Étude des propriétés physicochimiques de verres borosilicatés et de borosilicates de lanthane

Étude des propriétés physicochimiques de verres
borosilicatés et de borosilicates de lanthane

Vitrification des déchets nucléaires de haute activité 

Propriétés et formulation des verres de confinement

L’objectif du confinement des déchets HA étant d’insérer les radionucléides au sein même du réseau du matériau « confinant », ce dernier doit avoir une grande flexibilité chimique. Les matériaux vitreux offrent cette importante propriété contrairement à des structures cristallines ou l’inclusion d’éléments chimiques est plus complexe et peut grandement détériorer leurs propriétés physico-chimiques et mécaniques. Ce fut donc une des premières raisons menant au choix de l’utilisation des verres pour le confinement des déchets de haute activité. La formulation de ces verres nucléaires a ensuite été déterminée et résulte d’un compromis entre trois objectifs : • La flexibilité chimique : cette propriété importante pour la bonne insertion des radioéléments au sein de la matrice vitreuse fixe le taux de charge dans le colis (quantité de déchets radioactifs inclus dans le verre). L’élaboration à haute température favorise l’obtention d’un liquide homogène et augmente la réactivité chimique entre les déchets et – 8 – Gestion des déchets nucléaires les adjuvants de vitrification. Cette réactivité chimique entre les constituants est essentielle pour éviter toute forme de séparation de phase dans le liquide qui pourrait mettre en péril l’homogénéité du colis de verre. • La viscosité et la conductivité électrique du liquide : la viscosité du verre en fusion est une propriété importante quant à la faisabilité d’un verre dans un four. En effet, une viscosité trop basse aura tendance à augmenter la vitesse de corrosion des matériaux constituant le four et favorisera la volatilisation et la sédimentation de certains éléments. À l’inverse, une viscosité trop importante peut diminuer la vitesse de solubilisation des oxydes du déchet et va également augmenter le temps de coulée. À la température d’élaboration des verres nucléaires, la viscosité recherchée est comprise entre 2 et 15 Pa.s. La conductivité électrique va prendre son importance uniquement dans le cas des fours céramiques chauffés par électrodes et des procédés dits de creuset froid chauffés par induction directe. Pour ces technologies, le chauffage est obtenu par effet Joule en faisant circuler le courant dans la masse de la fonte verrière ce qui nécessite une bonne maitrise de la conductivité électrique. Cette dernière est généralement comprise entre 0,1 et 1 S/cm à température d’élaboration. • Le comportement à long terme : la durée de vie de certains éléments radioactifs étant très longue (jusqu’à plusieurs millions d’années), une des fonctions principales du verre de confinement est d’être stable chimiquement, physiquement et thermiquement sur ces longues durées. Pour cela, le verre devra conserver son inertie chimique ainsi que sa résistance à l’eau qui sera un agent dégradant et qui favorisera la dispersion des radionucléides. Enfin il devra également résister aux effets d’auto-irradiation. Pour l’insertion des produits de fission dans un verre, il est nécessaire d’introduire des oxydes qui vont former la structure vitreuse (formateurs de réseau) tels que SiO2 et Al2O3 . Un autre formateur de réseau vitreux a été ajouté à la composition, il s’agit de B2O3 qui va augmenter la solubilité de certains éléments tels que les terres rares. Pour augmenter la flexibilité chimique, des oxydes modificateurs de réseau, tels que les oxydes d’alcalins et d’alcalino-terreux viennent s’ajouter à la composition du verre. Enfin, d’autres oxydes complètent cette dernière pour optimiser les propriétés du verre. Le tableau 1.1 référence les différents oxydes entrant dans la composition du verre R7T7. Il est à noter que la fraction massique autorisée de PF et d’actinides introduits dans la matrice vitreuse ne dépasse pas 18,5%.

Procédés de vitrification

 La vitrification des déchets nucléaires consiste à mélanger une solution de produits de fission et d’actinides mineurs calcinée à une fritte de verre. Elle peut être décrite en plusieurs étapes : • Déshydratation des solutions de produits de fission et d’actinides mineurs. • Calcination des résidus de l’évaporation qui transforme la plupart des éléments en oxydes. Cette opération est réalisée à des températures allant de 100 ◦C à 400 ◦C. • Fusion et vitrification du calcinât et de la matière première (fritte de verre). Cette étape nécessite des températures comprises entre 1050 ◦C et 1300 ◦C selon la composition du verre et le procédé choisi. • Coulée du verre liquide au sein du conteneur métallique (figure 1.3 droite). La figure 1.3 présente les différents composants intervenant dans la vitrification des déchets nucléaires ainsi que les étapes de ce processus. En France, deux technologies sont utilisées pour l’étape de fusion. La première est un creuset métallique chauffé par induction du pot de fusion (aussi appelé creuset chaud) alors que la seconde consiste à chauffer le verre par induction directe (creuset froid). 

Creuset métallique

Le premier procédé de fusion est effectué avec un creuset métallique dont le chauffage par induction est assuré par un four comprenant plusieurs inducteurs indépendants (figure 1.4). L’homogénéisation du bain de verre est réalisé par bullage et par agitation mécanique. De plus, le pot de fusion est de forme ovoïde pour favoriser l’homogénéité thermique.Malgré ses propriétés très intéressantes, ce procédé de vitrification possède quelques limitations. En effet, les pots métalliques utilisés pour la fusion de la matrice vitreuse ont une durée de vie limitée (environ 5 000 heures en fonctionnement), ce qui nécessite de les changer régulièrement et de ce fait pose un nouveau problème : leur démantèlement et le coût de leur renouvellement. Du fait de leur contact prolongé avec les radioéléments, ces fours en fin de vie constituent des déchets technologiques à retraiter. La capacité de production du procédé en creuset chaud constitue également une limite puisqu’environ 25 kg de verre peuvent être coulés chaque heure, ce qui nécessite de faire fonctionner plusieurs fours en parallèle pour une utilisation à l’échelle industrielle. Une autre limitation se situe au niveau de la composition des verres. Leur température de fusion ne doit pas dépasser 1 150 ◦C pour ne pas détériorer le four, ce qui limite les compositions possibles. D’autre part, l’augmentation de la teneur en éléments fissiles des combustibles des centrales nucléaires et leur durée d’utilisation plus importante en réacteur (augmentation du taux de combustion) conduit à augmenter les quantités de déchets radioactifs, que ce soit les actinides mineurs ou les produits de fission, et en particulier les terres rares (TR). Pour ne pas avoir à traiter des volumes trop importants de verres de confinement, une possibilité est d’augmenter leur teneur en déchets radioactifs. Mais plus la quantité de terres rares dans les colis de verre est importante, et plus le verre sera réfractaire, ce qui nécessite des températures d’élaboration de plus en plus élevées. Creuset froid Pour pallier à toutes ces limitations, un nouveau procédé de fusion a été développé. Dans cette nouvelle technologie appelée « creuset froid » (figures 1.5 et 1.6), contrairement au creuset chaud qui est chauffé par un four externe, ici la fusion est réalisée par induction directe. Cela consiste à chauffer le verre en lui appliquant un champ électromagnétique alternatif créé par un inducteur. Le courant induit généré dissipe l’énergie par effet Joule et entraine ainsi la fusion du verre. Les frittes de verres introduites dans le creuset avant la fusion ne sont pas conductrices à température ambiante. Il convient donc de préchauffer une charge de verre pour initier l’induction. Pour cela, un anneau en titane ou en zirconium est placé sur la charge de verre initiale. Sous l’action du champ électromagnétique l’anneau s’échauffe et fournit l’énergie nécessaire à l’amorçage de la fusion du verre. À la fin de cette phase, les composants de l’anneau, totalement oxydés, font partie intégrante de la matrice vitreuse. Un circuit d’eau permet de refroidir les parois du creuset ce qui forme une couche de verre figé à la surface interne de celles-ci. Cette couche de verre solidifié est appelée auto-creuset (en rouge sur la figure 1.6). Ce dernier va avoir un rôle protecteur puisque le creuset n’est plus en contact direct avec le bain de verre à haute température. Cela a pour effet de diminuer fortement la corrosion du creuset en dépit de l’agressivité des composants du bain et de la température. Cela augmente ainsi la durée de vie du creuset. Un des autres avantages de ce type de procédé est l’accès à de plus hautes températures en comparaison du creuset chaud. En effet, le chauffage par induction directe couplé au refroidissement du creuset permet d’atteindre des températures jusqu’à 1300 ◦C. Un tel atout permet par exemple de développer de nouvelles matrices vitreuses de confinement pour améliorer leurs propriétés ou encore d’augmenter la quantité de déchets introduits dans le colis de verre. 

Les verres d’oxydes

 Le verre est un matériau dit amorphe où la structure est désordonnée. Aucun arrangement périodique des atomes n’est défini contrairement aux solides cristallins. Les verres d’oxydes sont habituellement obtenus à partir d’un liquide à haute température que l’on refroidit rapidement. La trempe appliquée au liquide permet d’éviter la cristallisation. Le liquide ne se fige pas à la température de fusion Tf (où la cristallisation peut apparaitre) mais a une température plus basse Tg (appelée température de transition vitreuse). Le système est alors bloqué dans un état  énergétique métastable (puisqu’il ne s’agit pas du minimum d’énergie atteignable) gardant la mémoire du désordre du liquide. En 1932, W. H. Zachariasen [17] a proposé un premier modèle (appelé Random Network Theory) décrivant la capacité que plusieurs oxydes ont à former un verre. Tout d’abord un verre doit être un réseau tridimensionnel et se distingue du cristal par sa non périodicité et son absence de symétrie. Il indique ensuite, dans le cas des systèmes à un oxyde, que les polyèdres formés par les atomes d’oxygène autour des cations sont les mêmes dans le verre et le cristal (pour une même composition). Par exemple, dans le cas de SiO2 les atomes d’oxygènes doivent former un tétraèdre autour de chaque Si. Cette règle est représentée dans la figure 1.7 pour une composition A2O3. Il généralise sa description des verres à un oxyde en proposant quatre règles : • Un atome d’oxygène ne peut pas être lié à plus de deux cations A.• Le nombre d’atome d’oxygène entourant A doit être faible (3 ou 4). Ce nombre définit la coordinence du cation A. • Les polyèdres formés par les oxygènes partagent leurs sommets mais ne peuvent pas avoir d’arêtes ou de faces communes. • Pour respecter la tridimensionnalité des réseaux vitreux, au moins trois sommets de chaque tétraèdre (définis par les atomes d’oxygènes) doivent être partagés. Il a ensuite étendu son modèle aux systèmes à plusieurs oxydes et a défini un classement des cations en fonction de la nature de leur liaison avec les atomes d’oxygènes : • Les formateurs de réseau : il s’agit de cations dont l’oxyde peut former un réseau vitreux à lui seul, sans l’ajout d’un autre élément. Ils suivent donc les règles précédemment énoncées. Ils possèdent une électronégativité élevée, leur liaison avec les oxygènes est rigide et principalement covalente. Les oxydes formateurs de réseau les plus utilisés sont SiO2 et B2O3. GeO2, As2O5 et P2O5 peuvent également être cités. Un atome d’oxygène lié à deux formateurs de réseau est dit pontant. • Les éléments intermédiaires : ils ne peuvent pas former un verre à eux seuls mais sont capables de remplacer partiellement des formateurs au sein du réseau vitreux. Ce sont des cations dont l’électronégativité est plus faible que celle des formateurs. Leur liaison avec les oxygènes est plus ionique. Les éléments intermédiaires associés aux verres silicatés sont Al, Fe, Ti, Ni, Zr. • Les modificateurs de réseau : ils ne peuvent pas former un verre seuls ni remplacer un formateur. Leur électronégativité est plus faible que celle de l’oxygène, leur liaison devient donc fortement ionique. Ils peuvent avoir deux rôles au sein du réseau vitreux. Le premier est celui de compensateur de charge en se plaçant à proximité d’un polyèdre formateur de réseau ayant un excès de charge négative. Le second consiste à casser une liaison entre un atome d’oxygène et un cation formateur. Il portera le nom de modificateur de réseau. Il dépolymérise le réseau en formant un oxygène non-pontant (atome d’oxygène lié à un seul formateur et un modificateur). Afin d’évaluer le degré de dépolymérisation, la notion d’environnement Qn a été introduite pour le tétraèdre SiO4. n représente le nombre d’atomes d’oxygène pontants dans l’unité silicatée. 

Table des matières

Liste des tableaux
Table des figures
Introduction générale
I Généralités
1 Gestion des déchets nucléaires
1.1 Contexte
1.2 Vitrification des déchets nucléaires de haute activité
1.2.1 Propriétés et formulation des verres de confinement
1.2.2 Procédés de vitrification
1.3 Les verres d’oxydes
1.4 Les verres simplifiés sodo-borosilicatés
1.4.1 Les verres SiO2-B2O3-Na2O (SBN)
1.4.2 Les verres SiO2-B2O3-Na2O-La2O3 (SBN_La)
2 Dynamique moléculaire
2.1 Ensemble microcanonique
2.1.1 Principe de la méthode
2.1.2 Algorithme de Verlet
2.2 Ensemble canonique et ensemble NPT
2.2.1 Méthode de Nosé-Hoover
2.2.2 Dynamique moléculaire à température et pression constantes
2.3 Potentiel pour les verres SBN
2.4 Modèle des ions polarisables (potentiel PIM)
2.4.1 Potentiels de paires
2.4.2 Potentiel de polarisation
2.5 Conditions aux limites périodiques
2.5.1 Conditions aux limites périodiques
2.5.2 Rayon de coupure
2.5.3 Sommation d’Ewald
II Propriétés structurales de systèmes SiO2-B2O3-Na2O
3 Développement d’un champ de force polarisable pour les systèmes SiO2-B2O3-Na2O 45
3.1 Systèmes SBN étudiés
3.2 Développement d’un potentiel polarisable
3.2.1 Procédure d’ajustement du potentiel
3.2.2 Calculs de référence
3.2.3 Validation de l’ajustement des potentiels
3.3 Détails des champs de force développés
3.3.1 Impact sur la coordinence du bore
3.3.2 Impact sur la densité
3.4 Conclusion
4 Structure des systèmes SiO2-B2O3-Na2O
4.1 Présentation des simulations
4.2 Structure des verres SiO2-B2O3-Na2O
4.2.1 Facteurs de structure
4.2.2 Structure locale
4.3 Coordinence du bore
4.3.1 Influence de la composition
4.3.2 Spéciation du bore
4.4 Rôle du sodium
4.5 Conclusion
5 Etude de la densité
5.1 Densité du verre et du liquide
5.2 Etude du gonflement
Sommaire
5.3 Conclusion
III Propriétés dynamiques des systèmes SiO2-B2O3-Na2O
6 Viscosité
6.1 Présentation des simulations
6.2 Méthode de calcul
6.3 Résultats obtenus
6.4 Conclusion
7 Diffusion dans les systèmes SiO2-B2O3-Na2O
7.1 Calcul des coefficients d’auto-diffusion
7.2 Découplage de la diffusion des Namodificateurs et des Nacompensateurs
7.3 Conclusion
8 Conductivité électrique
8.1 Calculs et résultats obtenus
8.2 Dynamique coopérative
8.3 Canaux de diffusion
8.4 Conclusion
IV Etude des verres SiO2-B2O3-Na2O-La2O3
9 Structure des systèmes SiO2-B2O3-Na2O-La2O3
9.1 Simulation des verres SiO2-B2O3-Na2O-La2O3
9.1.1 Potentiel polarisable pour les sytèmes SiO2-B2O3-Na2O-La2O3
9.1.2 Systèmes étudiés
9.2 Structure des verres SiO2-B2O3-Na2O-La2O3
9.2.1 Facteurs de structure
9.2.2 Structure locale
9.3 Densité des verres SiO2-B2O3-Na2O-La2O3
9.4 Conclusion et perspectives
10 Propriétés dynamiques des systèmes SiO2-B2O3-Na2O-La2O3
10.2 Diffusion dans les systèmes SiO2-B2O3-Na2O-La2O3
10.3 Conductivité électrique
10.4 Conclusion
Conclusions et Perspectives
A Potentiels polarisables pour les systèmes SBN

projet fin d'etude

Télécharger le document complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *