La personne âgée
Il existe différentes définitions de la personne âgée. Selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), une personne est « âgée » à partir de 60 voire 65 ans. Mais pour la Haute Autorité de Santé (HAS), la personne âgée est définie comme quelqu’un de 75 ans ou plus, ou de plus de 65 ans et polypathologique, c’est-à-dire ayant au moins 2 maladies chroniques .
Trois types de vieillissement peuvent être observés selon l’état de santé et l’indépendance de la personne âgée : Le vieillissement réussi correspond aux personnes âgées dites « vigoureuses » ou « robustes », en bonne santé, indépendantes et bien intégrées socialement ;
Le vieillissement usuel correspond aux personnes âgées dites « fragiles » à l’état de santé précaire avec un risque de dégradation ;
Le vieillissement pathologique correspond aux personnes âgées dites « dépendantes », malades, en mauvais état de santé à cause d’un état polypathologique avancé, à risque de handicap et/ou d’isolement social. La répartition des différents types de vieillissement n’est pas homogène .
Facteurs favorisant la iatrogénie médicamenteuse
Le terme « iatrogénie » provient du grec « iatros » qui signifie « médecin » et de « genesis » qui signifie «origine», ce qui peut être défini étymologiquement par « ce qui est engendré par le médecin ». La iatrogénie médicamenteuse est définie comme toute réponse néfaste et non recherchée à un médicament survenant à des doses utilisées chez l’homme à des fins de prophylaxie, de diagnostic et de traitement . Toute personne peut donc potentiellement développer un effet indésirable.
Chez la personne âgée, le risque est plus important en raison de multiples facteurs qui peuvent favoriser cette iatrogénie. Les modifications physiologiques, la polypathologie, la polymédication sont les principaux facteurs identifiés.
Modifications physiologiques liées à l’âge : Sous l’effet du vieillissement physiologique, les capacités d’adaptation de l’organisme diminuent. Il s’agit d’un phénomène complexe et multifactoriel ayant pour conséquences des modifications pharmacocinétiques (PK) et pharmacodynamiques (PD).
Polypathologie : Il n’existe pas de consensus pour définir la polypathologie, mais elle peut être définie comme l’association de deux maladies chroniques ou plus. D’après l’Article R160-12 du Code de la sécurité sociale, le terme de « polypathologie » renvoie à un patient atteint de plusieurs affections caractérisées, entrainant un état pathologique invalidant et dont la durée des soins est supérieure à 6 mois .
D’après l’étude réalisée par le Centre de Recherche, d’Etude et de Documentation en Economie de la Santé (CREDES) en 1991-1992, le nombre moyen de maladies était de 5,3 entre 70 et 74 ans et de 6,1 au-delà de 85 ans . En 2000, une personne âgée de plus de 65 ans déclarait en moyenne plus de sept affections . La prévalence de certaines maladies chroniques augmente avec l’âge. Une augmentation de la durée d’exposition aux facteurs de risque, le vieillissement d’un organe, ou l’allongement de la durée de vie grâce aux progrès de la médecine sont retrouvés parmi les facteurs favorisants . Afin de prédire le retentissement de ces associations, différentes échelles ont été développées, dont le score de Charlson. Il permet de mesurer l’impact des comorbidités sur la mortalité . Le score initial ne reflétait pas les pathologies principalement rencontrées chez la personne âgée, raison pour laquelle une nouvelle étude avec des sujets âgés a été menée pour pouvoir l’adapter. Les résultats montrent qu’à partir de 50 ans, il existe une augmentation du risque relatif de décès de 1,4 par décennie. Le score est donc pondéré de 1 point supplémentaire tous les 10 ans à partir de 50 ans.
Les équipes mobiles gériatriques
Les équipes mobiles gériatriques sont des équipes pluridisciplinaires qui interviennent auprès des patients âgés hospitalisés. Elles aident les différents services dans la prise en charge globale de la personne âgée fragile en leur apportant un avis spécialisé, et en orientant les patients âgés dans les différents services de soins gériatriques ou non .
Ces équipes ont des dénominations différentes selon les hôpitaux ou structures de soins. Elles portent le nom d’Equipe Mobile de Gériatrie (EMG), d’Unité Mobile de Gériatrie (UMG), d’Equipe Mobile d’Evaluation Gériatrique (EMEG), ou encore d’Unité Mobile d’Orientation Gériatrique (UMOG).
Législation : Ces équipes existent depuis les années 1990. Mais ce n’est qu’à la suite de la circulaire du 18 mars 2002 relative à l’amélioration de la filière de soins gériatriques qu’elles se sont essentiellement développées . En effet, la circulaire recommande l’utilisation de filières courtes et d’équipes mobiles gériatriques pour assurer une bonne prise en charge de la personne âgée. L’annexe III de la circulaire recense « l’ensemble de leurs missions, leurs moyens et leurs modalités ».
En mai 2005, l’Inspection Générale des Affaires Sociales (IGAS) a émis un rapport sur « les équipes mobiles gériatriques au sein de la filière de soins » . Ce rapport fait suite à une demande du Secrétariat d’Etat aux personnes âgées après la surmortalité observée pendant la canicule de l’été 2003. Le rapport décrit les « différents types d’organisation et mode de fonctionnement » existants ce qui a permis de définir « des indicateurs d’efficience et d’efficacité ».
Plus tard, la circulaire du 28 mars 2007 relative à la filière de soins gériatriques vient renforcer les dispositions de la précédente circulaire concernant l’organisation des soins .
Définition de la pharmacie clinique
Le terme « clinique » provient du grec « klinos » qui signifie le lit. La notion de pharmacie clinique est donc traduite comme l’exercice de la pharmacie au lit du patient. Le pharmacien s’intéresse à la fois au patient, à sa physiopathologie, et aux médicaments avec leurs propriétés pharmacologiques.
La pharmacie clinique est née aux Etats-Unis dans les années 60, suite à des procès pour erreurs médicamenteuses. En 1961, Charles Walton de l’Université du Kentucky définissait la pharmacie clinique comme « l’utilisation optimale du jugement et des connaissances pharmaceutiques et biomédicales du pharmacien dans le but d’améliorer l’efficacité, la sécurité, l’économie et la précision selon lesquelles les médicaments doivent être utilisés dans le traitement des patients ». Elle s’est ensuite développée au Canada, et plus précisément à Québec. A partir de 1975, le pharmacien fait partie intégrante des services de soins. La pharmacie clinique n’est arrivée que plus tardivement en Europe, au cours des années 1990. En France, il a fallu attendre 1984, et la réforme de la 5ème année hospitalo-universitaire, pour voir un début de présence pharmaceutique dans les services, ouvrant la voie à une collaboration entre les médecins et les pharmaciens . En 2016, la Société Française de Pharmacie Clinique (SFPC) a actualisé la définition de la Pharmacie clinique comme étant « une discipline de santé centrée sur le patient dont l’exercice a pour objectif d’optimiser la prise en charge thérapeutique, à chaque étape du parcours de soins. Pour cela, les actes de pharmacie clinique contribuent à la sécurisation, la pertinence et à l’efficience du recours aux produits de santé. Le pharmacien exerce en collaboration avec les autres professionnels impliqués, le patient et ses aidants ». En 2017, le bilan partagé de médication a été intégré aux activités de pharmacie clinique, en établissement de santé et en ville. La SFPC, s’intégrant dans une démarche globale, a donc actualisé son modèle de la pharmacie clinique en reprenant l’ensemble des activités de pharmacie clinique réalisables à l’hôpital et/ou en ville .
Rôle du pharmacien clinicien
Dans la Définition de la pharmacie clinique, Jean Calop désigne le pharmacien clinicien comme étant « la personne en charge de la mise en place de la stratégie thérapeutique efficiente et sûre définie par le médecin pour un patient donné ». Le pharmacien clinicien est en lien direct avec le médecin (qui établit le diagnostic et choisit la stratégie thérapeutique) et l’infirmier (qui administre les soins aux malades), chacun respectant son domaine de compétence . Il a pour missions : D’aider à la précision de la stratégie thérapeutique : information sur les nouveautés thérapeutiques, le choix des médicaments selon les rapports bénéfices/risques et coût/efficacité ; D’analyser et valider les ordonnances (respect des référentiels, posologies, contre-indications, interactions médicamenteuses…) ; De surveiller les effets indésirables médicamenteux, et de les notifier au centre régional de pharmacovigilance ; De participer à l’élaboration des protocoles thérapeutiques ; De diffuser l’information sur les nouveautés thérapeutiques, les conférences de consensus, les protocoles thérapeutiques, les références médicales opposables, le coût des produits ; De proposer des plans de prises ou des plans d’administration (répartition des prises par rapport au repas, modalités d’administration) ; De conseiller, informer voire éduquer le patient sortant : observance, précautions d’emploi, modalités d’administration.
Ainsi, le pharmacien clinicien tente de sécuriser le circuit du médicament en optimisant la thérapeutique et en prévenant la iatrogénie médicamenteuse.
Table des matières
Introduction
Généralités
I. La personne âgée
I.1 Définitions
I.2 Epidémiologie – Démographie
I.3 Facteurs favorisant la iatrogénie médicamenteuse
I.3.1 Modifications physiologiques liées à l’âge
I.3.1.1 Modifications pharmacocinétiques
I.3.1.2 Modifications pharmacodynamiques
I.3.2 Polypathologie
I.3.3 Polymédication
I.3.4 Les syndromes gériatriques
II. Les équipes mobiles gériatriques
II.1 Définition
II.2 Législation
II.3 Composition
II.4 Missions
II.5 Financement
II.6 Modalités d’intervention de l’EMG
II.7 Activités – Outils
II.8 Présentation de l’EMEG de Saint-Lô
II.8.1 Son origine
II.8.2 Sa composition
II.8.3 Ses critères de recrutement
II.8.4 Son fonctionnement
II.8.5 Ses données d’activité intra-hospitalière
III. Le pharmacien clinicien et ses activités de pharmacie clinique
III.1 Définition de la pharmacie clinique
III.2 Rôle du pharmacien clinicien
III.3 La conciliation médicamenteuse
III.3.1 Définition
III.3.2 Objectifs
III.3.3 Déroulement de la conciliation médicamenteuse
III.3.3.1 Recueil d’informations
III.3.3.2 La formalisation et la validation du bilan médicamenteux
III.3.3.3 La comparaison du bilan médicamenteux optimisé à l’ordonnance d’admission
III.3.3.4 La prévention et la correction des divergences non documentées
III.3.4 Les différents modes de conciliation
III.3.5 Impact clinique et économique de la conciliation
III.4 L’analyse pharmaceutique
III.4.1 Définition
III.4.2 Objectif
III.4.3 Les interventions pharmaceutiques
III.4.4 Impact clinique et économique
III.5 La revue de pertinence – Les prescriptions inappropriées
III.5.1 Les critères de Beers
III.5.2 La liste de Laroche
III.5.3 L’outil STOPP/START
III.5.4 Le MAI : Medication Appropriateness Index
III.5.5 Les programmes de la HAS : PMSA et AMI
III.6 L’apport du pharmacien dans l’EMEG
Matériels et Méthode
I. Objectifs de l’étude
II. Type de l’étude
III. Critères d’inclusion et d’exclusion
IV. Recueil des données
V. Analyse statistique
VI. Réglementation juridique
VII. Critères d’évaluation
VIII. Déroulement pratique de l’étude
Résultats
I. Caractéristiques de l’échantillon
I.1 Population générale de l’étude
I.2 Services de chirurgie
I.3 Services de médecine
I.4 Comparaison chirurgie – médecine
II. L’EMEG
II.1 Population générale de l’étude
II.2 Services de chirurgie
II.3 Services de médecine
II.4 Comparaison chirurgie – médecine
III. La conciliation médicamenteuse
III.1 Population générale de l’étude
III.2 Services de chirurgie
III.3 Services de médecine
III.4 Comparaison chirurgie – médecine
IV. L’analyse pharmaceutique
IV.1 Population générale de l’étude
IV.2 Services de chirurgie
IV.3 Services de médecine
IV.4 Comparaison chirurgie – médecine
V. La revue de pertinence et l’évaluation gériatrique
V.1 Population générale de l’étude
V.2 Services de chirurgie
V.3 Services de médecine
V.4 Comparaison chirurgie – médecine
Discussion
I. Les critères d’inclusion et d’exclusion
II. Les résultats
II.1 L’échantillon
II.2 L’EMEG
II.3 La conciliation médicamenteuse
II.4 L’analyse pharmaceutique
II.5 La revue de pertinence et l’évaluation gériatrique
II.6 Comparaison entre les services de chirurgie et de médecine
III. Limites de l’étude
III.1 Le recrutement
III.2 Le recueil de données pour les MPI
III.3 Les données statiques
Conclusion
Bibliographie
Annexes
Annexe 1 : Tests utilisés lors de l’EGS
Annexe 2 : Formulaire de demande d’avis par l’EMEG
Annexe 3 : Exemple de compte-rendu d’évaluation gériatrique
Annexe 4 : Exemple de fiche de conciliation des traitements médicamenteux
Annexe 5 : Fiche de recueil et de codification des interventions pharmaceutiques
Annexe 6 : Tableau d’aide à la codification des problèmes médicamenteux
Annexe 7 : Tableau d’aide à la codification des interventions pharmaceutiques
Annexe 8 : Les critères de Beers
Annexe 9 : La liste de Laroche
Annexe 10 : L’outil STOPP/START.v2 – adaptation en langue française
Annexe 11 : Le Medication Appropriateness Index
Annexe 12 : Outils du PMSA
Annexe 13 : Caractérisation des patients à risque iatrogène …