Contrôle non destructif par reconstruction en tomographie térahertz

L’entreprise T-Waves Technologies conçoit et développe des équipements très innovants pour la résolution de problématiques présentes dans un contexte de Contrôle Non Destructif (CND) des matériaux [1]. Ce contexte inclut toutes les méthodes permettant d’une part de caractériser l’état d’intégrité des matériaux et d’autre part d’évaluer leurs propriétés sans aucun endommagement. En particulier, l’entreprise développe des systèmes d’imagerie et de spectroscopie [2][3] basés sur les ondes THz (qui seront introduites dans la section 1.3 puis approfondies dans la section 2.9) pour le contrôle de la qualité, des performances et des procédés de fabrication de la matière. Ce qui implique que les équipements développés peuvent être destinés d’une part pour des usages en laboratoire et d’autre part pour des usages en production ou en exploitation dans un contexte industriel. Ce développement implique nécessairement la définition de différents moyens technologiques et de différentes méthodes de traitement des données.

Dans un contexte industriel, de nombreux efforts sont réalisés pour améliorer la qualité et les performances des matériaux pour les applications associées. Cela implique une évolution constante dans le temps de la nature des matériaux, de leur processus de fabrication et de leurs processus d’assemblage. Leur contrôle avant et après intégration est essentiel. Par ailleurs, de nombreux efforts sont également réalisés pour réduire les coûts et le temps de fabrication. Pour répondre à toutes ces exigences plusieurs solutions technologiques sans contact, non destructives, non invasives et non nocives ont vu le jour.

L’imagerie à l’aide des ondes THz en est un exemple à fort potentiel, étant donné les propriétés fortement intéressantes des ondes THz (voir section 1.4). Les informations obtenues peuvent être dans le cœur ou à la surface de la matière [4][5] impliquant ainsi 2 types de configurations possibles : transmission et réflexion. La spectroscopie THz [6] [7] [8] peut être un outil complémentaire de l’imagerie THz puisqu’elle permet la caractérisation des propriétés optiques et structurelles de la matière et l’identification de composés chimiques dans les matériaux. Au-delà, la spectroscopie THz peut être également une solution technologique pour la mesure de l’épaisseur de matériaux [9].

La matière composant un échantillon d’étude dans un contexte CND peut être déclinée sous forme de matériaux séparés (homogènes et hétérogènes mono-couches ou multi-couches) ou d’assemblages. Le champ des applications est ainsi très large. On peut citer comme exemples de problématiques pouvant être traitées par l’imagerie THz : la détection et quantification de défauts (corps étrangers [10][11], délaminations [12][13], humidité [14][15], porosité [16], etc.), la caractérisation des propriétés d’un matériau (physico-chimique [17][18], comportement mécanique [19 [20], comportement thermique [8][21], etc.) et le contrôle de qualité pour assemblages de matériaux. Dans ce dernier domaine (en particulier pour les polymères [22]), certains procédés tels que le collage [23][24] ou le soudage [25][26] ont eu tendance à se développer pour remplacer les processus comme le rivetage ou le boulonnage. Le but est de simplifier et réduire le temps de fabrication pour une meilleure productivité et réduire les masses des produits assemblés notamment dans le contexte du transport.

Lors des premières années de recherche et développement de l’entreprise, il a été fait le choix d’en concentrer les activités sur l’étude des polymères et des composites étant donné leur forte présence dans différents secteurs concernés par le CND. L’utilisation des polymères a augmenté significativement dans différents secteurs tels que l’industrie chimique, para-chimique ou de transformation, l’industrie textile, le bâtiment, les constructions automobiles et aéronautiques. Généralement, les polymères ont comme propriétés d’avoir une masse volumique inférieure à 1500kg .m−3 , d’être souples et stables pour des températures modérées et d’être transparent dans la gamme des ondes THz [22]. Cependant, les propriétés des polymères sont encore à l’heure actuelle sous exploitées, et particulièrement est sous-exploité la possibilité de les combiner, permettant ainsi l’amélioration de la qualité de la matière.

Un matériau composite peut être défini d’une manière générale comme l’assemblage de deux ou plusieurs matériaux, l’assemblage final ayant des propriétés supérieures aux propriétés de chacun des matériaux constitutifs [27]. Il est constitué d’une matrice, d’un renfort (généralement constitué de fibres) et éventuellement une charge et/ou un additif. Il existe deux grandes familles de ces matériaux. Elles se différencient par les caractéristiques de leur matrice de renfort. Les composites de grande diffusion sont peu onéreux et occupent une large part du marché. Les composites à hautes performances, généralement renforcés de fibres continues de carbone ou d’aramide, sont quant à eux réservés à des secteurs de forte valeur ajoutée : aéronautique, médical, sports et loisirs. Les matériaux composites apportent de nombreux avantages : légèreté, résistance mécanique et chimique, maintenance réduite, liberté de formes. Ils permettent d’augmenter la durée de vie de certains équipements grâce à leurs propriétés mécaniques (rigidité, résistance à la fatigue), mais aussi grâce à leurs propriétés chimiques (résistance à la corrosion). Ils renforcent également la sécurité grâce à une bonne résistance aux chocs et au feu. Ils offrent une bonne isolation thermique ou phonique et, pour certains d’entre eux, une bonne isolation électrique. Ils enrichissent aussi les possibilités de conception en permettant d’alléger des structures et de réaliser des formes complexes, aptes à remplir plusieurs fonctions.

En fonction de la problématique visée et de la géométrie de l’objet d’étude, il est possible de considérer l’imagerie THz en deux ou trois dimensions (2D, 3D). Le cas du 3D correspond à la tomographie dont le grand intérêt réside dans la possibilité de visualiser, avec une haute résolution, un plan transverse dans l’objet sans destruction des parties contrôlées. Parmi les trois principales modalités de la tomographie, (tomographie par résonance magnétique [28], tomographie en transmission [29] et tomographie par émission [30]), seule la tomographie par transmission est utilisée pour le CND [31].

Tomographie THz versus tomographie à rayons-X

Comme dans d’autres gammes spectrales, il existe 2 types d’émissions dans la gamme spectrale THz: impulsionnelle et continue.

• Émission impulsionnelle: Grâce au développement de sources laser ultra rapides, la génération d’impulsions THz ultra courtes a été développée [40][41]. La technique Time Domain Spectroscopy (TDS), basée sur l’échantillonnage temporel de l’impulsion THz générée (typiquement de puissance inférieure ou égale à 1 mW), est devenue l’application la plus fréquente pour la caractérisation des propriétés optiques des matériaux. Étant donné que la référence de temps est connue avec précision, les informations de phase sont conservées et, par conséquent, les parties réelle et imaginaire de la fonction diélectrique peuvent toutes deux être obtenues sur toute la gamme spectrale engendrée par l’impulsion THz. Cette possibilité d’avoir accès à la fonction diélectrique complexe sur toute la gamme spectrale considérée forme le principal intérêt du TDS. Plusieurs travaux de recherche ont été publiés en utilisant cette technologie dont le premier article sur la tomographie THz par ondes pulsés a été publié dans [38]. Toutefois le couplage de la tomographie THz à la technique TDS augmente le temps de reconstruction [42]. Il est important de noter qu’en rayons-X, cette technique n’est pas disponible.

• Émission continue: Le développement des sources à émission continue a été rendue possible grâce à l’amélioration des performances des composants électroniques. Plusieurs paliers ont été franchis à plusieurs échelles : fréquences d’accès, gammes de balayage en fréquence, fonctionnement à température ambiante, rapidité, stabilité, sensibilité, compacité et coût. Les progrès réalisés ont permis l’obtention des niveaux d’émission, de détection, de contraste, de rapport signal à bruit intéressants pour le développement de plusieurs applications utilisent les ondes THz et particulièrement en imagerie. Les puissances atteintes sont nettement supérieures à celles des ondes à émission impulsionnelle.

Pour un atome ou une molécule, l’absorption d’un photon incident de fréquence f se produit par le passage d’un niveau d’énergie E1 à un autre plus élevé E2, tel que E2−E1 = h f où h est la constante de Planck. D’un point de vue corpusculaire, un photon entre en collision avec les électrons liés aux atomes du milieu traversé (électrons des couches internes). Si l’énergie du photon incident est suffisante, un électron du cortège atomique peut se voir arraché. Cet électron, appelé photo électron, est éjecté avec une énergie cinétique qui peut être transférée au milieu en provoquant des ionisations. Pour les atomes individuels, la différence d’énergie est trop grande pour que les ondes THz puissent provoquer un changement d’état électronique. Par contre, dans les molécules, les atomes peuvent vibrer ou tourner les uns par rapport aux autres, et de manière plus globale, tout le squelette de la molécule peut se déformer de manière à osciller aux fréquences THz.

Table des matières

1 Introduction
1.1 Préambule
1.2 Contexte de ce travail : le contrôle non destructif
1.3 Tomographie THz versus tomographie à rayons-X
1.4 Sujet de thèse
1.5 Système d’imagerie THz expérimental
2 La tomographie du point de vue des ondes Térahertz
2.1 Introduction du deuxième chapitre
2.2 Tomographie et transformée de Radon
2.3 Tomographie discrète
2.4 Tomographie et problème inverse
2.5 Méthodes directes
2.5.1 Méthode par rétro-projection filtrée
2.5.2 Méthode par utilisation du théorème de la coupe centrale
2.6 Méthodes par optimisation
2.6.1 Méthodes algébriques
2.6.2 Méthodes par maximisation de l’espérance
2.7 Bilan sur les méthodes de reconstruction
2.8 Régularisation de la reconstruction
2.9 Modèle d’interaction entre une onde THz et un objet
2.9.1 Modélisation de la distribution d’intensité d’une onde THz
2.9.2 Propagation de l’onde THz dans un objet
2.9.3 Méthodes par lancer de rayon
2.10 Etat de l’art de la tomographie THz
3 D’une reconstruction d’objet à une reconstruction d’écart
3.1 Introduction du troisième chapitre
3.2 Un nouveau modèle d’interaction pour les ondes THz
3.2.1 Modèle Monte Carlo Fan Ray Tracing
3.2.2 Modèle Monte Carlo Slash Ray tracing
3.3 Utilisation d’un modèle de propagation pour simuler une mesure
3.4 Comparaison des différents modèles
3.4.1 Analyse des faisceaux simulés
3.4.2 Analyse des projections simulées
3.5 De la reconstruction d’objet à la reconstruction de défauts
3.5.1 Importance de l’échantillonnage
3.5.2 Importance de la prise en compte de l’épaisseur et de la distribution d’intensité du faisceau THz
3.5.3 Importance de la prise en compte de la déviation du faisceau
3.5.4 Non-linéarité de l’interaction onde-matière
3.5.5 Linéarisation de l’interaction entre le faisceau THz et l’objet
3.5.6 Tomographie différentielle discrète
3.5.7 Algorithme du calcul de la matrice de Radon dans le cas non linéaire
3.5.8 Méthode de reconstruction
3.5.9 Utilisation de notre proposition basée seulement sur des acquisitions
4 Expérimentations
4.1 Introduction du quatrième chapitre
4.2 Objet cylindrique sans défaut
4.3 Objet cylindrique avec un défaut central
4.4 Objet cylindrique avec un défaut proche du centre
4.5 Objet cylindrique avec un défaut proche de la périphérie
4.6 Réduction de l’incomplétude des mesures
4.7 Objet cubique sans défaut
4.8 Objet cubique avec un défaut proche du centre
4.9 Cas applicatif industriel : taux de suie dans un filtre à particule
Conclusion 

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