Les préjugés sexistes s’enseignent-ils à l’école maternelle ? Retour sur un outil d’égalité

Les préjugés sexistes s’enseignent-ils à l’école maternelle ? Retour sur un outil d’égalité

Historique du livre pour enfant : le reflet des sociétés

L’histoire des livres pour enfants dépend du contexte social, culturel et économique des époques qu’ils traversent. Jusqu’au XVème siècle, la littérature jeunesse est inexistante et les livres sont des objets rares et coûteux réservés à la noblesse. Une infime partie des enfants 16 est alphabétisée et les histoires circulant de génération en génération sont le fruit d’une tradition orale. L’invention de l’imprimerie par Gutenberg permettra d’éditer la Bible à 42 lignes destinée aux illettrés, qui peut être considérée comme l’un des premiers ouvrages illustrés pour la jeunesse. Les premiers livres imprimés jusqu’aux environs de 1830 sont avant tout instructifs et moralisateurs. Ce sont des outils pédagogiques destinés aux plus riches, notamment à l’éducation royale des princes. Davantage réservés aux adultes qu’aux enfants, ils retranscrivent des histoires traditionnelles transmises oralement au fil des époques. Ainsi, des ouvrages tels que les Chevaliers de la Table Ronde issus d’anciens récits d’origine celte, ou encore Renart, réunissant plusieurs romans datant du Moyen-Age, donneront naissance à un genre littéraire spécifique : les récits traditionnels. Au XVIème siècle, cet aspect moral va laisser place à un caractère plus ludique et attractif du livre qui fera polémique : son écriture et son format change, ce qui le différencie des ouvrages religieux. De nouveaux textes vont être remarqués pour leur caractère plus divertissant. Les Contes de la mère d’Oye écrits par Charles Perrault, ou encore le premier recueil des Fables de Jean de La Fontaine, sont des histoires qui ont traversé les siècles. Le terme « d’album » apparait dans les années 1820 et fait référence à un recueil de gravures ou de lithographies. Rassemblant et reliant plusieurs portraits, caricatures et images de paysages ou encore de monuments, il ressemble à un « portefeuille ». Il est offert en présent aux familles privilégiées. Ceux destinés aux enfants illustrent des classiques littéraires (contes de fées, fables) ou des histoires instructives prenant la forme de gravures suivies d’un commentaire. Ayant un franc succès dans les milieux bourgeois et aristocrates, leurs histoires seront divulguées à l’ensemble de la population grâce aux nourrices de leurs enfants qui les colporteront. Entre le XVIème et le XVIIIème siècle, les éditeurs sont plus diversifiés et malgré une culture de transmission orale encore dominante, la littérature se diffuse à l’ensemble de la population. Il faudra attendre le siècle des Lumières pour que les livres soient abordables financièrement pour les classes moyennes. L’histoire de la littérature enfantine est d’ailleurs directement liée à l’évolution des sociétés et notamment de leur jeunesse. Les enfants de la pré-révolution française ont été 17 longtemps perçus comme de petits adultes. Utilisés comme main d’œuvre facilement exploitable, leurs parents ne s’y attachaient guère au vu de la forte mortalité infantile de l’époque. L’une des premières lois encadrant le travail des enfants, en 1841, va permettre de sensibiliser la société sur la question de leurs droits. Les enfants de cette époque devront dorénavant avoir 8 ans pour commencer à travailler, pour un volume horaire journalier de 12 heures maximum. Il faudra attendre 1882 et les lois Jules Ferry pour obtenir une éducation nationale gratuite, laïque et obligatoire pour les enfants de 6 à 13 ans afin d’alimenter les esprits républicains. La révolution industrielle et l’Organisation Internationale du Travail vont permettre de protéger les enfants de l’exploitation. C’est donc seulement à la fin du XIXème siècle qu’une « véritable enfance » leurs sera enfin accordée. C’est par conséquent lors de ce siècle que naîtra « l’âge d’or de la littérature enfantine » selon Véronique Maréchal, dans Le livre et le jeune enfant, de la naissance à 6 ans, 2009 (page 22). Entre 1840 et 1940, la créativité et l’imagerie dans les livres pour enfants foisonnent, aussi bien dans les abécédaires, les contes, les romans et les albums. Mais ce sont avant tout les collections qui vont dynamiser l’édition des livres jeunesse à partir des années 1860. Les éditions Hetzel vont mettre en place les « Albums Stahl » spécifiquement destinés à un public enfantin, élargi aux enfants de 3 à 6 ans. Cette nouvelle littérature spécifique à la petite enfance va être à l’origine de l’émergence de l’album moderne. Les albums prennent un format vertical, ce qui rompt avec le modèle de la littérature romantique, et laissent place à des couleurs et cartonnages animés. Enfin, l’image s’associe au texte pour raconter les histoires. La littérature pour enfants est maintenant associée à un aspect ludique et récréatif. Bien que la production de masse touche le marché du livre au lendemain de la guerre 1914-1918, la standardisation de la littérature jeunesse n’a pas lieu et les courants nouveaux influencent les maisons d’édition. L’entre-deux-guerres accordera une place importante à l’image. Celle-ci s’étendra, au fur et à mesure, sur l’ensemble de la page voire de la double page, réduisant la place du texte à de simples encadrés. C’est le cas des albums de la première publication pour la jeunesse de la Nouvelle République Française (NRF), qui aborde les dégâts entrainés par la civilisation industrielle de façon contestataire, mais toutefois nuancés, via des illustrations bien choisies. En 1919, l’album Macao et Cosmage, d’Eddy-Legrand va être à l’origine de l’inversion de la prédominance du texte sur l’image, jusque-là établie dans les livres illustrés. 18 A partir de 1920, les techniques narratives et le coup de crayon, dans certaines créations littéraires, modernisent l’image dans l’album jeunesse. En décomposant les gestes de son personnage « Gédéon le canard », Benjamin Rabier s’approche petit à petit de la bande dessinée. On passe alors d’une image accompagnée d’une phrase, à une bulle et à des bruitages s’intégrant dans l’image elle-même. Une autre grande nouveauté dans les albums fait son entrée à partir de 1935 : l’utilisation d’animaux personnifiés ou anthropomorphiques. Des personnages comme Mickey ou encore Babar deviennent les héros de la jeunesse. Ce nouveau souffle littéraire s’accompagne d’une vision défendant l’éducation nouvelle que Paul Faucher résumera en une phrase : « L’enfant n’est pas un vase qu’on emplit, c’est un feu qu’on allume ». Fondateur de la collection « Père Castor » chez l’éditeur Flammarion, ce pionnier de l’éducation nouvelle désacralisera l’objet livre en l’imprimant sur des formats papiers agrafés, accessibles au plus grand nombre et non plus à une certaine élite. Il ouvrira un Centre de recherche biblio-pédagogique en 1946 regroupant aujourd’hui près de 2000 ouvrages pour les enfants de 1 à 12 ans. Chez Père Castor, le livre prend une dimension affective stimulant la créativité de l’enfant. Ces ouvrages sont reconnus comme étant d’une qualité bien supérieure aux livres produits massivement dans l’après-guerre. Son fils François Faucher gardera cet état d’esprit visionnaire pour fonder « La Maison du Père Castor », lieu public archivant tous les documents en lien avec l’idéologie de son père. De même, la création de l’association « Les Amis du Père Castor » et « L’imagier du Père Castor », permettront de mettre en avant l’importance des images et de la littérature enfantine pour éduquer les enfants. L’illustration devient un support pédagogique à part entière qui permet aux élèves de mieux apprendre. Déjà en 1657 dans La Grande Didactique, le philosophe et pédagogue tchèque Comenius disait « C’est donc à l’aide d’images qu’il faut commencer d’enseigner l’histoire aux enfants. On retient mieux ce qu’est un rhinocéros si on en a vu, au moins une fois, la représentation imagée. » 

Les albums jeunesse, un support d’égalité ?

C’est cet intérêt pédagogique qui a poussé l’école à accorder une place privilégiée aux livres dans l’Education nationale. Comme nous l’avons étudié précédemment, l’album est à l’origine une création conçue pour un public de non-lecteurs. Sophie Van der Linden dans Lire l’album (Atelier du poisson soluble, 2006) explique que cet objet a nécessairement besoin d’un médiateur pour être compris par un public de jeunes enfants. L’adulte est donc celui qui fait le lien entre l’histoire et l’enfant, mais aussi le premier acheteur. Économiquement parlant, les maisons d’édition orientent leurs offres en fonction de l’attente supposée de l’adulte. Cependant, les albums jeunesse ont l’intérêt de toucher un public plus large que la petite enfance, car ils conviennent aussi aux jeunes lecteurs. Ainsi, le ministère de l’Education nationale s’est intéressé à la grande diversité d’ouvrages proposés aux enfants pour établir une liste de littérature jeunesse « adaptée » à chaque cycle d’enseignement. Depuis 2002, les programmes officiels de l’Education nationale ont mis à disposition des enseignants des références littéraires pour les élèves de cycle 2 et 3. Il faudra attendre 2013 pour qu’une liste soit proposée à l’école maternelle. Pour autant, ces ressources en ligne sur le site www.eduscol.education.fr n’ont pas été attendues par les enseignants, qui utilisent l’album jeunesse depuis les années 1980, décennie où les bibliothécaires ont commencé à investir l’école primaire et les Bibliothèque Centre Documentaire (BCD). Au cours de la journée d’études du 16 janvier 2012 contre le sexisme, Isabelle Lebrun travaillant au service éducation de la médiathèque José Cabanis de Toulouse, intervient sur la construction identitaire des filles et des garçons à travers les albums jeunesse. La littérature actuelle propose une très grande variété de livres dès le plus jeune âge, ce qui est un atout considérable pour le développement et l’épanouissement des enfants. En revanche, ces albums ne sont pas neutres et plusieurs études ont pu démontrer que la littérature jeunesse était emplie de stéréotypes sexistes. Ces derniers sont par la suite plus difficiles à déconstruire car intériorisés très tôt. L’album étant le premier livre de l’enfant, il mérite une attention particulière. Dans les années 1970, le courant féministe avait une première fois tiré la sonnette d’alarme en dénonçant des rôles caricaturaux présents en grande quantité dans la littérature enfantine mais 20 également dans les manuels scolaires. Il faudra attendre 1996 pour relancer le débat avec la publication de l’étude « Attention album ! » effectuée par l’association européenne « Du Côté Des Filles ». Leur objectif premier : éliminer le sexisme dans le matériel éducatif. Comment ? En analysant la représentation des hommes et des femmes dans les albums jeunesse. Les albums illustrés présents dans les écoles sont pointés du doigt car sont la première littérature à laquelle les enfants sont confrontés. Ce public de non lecteurs est exposé régulièrement à des images renvoyant à des stéréotypes sur le rôle et la place que doivent tenir les hommes et les femmes dans la société. Avec le soutien de la commission européenne, 537 albums illustrés pour les enfants de 0 à 9 ans ont été analysés. L’ensemble des livres étudiés ont été édités entre 1905 et 1994, mais la plus grande majorité concernait des ouvrages récents. Une grille d’observation recensant 150 questions a permis de confirmer l’hypothèse de départ : les albums jeunesse véhiculent des stéréotypes sexistes. En effet, le monde des albums est sexuellement ségrégué, que cela soit dans les titres, sur les couvertures, ou dans leurs contenus. Les personnages masculins y sont dominants et majoritairement représentés dans des rôles et postures beaucoup plus valorisantes que leur alter-égo féminin. Ces dernières ont une place moindre et occupent un statut social différent directement lié à leurs capacités, leurs physiques et leurs psychologies. Avant même d’avoir ouvert l’album, 77,7% des titres et des images des couvertures sont à dominante masculine, contre 27,8% des titres et 43,8% des images au moins présentant un personnage féminin. On comprendra que les personnages féminins ont davantage tendance à partager la couverture avec un personnage masculin que l’inverse. Sur 1126 protagonistes analysés, tous types confondus, les garçons représentent 60,3 % des enfants et 59,6% d’hommes chez les adultes. Lorsque les personnages sont des animaux personnifiés, ou « anthropomorphiques », l’écart est renforcé : 70% des personnages enfants et 62,20 % des personnages adultes sont masculins. Cependant, la figure masculine de ces livres pour enfants est tout aussi discriminante, car se conformant à des stéréotypes réducteurs pour l’homme. La ségrégation est la plus marquée pour les albums destinés aux 0 – 3 ans. Le masculin a beau être le principal héros des albums jeunesse, 28,5% des hommes occupent une fonction paternelle, soit 156 pères d’après l’étude. Le père dominant dans les albums est donc un père absent. Cependant, le confort dont bénéficient les enfants et les mères  au foyer laisse à penser qu’il subvient aux besoins de sa famille. Pour autant, même en étant moins nombreux, les pères endossent à 83,3% le rôle principal et sont beaucoup plus valorisés dans leur rapport aux enfants. Ils ont en effet des relations plus riches avec ces derniers et sont souvent assimilés à une posture plus intellectuelle, représentée avec des lunettes. Le cliché du père stéréotypé traditionnel est encore trop présent lors de cette étude : il aime trôner dans son fauteuil devant la télévision ou avec un journal, prenant uniquement part aux activités de bricolage et de jardinage. A l’inverse, sur les 202 mères des albums étudiés, seulement 16,7% occupent le rôle de personnage principal. Leur principale fonction est maternelle et domestique car seulement 5% d’entre elles ont une activité professionnelle. Le travail occupé par les personnages masculins est « économiquement productif et/ou prestigieux» (page 7), contre un travail féminin similaire à celui d’une servante, parfois humiliant et de surcroit gratuit. Pour les personnages féminins qui exercent un travail, elles occupent exclusivement les métiers du commerce, de l’enseignement, des services et des soins. Les personnages masculins ont accès à des métiers bien plus variés dans l’ensemble des domaines professionnels, à l’exception des métiers de l’enseignement et du soin des enfants où ils sont minoritaires. Ils sont essentiellement représentés dans les métiers du commerce, suivis par ceux de l’ordre et de la justice, de l’aventure et de la nature, de l’art, de la médecine et enfin de la politique. Les rôles féminins qui accèdent à ces autres professions sont quant à eux quasiment inexistants. Concernant les enfants, les stéréotypes sont là aussi résistants, malgré quelques albums « progressistes ». Les filles ont des comportements souvent maternant et participent aux tâches ménagères. Elles se conforment aux qualités et défauts attribués depuis toujours aux femmes : la coquetterie, la passivité, la gourmandise, le commérage et s’intéressant aux garçons. Les garçons sont pour la plupart « souvent violents, effrontés, insolents, moqueurs et farceurs ». Les deux sexes s’opposent également par leurs activités, le féminin étant plus associé à la sphère domestique quand le masculin est synonyme d’extérieur.

Influence des représentations genrées sur la construction identitaire des enfants

Malgré ces données qu’on pourrait qualifier d’alarmantes, il est aisé de vouloir croire que notre esprit critique nous aide à faire la part des choses entre réalité et fiction, même quand on est un enfant de maternelle. Isabelle Lebrun nous interroge sur l’impact qu’ont ces modèles stéréotypés, massivement présents dans la littérature jeunesse, sur la personnalité des enfants. Difficilement estimables, ces stéréotypes « ne contribuent certainement pas à renforcer l’estime de soi » (page 68) pour cette dernière, car ils n’encouragent pas les garçons à exprimer leurs sentiments ni à être attentifs aux autres. L’étude d’Anne Dafflon Novelle (Sexisme dans la littérature enfantine : quels effets pour le développement des enfants ?, 2002-2003) nous alerte en expliquant que les jeunes enfants, entre 0 et 6 ans, ont un attrait particulier pour les animaux anthropomorphiques auxquels ils s’identifient plus volontiers qu’aux personnages humains : à cet âge, l’intérêt est davantage porté sur les images ne représentant pas la réalité. Dans cette synthèse des recherches d’Anne Dafflon Novelle, l’utilisation d’animaux dans les histoires est interrogée. Selon la chercheuse, il serait faux de penser que l’utilisation des animaux anthropomorphiques pour illustrer les histoires exclue les stéréotypes de genre. Selon l’étude, l’idée que la représentation qu’ont les adultes des animaux présents dans les albums serait asexuée est fausse. Dans la littérature jeunesse anthropomorphique, un sexe peut être attribué à la quasi-totalité des personnages. Au niveau physique, les animaux anthropomorphiques peuvent adopter des caractéristiques humaines sexuées, telles que du rouge à lèvre, des bijoux, de long cils ou encore de la poitrine pour le féminin contre des moustaches, de la barbe, des muscles pour le masculin. En absence de caractères sexués, l’adulte va qualifier l’animal comme étant de sexe masculin par défaut, sauf si celui-ci a un comportement maternant. On comprendra alors, que l’utilisation d’animaux anthropomorphiques dans la littérature jeunesse n’est pas une solution suffisante contre le sexisme car elle amplifie la représentation du masculin. De plus, l’étude montre une asymétrie au niveau du choix des animaux représentant les sexes féminins et masculins. Les héros sont souvent incarnés par des animaux puissants ou plus communs dans l’imaginaire collectif des enfants tels que l’ours, le loup ou encore le lapin. Les héroïnes quant à elles sont représentées par des petits animaux voire des insectes. 23 Pour l’association « Du Côté Des Filles », les animaux anthropomorphiques sont « porteurs d’un message d’égoïsme, de sexisme et de racisme : (montrant) aux enfants les rôles sexuels les plus rigides, qui leur apprennent à se méfier des différences » (Quels modèles pour les filles ?, Association européenne Du Côté Des Filles, 1997, page 6). C’est en effet chez ces animaux que les rôles stéréotypés traditionnels sont les plus présents. Les illustrateurs utilisent des symboles sexistes pour différencier les personnages, tels que le tablier, le cabas pour les courses, le balai ou encore les journaux, le cartable et les fauteuils imposants. De même, ils n’évoluent pas avec leur époque et restent cantonnés dans des rôles « à l’ancienne » avec des « pères autoritaires, des mères aux fourneaux, […] des petites filles idiotes et (des) garçons virils, (des) grand-mères séniles qui racontent des histoires à la morale réactionnaire. » (page 6). De plus, ils ont un comportement méfiant, parfois méchant envers les animaux étrangers. Les animaux personnifiés, bien qu’ayant un comportement civilisé, suivent la loi de la jungle, loi qui serait intolérable dans une représentation humanisée. Pour Pierre Bruno, maitre de conférences à l’IUT de Dijon, département information et communication, les résultats de l’analyse du sexisme dans la littérature doivent être nuancés. D’une part, parce que l’offre importante de la littérature enfantine ne peut permettre de connaître réellement les textes qui la composent. D’autre part, selon les critères d’analyse du sexisme, les résultats seront interprétés complètement différemment. Pour illustrer ce phénomène, il propose une double analyse de l’œuvre J. K. Rowling, Harry Potter. Quand l’un a fait le choix de s’attacher aux professions endossées par les sexes respectifs, l’autre s’est attardé sur le comportement du héros (il ne retient pas ses larmes, etc.). Enfin, il explique que la prise en compte des conditions de production de l’étude est nécessaire pour en faire une juste analyse. Par exemple, on sait que les maisons d’édition s’adaptent à un lectorat ciblé. En fonction de l’âge du lecteur, les héros peuvent être plus importants que les héroïnes et inversement. En effet, plus l’âge du public augmente, plus les personnages de la littérature ont tendance à se féminiser. Pourquoi ? Parce qu’en grandissant, les filles sont de plus nombreuses lectrices que les garçons, or le marché du livre a compris que son lectorat préférait des livres représentant son propre sexe. Les lecteurs de neuf ans et plus vont donc trouver deux fois plus d’héroïnes que de héros au fil des pages. Enfin, bien que les discriminations énoncées précédemment soient toujours vraies, et ce malgré la féminisation du lectorat au fil des âges, les analyses doivent prendre en compte d’autres facteurs dans la lutte contre les stéréotypes. Il est vrai qu’il serait dommage de réduire la lutte contre les discriminations aux simples illustrations des albums jeunesse. D’autres outils doivent permettre de lutter contre ces clichés, et en premier lieu la culture et l’éducation. On pourrait penser que le poids des images présentes dans les albums jeunesse est insignifiant sur la construction des rôles sociaux, pourtant elles y contribuent certainement à leur échelle. Alors qu’en 2012, Isabelle Lebrun continue de dépeindre une littérature de jeunesse imprégnée de stéréotypes sexistes, elle nuance son propos en évoquant des livres très encourageants pour l’égalité filles-garçons. En 2005, une maison d’édition Talents Hauts a souhaité réagir face à cette littérature enfantine discriminante. Pour ses fondatrices Laurence Faraon et Mélanie Decourt, le choix de proposer une littérature en faveur de l’égalité a été une réponse à l’inexistence de maison éditoriale contre le sexisme. Les éditrices ont la volonté de lutter contre les stéréotypes dès la petite enfance, car les valeurs morales et idéologiques sont pour elles transmises très tôt. Elles estiment que les modèles exposés aux jeunes enfants dans les albums jeunesse imposent des comportements qui reproduisent les inégalités entre les hommes et les femmes. L’objectif est de permettre à l’enfant de devenir un adulte tolérant refusant les préjugés dans le but de créer l’égalité entre les sexes. En souhaitant évoquer ce nouveau modèle en toute simplicité, elles choisissent des albums mettant en scène des personnages féminins dans des rôles plus souvent attribués aux rôles masculins. Cependant, le succès de cette maison d’édition anti-préjugés n’efface pas complètement le sexisme de ses albums. Par exemple, dans des livres comme Ma mère est maire ou encore Inès la piratesse, les personnages féminins, qui devraient être mis sur un pied d’égalité avec les masculins, ne créent pas forcément l’effet escompté. Dans le premier album, un enfant raconte sa gêne face aux moqueries de ses camarades au sujet des métiers de ses parents. Il va proposer à sa maman qui est maire et son papa père au foyer d’inverser leurs rôles pour une journée.

Table des matières

Introduction
PARTIE 1 – ANALYSE DU CONTEXTE
1. Les stéréotypes de genre : le fruit d’une construction historique
2. Influence des stéréotypes de genre sur le marché du travail
3. Influence des stéréotypes de genre sur l’orientation scolaire
PARTIE 2 – APPORTS THEORIQUES
1. Historique du livre pour enfant : le reflet des sociétés
2. Les albums jeunesse, un support d’égalité ?
3. Influence des représentations genrées sur la construction identitaire des enfants
PARTIE 3 – METHODOLOGIE
1. Hypothèses sur le sujet
2. Sélection de la population et méthode d’analyse retenue
PARTIE 4 – ANALYSE DES RESULTATS
1. Analyse des couvertures d’albums
2. Analyse des contenus d’albums
3. Les stéréotypes des albums jeunesse dépendent-ils du sexe de leurs auteurs ?
Conclusion

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