La limitation constitutionnelle du délit d’opinion

La limitation constitutionnelle du délit d’opinion

Certaines opinions peuvent être dangereuses pour la vie en société

L’idée très courante et majoritaire est celle selon laquelle des opinions fondamentalistes, qu’elles soient de l’extrême gauche ou de l’extrême droite ou encore des groupes extrémistes religieux, seraient immorales, illégales et interdites. Il faut être disposé à écarter par des mesures d’autorité publique des conceptions qui remettent en cause l’importance des bases démocratiques et de l’État de droit, notamment aujourd’hui avec le Web. La question de savoirsi des opinions, des expressions ou des communications peuvent être interdites à cause de leur seule dangerosité pour le système constitutionnel (A) est un des grands problèmes relatifs à la liberté d’expression et de communication des pensées et des opinions, mais qui peut trouver une réponse lors de la prise en considération des conséquences du délit d’opinion (B). 

Les opinions inconstitutionnelles dangereuses pour la vie en société

Malgré l’importance de la liberté d’expression et de communication certaines opinions peuvent représenter un risque ou être dangereuses pour la vie en société. En faisant de la liberté la base de la démocratie on l’ouvre à un développement infini. Cette grande ouverture permise par la notion de liberté a pour conséquence d’engendrer des effets imprévus et non maîtrisables. La liberté peut entraîner une dynamique avec des risques d’insécurité. À l’origine d’un État de droit libéral il faut une protection profonde de la liberté qui doit perdurer malgré ces risques. Ceci est d’autant plus vrai pour la liberté d’expression. Les opinions rassemblent les individus ou les séparent, et peuvent se transformer en actes. On constate que ces situations, parfois dangereuses sont d’actualité, comme le démontrent les réactions nationales et internationales à la publication des caricatures du Prophète Mohamed du dessinateur Kurt Westerwald. 368. La reconnaissance d’un droit et sa limitation. Notons que les idéologies nazies, tout comme d’autres opinions racistes, dictatoriales…, sont le « fruit pourri », des abus de la liberté d’expression. C’est également en invoquant la liberté que l’abolition de certains droits de l’homme est revendiquée, en commençant par la remise en cause du principe d’égalité  des êtres humains, par exemple, avec le racisme. Il serait naïf de penser que de telles opinions ne contiennent aucun danger potentiel. Et, dans un monde, dans lequel grâce aux nouvelles techniques de communication et à une internationalisation rapide, on est de plus en plus confrontés directement aux divergences des conceptions de l’ordre politique et social, et la mise à l’écart des conceptions dangereuses diminue. Les expériences concernant les résultats de la communication par internet, véhiculée par les « mass médias », contribuent, elles aussi, à nourrir la méfiance vers l’autorégulation de la libre structuration des opinions. Par conséquent, la liberté d’expression et de communication n’a pas intérêt à bénéficier d’une garantie de manière illimitée. Les circonstances dans lesquelles des opinions sont diffusées peuvent également être soumises à une réglementation propre à chaque État. Ce qui est récent ce sont les dispositions concernant l’interdiction de la seule propagation d’opinions et d’idéologies seulement en raison de leurs contenus à cause du fait qu’elles peuvent être dangereuses pour le système constitutionnel673 . Dans le droit de réunion, on constate de plus en plus de telles tentatives, parfois de manière pas très argumentée : en Allemagne par exemple et pour des raisons historiques évidentes, les autorités tentent ouvertement d’empêcher les militants d’extrême droite de manifester. Cependant, à plusieurs reprises, les juges constitutionnels allemands du Karlsruhe ont assuré leur droit à la liberté de réunion.

La dangerosité du délit d’opinion

Le thème de la dangerosité du délit d’opinion est d’une actualité brûlante, compte tenu de la force d’attaque d’internet et de son influence sur les internautes. Les règles procédurales fixées par la loi de 1881 sont des règles protectrices de la liberté d’expression, internet conduit à conduit à modifier certaines approches de cette loi historique. En effet, au XXIème siècle et en ces moments d’attentats terroristes à répétition, on pourrait être tentés de croire que certains délits ne constitueraient pas des abus de la liberté d’expression mais « des faits directement à l’origine des actes terroristes ». Néanmoins, lorsqu’on s’estime être un protecteur des libertés fondamentales, il faut reconnaitre qu’une opinion ne conduit pas  obligatoirement à la commission d’un acte. La loi de 1881 est là pour faire une summa divisio entre ce qui relève de l’expression délictueuse (1) de ce qui relève de l’acte délictueux (2). 1) L’opinion comme élément potentiel de l’infraction pénale 370. Les propos tenus par une personne peuvent être sanctionnés lorsqu’ils sont constitutifs d’une infraction. Dans un État de droit il faut respecter la distinction entre des propos constitutifs d’une infraction et ceux qui restent simplement à l’état d’opinion. La distinction entre une opinion et une infraction pénale, et le fait du « délit d’opinion », engendrent des difficultés en rapport aux conséquences au regard des sanctions judiciaires applicables. Par conséquent il s’agira d’observer que le critère principal qui est pris en considération par les magistrats est de vérifier s’il y a une atteinte à l’ordre public. 2) L’atteinte à l’ordre public 371. Les juges français en fonction des situations qui leur sont soumises jugent si des propos tendent à porter atteinte à l’ordre public, à la réputation ou aux droits d’autrui. Le juge européen bouscule les limites traditionnelles de la liberté d’expression dès lors qu’un débat d’intérêt général est en cause. Il ouvre à lui seul un droit à l’information qui s’impose comme une composante nouvelle, fondamentale de ce nouvel ordre public opposé aux ingérences de l’État675 . Soutenir que les délits d’opinion sont interdits revient à affirmer qu’il existe dans la Constitution une disposition qui interdit au législateur de créer une limite à la liberté d’expression.

Formation et coursTélécharger le document complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *