Évaluation de l’efficacité des produits d’entretien pour lentilles de contact

Facteurs de virulence de Fusarium

Quelques données existent sur les facteurs de virulence des champignons du genre Fusarium mais principalement documentées à partir des études botaniques. Certains gènes présents au sein des espèces du genre Fusarium sont des gènes de pathogénicité communs à de nombreux champignons. Ces gènes sont impliqués dans des voies de signalisation endogènes ou dans la réception de signaux exogènes. Il s’agit de gènes codant pour : des protéines de la voie de signalisation MAPK (mitogene-activated protein kinase), des protéines impliquées dans les voies de signalisation impliquant les protéines-G, des protéines impliquées dans la voie de signalisation de l’AMPc, ou encore des protéines du «velvet complex» (LaeA/VeA/VelB). La modification d’expression de ces gènes a un impact direct sur la pathogénicité de l’espèce fongique considérée mais les différentes interactions entre ces voies de signalisation et leur impact sur le pouvoir pathogène du Fusarium ne sont pas bien comprises à l’heure actuelle.
On retrouve également des gènes de pathogénicité spécifique selon les espèces de Fusarium. Ces derniers sont directement impliqués dans les interactions hôte-Fusarium. En ce qui concerne les facteurs de virulence sur les hôtes humains ou animaux : Zhang et al. ont rapporté que les facteurs de virulence spécifiques du complexe d’espèce oxysporum, étaient portés par des chromosomes surnuméraires (SP) et qu’une transmission de ces facteurs de virulence était possible par transfert horizontal entre des souches appartenant même parfois à des phylums différents . Ceci suggère des échanges possibles inter-espèces.
On sait que le complexe d’espèce oxysporum possède une habilité exceptionnelle à pénétrer les tissus hôtes . De plus, la capacité des souches de Fusarium à sécréter des toxines influerait notamment sur la réponse immunitaire par l’intermédiaire des lymphocytes T.

Historique de l’entretien des lentilles de contact

Ce sujet semble avoir été peu abordé dans la littérature aussi, des imprécisions demeurent : on peut néanmoins citer Szczotka-Flynn et al. qui traitent ce thème dans un article de 2013 .
Les premiers systèmes de nettoyage des lentilles de contact étaient basés sur la chaleur : une pastille de sel était incorporée à de l’eau distillée, portée à chaud entre 80 et 90°C pendant 10 minutes . Par la suite l’eau distillée a rapidement été remplacée par du sérum physiologique stérile prêt à l’emploi.
Ces systèmes chauffants étaient efficaces contre les microorganismes, mais présentaient l’inconvénient d’être encombrants et destructeur pour les lentilles de contact. Par la suite, les premiers systèmes d’entretien « chimiques » contenant des agents antiseptiques et des conservateurs ont été mis sur le marché. Peu après, sont apparus les produits désinfectants à base de peroxyde d’hydrogène. Dans les deux cas, une étape supplémentaire de rinçage de la lentille par une solution séparée était nécessaire.
Au cours des années 1970, les premiers produits contenant des conservateurs et antiseptiques combinées aux solutions de rinçage sont apparus (premières « Multipurpose solutions » MPS) ; par la suite, des surfactants et des agents lubrifiants ont étés ajoutés aux solutions existantes pour créer des solutions « tout-en-un ».
En dehors du peroxyde d’hydrogène, les premiers agents antiseptiques furent le Thimerosal, des dérivés de chlorure de chlorexidine, des complexes contenant de l’iode ou encore du chlorure de benzalkonium. Tous ces produits se sont révélés irritants voire allergisants. Ils ont désormais été remplacés par le Polyhexamethylène Biguanide (PHMB), le Polyquaternium-1 (PQ-1), le myristamidopropyl diméthylamine (MAPD ou Aldox®) et l’Alexidine (qui appartient à la classe des biguanides).
Historiquement, une étape de détersion mécanique était nécessaire avec les produits d’entretien pour lentilles de contact. Cette étape est momentanément tombée en désuétude vers la fin des années 1990 – le début des années 2000 pour des raisons de facilité et de confort d’utilisation. Depuis l’épidémie de kératite à Fusarium attribuée en partie à ReNu® with MoistureLoc® en 2005, cette étape de détersion mécanique a été petit à petit réinstaurée.
A l’heure actuelle, le consensus est d’inclure une étape de détersion mécanique et une étape de rinçage dans les protocoles de désinfection de lentilles de contact avec une solution « tout-en-un ». Il est à noter que la FDA n’a pas approuvé de solution d’entretien « tout-en-un » avec l’indication «sans détersion mécanique» depuis plusieurs années .

Essais d’efficacité des produits d’entretien sur lentilles de contact

Des suspensions mères de chacune des souches de Fusarium à tester ont été réalisées à une densité optique de 0.3 Mc Farland avant d’être diluées au 1/100ème en RPMI liquide. Différents types de lentilles ont été incubées dans cette suspension fille à température ambiante. Après 24 heures d’incubation, les lentilles ont été récupérées et traitées avec les différents produits d’entretien selon les recommandations du fabricant .
Concrètement : du produit d’entretien était déposé sur la lentille et une étape de détersion mécanique était réalisée par massage des deux faces de la lentille entre la paume de la main et l’index pendant 10 à 20 secondes ; les lentilles étaient rincées avec le produit testé, les lentilles étaient ensuite placées en tube stérile Falcon® 50mL (Corning, UK / Dutscher, France) et immergées dans le produit testé pour une durée de 8 à 10 heures. Pour AO Sept® PLUS + HydraGlyde® (Alcon), aucune étape de détersion mécanique n’a été effectuée (conformément aux instructions d’utilisation) : les lentilles étaient placées dans l’étui adapté fourni avec ce produit et immergées dans la quantité préconisée de solution d’entretien pour une durée de 8 à 10 heures. L’étui à lentille était rincé avec une solution stérile de NaCl à 9‰ et séché à l’air libre entre chaque utilisation (conformément aux recommandations du fabricant).

Comparaison d’efficacité des produits en fonction du type de lentilles de contact utilisé

De façon à évaluer l’influence du type de lentille de contact sur l’efficacité des produits d’entretien ; des tests ont été réalisés avec différents types de lentilles de contact (parmi les plus couramment utilisées) sur la souche de F. sacchari. Cette condition a été retenue car la souche de F. sacchari semble la moins sensible à l’action mécanique de détersion combinée aux produits d’entretien. Il a été observé :  une croissance fongique variable en fonction du modèle de lentille de contact utilisé dans la condition contrôle (sans produit). une absence totale de croissance fongique à conditions équivalente (même souche de Fusarium, même produits testés, même protocole de désinfection des lentilles) sur le modèle de lentilles (CibaVision/Alcon) Dailies® TOTAL 1® ; une persistance de croissance fongique de la souche de Fusarium sacchari à partir des lentilles (Alcon) Dailies® AquaComfort PLUS® après une décontamination avec le produit Precilens B5 de façon isolée.

Généralités sur les Fusariums

Historique et taxonomie : Le genre Fusarium tire son nom du latin fusus car ses spores sont en forme de fuseau. La première description du genre Fusarium a été réalisée par Link en 1809, ce dernier a créé le genre pour y classer des espèces présentant des spores cloisonnées, fusiformes, formées sur des stromas. Ses descriptions étaient basées de l’observation microscopique d’un Fusarium roseum, mais aujourd’hui l’espèce type est F. sambucinum. (Espèce décrite en 1869, également connue sous le nom Fusarium sulphureum) il s’agît d’un pathogène de la pomme de terre . Les premières classifications du genre Fusarium se basaient sur de nombreux critères, outre l’aspect microscopique en fuseau des macroconidies : Une opinion commune à l’époque voulait qu’à une espèce végétale donnée il correspondait un Fusarium spécifique qui constituait alors une espèce fongique à part entière.
Ainsi, l’espèce végétale atteinte, les caractéristiques macroscopiques et microscopiques des colonies fongiques et les capacités de croissance sur différents milieux de culture spécifiques étaient autant d’éléments classant les Fusarium dans différentes espèces. Finalement, sur ces critères, le genre Fusarium comptait plus de 1000 espèces distinctes en 1930. En 1935, Wollenweber & Reinking dans leur ouvrage « Die Fusarien », proposent une nouvelle classification basée uniquement sur les caractéristiques mycologiques du Fusarium, indépendamment de l’hôte végétal. Ils décrivent ainsi : 16 sections, 66 espèces de Fusarium, et 77 sous-variétés (formae speciales). Certaines espèces ainsi décrites sont encore considérées à l’heure actuelle, et leur travail a longtemps servi de base pour la taxonomie des Fusarium.
Par la suite, Snyder et Hansen par leurs travaux dans les années 1940-1950, compilés dans un article publié en 1954, simplifièrent grandement cette classification : le genre Fusarium comportait alors 9 espèces. Ce sont eux qui décrivirent pour la première fois Fusarium solani et Fusarium oxysporum (dont on sait aujourd’hui qu’ils comportent plusieurs espèces distinctes (complexe d’espèce ou « species complex »).
Les années suivantes furent marquées par de nombreux travaux sur la taxonomie des Fusarium, avec parfois des désaccords entre équipes.

Table des matières

I. Introduction 
II. Généralités 
II.1 Généralités sur les Fusariums 
II.1.1 Historique et taxonomie
II.1.2 Taxonomie actuelle
II.1.3 Écologie
II.1.4 Pathogénicité
II.1.5 Facteurs de virulence de Fusarium
II.2 Historique des lentilles de contact 
II.3 Historique de l’entretien des lentilles de contact 
II.4 Objectif de la thèse 
III. Matériel et méthodes
III.1 Souches utilisées 
III.2 Conditions de culture 
III.3 Produits d’entretien utilisés 
III.4 Essai d’efficacité des produits d’entretien 
III.4.1 Essais en milieu liquide
III.4.2 Essais d’efficacité des produits d’entretien sur lentilles de contact
III.5 Statistiques 
IV. Résultats
IV.1 Essais d’efficacité des produits d’entretien en milieu liquide 
IV.2 Essais d’efficacité des produits d’entretien sur lentilles de contact
IV.3 Comparaison d’efficacité des produits en fonction du type de lentilles de contact utilisé 
V. Discussion 
VI. Conclusion 
VII. Annexes 
Annexe 1 : Composition du milieu RPMI
Annexe 2 : Détail des produits à lentilles utilisés 
(Ophtalmic Compagnie) Jazz Comfort®
(Bausch & Lomb) Biotrue
(Horus pharma) Regard®
(Precilens) Precilens® B5
(Alcon)Opti-Free® PUREMOIST®
(CooperVision) Hy-Care®
(Alcon) AO Sept® PLUS + HydraGlyde®
Annexe 3 : Détail des lentilles de contact utilisées 
(Johnson & Johnson) Acuvue® Moist for astigmatism
(Alcon) Dailies® AquaComfort PLUS®
(Alcon / Ciba Vision) Dailies® TOTAL 1®
Annexe 4 : Détail de la classification FDA des matériaux hydrogel 
Détail Groupe I
Détail groupe II
Détail groupe III
Détail groupe IV
Liste des matériaux Silicone-Hydrogel
Groupe V : Sous-groupes
Annexe 5 : Eléments historiques 
VIII. Références

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