Etude dendrochronologique de Acacia Sénégal

Définition et domaine d’étude de la dendrochronologie

Bien qu’au XVIe siècle, Leonard de Vinci s’intéressât déjà aux cernes, c’est le physicien et astronome américain Andrew Ellicott Douglass qui, au début du XIXe siècle, posa les bases de la dendrochronologie moderne (du grec: dendron = arbre ; Kronos = le temps ; logos =l’étude). La dendrochronologie est une science qui repose sur la mesure des largeurs des cernes annuels de croissance et sur leur datation précise (Lebourgeois et Merian, 2012).
Elle est de plus en plus utilisée dans la recherche forestière pour évaluer l’impact du climat sur la croissance des arbres. A l’heure actuelle, sous le terme dendrochronologie sont regroupées toutes les disciplines qui utilisent directement ou indirectement l’information « date » contenue dans une série chronologique de cernes (Lebourgeois et Merian, 2012).
D’abord principalement utilisé dans des disciplines telles que l’archéologie ou la climatologie pour la datation précise d’arbres « fossiles » ou la reconstruction du climat passé, cet outil est de plus en plus utilisé pour étudier l’environnement et détecter ses changements. Ainsi, elle est étudiée dans d’autres domaines scientifiques variés :  analyser l’influence de l’environnement sur la croissance et la dynamique des forêts (Latte,2012). La dendroécologie est une discipline récente de la dendrochronologie (environ 40 ans) et en plein essor dans le contexte actuel d’instabilité environnementale. A partir de la dendroécologie, plusieurs caractéristiques peuvent être mesurées sur les cernes. Lorsqu’ils apportent des informations climatiques et fonctionnelles, on les désigne sous le terme de « proxy ». Ces proxy peuvent être, entre autres : la largeur de cerne, la composition isotopique en 13C (13C), en 18O (18O) ou en 15N (15N), la densité ou encore la largeur des vaisseaux (Lebourgeois et Merian,2012).

La dendrochronologie en milieu tropical

La dendrochronologie en région tropicale est restée pendant très longtemps en retrait, car des auteurs comme Lang et Chevalier (1983), Knight (1983), Lieberman et al.(1985) et Whitmore (1998) ont affirmé que la plupart des arbres tropicaux ne formaient pas d’anneaux de bois annuels. Cette affirmation a été justifiée par Détienne(1989) qui stipule que : « Les faibles variations saisonnières du climat tropical ou l’absence de saisonnalité ne permettant pas, en effet, d’entrer en dormance ; pas d’arrêt de croissance et donc pas de cernes annuels ». Cet auteur précise que l’absence de saisonnalité se manifeste par des fluctuations de température journalière qui dépassent la gamme des variations annuelles et par une absence de réelles saisons froides dans les Tropiques.
Contrairement à cette hypothèse, des résultats prometteurs ont déjà été obtenus sur la dendrochronologie et l’existence d’anneaux de croissance sur les arbres en milieu tropical. Dans son article sur les cernes dans les bois tropicaux, (Mariaux, 1967) précise que les espèces comme Danielle oliveri, Acacia albida, Cassia siamea, Ceibapendandra, Lanneaacida, Antraris africana ect présentent bel et bien des cernes et que ces cernes pouvaient permettre de déterminer l’âge des arbres en Afrique de l’Ouest.
Par ailleurs, l’analyse des cernes a donné d’intéressants résultats en milieu tropical notamment avec les travaux de Jacoby (1989) en Inde. En effet, ila eu des résultats dendrochronologiques sur le Tek où il a montré que la taille des cernes était liée de manière significative à la pluviométrie de la saison.
En plus, la formation de deux anneaux par an a été signalée dans des zones à deux saisons sèches (Jacoby,1989 ; Wayant et Reid, 1992 ;Gourlay, 1995 ).Et celle de moins d’anneaux dans des conditions humides (Eshete et Ståhl, 1999 ).
Fichtler (2004), dans son article, «Signaux climatiques en anneaux de Burkea africana et Angolensis pterocarpus des forêts semi arides de Namibie » affirme que les cernes de Burkea. africana sont caractérisés par une bande de parenchymes située à la limite du cerne souvent combinée à une bande de tissus contenant quelques pores.

Le changement climatique

Dans la Convention-cadre des Nations Unies (CCNU) sur le changement climatique, le terme désigne uniquement les changements dus aux activités humaines. Un changement climatique correspond à une modification durable (de la décennie au million d’années) des paramètres du climat de la terre. Cette convention utilise le terme « variabilité climatique » pour désigner les changements climatiques d’origine naturelle.
Depuis le début du XXe siècle, les températures globales ont augmenté de l’ordre de 0,9°C et le réchauffement s’est accéléré depuis 1980. Parmi les dix années les plus chaudes depuis 131 ans, 9 font partie de la dernière décennie 2000-2010 (NOAA, 2011). Une des causes de ce réchauffement climatique est l’effet de serre additionnel dû à l’homme, notamment via l’accroissement du CO2 atmosphérique (de 336 à 385 ppm de 1980 à 2010) (NOAA, 2011). Le CO2 représentait 77 % des émissions anthropiques de gaz à effet de serre en 2004 (IPCC, 2007). Le changement climatique est une réalité depuis les années 1970 et ses effets sont visibles sur les ressources naturelles dans les pays en développement, en général, et les pays sahéliens, en particulier. A ce titre, le Sénégal subit les impacts du changement climatique qui limitent son développement. En effet, l’économie sénégalaise est essentiellement basée sur le secteur primaire (agriculture et élevage) tributaire d’une pluviométrie de plus en plus capricieuse. Les effets du changement climatique se traduisent par le réchauffement climatique, la faiblesse de la pluviométrie, des sécheresses, mais aussi des inondations par moment.

Le Sahel : une zone spécifique face aux effets du changement climatique

Le réchauffement de la terre se manifeste partout. Mais est-il encore plus flagrant dans les zones désertiques ? (source : ww.ird.fr ; 04/02/2017 ; 10 :05). La zone du Sahel, qui traverse l’Afrique d’Est en Ouest au Sud du Sahara, est ainsi l’une des régions du globe les plus vulnérables face au changement climatique actuel où se produit une alternance marquée entre une courte saison humide estivale et une longue saison sèche hivernale de 8 à 10 mois (CILSS, 2001). Les pays du Sahel partagent une même réalité climatique caractérisée par une seule saison des pluies de juillet à septembre. La température moyenne annuelle y avoisine les 18 °C, les pluies y sont très irrégulières tout au long de l’année .
La région est particulièrement vulnérable au changement climatique en raison de sa position géographique très proche du désert du Sahara, de la grande dépendance de ses populations et de l’économie de ses états à l’agriculture pluviale (CGIAR, 2006). Les modèles climatiques actuels sont plus ou moins satisfaisants pour prévoir les évolutions de températures et ils prédisent des hausses de température pour le continent africain supérieures à 1,5°C de la moyenne mondiale (GIEC, 2007). Il est prévu des hausses de températures moyennes entre 1980/1999 et 2080/2099 de 3° à 4°C sur l’ensemble du continent, avec une moyenne supérieure à celle prévue au Sahel (CSAO/OCDE, 2008). Cette zone géographique est donc caractérisée par une forte variabilité et une grande incertitude climatiques. Les conséquences du changement climatique sur les arbres peuvent se manifester de différentes manières (Godart, 2010):
Un allongement de la période de croissance : le réchauffement climatique avance la date de débourrement des bourgeons et retarde la chute des feuilles. L’augmentation de la concentration atmosphérique en CO2 et la présence d’azote dans les pluies sont d’autres facteurs explicatifs, encore à l’étude.
Des dépérissements : il semble hautement probable que des dépérissements touchant les peuplements soient les signes annonciateurs des impacts du changement climatique sur certaines espèces forestières.
Croissance des arbres stimulée : l’augmentation de la teneur de l’atmosphère en CO2 accélère la croissance des arbres. Grâce à des études expérimentales menées dans des serres, des équipes de chercheurs ont chiffré cette augmentation à 40 % pour un doublement de la teneur en CO2. Selon les espèces, les conséquences de cette augmentation ne sont pas forcément positives pour plusieurs raisons:
accroissement de la sensibilité des arbres aux contraintes du milieu (déséquilibres nutritionnels) ; dégradation des propriétés technologiques du bois (propriétés mécaniques, composition chimique). Réduction de la sensibilité des arbres à la sécheresse, variable suivant les espèces: l’augmentation du CO2 atmosphérique réduit l’ouverture des stomates, orifices situés à la surface des feuilles par lesquels la plante absorbe le CO2 et laisse échapper de la vapeur d’eau. Les stomates des arbres réagissent différemment à l’augmentation du CO2 en fonction de l’espèce considérée.

Table des matières

Introduction
I. Revue bibliographique 
I.1 Définition et domaine d’étude de la dendrochronologie
I.2 La dendrochronologie en milieu tropical
I.3 La dendrochronologie en zone sahélienne
I.4 Le changement climatique
I.5 Le Sahel : une zone spécifique face aux effets du changement climatique
II. Matériel et méthode
II.1 Matériel
II.1.1 Présentation de la zone d’étude
II.1.1.1 Situation géographique
II.1.1.2 Sol et végétation du Ferlo
II.1.1.3 Le climat
II.1.1.4 Activités socioéconomiques
II.1.2.1 Classification et nomenclature
II.1.2.2 Description générale
II.1.2.3 Ecologie
II.1.2.4 Intérêts et usages
II.1.3 Matériel d’étude
II.2.1 Mesures dendrométriques
II.2.2 Echantillonnage et préparation des rondelles
II.2.3 Identification et comptage des cernes
II.2.4 Datation des cernes
II.2.5 Relation cernes-facteurs climatiques
III. Résultats
III.1 Analyse dendrométrique
III.2 Présentation de la structure morpho-anatomique des cernes de A. Sénégal
III.3 Datation des cernes et Détermination de l’âge des arbres
III.4 Chronologie moyenne de référence
III.5 La matrice de corrélation
III.6 Relation cernes-facteurs climatiques
III.6.1 Variation de la largeur moyenne des cernes en fonction du temps
III.6.2 Relation entre la largeur des cernes et la température (minimale et maximale)
III.6.3 Relation cernes-pluviométrie
IV. Discussion
Conclusion 
Perspectives 
Références bibliographiques 
Annexes 

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