MIGRATIONS INTERNES

MIGRATIONS INTERNES

Les facteurs explicatifs des migrations

Pour l’analyse même des migrations, il est nécessaire de dépasser la sociologie simpliste des néo-classique (le calcul maximisateur monétaire) pour mettre à jour des facteurs susceptibles de les expliquer. Quatre facteurs seront analysés à savoir instruction ; urbanisation ; travail et revenu et enfin le facteur distance. 

Facteur instruction

L’impact du facteur instruction va dans un double sens : d’un coté il peut avoir un effet négatif sur la migration mais peut aussi avoir un effet bénéfique pour la région destinataire. Des lors, le facteur instruction est-il toujours un effet stimulant sur la migration ?

Les investissements humains en Afrique (ASS ou Afrique Subsaharienne) 

L’implosion scolaire Les systèmes scolaires ont tendu, comme les systèmes de santé, à se développer rapidement après les indépendances. La forte demande scolaire émanant des familles, la volonté des autorités de réduire les disparités régionales et de rattraper les retards historiques, de développer le capital scolaire national et d’africaniser les emplois, le poids de la contrainte démographique, enfin, sont autant de facteurs explicatifs de l’ « inflation scolaire » (Hugon, 1994)42. La machine scolaire s’est développée rapidement selon sa propre logique, indépendamment des conditions socioéconomiques. Il en résulte une situation paradoxale. Selon Ph. Hugon43, « l’Afrique demeure sous-scolarisée eu égard à l’importance de sa population. Un tiers des pays ont un taux de scolarisation primaire inférieur à 50% ; 4% ont un taux de scolarisation secondaire inférieur à 15%. Les femmes sont particulièrement touchées par l’exclusion scolaire. La tendance durant les années quatre-vingt, a été une relative déscolarisation. L’Afrique est également mal scolarisée. Les expansions quantitatives se sont faites aux dépens de la qualité de l’enseignement et au prix de nombreuses déperditions. La plupart des écoles sont des garderies plus que des lieux de formation des élites et les écoles de masse. L’Afrique est surscolarisée eu égard aux capacités de financement et aux structures de l’emploi. L’élasticité des dépenses éducatives par rapport au PIB a été supérieure à 1 durant vingt ans. Les dépenses d’éducation sont supérieures à 4% du PIB dans les deux tiers des pays et elles représentent plus d’un quart des dépenses budgétaires courantes. Les coûts de formation sont particulièrement élevés. Ils représentent par élèves, en % du PNB par habitant, entre un cinquième et un tiers pour le primaire, 130% pour le secondaire et 1 000% pour le supérieur. A même taux de scolarisation, l’effort financier relatif (par rapport au PIB) est près de dix fois supérieur en Afrique à ce qu’il est en Europe ». 

Les effets de l’investissement humain

L’enseignement apparaît certes comme un investissement et pas seulement comme un bien de consommation. Son impact dépasse largement celui de la formation pour le travail productif, salarié ou non. Il développe les facultés des enfants, il exerce des effets sur la fécondité des femmes, il favorise le patrimoine culturel et construit l’identité nationale. L’enseignement est un investissement intergénérationnel puisque la réussite des enfants dépend du milieu éducatif familial. Mais ces différents effets dépendent du contenu de la formation et du système productif. L’école est un support qui ne véhicule que les connaissances qui lui sont confiées. Le système éducatif est constitué en filières différenciées liées à la segmentation du marché du travail (Vinokur, 199444). La reproduction sociale des élites tend à se réaliser hors d’Afrique. La faible création d’emploi a conduit à une dévalorisation des diplômes et à un exode de compétence. Le secteur public et parapublic, qui avait, durant les vingt années postérieures aux indépendances, été le principal régulateur de l’emploi, diminue ses effectifs. Le coût de réaction d’un emploi dans le secteur moderne privé dépasse le salaire d’une vie de travailleur. Seul le secteur informel joue un rôle d’éponge, mais en faisant peu appel aux connaissances acquises à l’école. Certains tests économétriques montrent que la formation n’a pas été en Afrique un facteur significatif de la croissance (Banque mondiale, 1988)45 du fait des trappes à pauvreté.

 Contexte malgache

Depuis 1990, le PNUD↵ calcule un indice de développement humain ou IDH en tenant compte du niveau de revenu, de l’espérance de vie à la naissance et du niveau d’alphabétisation de plus de 15 ans. Même si un recul relatif de l’analphabétisme est à constater depuis 1960, la population malgache en général demeure sous instruite. Par conséquent, la pauvreté intellectuelle reste importante. Tableau n° 4: Distribution de la population malgache selon le niveau d’instruction par milieu et par sexe Niveau d’instruction MILIEU (%) SEXE (%) urbain rural masc. fém.Normalement, les systèmes éducatifs en vigueur à Madagascar sont divisés en 3 ordres à savoir le niveau primaire, secondaire et supérieur (ou tertiaire). La première remarque est que plus on monte au sommet de la pyramide scolaire plus on observe une diminution importante de l’effectif des étudiants. La population rurale malgache reste dominante (la population urbaine est de 28% en 199846). Or c’est en milieu rural qu’on enregistre un taux élevé d’analphabète où les femmes sont les plus concernées. Bref, dans l’ensemble de la Grande Île, seul le taux de scolarisation dans le niveau primaire connaît un pourcentage élevé. La déperdition scolaire gagne du terrain. On estime que le nombre moyen d’années passées en classe est de 6 ans. ↵ Programme des Nations Unies pour le Développement politique et économique 46 Statistiques de la Banque mondiale (2000), du PNUD (2000) et de la BAD 2000)

Contexte local : cas des tireurs

S’agissant du facteur instruction, force est de demander si celui-ci est en mesure d’expliquer le mouvement migratoire ? D’après notre échantillon d’enquête, les tireurs de pousse-pousse ont un niveau d’instruction faible. Alors que certains n’ont jamais franchi le seuil de l’école, la déperdition scolaire demeure importante. Pour pousser davantage notre analyse, nous avons mis en relation niveau d’étude et diplôme des tireurs.  Source : enquête personnelle, juin 2010 Les valeurs du tableau sont les nombres de citations de chaque couple de modalités Il est constaté que 30 observations sur 83, ‘ne veut pas répondre’ exclu, soient 36.14% des observations sont des non scolarisés donc sans diplômes. Ce qui fait que, pour cet échantillon d’enquête, le taux de scolarisation est de 63.86%. Côté diplôme, seulement 23 observations sur 53, soit 43.39% des scolarisés sont diplômés. Cette proportion ne représente même pas la moitié des observations qui ont franchi le seuil de l’école. Ainsi, parmi les 44 observations ayant fréquenté le niveau primaire, 13 seulement ont acquis le diplôme de CEPE et parmi les 10 observations qui ont atteint le niveau secondaire, aucune observation pour le baccalauréat néanmoins 9 observations partent avec le diplôme de BEPC en poche. Par ailleurs, ce sont le plus souvent les ruraux qui sont les plus touchés par la déperdition scolaire ou le décrochage scolaire. Éloignement des établissements scolaires, famille nombreuse, paresse, travail des enfants, misère… sont autant de raisons qui favorisent cette déperdition scolaire. Or, il y a lieu de signaler que 75 observations sur 91, soit 82.42% de nos observations habitent en milieu rural. Ce qui donne la classification suivante : 38 observations pour le niveau primaire et 8 pour le niveau secondaire tandis que 23 observations ont déclaré non scolarisés. 77 La question est de savoir si mouvement migratoire et niveau d’instruction sont liés. Sur ce point, deux optiques peuvent être analysées suivant le cas d’Antsirabe: – Les mouvements migratoires internes résultant des déplacements des élèves des écoles primaires des Fokontany à chaque Sous Préfecture pour rejoindre les collèges, lycée puis les universités. – Productivité du travail et niveau d’instructions Malgré les efforts fournis par l’État malgache, le niveau d’instruction reste faible dans l’ensemble du pays. On estime que le nombre moyen d’années passées à l’école est de 6 ans pour Madagascar. D’où la tentative de prolonger le primaire à 7 ans au cours du mandat présidentiel de Marc Ravalomanana. Y a-t-il une faille dans le système éducatif appliqué à Madagascar ou bien les malgaches en général voient en lui une perte de temps et/ou des dépenses en plus ? Pourtant les adages47 suivants prouvent le contraire : – « Tanora ratsy fihary ka antitra vao ratsy laoka»↓ . – « Ny hazo no vano-kolakana ny tany naniriny no tsara»↓ – « Izay adala no toa an-drainy»↓ . Autant dire que la réussite sociale passe d’abord par l’éducation. Mais d’une manière globale, la paupérisation croissante de la population malgache explique en partie le faible niveau d’instruction des Malgaches. Cependant ceux qui ont réussi leurs études, ne sont pas au bout de leur peine face au problème d’emploi. On peut parler même, avec Hallak48, de stagflation scolaire. Face aux faibles capacités d’absorption des sortants par le système éducatif, l’explosion scolaire a conduit à une dévalorisation des diplômes et à un chômage des diplômés, qui ont touché progressivement les niveaux supérieur, et à un exode des compétences. Dans le cas des tireurs de pousse-pousse, il se trouve que le niveau d’instruction est pour quelque chose dans la mesure où le métier de tireur ne requiert pas nécessairement de diplôme. D’autant plus que c’est le métier le plus accessible pour les migrants d’Antsirabe ville. Toutefois l’obtention d’un permis de tirer est indispensable.

Table des matières

AVANT PROPOS
INTRODUCTION GENERALE
PARTIE I : CADRE GENERAL DE L’ÉTUDE
CHAPITRE I : GENERALITES SUR LES MIGRATIONS
CHAPITRE II : CONTRIBUTION A LA SOCIOLOGIE DES MIGRATIONS ET CADRE THÉORIQUE
PARTIE II : PRESENTATION DES TERRAINS D’ENQUETE ET RESULTAT
CHAPITRE III : PRÉSENTATION DES TERRAINS D’ENQUETE
CHAPITRE IV : PRÉSENTATION DES RESULTATS
PARTIE III : ANALYSE DES RESULTATS ET APPROCHE PROSPECTIVE
CHAPITRE V : ANALYSE DES RESULTATS
CHAPITRE VI : VERS UNE APPROCHE PROSPECTIVE
CONCLUSION GENERALE
ANNEXES
ANNEXE I : RESULTATS D’ENQUÊTE A ANTSIRABE
ANNEXE II : QUESTIONNAIRE
ANNEXE III : CARTE ADMINISTRATIVE DE LA RÉGION VAKINANKARATRA
RÉSUM

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