Diagnostic de l’état d’exploitation des principaux stocks démersaux Côtiers

Cadre physique et nature des fonds marins

Le plateau continental, globalement compris entre le rivage et l’isobathe 200 m, est peu accidenté et couvre une superficie de 23 600 km2 inégalement répartie suivant la profondeur : 15 % (3 540 Km2) entre 0 – 10 m, 49 % (11 564 Km2) entre 10-50 m et 36 % (8 496 Km2) entre 50-200 m (Domain, 1978). En fonction des composantes sédimentologiques, la ZEE est subdivisée en trois (03) zones : nord, centre et sud (Domain, 1977).
La zone nord : La zone nord, encore appelée grande côte ou côte nord, s’étend de Saint Louis (16°04N) au nord à la pointe des Almadies (14°36’N) à Dakar. Elle est caractérisée par une suite de dunes et de cordons littoraux dont le plus important est la langue de Barbarie. Cette dernière oriente le cours du fleuve Sénégal sur une longueur de 20 km environ dans une direction Sud Sud-Ouest (SSO) au niveau de son embouchure (Fall, 2009). Le plateau continental est traversé sur toute sa largeur par un canyon sous-marin, la fosse de Kayar, située à la latitude 15°00’N en face du village du même nom (Fall, 2009). Les fonds meubles (sable, vase, mélange des deux) y occupent une part plus importante que les fonds rocheux qui sont situés à l’intérieur des 6 milles (Fall, 2009). Une importante vasière (> 75% de lutites), située de part et d’autre de l’embouchure du fleuve Sénégal (15°15 N 16°30 N), existe entre 20 et 80 m de profondeur . Ce sont des fonds à crevettes côtières telles que Farfantepenaeus notialis dont les juvéniles proviennent dudit fleuve.
L’isobathe des 200 m se rétrécit du nord au sud (27 milles au large de Saint-Louis et 2 milles au niveau de la pointe des Almadies, à Dakar) (Fall, 2009).
Dans cette partie du littoral sénégalais se trouvent les centres de débarquement de Kayar et de Saint Louis qui font partie des plus grands centres de débarquement du pays.
La zone centre : La zone centre va de Dakar (14°36 N) à la frontière maritime nord de la Gambie (13°35). Elle est appelée « Petite côte » – comprise entre Dakar et Joal et l’estuaire du Sine-Saloum. Les principaux centres de pêche se trouvant dans cette zone sont Mbour et Joal. Elle présente 2 falaises sous-marines. Le sommet de la première est à des profondeurs comprises entre 35 et 45 m. Cette falaise se manifeste par une rupture de pente qui peut, par endroits, atteindre une quinzaine de mètres et s’étend, en s’estompant, de la pointe des lmadie s jusqu’à la hauteur de Mbour. Elle réapparaît, peu marquée, à la latitude de Joal. La seconde falaise, moins longue, limitée au secteur sud-ouest de la presqu’île du Cap Vert, a son bord supérieur vers les profondeurs de 70 m et peut également présenter une dénivellation de 10 à 15 m (Domain, 1977). A ce biotope accidenté s’ajoutent d’autres fonds sableux présents dans la zone côtière jusqu’aux fonds de 40 m. Différentes frayères, zones de grossissement ou de reproduction des poissons y existent. Les ressources halieutiques de la zone centre sont abondantes et diversifiées et les mises à terre font d’elle la première zone de production du pays (40,8% des débarquements de la pêche artisanale en 2012 (DPM, 2012).
La zone sud : La zone sud, comprise entre les limites 13°05 N et 12°20 N, correspond à la région naturelle de la Casamance. Le plateau continental y atteint sa largeur maximale, soit près de 54 miles. Les fonds rocheux sont situés au large, essentiellement sur le rebord du plateau. Cette zone héberge la plus importante vasière du pays, s’étendant du sud de l’embouchure du fleuve Casamance aux îles Bissagos en Guinée Bissau (11°35 N) entre 25 et 50 m de profondeur.

Productivité et écosystèmes de mangroves

Les processus physiques, chimiques et biologiques déterminent la productivité du milieu océanique. C’est pourquoi, les fortes variabilités saisonnières et interannuelles auxquelles ils peuvent être soumis influencent la biodiversité et l’abondance des ressources marines (Cury et Roy, 1991 ; Demarcq et Samb, 1991; Samba et Laloë, 1991; Roy, 1992).
Le mécanisme principal d’enrichissement du plateau continental est l’upwelling côtier qui, par l’apport en nutriments qu’il provoque, va induire un développement de l’ensemble de la chaîne alimentaire marine (Medina-Gaertner, 1985; Gningue et al., 1990; Diouf, 1991). Ce mécanisme consiste en un déplacement des eaux de surface par des vents de secteur Nord (alizés) et une remontée d’eaux froides riches en éléments nutritifs.
Secondairement, les mangroves contribuent aussi à l’enrichissement et à la productivité biologique des ressources démersales côtières. En effet, au Sénégal, les mangroves sont situées aux bords du fleuve Casamance, à l’estuaire du Sine Saloum et à l’embouchure du Fleuve Sénégal et couvrent une superficie de 200 000 hectares (UICN, 2007). Les milieux estuarien et lagunaire offrent aux juvéniles et aux larves de beaucoup de poissons une nourriture abondante, des biotopes d’eaux calmes et une protection contre la prédation du fait de la turbidité et de la présence d’abris (racines de palétuviers, herbier, zones peu profondes) (Warburton, 1978). Ces conditions favorables à la survie des larves et juvéniles de poissons, de crustacés et de mollusques, combinées aux températures relativement élevées qu’on rencontre dans les estuaires, favorisent une croissance rapide des espèces (Loneragan et Potter, 1990). Cette croissance rapide des espèces, associée aux conditions favorables à la reproduction (température et salinité), occasionne l’abondance et la biodiversité des ressources dans ces zones côtières.

Bioécologie des principales espèces demersales côtières

Les espèces démersales côtières vivent à proximité des fonds (mérous, pagre, pageot, capitaine, rouget, etc.) ou à leur contact (soles, volutes, raies, etc.). Suivant leur affinité au substrat, elles vivent sur les fonds rocheux, sableux, vaseux, vaso-sableux ou sablo-vaseux (Domain, 1980). Suivant la saison, certaines espèces effectuent des déplacements vers la côte ou le large, selon les conditions hydrologiques locales et le cycle biologique (Franqueville, 1983). En effet, en fonction des variations des paramètres de température, de salinité, et de vitesse du courant, les espèces migrent vers les zones adaptées pour satisfaire leurs besoins de reproduction, de croissance et d’alimentation et d’habitation ou logis. C’est ce qui explique que pour beaucoup d’espèces démersales côtières, la distribution bathymétrique varie selon l’âge (Chabanne, 1987).
La plupart des espèces démersales côtières se reproduisent en saison chaude (Caverivière, 2002). Il s’agit entre autres des mérous, du pageot, du pagre à points bleus et de la crevette côtière. Par exemple: le mérou blanc est une espèce hermaphrodite protérogynique1, sa maturité sexuelle est atteinte à 40 cm. Sa reproduction est continue avec des pics de mai à juin et secondairement de juillet à septembre (Cury & Worms, 1982);
le pageot, hermaphrodite protérogynique, présente deux pics de reproduction en juin et en octobre (Franqueville, 1983);
la crevette côtière a un cycle biologique comprenant 2 phases: une phase marine et une phase estuarienne. Elle se reproduit en mer et les variations d’abondance des post-larves à l’entrée des lagunes constituent un bon indice de la reproduction des adultes en mer. Au Sénégal, il existe deux stocks de crevette: un stock au nord (de Fass-Boye à Saint Louis) et un autre au sud (vers la Casamance) (Thiaw, 2010).
Pour d’autres espèces, la ponte est étalée toute l’année avec des pics en saison chaude, c’est le cas du poulpe (Caverivière, 2002), du pagre, du petit capitaine et du rouget (Giret, 1974). Certaines espèces présentent une croissance rapide, une arrivée à maturité sexuelle précoce et une durée de vie courte (crevette côtière et poulpe) (Thiaw, 2010). Par contre, d’autres espèces affichent une croissance lente, une maturité sexuelle tardive et une durée de vie longue (mérou blanc, pagre à points bleus, etc.) (Cury et Worms, 1982; Laurans et al., 2005).
Les juvéniles d’espèces démersales côtières s’alimentent, en général, de phytoplancton et de zooplanction (Domanevskaya et Patokina, 1984). Tandis que les adultes se nourrissent de poissons de mollusques et de crustacés.

Résultats d’évaluation des stocks demersaux côtiers

Au Sénégal, l’état d’exploitation des principaux stocks est analysé en recourant aux meilleures données disponibles (Chavance et al., 2004).
Laurans (2005) et Gascuel et al. (2004) ont évalué le niveau d’exploitation des cinq principales espèces démersales exploitées (Epinephelus aeneus, Pagellus bellottii, Sparus caeruleostictus, Galeoides decadactylus et Pseudupeneus prayensis). Un indice synthétique d’abondance est fourni pour ces principales espèces de 1974 à 2000 par Laurans et al. (2004).
Ces auteurs ont constaté que ces espèces sont pleinement exploitées voire surexploitées. Aussi, ils montrent que, depuis plus d’une décennie, les biomasses des ressources halieutiques ont diminué de façon drastique, de 50 à 90% selon les espèces. Certaines, très sollicitées à l’instar de Epinephelus aeneus et de Pagellus bellottii, sont proches du seuil de précaution habituellement considéré comme limite inférieure de la biomasse à ne pas dépasser.
S’agissant du poulpe, la dynamique du stock est très variable d’une année à une autre, entrainant ainsi une forte variabilité interannuelle des captures (Thiaw, 2010). Le recrutement du poulpe est très variable et sans tendance nette. Les modèles de rendement par recrue indiquent que le stock de poulpe est presque toujours proche de la situation de pleine exploitation (Thiaw, 2010). Pour la crevette côtière, il existe deux stocks de crevettes: un stock nord et un stock sud, plus important. Pour le stock sud, le recrutement varie d’une année à une autre avec une tendance nette à la baisse. En ce qui concerne l’état d’exploitation des stocks de crevettes du nord et du sud, les modèles mettent en évidence une situation de surexploitation (Thiaw, 2010).

Table des matières

Introduction générale
Chapitre I: Etat des connaissances sur l’environnement marin, la bioécologie et les pêcheries des espèces démersales côtières
Introduction 
1.1. Cadre physique et environnemental du plateau continental
1.1.1. Cadre physique et nature des fonds marins
1.1.2. Hydroclimat de la zone d’étude
1.1.3. Productivité et écosystèmes de mangroves
1.2. Ressources démersales côtières 
1.2.1. Bioécologie des principales espèces demersales côtières
1.2.2. Pêcheries démersales côtières au Sénégal
1.2.3. Résultats d’évaluation des stocks demersaux côtiers
Conclusion
Chapitre II: Diagnostic de l’état d’exploitation des principaux stocks démersaux Côtiers
Introduction
2.1. Données et méthodes 
2.1.1. Données
2.1.1.1. Statistiques de pêche du CRODT
2.1.1.1.1. Données de pêche artisanale
2.1.1.1.2. Données de pêche industrielle
2.1.1.1.3. Données de Campagnes scientifiques
2.1.1.2. Statistiques de pêche de la DPM
2.1.1.2.1. Données de la pêche artisanale
2.1.1.2.2. Données de la pêche industrielle
2.1.1.3. Données de la littérature scientifique
2.1.1.3.1. Données d’indices d’abondance
2.1.1.3.2. Données environnementales
2.1.2. Méthodes
2.1.2.1. Estimation des indices d’abondance des principales espèces
2.1.2.1.1. Principe général
2.1.2.1.2. Estimation à partir des CPUE commerciales
2.1.2.2. Modèles globaux à l’équilibre
2.1.2.2.1. Principe général
2.1.2.2.2. Estimation des paramètres
2.2. Résultats
2.2.1. Evolution des captures
2.2.2. Dynamique des stocks
2.2.3. Dynamique des pêcheries
2.2.4. Evaluation des stocks
2.2.4.1. Stock de poulpe
2.2.4.2. Stocks de crevettes côtières
2.2.4.3. Autres stocks démersaux côtiers
2.3. Discussions et Conclusion 
Conclusion générale
BIBLIOGRAPHIE
Annexes

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