La nature dans Paul et Virginie (1788) de Bernardin de Saint-Pierre

La nature dans Paul et Virginie (1788) de
Bernardin de Saint-Pierre

Présentation des trois auteurs et de leurs ouvrages 

À l’heure d’entamer l’étude de la nature dans nos trois œuvres, nous jugeons nécessaire de rappeler quelques informations relatives à la vie et l’œuvre de leursauteur parce que celles-ci, d’une manière ou d’une autre, vont nous aider à comprendre les sources d’inspirations littéraires et les raisons pour lesquelles leur auteur sont inséparablement liés à l’univers naturel. Dans un premier temps, nous procéderons à la présentation de Saint-Pierre et Paul et Virginie en nous référant, des fois, au thème de la nature. Les sous-chapitres dédiés à Chateaubriand et Jorge Isaacs suivront.

Bernardin de Saint-Pierre

Bernardin de Saint-Pierre, le plus âgé parmi eux, est né au Havre le 19 janvier 1737. Doté d’une sensibilité irritable et nerveuse, et d’une grande imagination, il a manifesté, depuis sa tendre enfance, son penchant pour les promenades solitaires à côté de la mer et pour la campagne, véritable passion pour le spectacle de la nature. À cette même époque, un de ses oncles, capitaine de la marine marchande, l’emmènait à la Martinique. Il en revenaitt dégoûté des voyages et de la mer : «Je déteste la mer… je pensais mourir du mal du pays»  , disait-il. La traversée du banc de TerreNeuve, dans le froid, dans la nuit, enveloppé d’une épaisse brume, lui fit une impression terrible, qu’il n’oublia jamais. En 1767, à l’âge de 29 ans, il est nommé capitaine ingénieur du Roi à l’Île de France. Il y passe trois ans et il rentre joyeux après s’être débarrassé de la population et du paysage hostile de la colonie112. Se retrouvant sans poste, il se reconvertit dans la littérature. Il fréquente le salon philosophique de Mademoiselle de Lespinasse et celui de Madame Necker où il se lie d’amitié avec Jean-Jacques Rousseau avec qui il partage non seulement l’amour de la nature, mais aussi l’horreur de la civilisation. En 1792, à l’âge de 50 ans, il se marie pour la première fois avec une fille de 20 ans; Félicité Didot. De cette union, il a deux enfants : Pablo, mort jeune, et Virginie, mariée à un général de l’armée. Plus tard, cette dame devient orpheline à cause de la disparition de sa mère. Ainsi, en 1800, Saint-Pierre se remarie avec Désirée de Pellport, une jeune et belle fille qui apaise ses dernières années avant sa mort, dans sa campagne d’Eragny, au bord de l’Oise, le 21 janvier 1814, lorsqu’il vient de terminer la rédaction de son ouvrage intitulé Harmonie de la Nature. De son vivant, il publie un grand ouvrage consacré à la nature -Études de la naturedont une partie est Paul et Virginie. Ce roman, très connu, raconte l’histoire de deux femmes françaises, Mme. de la Tour et Marguerite, qui habitent l’Île de France ; actuelle Île Maurice. Mme. de la Tour vient d’une famille riche et ancienne. Elle a épousé un homme qui appartenait à une classe sociale qui ne convenait pas à la famille de la Tour. Mme. de la Tour étant repoussée à son tour, quitte la France avec son mari pour aller vivre dans l’océan Indien. Alors qu’elle est enceinte, son mari meurt. D’une famille moins renommée, Marguerite fuit la France par honte: elle s’est retrouvée enceinte d’un gentilhomme qui lui avait promis le mariage et qui s’est désisté après. Ces deux femmes se rencontrent sur cette île et décident de vivre ensemble, chacune dans sa maison, mais l’une à côté de l’autre. Mme. de la Tour met au monde une fille, Virginie, et Marguerite, un fils qui prend le nom Paul. Ces deux enfants grandissent ensemble et leurs mères conviennent de leur mariage lorsqu’ils seront en âge de se marier. Mais les deux mamans estiment nécessaires que Paul et Virginie aient une fortune ou un revenu leur assurant une existence digne. Un jour, une tante de Mme. de la Tour invite Virginie à venir chez elle, en France, pour lui donner une éducation mondaine et lui léguer sa fortune. Paul et Virginie sont accablés de douleur face à cette séparation, mais Virginie obéit et part en France. Pendant les années de séparation, Paul meurt d’envie de la voir revenir, alors qu’elle rêve de retrouver la vie simple et heureuse de l’Île de France. Le jour de son retour, à hauteur de la côte de l’Île, le bateau qui ramène Virginie coule et celle-ci meurt noyée. Peu de temps après, le chagrin tue aussi Paul et les deux femmes. Paul et Virginie peut être vu comme la description d’un monde primitif et champêtre dont se sert son auteur pour mettre en évidence plusieurs grandes vérités, entre autres celle selon laquelle «notre bonheur consiste à vivre selon la nature et la vertu»113 . La tendresse des sentiments, la bonté naturelle des personnages, leur mépris pour la vie civilisée et leur amour pour la nature dotent cet ouvrage d’un clair esprit romantique.

 François René de Chateaubrian

Annoncé par Rousseau et Saint-Pierre, François René de Chateaubriand, l’auteur le plus célèbre parmi eux, est considéré egalement comme une grande figure du Romantisme français. Né à Saint-Malo le 4 septembre 1768, sur la côte atlantique, il passe là les premières années de son enfance ; au bord de la mer, il découvre alors ses premiers oiseaux : «Là, je m’amusais à voir les pingouins et les muettes»115 . Sa naissance aurait sans doute pu l’orienter vers la carrière maritime, mais il échoua dans sa tentation de devenir Garde côte. Pour passer son examen, le jeune adolescent voyage à Brest, et là il passe tout son temps dans le port, entre la mer et les oiseaux marins: «Tantôt regardant couler l’eau, tantôt suivant des yeux le vol de la corneille marine… je tombais dans la plus profonde rêverie»116 . En ce moment crucial de son existence, un fait vient le marquer profondément : la découverte des forêts de Combourg, en Bretagne, lorsque l’enfant compte dix ans. Il y réside avec sa famille jusqu’à l’âge de dix-huit ans. René, une transposition de sa propre biographie, le prouve en ces termes : «Chaque automne, je revenais au château paternel, situé au milieu des forêts, près d’un lac, dans une province reculée». Ce sera l’époque la plus heureuse et la plus décisive de sa vie. Le penchant pour les oiseaux se voit renforcer dans ces années de délire à Combourg : «j’avais établi un siège, comme un nid, dans un de ces saules : là, isolé entre le ciel et la terre, je passais des heures avec des fauvettes» . L’assimilation aux oiseaux dans ses jeux et à un si jeune âge est très marquée, puisqu’il s’est créé une espèce de nid et passe des heures entières entre eux comme un oiseau de plus. Alors, il manifeste déjà une passion spéciale pour les hirondelles, son oiseau favori de toujours. Les Mémoires d’Outre-tombe nous donnent une multitude d’exemples fondamentales de «Ces hirondelles compagnes de mon enfance»119, qui apparaissent aussi dans René, œuvre de fiction où l’enfance rêveuse du protagoniste ressemble beaucoup à celui de l’auteur: «Tantôt de nos yeux innocents, nous poursuivions l’hirondelle dans la prairie». Le dénominateur commun de ces années a été la solitude qui a laissé une trace profonde sur son caractère. Dans l’obscure tour de Combourg, il n’a compté que sur ses fidèles amis. Des oiseaux crépusculaires ou nocturnes lui ont causé tant d’impression: «Quelques martinets qui, durant l’été, s’enfonçaient en criant dans les trous des murs, étaient mes seuls compagnons… Des chouettes, voletant d’une tour à l’autre, passant et repassant entre la lune et moi, dessinaient sur mes rideaux l’ombre mobile de leurs ailes». Plus tard, il commence une carrière militaire, qu’il abandonne par la suite. Les armes ne semblent pas non plus être sa véritable vocation. Détaché à Normandie, il s’échappe chaque fois qu’il peut pour aller au cimetière où il y a des distractions les plus conformes avec son caractère: «Mes compagnons étaient les morts, quelques oiseaux et le soleil qui se couchait» . Le reste de sa vie a été un voyage continue, et les oiseaux toujours présents, toujours reconnus comme des amis: les corbeaux à Berlin, de vieux corbeaux, mes éternels amis ; «les cigognes en Athènes et en Amérique, ces oiseaux furent souvent les compagnons de mes courses dans les solitudes de l’Amérique… Je n’ai pu m’empêcher de parler un peu de mes anciens amis»  . Blessé dans l’assaut de Thionville et croyant imminent sa mort, la dernière sensation captée, avant de s’évanouir sur les Ardennes, c’est le chant d’un bouvreuil : «Le dernier bruit que j’entendis était la chute d’une feuille et le sifflement d’un bouvreuil»125 . Dans son enfance et son adolescence des forêts de Combourg, il acquit sans doute le goût pour les plantes, et spécialement pour les fleurs. C’est là où a commencé sa passion pour les longues promenades, de Amélie et de René : «Nous aimions…à parcourir les bois à la chute des feuilles : promenades dont le souvenir remplit encore mon âme de délices»126 . Ou, si l’on préfère, de François et de Lucile : «Notre principal désennuie consistait à nous promener côte à côte dans le grand Mail, au printemps sur un tapis de primevères, en automne sur un lit de feuilles séchées»127. Et avec ces promenades, la découverte d’un paysage qui laissera un souvenir très vivant sur Chateaubriand c’est celui de La Bretagne. Il cherchera partout des images de cette Bretagne avec «ses bruyères terminées par des forêts»128 . En plus de jouir de sa vue, cueillir des fleurs dans les champs sera un de ses penchants les plus durables. Même les fleurs composent sa tenue. Il a toujours aimé porter une petite fleur à la boutonnière : «N’ayant à ma boutonnière qu’une petite fleur, selon ma coutume»129 . Ses fleurs préférées l’accompagneront le jour de sa mort dans un geste délicat d’une des femmes qui l’ont le plus aimé, Mme. Récamier: «Le matin du 4 juillet 1848… il expira…Et Mme. Récamier, entrée en tâtonnant, épingla sur le drap quelques branches de verveine, -Fleur favorite de René, fleur magique des anciens Druites et de Velléda»130 . Au penchant de Chateaubriand pour les fleurs, vient s’ajouter un aspect, une touche, qui correspond entièrement à une caractéristique romantique; l’amour pour les lieux abandonnés et pour les plantes négligées. Le jeune Chateaubriand remarque ces plantes lorsqu’il va faire un dernier adieu aux forêts et au château paternel abandonné : «Je m’arrêtai à regarder le charbon qui croissait au pied des murs, les feuilles qui jonchaient le seuil des portes…le violier jaune croissait entre leurs pierres déjointes et tremblantes» . 

Table des matières

INTRODUCTION
Chapitres préliminaires: Cadre théorique
Chapitre 1: Autour de la Nature
Chapitre 2: Présentation des trois auteurs et de leurs ouvrages
PREMIÈRE PARTIE: Les éléments inanimés de la Nature
Chapitre 1: Le monde cosmique
Chapitre 2: Le monde terrestre
DEUXIÈMEPARTIE: Les éléments animés de la Nature
Chapitre 1: La flore
Chapitre 2: La faune
TROISIÈME PARTIE: Les éléments humains
Chapitre 1: Les personnages
Chapitre 2: La religion, les habitudes, les traditions et le calendrier naturel
CONCLUSION

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