La protection des créanciers de la filiale selon des règles particulières

La protection des créanciers de la filiale selon des règles particulières

La position dominante qu’exerce la société mère sur ses filiales n’est pas, à elle seule, suffisante pour mener à sa condamnation : tant qu’elle n’a pas joué un rôle dans les faits qui leur sont reprochés, cette société n’a pas à être poursuivie par les créanciers de ses filiales. La raison en est que les sociétés affiliées d’un groupe, même réunies par un seul intérêt commun, sont dotées en droit de leur propre personnalité juridique et autonome. Dans un arrêt récent (du 12 juin 2012), la Cour de cassation1368 a rappelé ce principe général en déclarant que « ne donne pas de base légale à sa décision au regard des articles 1842 et 1165 du code civil la cour d’appel qui retient la responsabilité d’une société mère au titre des préjudices subis par le cocontractant de sa filiale en raison de son immixtion dans ces relations contractuelles, sans constater que cette immixtion avait été de nature à créer pour le cocontractant une apparence trompeuse propre à lui permettre de Aussi, hormis les cas de confusion de patrimoine et de fictivité que nous avons étudiés précédemment, rien n’est susceptible de supprimer l’autonomie des sociétés sociétés de son groupe (les sociétés Carrefour France et CMI), à payer à une troisième société ( dite Jean- Marc Valensi) contractante avec celles-ci la somme de 1 293 146, 43 euros. L’arrêt après avoir relevé que la société mère Carrefour SA n’était pas intervenue dans les relations avec la société Jean-Marc Valensi et que les contrats de coopération commerciale avaient été négociés avec la société CMI, puis signés par la Carrefour France, retient que « la société Carrefour SA définissait néanmoins la politique commerciale du groupe et avait un intérêt direct dans la commercialisation des produits des hypermarchés du groupe ».

Selon la Cour de cassation, la Cour d’appel, « en se déterminant ainsi sans préciser en quoi la société Carrefour SA était intervenue dans la conclusion des contrats de coopération commerciale et avait pu engager sa responsabilité à ce titre, la cour d’appel a privé sa décision de base légale ». 1370 Voir, B-S. Salgado, op.cit., p.58 «les filiales sont des personnes juridiquement distinctes quelle que soit la participation de la société mère dans leur capital»; J-P. Le Gall, Groupe de sociétés, op.cit., p.4 : «chaque filiale garde sa personnalité propre, peut être gérée de manière indépendante et dispose d’une liberté de moyens pour atteindre les objectifs fixés par la société mère.» 1371 D. Poracchia, Groupe de sociétés – filiale – immixtion par la société mère, Critère, Droit et patrimoine, 2004, p.126 : « Les sociétés d’un groupe sont des personnes morales autonomes et, à défaut d’événements particuliers, elles sont seules tenues par les actes qu’elles concluent ».

morales de constituer et de gérer des sociétés, ne prévoit pas de règles particulières quant à leur responsabilité. Mais, ce manque de dispositions en droit des sociétés ne prive pas les créanciers de l’usage d’autres règles juridiques inhérentes à des domaines particuliers ou au droit commun. En effet, il existe en droit français certaines lois spécifiques à certains domaines, qui touchent d’une manière ou d’une autre à la responsabilité de la société mère. On peut évoquer à titre d’exemple la loi n°2010-788 du 12 juillet 2011 portant engagement national pour l’environnement (dite «Grenelle II») (devenu l’article 512-17 du Code de l’environnement), et le droit de la concurrence. d’autres activités afférentes à d’autres sociétés1372, concourant ensemble à un but commun. En effet, l’existence juridique des sociétés affiliées d’un groupe n’est pas un frein à ce que certaines de celles-ci soient dépendantes dans leur entreprise des produits et services disponibles dans d’autres : des matières premières ou des produits intermédiaires. La mise en œuvre de cette complémentarité nécessite dès lors la conclusion de différentes conventions entre les sociétés du groupe. Ces actes, quoi qu’ils soient soumis au principe légal de l’effet relatif des contrats, peuvent induire des effets importants sur les créanciers de ces sociétés. Le refus par la société mère ou par une société sœur de s’en tenir à ses obligations contractuelles peut être à l’origine d’un préjudice, non uniquement pour une filiale contractante mais également pour les créanciers de celle-ci. 703. Par ailleurs, personne morale indépendante, la filiale est souvent liée à sa mère et à d’autres sociétés du groupe par un réseau de contrats relatifs à différents sujets. La complémentarité, qui caractérise la vie des groupes, implique que l’activité exercée par chacune des sociétés membres soit inscrite dans le prolongement.

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