La limitation des atteintes à l’inviolabilité du secret des correspondances

La limitation des atteintes à l’inviolabilité du secret des correspondances

Le secret des correspondances et le respect de la vie privée

Le respect de la vie privée est introuvable dans la Constitution de 1958, avec de l’imagination on peut le découvrir dans la Déclaration de 1789, à travers la référence à la liberté. Sa protection est ainsi confrontée, aujourd’hui, aux difficultés d’ordre technique et juridique. Elle doit aussi être conciliée avec le droit à la communication et d’expression ou à l’information. D’autant que : « les progrès récents des sciences et des NTIC, ont rendu les communications entre les hommes plus nombreuses, plus faciles et plus rapides, et ont eu pour contrepartie de faire naître de graves menaces pour le secret de leur vie privée » 421 . Ils’agit de se demander quelle est la place des correspondances privées dans le droit constitutionnel. Le caractère privé et secret des correspondances, principe qui découle de l’article 9 du Code civil 422 . La correspondance privée existe lorsque le message est exclusivement destiné à une ou plusieurs personnes, physiques ou morales, déterminées et individualisées. En pratique, à l’ère du numérique, cette définition traditionnelle s’applique aujourd’hui aux courriers électroniques, à la messagerie instantanée, aux listes de discussions, lorsque la détermination des destinataires est possible de manière sûre et précise, en fonction de certains éléments, préalablement vérifiés, ou encore aux échanges sur les profils ou moyens de communication privés des réseaux sociaux, tels : Facebook, Whatsapp, Instagram. Ce droit qui initialement était uniquement formulé pour les courriers postaux est à l’ère du numérique applicable aux communications électroniques 423 . Le principe juridique du caractère privé et secret des correspondances est susceptible d’être législativement limité. Par conséquent, le Conseil constitutionnel le consacre tout en autorisant des dérogations.

Les mails utilisés dans le cadre du travail

Selon une jurisprudence constante notamment depuis l’arrêt Nikon 424 , ces mails sont présumés professionnels et donc accessibles au contrôle de l’employeur. Dans la mesure où l’employeur met à la disposition des salariés des outils de communication, le droit français présume que toute communication qui est menée est de nature professionnelle, et ceci induit plusieurs conséquences. D’une part, l’employeur peut contrôler les flux des communications, l’usage qui en est fait et peut accéder au contenu des communications. Toutefois, pour accéder au contenu des communications il doit respecter certaines conditions, tout d’abord la CNIL impose que l’employeur informe les salariés de la possibilité qu’il se réserve d’accéder au communications, d’autre part l’employeur ne doit accéder au contenu des communications qu’à la condition qu’ils n’existent pas d’autres moyens moins intrusifs pour parvenir à l’objectif recherché conformément à l’arrêt du 5 septembre 2017 de la Cour EDH, Barbulescu c/ Roumanie425. Enfin l’employeur ne peut avoir accès aux correspondances privées des salariés. On pourrait supposer que le destinataire du message donnera une réponse sur le caractère privé ou non, par exemple le contenu serait privé si le destinataire est une personne de la famille, et a contrario il serait professionnel parce-que le destinataire est un collègue, un client, un fournisseur. En réalité, la règle retenue c’est celle qui a été posée par la Cour de cassation avec l’arrêt Nikon, concrètement l’employé doit écrire : « privé ou personnel », dans l’objet de son mail pour que l’employeur sache, s’il s’avisait de vérifier, que le contenu des correspondances est privé et qu’il n’a pas le droit d’y accéder. Cependant il faut savoir que l’employeur peut tenter d’accéder à ces communications privées sous certaines conditions : soit en demandant une autorisation à un magistrat, soit en le faisant en présence du salarié.

La distinction de deux cas de figure : contentieux et non contentieux

Dans le cas non contentieux, où le salarié n’a pas de problèmes avec son employeur mais qui a des doutes sur les pratiques de l’employeur quant à l’accès au contenu de sa messagerie, ce salarié peut saisir la CNIL, et la CNIL le cas échéant engagera une enquête et vérifiera quelles sont les pratiques de l’employeur en la matière. Le cas de figure plus problématique est celui contentieux, si un salarié fait l’objet de mesures disciplinaires à raison du contenu de ses  mails par exemple, il pourra, devant le Conseil des Prud’hommes, d’une part contester la recevabilité de la preuve, étant précisé le fait que les salariés n’étant pas prévenus que l’employeur accède aux contenus n’est pas en soi un motif d’irrecevabilité. D’autre part, le deuxième recours possible est de déposer plainte, puisque l’accès par toute personne à une correspondance privée est puni par la loi426 . Lorsqu’on analyse la jurisprudence du Conseil constitutionnel et le bloc de constitutionnalité on constate que le Conseil constitutionnel souligne l’importance qu’il donne à la libre communication lors du contrôle de constitutionnalité des lois sur la surveillance des correspondances en ligne, notamment depuis la loi sur le renseignement de 2015 (§ 1), tout en affirmant de façon nuancée le secret des correspondances (§ 2). 

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