Principe et mise en équation

Principe et mise en équation

Lors de la propagation d’une onde électromagnétique dans un milieu, le champ électrique E impose une oscillation aux électrons du milieu. On dit que le milieu est polarisé par ce déplacement de charges. Quand l’amplitude du champ électrique de l’onde est très faible devant le champ coulombien qui relie les électrons au noyau (faible intensité), l’oscillation des électrons s’effectue proportionnellement au champ laser, appelée alors oscillation harmonique. Ceci constitue la réponse linéaire d’un milieu (polarisation proportionnelle au champ P = χ (1)E) et définit l’indice optique n = q 1 + χ(1) = √ . A haute intensité, le déplacement des électrons devient conséquent et le puits de potentiel créé par la force coulombienne s’y oppose. Le mouvement des électrons de même que la polarisation du milieu n’est plus relié linéairement au champ électrique. En particulier, l’indice optique du milieu va dépendre de l’intensité du champ, cet effet non-linéaire appelé effet Kerr provient du terme de polarisation non-linéaire d’ordre 3, PNL = 0χ (3)E 3 (χ (3) dépend du milieu) dont la composante à la fréquence ω0 s’écrit PKerr = 3 4 0χ (3) |E| 2 E. L’équation de propagation Eq. 1.15 s’écrit alors dans l’approximation Principe et mise en équation 30 Principe et mise en équation de l’enveloppe lentement variable : ∆E −  + 3 4 χ (3) |E| 2 c 2 ∂ 2E ∂t2 = 0 (2.1) L’indice optique devient : n = s  + 3 4 χ(3) |E| 2 ≈ √  + 3χ (3) 8 √  |E| 2 (2.2) On définit alors l’indice non-linéaire n2 : n2 = 3µ0c 4n 2 0 χ (3) (2.3) En utilisant la définition de l’indice optique à faible intensité n0 = √ , il vient n = n0 +n2I. Ainsi, plus l’intensité est grande, plus la vitesse de phase sera faible. Pour une impulsion carrée (’top hat’) temporellement et spatialement, l’effet Kerr ne change rien d’autre. Dans le cas d’impulsions usuelles (gaussiennes en temps et en espace), l’intensité et donc l’indice optique varient en fonction du temps et de l’espace (voir Fig. 2.1). Le changement d’indice optique reproduit exactement la variation d’intensité spatio-temporelle d’une impulsion 1 . Cela a pour conséquences un élargissement spectral (auto-modulation de phase) et une déformation temporelle (auto-raidissement) de l’impulsion ainsi que la formation d’une lentille convergente (auto-focalisation). Ces trois effets sont décrits dans les paragraphes suivants. 

Auto-modulation de phase

L’auto-modulation de phase (Self-phase modulation SPM) est un effet largement utilisé pour élargir le spectre d’impulsions femtosecondes. Il provient de la variation temporelle de la vitesse de phase d’une impulsion se propageant en régime non-linéaire. Cet effet se démontre simplement en calculant la fréquence instantanée d’une impulsion gaussienne. La phase s’écrit alors φ = n0ω0 c z − ω0t + φSPM(t), à partir de l’équation de propagation on obtient : φSPM (t) = z LSPM e −t 2/σ2 (2.4) LSPM = 2cn0 ω0n2I0

Auto-raidissement

L’auto-raidissement (Self-steepening SS) provient de la variation de vitesse de groupe entre les pieds de l’impulsion et son maximum (description heuristique). Le centre de l’impulsion est ralenti par l’augmentation de l’indice optique ce qui va déformer l’enveloppe de l’impulsion (Fig. 2.4 (a)). Le front avant de l’impulsion voit sa pente diminuer alors que le front arrière se raidi. Cette déformation va affecter la SPM : l’élargissement spectral sera moins fort à l’avant de l’impulsion et plus fort à l’arrière, en revanche le front montant étant plus étalé que le front descendant, le redshift concerne ainsi une plus grande partie de l’impulsion que de blueshift. Au final, le SS élargit le spectre de manière asymétrique et le barycentre du spectre se déplace vers les fréquences hautes (Fig. 2.4 (b)). La longueur caractéristique d’auto-raidissement LSS dépend de LSPM et de la durée d’impulsion σ : LSS = LSPM s (2.7) s = 3 ω0σ (2.8) s est proportionnel à l’inverse du nombre de cycles optiques. (a) (b) Figure 2.4 – Déformation temporelle (a) et spectrale (b) d’une impulsion gaussienne (10 cycles optiques à mi-hauteur, s = 0.05) induits par SS et SPM sur une distance z = 2π LSPM = 0.3 LSS. L’auto-raidissement est indissociable de l’auto-modulation de phase et a son importance dans le cadre de l’élargissement spectral d’impulsions de quelques dizaines de cycles optiques (s > 0.01). Il est en revanche négligeable devant la SPM dans le cas d’impulsions plus longues (s < 0.01). Dans le cas de la Fig. 2.4 où s = 0.05, l’impulsion est propagée sur une distance 34 Principe et mise en équation z = 2π LSPM pour obtenir un élargissement notable, en prenant en compte le SS, on observe une forte différence avec la Fig. 2.2. Pour une impulsion de 10 cycles optiques, à 800nm, d’intensité 1014 W/cm2 dans 1bar de néon (n2 = 7.5 × 10−25m2/W) on a LSS = 680 cm. On voit ici qu’une propagation sur 0.3 LSS est suffisante pour avoir un auto-raidissement conséquent.

Auto-focalisation

Dans le domaine spatial, une variation d’indice optique va directement affecter la propagation d’un faisceau. Sur la Fig. 2.1, on constate que l’indice optique varie spatialement ce qui reproduit l’effet d’une lentille convergente (indice plus fort au centre que sur les bords). Si cette lentille compense la diffraction du faisceau, il se propage sans se déformer (auto-guidage). Si la lentille est assez forte pour faire converger le faisceau, l’intensité augmentant, l’effet de focalisation s’accroît jusqu’à la destruction du milieu (ionisation). Ce phénomène est l’auto-focalisation (Self-focusing SF). Dans le cas d’une fibre creuse, il n’y a pas de diffraction mais une propagation dans une base discrète de modes spatiaux (voir paragraphe 1.4). L’auto-focalisation transfère l’énergie vers des modes plus concentrés spatialement. Elle peut être interprétée comme une projection d’un faisceau plus focalisé sur la base des modes de la fibre. Cet effet est illustré Fig. 2.5 : au cours de sa propagation, la taille du faisceau diminue, l’intensité augmente et l’énergie est transférée dans les modes d’ordre supérieur. Sur la Fig. 2.6, on voit la déformation du profil spatio-temporel de l’impulsion : on observe le front arrière très raide de l’impulsion (SS) et la focalisation de l’impulsion. Pour obtenir ces figures, seul l’effet Kerr est pris en compte. En réalité, les modes spatiaux d’une fibre creuse ne se propagent pas de la même manière ce qui conduit à une oscillation de l’énergie entre les modes (voir paragraphe 2.3.1). L’auto-focalisation peut apparaître comme un effet avantageux dans le cadre de l’élargissement spectral d’une impulsion. Il augmente en effet l’intensité de l’impulsion et donc les effets non-linéaires recherchés (ici la SPM). Cependant, à trop haute intensité le gaz va être ionisé et de nouveaux effets non-linéaires apparaissent, qui peuvent être néfastes à la compression d’impulsion.

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