La microfluidique

 La microfluidique

Ecoulement et mélange en microfluidique

En microfluidique, les fluides sont manipulés dans des structures dont les dimensions varient entre 1 et 100 µm environ. Le comportement d’un fluide dans un volume aussi restreint a un certain nombre de particularités. Ces changements de comportement concernent principalement les phénomènes d’écoulement et de mélange.

Ecoulement

Le nombre de Reynolds permet de déterminer le régime d’écoulement en mécanique des fluides. Il permet de définir 3 états d’écoulement : laminaire caractérisé par un nombre de Reynolds faible, transitoire et turbulent pour des nombres de Reynolds plus élevés. Le nombre de Reynolds découle des équations de Navier-Stokes et représente un rapport entre les forces d’inertie et celles liées à la viscosité du fluide étudié. Il est appliqué à plusieurs domaines notamment dans l’étude de l’aérodynamisme d’un objet volant. Sa forme qui nous intéresse ici sera celle caractérisant l’écoulement d’un fluide dans un tuyau. Il est défini par l’équation suivante : avec V = vitesse caractéristique du fluide (m.s-1); L = dimension caractéristique (m); v = viscosité cinématique (µ/ ) (m2.s-1); masse volumique du fluide kg.m-3; µ viscosité dynamique : kg.m-1s -1) L’écoulement est laminaire pour des valeurs du nombre de Reynolds très faibles (~1), transitoire si le nombre de Reynolds est entre 2000 et 3000 et enfin turbulent au-delà de 3000.Si on prend l’exemple d’une solution aqueuse s’écoulant dans un canal cylindrique d’1 mm de diamètre interne et de 10 cm de longueur, le nombre de Reynolds est de 0,76. Malgré des dimensions supérieures à celles d’un dispositif microfluidique, les conditions d’un écoulement laminaire sont remplies. Les écoulements dans les dispositifs microfluidiques sont caractérisés par des nombres de Reynolds très faible (inférieur à 1) donc un l’écoulement y est laminaire. Ce flux laminaire va avoir de grandes conséquences sur le mélange au sein des dispositifs microfluidiques. Pour générer l’écoulement dans un dispositif microfluidique, il faut choisir un mode d’actuation. L’intérêt de la miniaturisation est de disposer d’un petit appareil amovible et disposant de toutes les fonctions intégrées (pompage, écoulement, détection). Cependant, l’intégration d’un mode d’actuation au dispositif microfluidique n’est pas toujours évidente. On trouve ainsi des modes de pompage internes et externes. L’écoulement dans les systèmes microfluidiques est généré principalement par application de pression PDF (Pressure Driven Flow ou flux par application de pression) ou par EOF (flux électroosmotique)39 . Modes de pompage internes : les modes d’actuation ou de pompage internes présentent l’avantage de rendre le dispositif microfluidique autonome avec l’intégration ~ 43 ~ de la fonction de pompage. On peut citer dans cette catégorie les modes de pompage électroosmotique, thermique, piezoélectrique40, par capillarité40 . Le mode de pompage interne le plus utilisé est sans doute le pompage électroosmotique. Dans ce cas de figure, l’écoulement est généré par application d’un champ électrique. L’application d’une tension électrique entre l’entrée et la sortie d’un canal microfluidique dont les parois sont chargées négativement (groupement SiO- verre, silice) entraine l’accumulation de cations sur les parois. Une couche de contre-ions fixes se forme sur les parois tandis que les contre-ions les plus éloignés de la surface vont se mettre en mouvement et générer un flux électroosmotique(EOF )41 . Le flux électroosmotique dépend fortement de la chimie de surface des matériaux utilisés et n’est pas applicable aux liquides non polaires42. Par ailleurs, l’application d’un champ électrique non adapté entraine l’apparition de bulles de gaz ou de gradient de pH. Il est généralement impossible de contrôler le débit dans un pompage électroosmotique. Le couplage d’un dispositif microfluidique intégrant un pompage électroosmotique à la MS est généralement plus complexe du fait de la nécessité de séparer la tension du flux électroosmotique de celle de la source ESI. Modes de pompage externe : l’utilisation d’un pompage externe est généralement plus simple. Il se résume à la connexion de la puce microfluidique à une pompe externe ou une pousse-seringue pour générer un flux par application de pression (PDF : Pressure Driven Flow). C’est l’approche la plus utilisée car elle est indépendante de la chimie de surface et de la polarité du liquide. Récemment, des pompes ont été développés spécialement pour les puces microfluidiques, offrant la possibilité de contrôler la pression et le débit. Le flux généré par PDF est par ailleurs caractérisé par un profil parabolique, ce qui n’est pas très adapté aux dispositifs destinés à la séparation. La force centrifuge peut aussi être utilisée pour le transport des liquides dans un dispositif microfluidique. En effet, la rotation d’un dispositif microfluidique en forme de disque a permis de transporter le fluide dans les canaux microfluidiques grâce à la force centrifuge.

Mélange

Le caractère laminaire de l’écoulement dans les dispositifs microfluidiques a plusieurs avantages dont la possibilité de travailler avec 2 phases non miscibles : la microfluidique en gouttes. Cependant, la lenteur du mélange dans un canal microfluidique représente un inconvénient pour bon nombre d’applications en chimie organique ou en chimie analytique. Des structures appelées mixeurs ont donc été pensées et intégrées dans les puces microfluidiques afin d’accélérer le mélange. Le mélange est dû à 2 phénomènes : la convection et la diffusion. L’importance relative de ces 2 phénomène peut être déterminée en calculant le nombre de Peclet. Le nombre de Peclet est sans dimension et est défini par l’équation suivante :  avec l = longueur caractéristique; u vitesse de l’écoulement; D : Coefficient de diffusion Si Pe>>1 la diffusion peut être négligée et si Pe<<1 c’est la convection qui devient négligeable44. Cependant, la valeur numérique du nombre de Peclet peut être trompeuse quand il s’agit de dispositif microfluidique si on ne prend pas en compte le caractère laminaire de l’écoulement. En effet, l’écoulement laminaire dans les canaux microfluidique fait que la diffusion est largement dominante et la convection est même négligeable. Ce mélange lent est un inconvénient pour les dispositifs destinés aux réactions chimiques basées sur le mélange de 2 réactifs. Il peut aussi être mis à profit pour la mise en place d’un gradient de concentration45. Des mixeurs microfluidiques ont été développés pour accélérer le mélange. Ils peuvent être caractérisés selon le mécanisme physique en focalisation hydrodynamique, injection alternée, effet géométrique, méthode électrokinétique, fusion de gouttes et agitation particulaire46 .

Avantages et inconvénients des systèmes microfluidiques

Il faut considérer les performances analytiques de la miniaturisation pour évaluer si elles peuvent dépasser celles des appareils de paillasse. En effet, les nombres sans dimension (comme le nombre de Peclet, le nombre de Fourier, le nombre de Bodenstein) permettent de décrire les microsystèmes et comparer leurs performances aux systèmes classiques. La diffusion des molécules est beaucoup plus importante dans les systèmes miniaturisés car elle est proportionnelle à la dimension caractéristique du du système47 . En pratique ceci signifie que la diminution à 1/10 du diamètre interne d’une colonne de séparation entraine une réduction non négligeable du temps d’analyse. La miniaturisation permet d’utiliser une plus faible quantité de réactifs et d’échantillon. Cette diminution ne se fait pas généralement au détriment de la qualité des résultats. Elle permet par ailleurs d’amoindrir le coût d’une expérience ainsi que son impact sur l’environnement. La miniaturisation présente donc des avantages financiers et écologiques.

La microfabrication

La microfabrication est un ensemble de procédés permettant d’usiner des objets dont les dimensions sont comprises entre le micromètre et le millimètre. Elle vient en partie du secteur de l’électronique, notamment de la fabrication des semi-conducteurs pour les circuits intégrés. Les objets microfabriqués peuvent inclure des structures mobiles ou statiques48. Comme structures mobiles, on peut citer les valves et comme structures statiques, les canaux microfluidiques, les chambres de réaction… L’utilisation de ces objets a ouvert un nouveau champ expérimental appelé microfluidique. Elle est définie comme étant un domaine de sciences et technologies permettant de manipuler de très faibles quantités de fluide en utilisant des canaux de l’ordre du micromètre49. La microfabrication est basée sur les principaux procédés que sont la photolithographie, le dépôt sur couche mince, la gravure chimique et physique, l’usinage laser, les méthodes de moulage… Pour la fabrication d’une puce, on peut avoir recours à un ou une combinaison de ces procédés. Les premiers dispositifs étaient fabriqués en silicium ou en verre qui sont les principaux matériaux utilisés dans l’industrie électronique. Le premier dispositif microfluidique ~ 45 ~ développé par Manz et al., était en verre et silicium fabriqué avec les méthodes conventionnelles de l’industrie micro-électronique comme la photolithographie et la gravure50. Ces méthodes sont précises, mais très coûteuses, sont peu flexibles et pas adaptées à un travail de recherche. En biologie (culture cellulaire par exemple), les matériaux comme le silicium ont vite été remplacés par des matériaux moins couteux et plus adaptés aux applications biologiques comme le PDMS. Etant donnés la taille micrométrique des objets fabriqués, la microfabrication est réalisée dans un environnement propre avec un minimum de particules par mètre cube. Les techniques de microfabrication sont en général sensibles à l’humidité et à la température d’où la nécessité de contrôler ces paramètres dans l’environnement de travail. 

L’environnement

La fabrication de microstructures dont la taille est de l’ordre du micromètre nécessite un environnement propre et contrôlé pour assurer le bon déroulement des procédés de microfabrication et amoindrir le risque de défaut de fabrication. La première exigence pour la microfabrication concerne le nombre de particules dans l’air qui doit être maintenu à un niveau le plus faible possible. Un échantillon typique d’air intérieur peut contenir entre 500 000 et 1 million de particules par mètre cube51. Ces particules sont de taille micrométrique et ont tendance à s’adsorber sur les surfaces. Le dépôt de ces particules sur les surfaces destinées aux microstructures conduit directement à un défaut de fabrication. Les produits utilisés (résine photosensible, polymères, solvants, eau ultra pure) doivent aussi être préservés de ces particules. Il est donc nécessaire de travailler et de stocker ces produits en atmosphère contrôlée ou « salle propre »(Clean room). Une « salle propre » est définie comme étant un environnement au sein duquel le nombre de particules (poussière, insecte, aérosols) est maintenu à un faible niveau. Par ailleurs, la température est contrôlée (environ 20°C) ainsi que l’humidité (environ 25%) et l’air filtré en permanence. Les particules sont de différentes tailles, de différents types et différentes origines. Elles peuvent provenir des cheveux humains (en moyenne entre 50 et 70 microns), des pollens (entre 30 et 50 microns), des bactéries (entre 2 et 10 microns) et enfin d’autres particules de plus petite taille aux origines et nature diverses. L’air extérieur (trafic automobile, végétation, vent..) et l’opérateur représentent les principales sources de particules. Des dispositions sont prises pour forcer la circulation de l’air dans un unique sens : de l’intérieur vers l’extérieur de la salle (avec ou sans recirculation). Le passage de l’air entrant est forcé à travers des filtres capables de retenir des particules aussi petites que 0,5 microns. Malgré cette filtration de l’air, les « salles propres » contiennent quand même des particules. Elles sont donc classées selon le nombre et la taille des particules présentes dans l’air. Cette classification est définie par l’Organisation Internationale des standardisations (ISO, Tableau 3). 

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