Les gangrènes de Fournier d’origine anale Expérience du CHU Mohamed VI de Marrakech

La gangrène de Fournier est une fasciite du périnée, due à une infection bactérienne nécrotique aiguë des parties molles du périnée, par des germes aérobies et anaérobies, de pronostic sévère avec une évolution spontanée vers la défaillance multiviscérale et le décès [1].

La gangrène périnéoscrotale primitive ou gangrène de Fournier est rapportée pour la première fois par Baurienne en 1764 [2].Elle est nommée habituellement gangrène de Fournier, en particulier dans les pays anglo-saxons, selon le concept de la « gangrène foudroyante idiopathique » décrit par son auteur Jean-Alfred Fournier en 1884 [3].

Elle correspond à une gangrène cutanée primitive des organes génitaux externes sans aucune étiologie retrouvée. Bien que pas encore claire en ce moment, la gangrène de Fournier pourrait être liée à une endoartérite et une thrombose d’origine infectieuse des artères honteuses internes et externes [4]. Cependant, les formes idiopathiques du sujet jeune dues à une infection par streptocoque pyogène sont exceptionnelles et la porte d’entrée doit être systématiquement recherchée et traitée de façon spécifique.

C’est une affection relativement rare, à nette prédominance masculine, aussi la mortalité est comprise entre 10 % et 40 % [6,7].

Les facteurs favorisants sont nombreux, ce sont principalement le diabète, l’obésité sévère, l’alcoolisme et les états d’immunosuppression. Ils constituent 50 % à 80 % des cas et peuvent être incriminés à la fois dans le déclenchement de la gangrène et dans la gravité de son évolution, en favorisant l’apparition d’une défaillance multiviscérale [8].

Le traitement d’urgence associe la réanimation médicale à une antibiothérapie probabiliste à des interventions chirurgicales itératives, ce qui nécessite donc une équipe multidisciplinaire et un plateau technique adéquat.

La première description de la dermohypodermite bactérienne nécrosante (DHBN) périnéale, revient à Baurienne en 1764 (plaie du scrotum évoluant vers une gangrène) [9, 10, 11]. Entre 1883 et 1884, le vénérologue français Jean-Alfred Fournier rapportait cinq nouveaux cas de gangrène des organes génitaux externes chez des hommes jeunes en bonne santé apparente [11]. Il décrivit une nécrose foudroyante de la verge dans « les diabétides génitales » caractérisée par une nécrose progressive du tissu sous-cutané et aponévrotique de la région ano génitale, à début fulminant et d’étiologie indéterminée [9, 12, 11,27, 30, 69]. Depuis cette date, de nombreuses séries de gangrène génitale ont été publiées chez l’homme de tous âges. Quelques cas ont également été rapportés chez la femme [11, 26, 40,58]. Des formes moins graves survenant parfois chez l’enfant ne sont pas toujours d’origine infectieuse et seraient des aphtes géants avec une histologie de vascularite. Chez l’enfant, il faut également penser aux sévices sexuels [34]. Aussi un cas de GF néonatale a été décrit [73]. Le concept de « gangrène foudroyante de la verge » décrit par Fournier comme idiopathique a été peu à peu abandonné puisque l’on retrouve fréquemment une lésion causale et des facteurs de risque liés au terrain et impliqués dans la gravité de son évolution [13].

Les gangrènes périnéales surviennent dans des circonstances très diverses, et les tentatives de regroupement des aspects cliniques, bactériologiques, anatomiques et évolutifs ont conduit à l’utilisation d’une terminologie très complexe :
– cellulite à anaérobie.
– syndrome de Meleney.
– cellulite nécrosante synergistique.
– fasciite nécrosante.
– gangrène gazeuse clostridiale.
– Syndrome de Fournier [40,49].
– Gangrène gazeuse du scrotum et du périnée.
– Gangrène fulgurante.
– Gangrène fulminante du scrotum [54].
– Gangrène idiopathique du scrotum.
– Cellulite streptococcique du scrotum.
– Fasciite nécrosante synergistique du périnée .

Cette terminologie est difficilement applicable en pratique courante. Larcan et al ont proposé une définition plus rigoureuse « infections et suppurations à point de départ périnéal et à extension locorégionale avec nécrose des masses musculaires et des tissus sous-cutanés, extension rapide dans la fosse ischiorectale, vers le périnée antérieur et sous le grand fessier en arrière, atteinte des organes génitaux, de la paroi abdominale et des plis inguinaux, et éventuellement production de gaz putrides» [17]. Cependant, cette définition ne tient pas compte des atteintes périnéales centripètes qui s’étendent dans les mêmes espaces anatomiques. Les cellulites périnéales à point de départ scrotal (maladie de Fournier), inguinal, voire lombaire ont le même mécanisme physiopathologique et leur pronostic est identique [98, 14, 26]. Actuellement, contrairement aux autres localisations des DHBN (démohypodermite bactérienne nécrosante), il n’existe pas de difficulté nosologique dans le secteur anatomique du périnée. Toute DHBN, chez la femme comme chez l’homme, y est dénommée « gangrène de Fournier » .

Le périnée est situé à la partie inférieure du bassin. Il se définit comme l’ensemble des parties molles placées au dessous du diaphragme pelvien des releveurs. Il est habituel de lui rattacher les organes génitaux externes de l’homme et de la femme qui en sont intimement solidaire.

Les limites de la région : sont à la fois profondes et superficielles.
o Les limites profondes sont constituées par la face inférieure des muscles releveurs de l’anus fermant en bas la cavité pelvienne.
o Les limites superficielles sont représentées en avant par la symphyse pubienne, latéralement par les plis génito-cruraux et plus en arrière, par le bord interne du muscle grand fessier, en arrière par le coccyx.
• Division du périnée : topographiquement le périnée est divisé par la ligne biischiatique en deux régions triangulaires, d’aspect et de constitutions bien différentes (fig 8 et9)
o Le périnée postérieur en arrière, ou périnée anal, est marqué superficiellement par l’orifice anal où vient s’ouvrir la partie terminale du rectum. De constitution très avoisinante chez l’homme et chez la femme. Limité en haut par la face inférieure des releveurs, latéralement par la face interne de la paroi pelvienne, en bas par les plans superficiels : c’est la fosse ischio-rectale.

Le périnée antérieur en avant, a, lui aussi, une forme triangulaire mais à sommet antérieur; il a un aspect et une constitution très différente chez l’homme et chez la femme.

Chez l’homme, il constitue une cloison résistante presque entièrement fermée livrant seulement passage à l’urètre entouré de volumineuses formations érectiles ; il est en continuité directe avec les organes génitaux externes masculins de situation plus antérieure .

Chez la femme, il apparait de constitution beaucoup plus fragile et il est occupé dans presque toute son étendue par la vulve où viennent s’ouvrir l’urètre en avant et surtout l’orifice inférieur du vagin plus en arrière.

Table des matières

INTRODUCTION
PATIENTS ET METHODES
I.CRITERES D’INCLUSION ET D’EXCLUSION
II.MODE DE RECUEIL DES DONNEES
RESULTATS
I.EPIDEMIOLOGIE
1.Fréquence
2.Répartition des patients selon les années
3.Répartition des patients selon l’âge
4.Répartition des patients selon le sexe
5.Facteurs de risques
6.Délai de diagnostic
II.ETIOLOGIES
III.DIAGNOSTIC POSITIF
1.Diagnostic clinique
2. Diagnostic paraclinique
IV.TRAITEMENT
1.Médical
2.Chirurgie
3.Soins locaux
V.EVOLUTION
1.Morbidité
2.Mortalité
VI.SUIVI
DISCUSSION
I.HISTORIQUE
II.TERMINOLOGIE-NOSOLOGIE
III.RAPPELS ANATOMIQUES
1. Le plan cutané et organes génitaux externe
2. Le plan moyen du périnée
3. Le plan profond du périnée
4. Vascularisation du périnée
5. Innervation du périnée
IV.PHYSIOPATHOLOGIE
1.Déclenchement du processus infectieux
2.Propagation de l’infection
V.CLASSIFICATION
VI.DONNEES EPIDEMIOLOGIQUES
1.Fréquence
2.Facteurs de risques
VII.DIAGNOSTIC POSITIF
1.Clinique
2.Examens Paracliniques
VIII.DIAGNOSTIC ETIOLOGIQUE
1.Les étiologies anales
2.autres formes
IX.DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL
1.Hidrosadénite suppurée
2.Localisation génitale du pyoderma gangrénosum
3.Balanite et balanoposthite
4.L’œdème aigue idiopathique du scrotum
5.La filariose scrotale
6.Nécroses localisée du tissu cellulograisseux
7.Affections des organes intra-scrotaux
X.TRAITEMENT
1.Le traitement médical
2.Le traitement chirurgical
3.L’oxygénothérapie hyperbare
XI.EVOLUTION
XII.FACTEURS PRONOSTIC
CONCLUSION

Cours gratuitTélécharger le document complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *