LE COUPLE FRANCO-ALLEMAND CHRONIQUE D’UNE COOPERATION

LE COUPLE FRANCO-ALLEMAND CHRONIQUE D’UNE COOPERATION

Les qualificatifs « exemplaire », « modèle » sont aujourd’hui associés de manière récurrente au couple franco-allemand. En effet, la France et l’Allemagne entretiennent des relations étroites tant d’un point de vue politique, commercial, et culturel. Pourtant, durant ces trois derniers siècles, « la guerre faisait partie de l’imaginaire social » [Daniel Cohn-Bendit, communication prononcée en séance publique devant l’Académie des sciences morales et politiques le lundi 8 novembre 2004] et les deux pays étaient dotés du statut d’« ennemis héréditaires », notion apparue en Allemagne à la fin du XVIIe siècle, lors de l’incendie du Palatinat par les troupes de Louis XIV, et introduite en France après la défaite de 1870. Aussi, le changement intervenu depuis 1945 tient du prodige. Les premières initiatives de rapprochement sont le fait de pionniers français parmi lesquels figurent nombre de résistants rescapés des camps de concentration nazis, dont les démarches ont été poursuivies par l’intervention des « pères de l’Europe », Jean Monnet, homme d’Etat français associé à la victoire des alliés sur l’Allemagne, Robert Schuman, ministre français des Affaires étrangères et Konrad Adenauer, chancelier allemand. La frise chronologique suivante retrace les grandes étapes de l’histoire de la coopération franco-allemande qui ont fait suite à la Seconde guerre mondiale. Celle-ci a été scellée officiellement en 1963 lors de la signature du traité de l’Elysée.

Le traité de l’Elysée : la réconciliation officialisée

« La réconciliation du peuple allemand et du peuple français, mettant fin à une rivalité séculaire, constitue un évènement historique qui transforme profondément les relations entre les deux peuples »2. Le traité franco allemand vise à établir une coopération étroite entre les deux nations contractantes dans trois domaines : les affaires étrangères, la défense, l’éducation et la jeunesse. Deux fois par an, les chefs d’Etat et de gouvernement doivent se réunir pour parvenir à définir des « positions analogues », notamment sur les questions de politique étrangère. Le traité se veut effectivement être « une étape indispensable sur la voie de l’Europe unie qui est le but des deux peuples ».3 Pour le Général de Gaulle et le chancelier Adenauer, le traité de l’Elysée doit également sceller la réconciliation franco allemande. La création de l’Office franco allemand pour la jeunesse confirme ce souhait : en luttant contre les stéréotypes hérités d’une histoire marquée par la guerre, en apprenant à se connaître par la multiplication des échanges, on espère une solidification des fondements de la réconciliation. En janvier 2003, le Traité de l’Elysée a 40 ans. A cette occasion, il est renforcé. Désormais deux sommets franco-allemands réunissant l’ensemble des ministres des deux gouvernements, appelés Conseils des ministres franco-allemands, sont organisés chaque année. En Allemagne comme en France est désigné un Secrétaire général pour la coopération franco-allemande. Lors d’un de ces Conseils des ministres est décidée la rédaction d’un manuel d’histoire commun portant sur la période 1945-2000, afin de se débarrasser, selon un diplomate, des «œillères nationales qui forgent la conscience historique transmise aux élèves». La réactualisation du Traité donne à penser que la réconciliation est un processus qui demande de fournir de constants efforts des deux parties contractantes, et qui trouverait sa force et sa signification dans la durée.

Si la réconciliation transparaît dans le Traité de l’Elysée signé en 1963, engageant une coopération entre les deux pays, elle trouverait son origine dès les premières années succédant la seconde guerre mondiale. « Je le dis tout de suite, parce que le répéter est utile, nous considérons que la réconciliation des peuples français et allemand est bonne et nécessaire en soi. Nous pensons que cette réconciliation s’inscrit très heureusement dans la ligne tracée il y aura bientôt 15 ans » [Mitterrand, député du Rassemblement démocratique, débat à l’assemblée nationale, 24 janvier 1963] « La France a tendu à l’Allemagne la main de la réconciliation. L’Allemagne ne l’oubliera jamais. L’Allemagne a accepté cette main tendue avec gratitude » [Angela Merkel, commémoration de l’armistice du 11 novembre, le 11 novembre 2009] Selon P. Moreau Defarges, la réconciliation est un enjeu, un rapport qui s’acquiert par les efforts fournis par chaque partie [Moreau Defarges, Philippe. Repentance et réconciliation, 1999]. Dans le cas du couple franco allemand, les acteurs de la réconciliation ne sont autres que les dirigeants des deux états, s’exprimant au nom de leur nation. L’entreprise de rapprochement politique engagée par le Général de Gaulle et le chancelier Adenauer a été poursuivie de manière plus ou moins chaotique par Georges Pompidou et Willy Brandt, Valéry Giscard d’Estain et Helmut Schmidt, François Mitterrand et Helmut Kohl, Jacques Chirac et Gerhard Schröder et enfin aujourd’hui par Nicolas Sarkozy et Angela Merkel. A leur manière, chacun de ces couples politiques a fait fructifier l’entente franco-allemande, renforçant généralement la coopération des deux nations. Si la réussite du rapprochement politique franco allemand semble incontestable, les divergences passées demeurent dans les esprits. L’entreprise politique ne se dissocie pas du devoir de mémoire, elle apparaît au contraire comme le moyen de justifier la nécessité du rapprochement par le souvenir des conflits qui ont, des siècles durant, creusé la mésentente [Moreau Defarges, Philippe. Repentance et réconciliation, 1999]. .

 

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