HISTOIRE ET NARRATION DANS LE ROMAN DE NATHALIE SARRAUTE

HISTOIRE ET NARRATION DANS LE ROMAN DE NATHALIE SARRAUTE

LA CONFIGURATION DE L’HISTOIRE

C‟est généralement, par commodité que l‟on s‟efforce de désigner à l‟aide de titres brefs des faits littéraires quelque peu complexes. Ainsi la dénomination du chapitre dans notre thèse : la configuration de l‟histoire appelle quelques commentaires, nécessaires au moins pour préciser suivant quels critères les trois romans de Nathalie Sarraute ont été retenus. En fait, le concept, configuration, n‟est pas nouveau en soi. Son usage n‟est pas exclusivement lié à la littérature. On le retrouve dans bien des domaines notamment mathématique, physique qui le définissent en substance, comme un ensemble d‟éléments vérifiant des conditions algébriques ou topographiques de régularité. Si, dans le roman traditionnel, cette condition de régularité a valeur de loi dans la configuration de l‟histoire, dans le Nouveau Roman, la réalité est tout autre. C‟est d‟autant plus remarquable que l‟Histoire du XXe siècle repose sur une dialectique du doute et de l‟incertitude qui ébranle toute croyance et décentre toute vision du monde. Par voie de conséquence, il n‟est pas étonnant, pour notre propos, que la notion de configuration épouse les fondamentaux d‟une époque ténébreuse. Nous aurions dû intituler ce chapitre la destruction de l‟histoire dans Tropismes, Portrait d’un inconnu et Le Planétarium ; mais animé par la volonté de démontrer la manière dont se présente l‟histoire sarrautienne, nous avons jugé nécessaire de conserver ce terme qui pourrait se définir comme la structuration de l‟histoire dans sa dynamique moderne ou plutôt néo-romanesque. Il est évident que les préoccupations exclusivement littéraires de ce chapitre amènent à limiter l‟extension de l‟idée d‟«histoire » et à préciser les caractères de la configuration qui a pris toute son ampleur au sortir de la Deuxième Guerre mondiale. Ainsi, jugeons-nous utile de circonscrire notre travail suivant une triple démarche : l‟écriture satirique et parodique, l‟expression du temps dans l‟histoire et critique du jugement critique. Dans le sous chapitre intitulé l‟écriture satirique et parodique, nous partons du principe que l‟écriture sarrautienne est entichée de données éminemment novatrices qui méritent qu‟on s‟y attarde, pour une raison ou une autre. Ces données sont bien évidemment représentatives de la satire ménipéenne mais aussi cautionnent une certaine polyphonie du texte moderne par opposition au texte classique satirique qui établit une position éthique stable. D‟ailleurs, cette conception de la satire classique est de bonne guerre si l‟on sait qu‟elle est en phase avec les valeurs et idéologies imperméables, rétives à la nouveauté. De plus, l‟analyse parodique nous 96 permettra de mettre en lumière ou plus exactement de cerner l‟angle de la littérature sous lequel Nathalie Sarraute transfigure les classiques de la littérature en même temps voir la signifiance de la parodie de ses textes, si on ose dire figuratifs. Aussi, le second volet de notre analyse portera-t-il sur l‟émanation du temps dans l‟histoire. En effet, la problématique du temps a été longtemps au cœur des préoccupations esthétiques des écrivains notamment ceux d‟obédience néo-romanesque. Car, les soubresauts de l‟Histoire de la seconde moitié ont généré ce que Ben Moustapha Diédhiou128 appelle « la désagrégation du temps » qui se manifeste sous diverses formes : le temps verbal, le temps circulaire, le temps labyrinthique, le temps mythique. Une telle conception du temps de l‟histoire pourrait avoir valeur de loi dans le roman de Nathalie Sarraute plus précisément dans Tropismes, Portrait d’un inconnu, et Le Planétarium. Mais, le temps civil, au sens où l‟entend Pape Mody Niang est-il à sa place dans la représentation que Nathalie Sarraute se fait du temps ? Rien n‟est moins sûr. Cependant tout laisse à croire que la crise de la cohérence temporelle a généré une autre vision du temps qui est l‟écho de l‟incohérence de l‟univers : le temps subjectif, le temps historique. Le temps subjectif se donne à lire très souvent dans la conscience des personnages sarrautiens. Voilà, en substance, le traitement que l‟on voudrait attribuer au temps de l‟histoire qui procède selon les propres mots de Paul Ricœur « autant par l’imitation de cet immense ordre du pensable que par dépassement de l’ordre du vécu» 129 . Enfin, le dernier volet de ce chapitre sera consacré à la critique du jugement esthétique. Nul doute, que la critique comme art de juger les œuvres de l‟esprit, a depuis Scaliger acquis ses lettres de noblesse. Elle était constituée comme une discipline différente de la littérature. Les doctes du XVIIe siècle en ont fait un usage dogmatique, muant en règles contraignantes les conseils donnés par Aristote aux écrivains. Mais, à partir du XXe siècle, on constate que la critique est devenue avec Roland Barthes une forme de littérature. En lieu et place des écrivains-critiques, on assiste à l‟avènement des critiques-écrivains, autrement dit des « romanciers en saucisse ». Ainsi, remarque-t-on dans l‟œuvre de Sarraute une tendance à faire disparaître cette solution de continuité entre la littérature et la critique. D‟où une volonté obsédante de faire une critique de la critique perceptible dans bien de ses romans. Aussi, jugeons-nous nécessaire de voir comment se manifeste la critique du jugement esthétique  chez Nathalie Sarraute, mieux encore comment se manifestent les conditions symboliques de l‟œuvre ?

Ecriture satirique et écriture parodique

Il reste évident que Nathalie Sarraute, dans sa fresque romanesque, entend prendre une certaine distance avec certains procédés éminemment aristotéliciens. Une telle prise de position s‟exprime dans Tropismes, Portrait d’un inconnu et Le Planétarium, romans qui, c‟est le cas de le souligner, occupent une place de choix dans l‟espace néo-romanesque. Ainsi, la double notion d‟écriture satirique et parodique, objet de notre analyse dans cette partie, laisse voir de la part de l‟auteur une volonté manifeste de s‟inscrire dans une dynamique de créativité nouvelle partant de prouver que l‟art n‟est pas une entité figée mais une trouvaille en perpétuelle mutation. Il doit faire l‟objet d‟un travail pérenne si bien évidemment il entend préserver sa légitimité. En fait, cette volonté de rénovation de l‟art ou plus précisément le roman est assujettie au climat ténébreux du XXe siècle qui prévalait. Dès lors que l‟Histoire du XXe siècle n‟est plus une entité transparente, il est tout à fait logique que Sarraute fasse de sa nouvelle démarche une machine de guerre contre l‟humanisme traditionnel. Si, dans le roman traditionnel, la double notion de satire et de parodie a eu des heures de gloire et très perceptible dans le roman néo-romanesque, l‟histoire, de par sa structuration, oscille entre une satire devenue, à présent, une vision du monde et la parodie caractérisée par une certaine transmutation dont les fondamentaux semblent rappeler ceux d‟Alfred Jarry plus précisément La chandelle verte, lumière sur les choses de ce temps. Qu‟en est-il de Tropismes, Portrait d’un inconnu et Le Planétarium ? Comment se manifestent les données représentatives de la satire et de la parodie ? Quel est le statut axiologique de ces trois romans? En quoi la double notion satirique et parodique est-elle une remise en question du texte classique et de la vision du monde de leurs écrivains ? Quelle est la vision du monde de l‟auteur ? C‟est à ces questions que nous tâcherons de répondre tout au long de notre analyse dans cette partie. Ainsi, nous pouvons dire, à l‟évidence, que l‟optique satirique a invariablement été l‟une des questions dont se servent les écrivains pour décrédibiliser un système foncièrement rétif à la nouveauté, au renouvellement de l‟art. Depuis Varron, en passant par Sénèque dans L’Apocolocyntose du Divin Claude, par Erasme de Rotterdam dans L’Éloge de la folie, Rabelais dans Le Tiers Livre et enfin Proust dans A la Recherche du Temps perdu, la satire ménipéenne n‟a cessé de marquer les esprits des grands écrivains dont Nathalie Sarraute. Ses œuvres, à des degrés divers, réutilisent le topique de la satire marquée par une dualité jointe en une symbiose paradoxale du sérieux et du comique. 99 Dans Tropismes, par exemple, dès l‟incipit, l‟emploi des pronoms personnels pluriels anonymes renforcé par le champ lexical de la négativité (« trottoirs, salons », « squares », « façades mortes »). Cest ainsi que nous pouvons lire : « Ils semblaient sourdre de partout, éclos dans la tiédeur un peu moite de l’air, ils s’écoulaient doucement comme s’ils suintaient des murs, des arbres grillagés, des bancs, des trottoirs sales, des squares. Ils s’étiraient en longues grappes sombres entre les façades mortes des maisons. De loin en loin, devant les devantures des magasins, ils formaient des noyaux plus compacts, immobiles, occasionnant quelques remous, comme de légers engorgements » (T, 11). Ici, l‟emploi des pronoms personnels pluriels ou anaphoriques renforcés par le champ lexical de la négativité corrobore l‟optique satirique sarrautienne. De fait, que représentent les « ils » dans la diégèse du récit ? Bien évidemment, les traditionalistes qui, comme le dit le narrateur, en « imitant habilement des montagnes de neige » (T., 12), trempent leur plume dans l‟imaginaire de la création puisque la narratrice les considère telles des figurines. Cette chosification des « il » est symptomatique et met en lumière une double visée satirique, tournant en dérision à la fois une mode littéraire désuète et des prétentions sociales, celles de l‟immobilisme : « ils regardaient longtemps sans bouger, ils restaient là » (ibid.). En outre, il faut souligner que la structure atypique de vingt- trois textes qui forment Tropismes, déroute tout lecteur de romans traditionnels. Car, l‟on ne saurait dire avec exactitude s‟il s‟agit d‟un texte en prose ou d‟un texte poétique. L‟on n‟est même pas tenté de dire que ce roman est situé aux frontières de deux genres : la prose et la poésie. Un tel mélange rappelle parfaitement le contexte historique du drame romantique dont Hugo est l‟un des créateurs. Pour se démarquer des règles classiques et pour mettre en sellette les auteurs classiques, l‟auteur de la Préface de Cromwell souligne : « disons-le hardiment, le temps est venu, et il serait étrange qu’à cette époque, la liberté, comme la lumière pénétrât partout, excepté dans ce qu’il y a de plus nativement libre au monde, les choses de la pensée. Mettons le marteau dans les théories, les poétiques et les systèmes. Jetons bas ce vieux plâtrage qui masque la façade de l’art. Il n’y a ni règles ni modèles ou plutôt il n’y a d’autres règles que les lois générales de la nature, qui placent surl’art tout entier et les lois spéciales qui, pour chaque composition, résultent des conditions propres à chaque sujet »  . Ces propos de Victor Hugo rendent comptent de la liberté dans l‟art dont Sarraute se réclame dans tous ses romans. Pour paraphraser l‟auteur des Contemplations, on dira que la pertinence de ce roman trouve sa légitimité dans l‟harmonie des contraires. Dans Portrait d’un inconnu, la verve satirique se fait plus saisissante. En fait, les fondamentaux de l‟écriture satirique sont, on ne peut plus perceptibles. Il est clair que la structuration du texte pourrait s‟apparenter à un texte en prose d‟autant plus que l‟on remarque de courts récits séparés, de part en part, par des blancs typographiques. Lesquels blancs sont aussi représentatifs de l‟écriture satirique qu‟ils opèrent une nouveauté dans le champ de la création. Mieux, l‟écriture s‟inscrit dans une perspective visant à ridiculiser des prétentions sociales. À la question de savoir quels sont les actants dans la stratégie de communication satirique, répondent qu‟elle met en place trois actants : la cible, le satiriste et les destinataires. Si dans le roman traditionnel, les cibles de la satire sont les institutions littéraires ou scientifiques, les hommes politiques et les ecclésiastiques, dans le Nouveau Roman, les cibles restent les snobs, les femmes, les prétendus écrivains, etc. Ceci est la preuve que l‟écriture satirique a évolué à travers les âges. Portrait d’un inconnu paraît justifié un tel constat, car le narrateur omniscient par vocation et extra diégétique par défaut tente de dénicher les travers des deux personnages principaux du roman : le père et la fille. Voici ce que le narrateur rapporte : « Oh ! Oui, bien sûr, je comprends, mais moi, voyez-vous, ce n’est pas du tout pareil, il n’y a plus que moi au monde, vous savez, depuis la mort de ma pauvre maman… » Elles hochent la tête : « Bien sûr, c’est un égoïste, vraiment des gens comme ça ne devaient pas avoir le droit de mettre au monde des enfants (…). Après tout, il aura beau faire, vous serez toujours sa fille, il sera toujours votre père. On ne va pas contre ça, allez » (P, 58). 

Critique du jugement esthétique

Longtemps, la critique du moins la critique du jugement esthétique avait occupé une place de choix dans le paysage littéraire. Elle a pour objectif majeur de guider et d‟orienter les écrivains soucieux des règles aristotéliciennes vers la production de belles œuvres. Cette autorité de la critique s‟est précisée aux XVIe et XVIIe siècles transformant, de facto, en règles contraignantes l‟héritage laissé par l‟auteur de La Poétique. Ainsi, des écrivains humanistes à l‟image de Scaliger170vont tenter de définir la critique tel un art de juger les œuvres de l‟esprit ou plus exactement le jugement porté sur elles afin de discerner leur mérite et leurs défauts. Au XXe siècle, les néo-romanciers vont opérer un décentrement dans l‟usage qu‟on s‟est fait de la critique classique. Ils s‟inscrivent, de ce point de vue, dans la voie tracée par Victor Hugo, Balzac, Proust, entre autres. Selon ces écrivains la littérature doit, pour une raison ou pour une autre, affirmer les droits de l‟imagination créatrice et dénoncer jusqu‟à la possibilité d‟une analyse cartésienne de la création romanesque. Une telle conception de la critique ne laissera pas de marbre Nathalie Sarraute qui, des Tropismes à «disent les imbéciles », n‟a de cesse de remettre en question la notion aristotélicienne du genre susceptible de guider du dehors le travail de l‟écrivain. C‟est donc dire que l‟auteur des Fruits d’or est, tout comme le romantique Victor Hugo, un écrivain qui prône les « droits de l’originalité(…) à la place du joug de la correction » 171 . Cette liberté dans la création va, bien évidemment bouleverser l‟armature des histoires aristotéliciennes et affirmer sa place dans le paysage restreint de la littérature. Ainsi, dans cet élan novateur, ne devait-on pas nous interroger sur les moyens utilisés par Sarraute pour clouer au pilori la critique traditionnelle mieux la critique barthésienne ? Quelle est l‟originalité de la critique sarrautienne ? Pourquoi s‟est-elle approprié la notion du goût kantienne ? Dans un contexte marqué par un essaim d‟écrivains, comment s‟emploie-t-elle à dénicher la fausseté des intellectuels ? Quelle est sa pensée à l‟égard des structuralistes comme Proust, Flaubert, etc.? Comment appréhende-t-elle la critique vis-à-vis de l‟auteur et  l‟œuvre ? Autant de questions qui nous confortent dans l‟idée que Sarraute est, de tous les écrivains, celle qui a mené une attaque en règle contre les empêcheurs de tourner rond en littérature. Car la littérature est pour elle un lieu d‟expression cybernétique où chacun peut puiser et affirmer sa personnalité en passant outre les observations, les injonctions. L‟examen de cette question se révèle très important en ce sens qu‟elle met au jour une nouvelle trouvaille sarrautienne dont les caractéristiques méritent qu‟on s‟y attarde. On sait prioritairement que Nathalie Sarraute, dans sa pratique de l‟écriture, n‟a guère épargné les intellectuels de sa verve critique. Un tel parti pris trouve sa validité dans sa riche fresque romanesque notamment dans Tropismes, Portrait d’un inconnu et Le Planétarium. Hannah Arendt n‟affirme-t-elle pas que « Le Planétarium et Les Fruits d’or, pris ensemble constituent un réquisitoire le plus sévère jamais adressé aux intellectuels? » Cette affirmation est d‟une pertinence remarquable. Mais elle nous semble quelque peu réductrice. D‟où la nécessité de l‟élargir à l‟ensemble des œuvres de Sarraute. Il est vrai que dans Le Planétarium la critique du jugement esthétique se lit dans la disgrâce du personnage de Germaine Lemaire. Ce personnage dont la psychologie Ŕ s‟il en est une- n‟est pas sans rappeler celle du roi Louis XIV est présenté comme un intellectuel doté d‟un pouvoir en apparence inébranlable. L‟adhésion à son cercle est fonction de son accord dans la mesure où elle est la critique littéraire par excellence. Une personnalité sans qui les projets des futurs écrivains en herbe équivaudraient à un échec. Alain Guimier, l‟un des personnages principaux en a fait les frais. Pour être dans les bonnes grâces de Germaine Lemaire il se donne en spectacle, « se jetant à tout moment dans ses jambes pour chercher une protection… » (P., 117). Mais à la longue, il se rendra compte que cette protection est nulle et non avenue. Germaine Lemaire tombera de son piédestal à cause de son absolutisme (« je sais que j’ai toujours tendance à être trop absolu, trop exclu…») (P., 151). Le commentaire d‟un des personnages de son cercle littéraire est assez révélateur. Il souligne l‟ancrage de Germaine Lemaire dans les valeurs éminemment classiques : « j’ai toujours dit que Maine était un type d’un autre siècle, un personnage de la Renaissance : Elisabeth d’Angleterre … César Borgia…Elle pense qu’elle peut permettre n’importe quoi. Elle se sent hors de la norme commune. Hors des règles morales mesquines à la mesure des petites gens… » (Ibid.). 172 Arendt (Hannah),( « Les fruits d’or: Nathalie Sarraute », The Ne w York Review of books, 1964), citée par Pascale Foutrier, Éthiques du Tropisme, Paris, L‟Harmattan, 2000 , p.85. 134 Ces propos jettent une lumière éclairante sur l‟antagonisme qui oppose les néo-romanciers aux critiques classiques très rétifs à une certaine liberté dans l‟art. Si l‟on admet avec André Gide repris par Camus que « l’art vit de contrainte et meurt de liberté »  , avec Nathalie Sarraute, la réalité est autre : l‟art se doit de s‟affranchir des contraintes pour mieux affirmer son originalité, sa spécificité. Dans Les Fruits d’or, le roman de Bréhier, un des personnages principaux est sous le feu des critiques les plus acerbes. Ce roman bâti sur la vacuité Ŕaucune histoire, aucune intriguedu récit, la critique de la critique y est une constante, car, la publication du roman de Bréhier fait l‟objet d‟un débat sur la pertinence ou l‟importance de l‟ouvrage. Les uns estiment que ce roman est « nul. C’est un livre nul. Il commence comme ça. Tous les affamés, tous les frustrés jubilent. Nul. Annuler. Tout s’annule. Il ne reste rien ». (F.O., 81). Les autres pensent que : « Les Fruits d’or, c’est le meilleur livre qu’on écrit depuis quinze ans » (F.O., 58). Ces deux analyses sur le roman confirment le principe selon lequel l‟œuvre ne doit guère être l‟apanage des tenants de « l’académisme » (F.O, 131) mais l‟affaire de tout lecteur désireux de produire son propre sens. Tout comme dans Le Planétarium, dans Les Fruits d’or, le personnage de Bréhier auteur dudit roman constitue une cible pour les critiques littéraires comme Jean-Pierre lorsqu‟il tente de comparer son mauvais goût avec celui de Rimbaud : « Rimbaud était exactement comme Bréhier…Rimbaud aimait aussi tout cela, vous le savez : les peintures idiotes, les livres érotiques sans orthographe, les petits livres de l’enfance, les refrains niais, la littérature démodée…Rimbaud aussi…comme Bréhier… » (F.O, 142-143). Ces propos de Jean-Pierre et le vocabulaire dépréciatif qui le sous-tend rendent véritablement compte de la chute de Bréhier. Cette chute trouve sa justification dans l‟idée que l‟œuvre n‟est qu‟une représentation de l‟humaine condition. Ce qui constitue, aux yeux de Sarraute, une erreur d‟appréciation car la vie de l‟auteur ne doit guère être la seule clé de compréhension de l‟œuvre. L‟œuvre se veut polysémique. Sur ce cas précis, nous y reviendrons plus amplement. Retenons au passage que Sarraute, en mettant sur la sellette ses personnages dotés d‟une prétendue autorité, elle nous expose à la lancinante question de la fausseté des intellectuels.

Table des matières

Première Partie : HISTOIRE
Chapitre I : Poids de l’histoire
I-1 : De l‟insignifiance de l‟histoire à la quête du sens
I-2 : De l‟esprit de la mémoire sarrautienne
I-3 : De la ponctuation sarrautienne
Chapitre II : Configuration de l’histoire
II-1 Ecriture satirique et écriture parodique
II-2 : Critique du jugement esthétique
Deuxième Partie : ESTHETIQUE DE LA NARRATION
Chapitre III : Fondamentaux de la narration
III-1 : De la temporalité au chronotope
III-2 : De l‟invasion descriptive à la description génératrice
Chapitre IV : Modes de la représentation narrative
IV-1 : Niveaux narratifs
IV-2 : Spécificité du lecteur sarrautien
Troisième partie : POETIQUE DU RECIT
Chapitre V : Sémiotique narrative
V-1 : Poétique du langage
V-2 : Déconstruction ou déshumanisation du personnage.
Chapitre VI : Fiction du récit
VI- 1 : Déconstruction du récit
VI-2 : Du monologue intérieur à la sous-conversation
Conclusion Générale
BIBLIOGRAPHIE
INDEX
INDEX NOMINUM
INDEX RERUM

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