Les méthodes d’administration et de cotation du dessin de l’horloge

Les méthodes d’administration et de cotation du dessin de l’horloge 

D’une manière générale, les diverses méthodes d’administration et de cotation du dessin de l’horloge (DH) présentent des éléments communs de même que des variations parfois importantes. Dans la réalisation de la tâche du DH, en général, le patient doit, en premier lieu, dessiner une horloge sur une feuille blanche sans aucun repère et y indiquer une heure prédéterminée selon une consigne verbale. En second lieu, il doit refaire l’horloge à l’intérieur d’un cercle pré-dessiné sur une feuille blanche et, en dernier lieu, il doit copier une horloge qui lui est préalablement fournie sur une feuille blanche. Considérant les variations dans l’administration, le DH est reconnu pour offrir une sensibilité et une spécificité accrue, allant respectivement de 0,76 à 0,94 et de 0,72 à 1,00 dans la reconnaissance des participants souffrant de démence comparativement à un groupe contrôle (Babins et al., 2008; Freedman et al., 1994; Manos & Wu, 1994; Mendez et al., 1992; Rouleau et al., 1992; Royall et al., 1998; Shulman et al., 1986; Sunderland et al., 1989; Tuokko et al., 1992; Watson et al., 1993; Wolf-Klein et al., 1989). La sensibilité correspond à la capacité d’un instrument de mesure à détecter un phénomène lorsqu’il est réellement présent chez un participant et la spécificité réfère à l’exclusion d’un participant qui ne présente pas réellement le phénomène mesuré par l’instrument (Osborn, 2006). Ainsi, une sensibilité élevée génère moins de faux-négatifs, alors qu’une spécificité élevée indique qu’il y aura peu de faux-positifs parmi les participants qui répondent à l’instrument (Hebel & McCarter, 2012). Dans les descriptions qui vont suivre de chacune des variantes de la méthode générale, l’accent sera mis sur la capacité de la méthode à isoler les particularités distinctives entre les différents processus démentiels et les limites de ces variantes tels que rapportées dans les études qui les présentent. Cette description inclura les différentes méthodes d’administration et de cotation, de même que des précisions concernant les paramètres de production du DH. Ainsi, les variantes de la méthode générale d’administration et des méthodes de cotation sont traitées chronologiquement en fonction de leur année de parution.

La méthode de Shulman, Shedletsky et Silver 

La méthode de cotation de Shulman et al. (1986) est considérée comme la première à évaluer le fonctionnement exécutif. Dans une étude faite auprès de 75 patients (37 hommes, 38 femmes) avec un âge moyen de 75,5 ans, la méthode devait permettre de distinguer les participants présentant des difficultés de fonctionnement cognitif exécutif. L’échantillon était composé de participants normaux provenant d’une unité de médecine familiale, de patients internes et externes souffrant de troubles mentaux d’origine biologique (non précisés par les auteurs) ou de troubles sévères de l’humeur, tous sans déficits visuels apparents. Lors de la réalisation du test du DH, afin de standardiser le stimulus, un cercle pré-dessiné sur une feuille de dimension inconnue est présenté, incluant un ensemble d’instructions qui n’est pas précisé. La personne reçoit la consigne suivante : « indiquer le temps à 3 h 00 ». Lors de l’épreuve, chaque répondant devait indiquer 3 h 00 à l’intérieur d’un cercle pré dessiné. Le dessin produit était ensuite coté sur une échelle hiérarchique de I à V (de léger à sévère) en fonction d’éléments visuospatiaux, d’erreurs dans l’indication de l’heure, de diverses persévérations, de désorganisations spatiales sévères et de l’incapacité à produire une tentative raisonnable d’un dessin représentant une horloge.

À l’aide de cette méthode, ce sont les erreurs relatives à l’indication de l’heure (telles que l’omission de l’aiguille des minutes; ou de tracer une ligne directe de 12 à 3; écrire le mot « 3 heures »; écrire le chiffre 3 à nouveau; souligner ou entourer le chiffre 3; incapacité à indiquer 3 heures) qui semblent discriminer le mieux les participants normaux des patients altérés significativement sur le plan du fonctionnement cognitif exécutif. Néanmoins, en demandant aux patients de placer les aiguilles de manière à indiquer 3 heures, l’épreuve n’est pas sensible aux héminégligences (ou négligence spatiale unilatérale, processus au cours duquel une personne à tendance à orienter automatiquement l’attention vers les stimuli typiquement situés dans l’hémichamp droit au détriment de ceux situés dans l’hémichamp gauche [cf. Lechevalier, Eustache et Viader, 2008]), surtout si les chiffres sont déjà placés (Freedman et al., 1994). Par ailleurs, des études telles que celle de Piotrowicz, Fedyk-Lukasik, Skalska et Grodzicki (2018), concluent en une plus faible sensibilité aux atteintes exécutives de type « rivé au stimulus » (stimulus bound) de cette consigne qui emploie le placement des aiguilles à 3 heures comparativement à la consigne impliquant un placement à 11h10.

La méthode de Wolf-Klein, Silverstone, Levy, Brod et Breuer 

Dans l’étude de validité de Wolf-Klein et al. (1989), une nouvelle méthode de cotation était proposée afin de faciliter et d’accélérer le dépistage de personnes souffrant de démence. Leur adaptation du test du DH a été administrée à 312 personnes (92 hommes, 220 femmes) âgées en moyenne de 76,8 ans (de 58 à 99 ans), réparties en cinq groupes : 130 normaux, 106 souffrants de MA, 26 souffrants de démence vasculaire (DV), 15 souffrants de démence mixte (MA et DV) et 35 présentant une condition mentale particulière étant généralement un état dépressif. Les patients avaient pour tâche de « dessiner une horloge » sur une feuille présentant uniquement un cercle pré-imprimé de 10,16 centimètres de diamètre. Si les participants demandaient des précisions, la même directive était répétée et aucune limite de temps n’était précisée. Par la suite, les productions étaient comparées à 10 patrons préétablis du DH. Les participants normaux devaient fournir une performance qui correspondait aux patrons 7, 9 et 10, alors que les patients souffrants de DA produisaient des dessins de l’horloge similaires aux patrons 1 à 6. Le patron 8 a été retiré lors de la validation de l’outil puisqu’il n’était pas suffisamment associé à l’un ou l’autre des groupes comparés dans l’étude. Cette méthode a le désavantage de ne pas offrir de gradation en termes de sévérité associée aux différents patrons de comparaison. De plus, comme il n’y a pas de consignes concernant l’heure à indiquer sur l’horloge, des informations importantes sur le plan exécutif ne sont pas disponibles (Royall et al., 1998). C’est aussi le cas de certains indices concernant la présence d’une démence vasculaire qui sont habituellement extraites du score lié au positionnement et à la taille des aiguilles (Freedman et al., 1994; Heinik, Solomesh, Raikher & Lin, 2002). Enfin, en se servant de patron de comparaison, cette méthode ne fournit pas d’informations suffisamment précises quant à la performance des patients atteints de la DA ou de démence vasculaire. Plus précisément, l’outil permet uniquement de dépister une DA, et ce, sans pouvoir isoler les particularités permettant une meilleure discrimination des processus dégénératifs lors de la formulation d’un diagnostic différentiel.

Table des matières

Introduction
Contexte théorique
Les méthodes d’administration et de cotation du dessin de l’horloge
La méthode de Shulman, Shedletsky et Silver
La méthode de Wolf-Klein, Silverstone, Levy, Brod et Breuer
La méthode de Sunderland et collaborateurs
La méthode de Rouleau et collaborateurs
La méthode de Tuokko et collaborateurs
La méthode de Mendez et collaborateurs
La méthode de Watson et collaborateurs
La méthode de Freedman et collaborateurs
La méthode de Manos et Wu
La méthode de Royall, Cordes et Polk
La méthode de Babins et collaborateurs
Discussion critique relative aux méthodes de cotation
Méthode
Conditions générales de recrutement
Critères d’inclusion des participants du groupe clinique
Critères d’inclusion des participants du groupe contrôle
Instruments de mesure utilisés
Questionnaire sociodémographique
Examen de l’état mental (MMSE)
Test du dessin de l’horloge
Déroulement
Résultats
Description des participants
Observations décisionnelles provenant du MMSE
Participants du groupe contrôle
Participants du groupe clinique
Traitement préalable à l’analyse des données
Impacts des variables psychosociales
Distinctions entre les groupes contrôle et clinique sur le MMSE et le DH
Impact de l’utilisation de médication
Analyses statistiques comparant la performance au DH entre le groupe contrôle
et les différents diagnostics démentiels
Le groupe contrôle en comparaison aux sous-groupes cliniques: Analyse des
variables non-dichotomiques
Score global au DH
Score pour le contour du cadran
Score pour le positionnement du centre
Score pour le positionnement des nombres
Score pour le dessin des aiguilles
Score pour la gestalt
Le groupe contrôle en comparaison aux sous-groupes cliniques: Analyse des
composantes dichotomiques des variables nombres et aiguilles
Analyse des items composant les sous-scores dichotomiques des aiguilles
au DH: Comparaison entre les participants contrôles et les participants
avec DA
Poursuite des analyses selon les distinctions significative relevées: Analyses
complémentaires de sensibilité et de spécificité
Sensibilité et spécificité des items significativement différents entre les
participants du groupe contrôle et les personnes avec DA
Sensibilité et spécificité pour le contour de l’horloge entre les participants du
groupe contrôle et les personnes avec DMV
Synthèse des observations et résultats
Discussion
Rappel des questions de recherche
Discussion relative aux questions de recherche
Première question: Différences dans la production du DH entre le groupe
contrôle et les trois sous-groupes cliniques de démence
Le score global
Le contour du cadran
La représentation des aiguilles
Le score de gestalt
Seconde question: Différences dans la production du DH entre les trois
sous-groupes cliniques de démence
Implications théoriques et pratiques
Implications théoriques
Implications pratiques
Limites de l’étude
Pistes de recherches futures
Conclusion

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