Le conflit, genèse et progression

Le conflit, genèse et progression

Le conflit s’installe de manière très organisée malgré une apparente confusion. 11Début d’une concertation -> Point de fracture -> Conflit est le schéma relativement classique de déclenchement du conflit. L’origine d’un conflit se situe dans la non-définition stricte du « ownership right » (propriété et usage strictement dévolu à un usager), qui se distingue du « property right » (droit d’usage ou de passage), signifiant qu’en dehors d’un droit exclusif de propriété, un territoire ou une infrastructure laissée à l’usufruit de plusieurs types d’usagers est un potentiel lieu de conflits12. La puissance publique éprouve de fait des difficultés à organiser la multifonctionnalité d’un bien, car ces droits d’usages et de propriétés viennent à se confronter. On remarquera ainsi les velléités des instances gouvernementales à acquérir les parcelles constitutives de certains sites remarquables, tel que cela se produit lors de la mise en place d’un Parc National. Il s’avère que certaines recherches ont déjà été réalisées dans ce domaine, notamment sur la multifonctionnalité des espaces ruraux (Torre et al.)13, sur la transformation des processus de débat public liés aux projets d’aménagements, ou encore sur les diverses procédures de gestion concertée des usages des espaces. Nous assistons depuis quelques années à une recrudescence marquée du nombre de conflits liés aux usages et aux mutations de l’espace, ce phénomène est explicable en grande partie par la conjoncture actuelle. 14 En effet, sur un territoire qui voit le réseau d’acteurs se complexifier, et ses « zones inoccupées » se restreindre, il est inévitable de voir une augmentation du nombre de conflits. Les usagers, les représentants de divers intérêts ainsi que les gestionnaires des espaces se confrontent dans un contexte de transformation des cadres réglementaires et administratifs (redécoupage des territoires, effets induits de la décentralisation, « mille-feuilles administratif » français etc.).15 On constate également que la population est de plus en plus informée, concernée, et que les compétences des associations se précisent. La prise de parole croissante lors des réunions de concertation et des consultations publiques montre que les questions d’aménagement ne sont plus aujourd’hui réservées aux autorités et aux professionnels du secteur, ce qui se traduit par une montée remarquée des expressions et des revendications locales.

Les conflits d’usages sont le fait d’acteurs qui revendiquent un même espace ou une même ressource pour des usages qui entrent en concurrence. Il existe ainsi cinq grands types d’interactions conflictuelles, qui peuvent être distinguées selon les incompatibilités qu’elles traduisent: le conflit par incompatibilité absolue, par compatibilité conditionnelle ou relative, par anticipation et enfin divergence16. Les travaux les plus récents de ces auteurs mènent à une représentation graphique simple des liens existants dans les conflits entre acteurs. La typologie utilisée et que nous avons repris afin de proposer une représentation des types de conflit est la suivante : Plus récemment, la notion d’espace public s’est vu enrichie par les travaux de nombreux sociologues tel Jürgen Habermas17, qui le définit comme le lieu dans lequel se déroule « le processus au cours duquel le public constitué d’individus faisant usage de leur raison s’approprie la sphère publique contrôlée par l’autorité et la transforme en une sphère où la critique s’exerce contre le pouvoir de l’État. »18 L’espace public apparait donc comme un lieu d’émergence privilégié de la contestation en général et du conflit en particulier.

La progression dans le conflit n’est pas non plus linéaire. Les catégories d’acteurs engagées dans le conflit, leurs modes d’organisation et de mobilisation changent au fil du temps. L’objet même du conflit évolue : autour de l’objet principal qui est souvent celui qui a déclenché les hostilités apparaissent des déclinaisons de cet objet qui deviennent des sujets de discorde. Dès lors, le conflit se structure en différents espaces de confrontation. 20 Il est relativement aisé de représenter ces notions et la réciprocité de la causalité par un graphique reprenant les phases du conflit : L’initiation d’un conflit peut arriver à n’importe quel moment, il s’agit en général de l’entrée d’un nouvel usage sur un territoire ou encore de la résurgence d’un ancien conflit suite à un évènement quelconque. On remarque à ce moment-là une montée en pente douce, marquée parfois de phases de latence ou de baisse des tensions, dues à une multitude de raisons possible : contexte socio-politique, entrée ou sortie d’un acteur etc. La montée de la conflictualité et le pic du conflit sont la plupart du temps assortis d’une mobilisation des acteurs sur la scène publique, c’est-à-dire, instrumentalisation des médias ou encore actions de blocage ou de sabotage (militants qui s’attachent aux arbres pour empêcher leur destruction, actions « escargots » sur les autoroutes…). Ce pic peut durer, on dit communément que le conflit « s’enlise ».

 

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