (6). Les risques à long terme de la CE sur la santé sont inconnus et sont actuellement très inférieurs à ceux du tabac fumé. La CE fait l’objet d’une controverse sociotechnique définie par des connaissances scientifiques instables et des incertitudes sociales, morales et politiques. Les logiques des différents acteurs sur la CE divergent (8). Le grand public s’approprie la CE et des associations d’utilisateurs existent. Les instances politiques et sanitaires sont prudentes et adoptent des positions non consensuelles. La situation est également hétérogène sur le continent européen.

Le tabac et le sevrage tabagique

La consommation de tabac

En France, en 2019, 30.4 % des 18-75 ans étaient fumeurs dont 24 % quotidiennement (5). Les fumeurs étaient majoritairement des hommes (53.8%), de moins de 55 ans (9). En Europe, en 2018, on estimait à 186 millions le nombre de fumeurs quotidiens en Europe et 1.337 milliard dans le monde. Le tabac était responsable de plus de 8 millions de morts par an (10,11). En 2015, le tabac était responsable de 75 000 décès en France dont 61,7% de cancers et 22,1% de maladies cardiovasculaires (MCV). La même année, en France, on estimait à plus de 250 000 les séjours pour une maladie cardiovasculaire attribuables au tabagisme. Ce nombre représentait 21% de tous les séjours hospitaliers pour une pathologie cardiovasculaire enregistrés la même année. La même année, les décès pour MCV attribuables au tabac représentaient 12% des décès par MCV. Si le nombre de fumeurs actifs était de 10% plus faible ou si la proportion de fumeurs était de 20% dans la population, ce sont respectivement 6 000 et 26 000 séjours hospitaliers pour une maladie cardiovasculaire qui auraient pu être évités annuellement (12). 

Les mesures de santé publique

Depuis plusieurs années, la lutte anti-tabac s’est renforcée sur le plan de la santé publique. Dans le cadre du plan cancer 2014-2019 et du PNRT (Programme National de Réduction du Tabagisme, de 2014 à 2019), des mesures suivantes ont vu le jour (13) :  La prescription pluridisciplinaire des traitements de substitution nicotinique (TSN) ;  La majoration du forfait de remboursement des TSN ;  L’obligation du paquet neutre, les opérations « Mois sans tabac ». Le PNLT (Plan National de Lutte contre le Tabac, de 2018 à 2022) a réaffirmé l’objectif d’une première génération d’adultes non-fumeurs à l’horizon 2032 (14). Les mesures phares mises en place depuis 2018 sont les suivantes :  L’augmentation des taxes sur le tabac ;  Le paquet à 10 € en 2020 ;  Le remplacement du forfait annuel de 150 € d’aide au sevrage tabagique par le remboursement à 65% par l’Assurance maladie des TSN sur ordonnance, comme n’importe quel médicament. Cela s’est traduit par l’augmentation des traitements d’aide à l’arrêt du tabac en 2019 en France (figure 3) (4,3 millions d’équivalent « patients traités », soit un tiers de plus qu’en 2018) et le recul des ventes de tabac dans le réseau buraliste français la même année (près de 6,6 % à jours constants de livraisons comparé à 2018) (figure 4) (1). Cette diminution pouvait s’expliquer par les augmentations successives des prix du tabac. Elle était toutefois à nuancer du fait de l’augmentation de la vente d’autres produits du tabac ainsi que de la diminution des ventes dans les départements frontaliers. Ce dernier point pouvait traduire une augmentation des ventes de tabac dans les pays limitrophes. 24 Sous l’impulsion de ces programmes de santé publique, la baisse de prévalence du tabagisme quotidien a été observé entre 2014 et 2019 (tableau 1) encourageant la poursuite de la lutte anti-tabac.

Table des matières

Première partie : préambule
I. La CE et son usage
1. Le produit
2. Les usagers
3. La controverse sociotechnique
II. Le tabac et le sevrage tabagique
1. La consommation de tabac
2. Les mesures de santé publique
3. Le rôle des professionnels de santé et le sevrage tabagique
III. Les comportements en matière de santé
1. Définition des comportements en matière de santé
2. Les enjeux de santé publique
IV. Les comportements de santé, les fumeurs et vapoteurs : état des lieux et questionnement
1. Fumeurs et sevrage tabagique
2. Vapoteurs et sevrage tabagique
V. La recherche qualitative
VI. Les objectifs
Références bibliographiques
Deuxième partie : article
I. Introduction
II. Méthode
1. Type d’étude
2. Population étudiée
3. Recueil des données
4. Analyse des données
5. Ethique
6. Thématiques abordées
III. Résultats
1. Population de l’étude
2. Une continuité dans la dépendance
1. Conscience de la dépendance au tabac
2. Facteur déclenchant le sevrage
3. Usage de la CE : de l’expérimentation à la chronicisation
3. Une importance accordée à la santé
4. Une continuité dans les comportements de santé
5. Attitudes : les actives et les passives
6. Un comportement de santé individualiste
IV. Discussion
1. Forces et faiblesses de l’étude
2. Rappel et discussion des principaux résultats
1. Continuité de la dépendance
2. Attitudes
3. Un comportement de santé individualiste
V. Perspectives
VI. Ouvertures
Références bibliographiques
Glossaire
Annexes
1. Annexe 1 : caractéristiques échantillon
2. Annexe 2 : lettre d’information aux participants
3. Annexe 3 : consentement
4. Annexe 4 : questionnaire sociodémographique

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