RESISTANCE BACTERIENNE AUX ANTIBIOTIQUES

Sensibilité des bactéries isolées des infections des sites opératoires (ISO) dans le service de chirurgie pédiatrique

INTRODUCTION 

Les infections des sites opératoires (ISO) occupent la deuxième position des infections nosocomiales (20 %) après les infections du tractus urinaires (30 %) (E-Pilly, 2008). Staphylococcus aureus est le germe le plus isolé de ses ISO et les souches résistantes à la méticilline (SARM) représentent un défi majeur de santé publique dans de nombreux établissements de soins à travers le monde (François, D. et al., 2007, Struelens, MJ. et al., 2000). Ces SARM font partie des indicateurs de surveillance des infections nosocomiales mais ne permettent pas selon certains auteurs, de classer les hôpitaux en fonction de leur niveau d’hygiène (Natacha, V. et al., 2011). La situation de ces ISO est de plus en plus critique avec l’augmentation des résistances des bactéries aux antibiotiques et de leur dissémination. Ces résistances sont dues à la pression des antibiotiques suite aux prescriptions irrationnelles lors des traitements probabilistes en milieu hospitalier et à l’automédication en milieu communautaire. Les gènes de résistance acquis sont ensuite transmis entre les bactéries (Patrice, C., 2008, Struelens, MJ. , et al., 2000). La dissémination est plus importante en milieu hospitalier à cause du manu-portage du personnel soignant et au manque d’hygiène en général, augmentant ainsi la prévalence des infections nosocomiales. On a noté au Benin en 2012 19,1 % d’infections nosocomiales et environ 12 % au Cameroun (Ahoyo, T. A. et al., 2014, Clotilde, N. et al., 2013, Simeu, C. et al., 1993). Dans les pays industrialisés, elle touchent environ 5 à 15 % des patients soit 14,1 % en France en 2007 (Raisin, Réseau REA, 2009). L’impact de ces infections nosocomiales est important, sur le plan sanitaire comme sur le plan économique. En exemple on peut citer le coût de prise en charge qui est évalué à 35.300 dollars contre normalement 28.800 par patient aux USA et à environ 2100 Dinar tunisien soit environ 600.000 Fcfa en Tunisie (Ben, R. F et al., 2007a, Robert, J. R. et al., 1999). Il est donc nécessaire en plus de la lutte contre la transmission croisée des souches, d’étudier l’écologie bactérienne des CHU afin de mieux adapter les antibiothérapies probabilistes. Les données sur ces infections dans les pays à faible revenu sont rares. C’est pourquoi, la présente étude est une participation à la dynamique mondiale de lutte contre les infections associées aux soins et servira d’élément important de prise en charge des ISO au CHUP-CDG par l’élaboration, d’une liste des bactéries fréquemment isolées des ISO et d’un guide d’antibiothérapies probabilistes en fonction de l’écologie bactérienne. 

. ECOLOGIE BACTERIENNE DES ISO 

 Nature des pus des ISO

 L’ISO est définie par la présence de pus franc ou liquide puriforme, ou la présence de micro-organisme associé à des polynucléaires, ou la présence de signes locaux inflammatoires ou de signes d’infection observés lors d’une intervention ou ré-intervention chirurgicale (EPilly, 2008). Ces infections sont favorisées par certains facteurs de virulence des bactéries comme la protéine A, qui est une adhésine responsable de la colonisation des cellules hôtes par les staphylocoques (Kwiecinski, J. et al., 2014). C’est aussi le cas de la leucocidine de Panton et Valentine (LPV) qui est leucotoxique et dermonécrotique responsable des infections nécrosantes suppuratives comme les furoncles, les anthrax, ostéomyélites (Badarau, A. et al., 2014). Le pus englobe toutes les suppurations superficielles regroupant le pus des ulcères, furoncles, escarres, et les suppurations profondes regroupant les ostéomyélites, les spondylodiscites, d’origine digestive etc. (François, D., et al., 2007). On distingue en fonction de leur localisation trois classes de pus : – Les pus de classe I qui proviennent de zones normalement stériles comme le cerveau, la bile, les os etc. Pour cette classe de pus, les germes isolés sont considérés comme responsable de l’ISO si le prélèvement est effectué dans les conditions d’asepsies rigoureuses. – Les pus de classe II proviennent des zones profondes mais communiquant avec la flore commensale. Le pus peut donc être contaminé par la flore commensale c’est le cas des pus de prélèvement d’origine locale. – Les pus de classe III sont issus de zones périphériques ce qui signifie qu’il est directement contaminé par la flore commensale. C’est le cas des prélèvements cutanés tels que les plaies, les escarres, les morsures, les brûlures etc. L’interprétation du résultat du pus se fera en fonction de sa localisation, des conditions et mode de prélèvement (seringue, biopsie etc.), et des conditions de transport.

Ecologie bactérienne en fonction de la localisation de l’ISO

La fréquence des germes isolés des prélèvements de pus sera fonction de la classe de pus concernée. Ainsi, les Staphylocoques sont majoritairement isolés dans les pus de classe I, dans plus de la moitié des cas : Staphylococcus aureus dans 40 %, Staphylocoques à coagulase négative dans 10 % des cas. Pour les pus de classe II et de classe III, les bactéries Revue de la littérature Master microbiologie fondamentale et appliquée UCAD/FMPO Page | 5 les plus isolées sont celles provenant de la flore commensale telles que Escherichia coli, les entérocoques et Pseudomonas aeruginosa (E-Pilly, 2008). 

RESISTANCE BACTERIENNE AUX ANTIBIOTIQUES 

Historique et situation épidémiologique de la résistance bactérienne aux antibiotiques

 En 1928, le monde assistait à l’une des plus grandes découvertes du siècle qui a révolutionné la médecine moderne. La pénicilline découverte par le bactériologiste britannique Alexander Fleming, offrait un réel espoir pour l’éradication d’un bon nombre de maladies infectieuses jusque-là non maitrisées. Cet espoir sera amplifié par la synthèse en grand nombre de dérivés de la pénicilline très actifs sur les bactéries. Cependant, dès l’aube de cette découverte, le risque d’apparition de résistances aux antibactériens de synthèse devenait de plus en plus réel à cause de l’utilisation abusive de ces antibactériens et à des doses souvent insuffisantes par les praticiens dans les années 1950 (Yvon, M-B, 2009). En effet les bactéries pathogènes, pour faire face à l’action des antibiotiques, développent des résistances par divers mécanismes. Les gènes de résistance acquis seront par la suite partagés entre ces bactéries à travers des supports de gènes de résistance comme les plasmides. On assistera alors à une dissémination rapide des pathogènes résistants compromettant énormément l’activité de ces antibiotiques. Ainsi la première pénicillinase TEM-1/2 et SHV-1 découverte dans les années 1960 chez une souche de Escherichia coli et Klebsiella pneumoniae a très vite diffusé chez d’autres entérobactéries et d’autres espèces telles que Haemophilus influenzae, Neisseria gonorrhoeae, Pseudomonas aeruginosa (Vincent, C., 2008). Une année plus tard, on observait le phénomène de résistance intrinsèque à la meticilline à l’époque même de l’introduction de celle-ci en thérapeutique (Avril, J. L. et al., 1992). L’émergence incessante de ces résistances va occasionner la mise sur le marché des céphalosporines à spectre étendu entre les années 1970 et 1980 pour parer aux problèmes liés aux pénicillinases. Ces céphalosporines seront très vite inefficaces à cause de la synthèse par les bactéries de nouvelles enzymes capable de les inactiver. La première bêtalactamase capable d’hydrolyser les céphalosporines à spectre élargi a été décrite en 1985 en Allemagne chez une souche de Klebsiella pneumoniae (Bradford, PA. , 2001). Cette bêtalactamase nommée SHV-2 mutant ponctuel de SHV-1, du fait de l’étendue de son spectre aux céphalosporines à spectre élargi va prendre le nom de bêtalactamase à spectre étendu (BLSE). Revue de la littérature Master microbiologie fondamentale et appliquée UCAD/FMPO Page | 6 De nos, jours plus de 230 types de BLSE sont décrites à travers le monde, et depuis plus de 20 ans, 90 % des Staphylococcus aureus sont résistants à la pénicilline G (Avril, J. L., et al., 1992, Vincent, C., 2008). Le pourcentage des Staphylococcus aureus résistant à la meticilline (SARM) ne fait que croître : de 0,46 % en 1995 ce pourcentage est passé à 8,04 % en 2006 au Canada (Sylvie, Carle, 2009). La vancomycine qui est l’antibiotique utilisé dans ces cas de figure rencontre de plus en plus de résistances chez certaines souches de cocci à Gram positif. 

Staphylocoques

Résistance aux bêtalactamines

 Le phénotype sauvage des staphylocoques sont sensibles à tous les bêtalactamines, les autres phénotypes de résistance observés sont des résistances acquises (Annexe n°1: Tableau a). Ces résistances sont basées sur plusieurs types de mécanismes (François, J. et al., 2003) décrits : – La sécrétion d’une pénicillinase – La résistance à l’oxacilline ou à la meticilline. 

Sécrétion d’une pénicillinase 

Les pénicillinases sont responsables de l’ouverture du cycle bêta-lactame des pénicillines, entrainant leur inactivation. Ces pénicillinases sont extracellulaires, d’origine plasmidique, et inductibles. Elles sont responsables de la résistance aux pénicillines A et G, aux carboxypénicillines et aux uréidopénicillines. Par contre les pénicillinases sont inactives sur les pénicillines M, les céphalosporines, et sont inactivées par les inhibiteurs de pénicillinase à savoir l’acide clavulanique, le sulbactam, le tazobactam (Avril, J. L., et al., 1992). Les pénicillinases sont détectées lors de la réalisation de l’antibiogramme par un disque de pénicilline G. Une souche sensible se caractérise par un grand diamètre d’inhibition avec une zone fantôme, c’est-à-dire une bordure floue correspondant à une lyse des bactéries (Avril, J. L., et al., 1992). Une souche résistante se caractérise par une augmentation de la CMI (˃ 0,12 mg/L) et une diminution du diamètre d’inhibition (˂ 29mm). Cette résistance se traduit par une zone d’inhibition qui présente une bordure nette, avec parfois la présence de colonies « squartters » c’est-à-dire des colonies bien développées, à la périphérie de la zone d’inhibition. Une résistance à la pénicilline G équivaut à une résistance à la phenoxy-méthyl pénicilline et aux pénicillines hydrolysables (amino-, carboxy-, uéido-pénicillines) (CA-sfm, 2013). 

Table des matières

ABREVIATIONS
LISTE DES TABLEAUX
LISTE DES FIGURES
INTRODUCTION
REVUE DE LA LITTERATURE
I. ECOLOGIE BACTERIENNE DES ISO
1.1 Nature des pus des ISO
1.2 Ecologie bactérienne en fonction de la localisation de l’ISO
II. RESISTANCE BACTERIENNE AUX ANTIBIOTIQUES
2.1 Historique et situation épidémiologique de la résistance bactérienne aux antibiotiques
2.2 Staphylocoques
2.2.1 Résistance aux bêtalactamines
2.2.2 Résistance aux aminosides
2.2.3 Résistance aux macrolides, lincosamines, streptogramines (MLS)
2.2.4 Résistance aux glycopeptides
2.3 Entérobactéries
OBJECTIFS
I. OBJECTIF GENERAL
II. OBJECTIFS SPECIFIQUES
APPROCHE METHODOLOGIQUE
I. TYPE ET CADRE D’ETUDE
II. METHODE D’ETUDE
2.1 Démarche de diagnostic bactériologique
2.2 Méthode d’exploitation des données
RESULTATS
I. REPARTITION DES PRELEVEMENTS
II. PROFIL BACTERIOLOGIQUE DES GERMES ISOLES
III. PROFIL DE SENSIBILITE DES GERMES AUX ANTIBIOTIQUES
3.1 Profil de sensibilité et phénotypes de résistance de Staphylococcus aureus aux antibiotiques.
3.2 Profil de sensibilité de Escherichia coli aux antibiotiques
3.3 Profil de sensibilité de Klebsiella sp. aux antibiotiques
3.4 Profil de sensibilité de Pseudomonas aeruginosa
3.5 Liste des antibiotiques actifs sur les germes isolés
DISCUSSION
CONCLUSION
REFERENCES
ANNEXES

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