Les ateliers individuels de manipulation et d’expérimentation en maternelle

Les ateliers individuels de manipulation et
d’expérimentation en maternelle

INTRODUCTION

 La nécessité de travailler avec des groupes d’élèves autonomes m’est apparue très rapidement indispensable lors de ma prise de fonction dans une classe de grande section de 29 élèves, en tant que Professeur des écoles stagiaire. En effet, certaines séances imposent à l’enseignant de travailler avec un petit groupe d’élèves afin de pouvoir observer leurs comportements, leurs raisonnements, leurs procédures de résolution… C’est d’autant plus vrai dans le contexte des nouveaux programmes de l’école maternelle qui prônent l’évaluation positive, davantage basée sur l’observation active des élèves de la part de l’enseignant et les activités de manipulation, activités qui ne peuvent pas toujours s’exercer en classe entière. Mais quelles activités proposer au reste de la classe, lorsque l’on travaille avec un petit groupe d’élèves ? Cette question de gestion de classe impose comme primordiale la construction de l’autonomie à l’école maternelle. Le bon fonctionnement d’une classe de maternelle induit nécessairement l’acquisition de l’autonomie de la part des élèves à certains moments. La construction de l’autonomie est par ailleurs essentielle pour le développement du jeune enfant. C’est dans ses premières années que chaque enfant va prendre petit à petit conscience de sa propre personne et va apprendre, à son rythme, à faire seul. Ces capacités peuvent être plus ou moins développées en fonction de la façon dont l’enfant vit chez lui, de sa fréquentation ou non de lieux d’accueils collectifs avant l’entrée à l’école, du caractère de chaque enfant. Néanmoins, amener les enfants vers l’autonomie est l’un des objectifs, naturel et fondamental, de toute éducation : les adultes aident les enfants à apprendre à être autonome et à devenir des citoyens capables de vivre seuls et en toute responsabilité dans le monde actuel. L’école et la famille se distinguent par les rôles différents et complémentaires qu’elles ont à jouer au service de cet objectif commun. L’école doit tenter de former des futurs citoyens maîtres de leurs destins, acteurs de leurs savoirs et de leurs compétences. « L’autonomie c’est la capacité à se conduire soi-même. Être autonome c’est accéder progressivement aux enjeux de ses propres actes et non agir en fonction des seuls intérêts du moment ».1 En débutant en GS, je me suis donc très rapidement confrontée à la problématique des ateliers autonomes en maternelle et à la complexité de leur mise en oeuvre. En effet, même en grande section, les enfants participants à un atelier autonome, surtout lors de sa première mise en œuvre, ont souvent besoin de se faire rappeler les consignes par un adulte ou ont du mal à se mettre au travail. Il est donc extrêmement difficile de pouvoir être pleinement avec un groupe d’élèves sans que d’autres enfants aient sans cesse besoin de nous. Ajoutons à cela qu’il faut occuper plusieurs groupes d’élèves et donc trouver plusieurs ateliers autonomes qui soient intéressants pour les enfants, qui s’insèrent dans les projets de la classe et qui aient une durée à peu près identique à celle de l’atelier dirigé animé par l’enseignant. On peut vite en arriver à proposer des ateliers autonomes occupationnels, plus par nécessité d’occuper 7 élèves 15-20 minutes que par véritable volonté ou nécessité pédagogique. Face à ces difficultés, j’ai mis en place dans ma classe des tiroirs individuels de manipulation et d’expérimentation, que nous pourrons, dans le cadre de ce mémoire, appeler par l’abréviation « TME ».Il s’agit activités libres, mais répondant à des compétences inscrites aux programmes de l’école maternelle, disposées dans des tiroirs individuels et largement inspirées des concepts de la Pédagogie Nouvelle et notamment de Maria Montessori. Ce sont des pratiques de travail en classe en vogue actuellement, notamment en maternelle. On trouve ainsi, sur de nombreux sites d’académies, des explications, des témoignages, des conseils ou et des exemples d’activités à proposer dans le cadre d’ateliers libres de manipulation et d’expérimentation, sous diverses appellations (« tiroirs » en référence à l’organisation spatiale, « ateliers pour apprendre », « ateliers mobiles…) Si les appellations de ce type d’activités autonomes varient, leur mise en place et leur mode de fonctionnement également : créneaux hebdomadaires en classe entière, créneaux quotidiens en groupes de 7 ou 8 élèves ou encore organisation complète et constante de la classe en ateliers libres. Les « TME», déjà testés et mis en place par plusieurs enseignantes de l’école depuis quelques années, et par la titulaire de ma classe l’année précédente, ont par conséquent été pour moi, dans un premier temps, une résolution partielle à des difficultés d’organisation. La mise en place de ces activités m’a ensuite ouvert, au cours de l’année, de nouveaux questionnements et réflexions : Qu’est ce que la véritable autonomie et comment peut-on aider des élèves à la construire ? Comment l’enfant peut il progresser seul et être conscient de son évolution ? L’individualité des apprentissages est elle compatible avec le travail en groupe et l’entraide ? L’enfant est il capable, si jeune, de prendre en charge certaines de ses compétences ? L’adulte, l’enseignant, est il capable de faire confiance à l’élève et de le laisser être maître de ses apprentissages ?

La mise en place des tiroirs d’expérimentation et de manipulation : principes et fonctionnement 

Organisation, fonctionnement et présentation des ateliers « TME » 

Nous nous sommes mises d’accord, avec la titulaire de la classe, pour mettre en place les tiroirs d’expérimentation et de manipulation à partir de la fin du mois de septembre 2015. Pour ma part (PES à mi temps les lundis, mardi et mercredi matin), j’ai choisi de proposer ce temps à mes élèves lors des ateliers du matin, afin de résoudre en partie mes difficultés d’organisation d’élèves en autonomie lorsque j’encadrais un atelier dirigé. J’ai donc réparti les 28 élèves de ma classe en 4 groupes qui tournent sur les matinées du lundi et du mardi. Les groupes ne sont pas fixes et peuvent varier d’une semaine à l’autre (homogènes ou hétérogènes) en fonction des projets de classe et des modalités qui en découlent. Les groupes d’enfants varient donc, généralement au moins une fois à chaque période. Chaque semaine, les élèves tournent, le matin, sur 4 ateliers différents, dont un qui requiert généralement ma présence. Les autres sont des ateliers surveillés ou autonomes. L’utilisation des TME est un atelier à part entière, qui est proposé chaque semaine, puisque chaque élève est totalement autonome. D’autres créneaux horaires sont petit à petit apparus pour l’utilisation des TME, à d’autres moment de la semaine et notamment dans le cas où certains élèves terminent leur travail avant les autres, avec l’inconvénient qu’il n’y a que 24 tiroirs pour 29 élèves et qu’il est donc impossible, si l’on veut qu’ils travaillent seuls, de mettre toute la classe sur cette activité. Il est par ailleurs clair que l’effet de concentration obtenu quand 7 à 10 élèves travaillent sur ces activités n’est pas envisageable avec 29 élèves. Les activités proposées au début de l’année dans les TME ne nécessitaient par, pour la plupart d’entres elles, de passation de consignes particulières, car elles reposaient soit sur du matériel connu et utilisable librement (légos, pâte à modeler, puzzles, perles…), soit sur de nouveaux matériels proposés en manipulation libre (engrenages, imprimerie Nathan). Si un résultat particulier était attendu, le matériel proposé dans le tiroir induisait fortement la consigne (cartes modèles pour la réalisation de scènes dans le jeu « Topologies », carte modèles pour les pavages, roues des lettres de l’alphabet, classeurs de modèles de graphismes à réaliser au feutre effaçable …)2 Peu de consignes ont donc été données en ce qui concerne les activités mêmes. En revanche, il a fallu insister sur le mode de fonctionnement de ces ateliers et bien rappeler, pendant plusieurs semaines, le mode de travail attendu des élèves sur ces moments-là (travailler seul et en silence). Plusieurs principes, sur lesquels nous nous sommes mis d’accords avec la titulaire de la classe, ont été exposés aux enfants et mis en place. Il nous semblait important que le fonctionnement des TME soit contraint aux mêmes règles avec les deux maîtresses de la classe, afin que les enfants ne soient pas perdus par deux types d’organisation différentes pour un même matériel. Nous évoquerons chacun de ces principes de travail dans les parties suivantes. 

Le libre choix

 Laisser les élèves choisir leur activité autonome dans le cadre de ces plages horaires m’a paru évident. En effet, comment exiger des élèves autonomie, silence et concentration si on leur impose une activité qu’ils n’ont pas choisi ? C’est le cas lors d’autres ateliers autonomes de réinvestissement (réalisés par exemple par tous les élèves d’un même groupe au même moment) mais qui n’exigent pas nécessairement le même degré de concentration et d’investissement des enfants. De plus, à partir du moment où on essaie de rendre l’élève acteur de son savoir et de ses apprentissages, quel serait le sens de lui imposer une activité ou de lui en interdire une autre. Néanmoins, il est tout à fait possible d’orienter les élèves « hésitants » ou ceux qui errent d’une activité à l’autre sur une activité intéressante pour eux ou bien de proposer une nouvelle activité à un élève qui fait toujours la même, de façon à lui proposer d’élargir son champ d’action. C’est d’ailleurs ce que recommandent les adeptes des pédagogies nouvelles, Montessori ou bien encore Decroly, concernant la place que doit tenir l’adulte dans le cadre de ces ateliers libres. L’adulte est présent pour aider les enfants qui en ont besoin à trouver une activité qui peut leur correspondre ou encore pour aider les enfants qui en ont besoin à réaliser leur tâche. Une des premières découvertes qu’a fait Maria Montessori, grande pédagogue de la Pédagogie Nouvelle, qui prône un apprentissage individualisé (et donc effectué en grande partie en autonomie par chaque enfant) repose sur une expérience fortuite. Dans la première Maison des enfants qu’elle fonde à Rome, l’éducatrice oublie un soir de fermer l’armoire contenant le matériel pédagogique. Le lendemain, avant l’arrivée de celle-ci, les enfants ont déjà investi le matériel de la classe par eux-mêmes. «Maria Montessori en tire pour sa part des conclusions très intéressantes : les enfants sont capables de choisir ce qui les intéresse parmi le matériel pédagogique ; et ce choix se traduit par une recrudescence d’activité. » 3 Cette découverte est devenue l’un des principes fondateurs de la pédagogie montessori et se retrouve dans toutes les classes qui pratiquent cette pédagogie. Maria Montessori n’est pas la seule à faire ce constat : à peu près à la même époque, Ovide Decroly, pédagogue belge faisant aussi partie du courant l’éducation nouvelle, développe des théories semblables. A l’école Decroly française, localisée à Saint-Mandé dans la Val de Marne, qui s’applique à enseigner et faire vivre les préceptes du pédagogue belge, chaque matinée, de 8h30 à 10h, est dédié à des activités autonomes effectuées selon le libre choix des enfants. Les trois sections de l’école maternelle sont alors décloisonnées et les élèves se déplacent librement selon leurs envies pour effectuer une activité. A l’instar des écoles montessoriennes, les élèves peuvent ici travailler à plusieurs et l’ambiance est plutôt bruyante et coopérative. J’ai effectué un stage d’observation en PS à l’école Decroly. Les enseignantes de maternelle étaient très attachées à ce temps matinal qui constitue un moment particulier de la journée des élèves. Selon elles, les élèves étaient, du fait qu’ils aient pu choisir eux mêmes leur activité, beaucoup plus motivés et concentrés sur leur tâche. De même, ils acceptaient beaucoup mieux les moments « imposés » à d’autres moments de la journée du fait qu’il y ait eu auparavant un temps de liberté totale. C’est donc sur ce principe de libre choix, que nous avons commencé l’année. Cette liberté totale laissée à l’enfant pour le choix de son activité permet aussi d’aider les enfants à abolir les tendances de « zapping » permanentes. C’est un contrat passé avec l’enfant : « tu choisis ton activité mais tu essaies de la terminer avant d’en commencer une autre ». Il ne s’agit pas de forcer les élèves à rester sur la même activité à tout prix, surtout dans la phase de découverte des TME, mais d’essayer de perdre l’habitude de passer d’une activité à l’autre sans arrêt et d’essayer de se concentrer afin de mener une activité jusqu’à son terme. Catherine Bogaert et Sandrine Delmarle, enseignantes et formatrices belges, se sont intéressées à un modèle de gestion du temps scolaire en maternelle.4 Elles s’appuient sur les préceptes de l’enseignement catholique belge (FédEFoc) et les analyses qu’en a fait Joseph Stordeur, pédagogue belge, pour distinguer 3 axes du temps scolaire : – L’axe de l’implication dans le milieu, qui s’insère dans une logique de production et dans une pédagogie de projet : construire ou réaliser telle production pour servir notre projet. – L’axe du développement personnel, qui répond à une logique d’apprentissage. Le maître conçoit des séquences visants à développer une ou plusieurs compétences et les propose à ses élèves., en petit groupes pour pouvoir observer finement les comportements. Lorsque l’apprentissage est suffisamment avancé, le maître peut proposer des activités de réinvestissement, en conservant ou en variant le matériel. – L’axe d’autogestion ou de gratuité (logique de choix) pendant lequel l’enfant est autonome, tout en continuant à respecter les règles de vie de la classe. Dans ce cadre, le maître peut proposer des situations variées, qui peuvent d’ailleurs se situer dans les autres axes si c’est un choix de l’enfant (continuer à travailler pour les projets de classe, travailler sur des activités de réinvestissement), et doit rester attentif aux propositions et aux demandes des enfants et les aider à les atteindre. Ces théories et ce modèle de gestion du temps scolaire me paraissent extrêmement intéressantes. Les activités proposées dans le cadre des TME se situent à la jonction entre l’axe d’autogestion et l’axe du développement personnel. En effet, c’est bien un moment dans lequel les enfants sont maîtres de leur temps et du choix de leur activité et pendant lequel ils travaillent en autonomie, s’entraînent et réinvestissent des compétences. Même si la gestion du temps choisie dans ma classe n’est pas celle avancée par les pédagogues belges, l’idée de l’importance du temps accordé au choix de l’enfant me semblait primordiale. Néanmoins, travaillant dans une classe de 29 élèves et effectuant ma première année, je voyais mal comment gérer les envies variées de cette masse d’élève. De plus, en GS, il me semblait que les élèves, même s’ils restent des jeunes enfants et qu’il est important de préserver leur équilibre et de respecter leurs besoins physiologiques, ont besoin d’apprendre à se concentrer de plus en plus de temps sur une activité, de s’entraîner à travailler seul sur des notions, en vue de se préparer aux changements prévisibles pour leur année de CP. L’expérience des TME combine le principe de choix de son activité et le principe de réinvestissement d’une même activité. C’est d’ailleurs sur ce dernier point, le fait de travailler plusieurs fois une même activité, que nous nous attarderons à présent. 

La possible réitération d’une activité à de multiples reprises

L’une des quatre modalités d’apprentissage inscrite dans les nouveaux programmes de l’école maternelle s’intitule : « Apprendre en s’exerçant ». « Les apprentissages des jeunes enfants s’inscrivent dans un temps long et leurs progrès sont rarement linéaires. Ils nécessitent souvent un temps d’appropriation qui peut passer soit par la reprise de processus connus, soit par de nouvelles situations. Leur stabilisation nécessite de nombreuses répétitions » 5 . Nous avons déjà parlé, dans la partie précédente, de l’importance des activités de réinvestissement. Cette constatation est aujourd’hui affirmée également avec conviction dans le cadre des nouveaux programmes de l’école maternelle française. Concernant les TME, la liberté que détient l’enfant dans son choix, lui permet de refaire la même activité à plusieurs reprises. Dès les premières semaines de mise en place des TME, j’ai remarqué que beaucoup d’enfants aimaient et éprouvaient le besoin de reprendre à chaque fois la même activité. Ainsi, Imad a développé un véritable intérêt pour un des TME6 , qui était constitué d’une boîte contenant un grand nombre de perles, de différentes formes et couleurs, d’une pince à épiler et d’une plus petite boîte. A chaque fois que son groupe travaillait sur les TME, il se précipitait sur ce tiroir et transvasait des perles de la grande à la petite boîte, en essayant de les manier à la pince à épiler. J’étais étonnée que ce tiroir, qui n’induisait pourtant à ce stade aucune consigne et progression et qui reposait exclusivement sur de la manipulation, fascine autant certains enfants (car Imad n’était pas le seul à vouloir prendre ce tiroir à tout prix). Sans avoir d’objectifs définis sur les actions à mettre en place (hormis bien sur l’acquisition de la motricité fine mais certains élèves ne se servaient que très peu de la pince à épiler et manipulaient les perles avec leurs doigts), certains enfants pouvaient passer plus de 15 minutes à transvaser, à secouer, à manipuler. J’ai été étonnée par ce comportement de la part d’Imad qui a des difficultés à se poser et à se concentrer sur un travail. C’est plutôt le genre d’enfant qui habituellement vaque d’une activité à l’autre sans terminer celle qui est en cours, alors même qu’il a toutes les compétences pour le faire. J’en ai donc déduit que ce qui tenait Imad concentré si longtemps sur ce type d’activité était le fait de manipuler, de pouvoir toucher, de pouvoir avoir un véritable pouvoir sur ces objets. Et ces enfants qui choisissaient inlassablement ce tiroir de perles le reprenaient d’une part parce qu’il leur permettait à nouveau d’être actif et également parce qu’ils cherchaient une solution à ce tiroir qui ne proposait aucune consigne claire, afin que leurs manipulations soient guidées par un objectif clair (nous reverrons ce point dans la deuxième partie du mémoire). D’après Maria Montessori, « Derrière cette répétition, l’enfant répond à un besoin et se construit. Il construit en lui les gestes nécessaires à son activité. Il expérimente, confirme ses premières impressions, apprend à coordonner ses mouvements, vérifie ses hypothèses. L’enfant s’arrête de travailler quand il a été au bout de ses besoins ».J’ai ainsi appris à accepter l’idée, loin d’être évidente au départ, quand on arrive dans le monde de l’enseignement, que des enfants qui refont la même activité de nombreuses fois, apprennent encore et encore. 

Travailler seul (et en silence) 

Un dernier principe a régulé cette phase de mise en place des TME : nous avons choisi de demander aux élèves de travailler seuls lorsqu’ils travaillaient sur des tiroirs d’expérimentation et de manipulation. Si le contenu de ces tiroirs ne sont pas calqués sur le matériel sensoriel proposé par Maria Montessori, on ne peut négliger l’inspiration qu’a eu cette femme et son courant dans les nombreuses expériences tentées à l’école publique, dans des classes normales qui ont essayé ce type de fonctionnement sur certains temps de la journée ou avec certains élèves. De nombreuses classes d’écoles publiques, et particulièrement en maternelle, empruntent des méthodes de travail, des modalités de gestion du groupe, des principes et un certain type de matériel aux thèses et aux travaux de cette pédagogue. Bien que désireux d’adapter comme nous l’entendons ces principes à notre classe, à nos contraintes et à nos propres volontés pédagogiques, nous avons en tête et nous avons envie d’essayer de reproduire le calme et la sérénité qui semble se dégager des classes Montessori.8 De plus, pour des raisons très pratiques, si les enfants qui travaillent sur les TME ne sont pas silencieux alors qu’un autre groupe est en atelier dirigé avec l’enseignant et se trouve donc en communication et que deux autres groupes travaillent sur des activités autonomes sur lesquelles il est compliqué d’exiger un silence complet, la classe peut devenir extrêmement bruyante. En demandant à l’élève de travailler seul, chacun sur un « TME », et en lui donnant assez de place pour placer son tiroir sur une table et travailler sur une autre, on lui laisse une chance plus grande de pouvoir se concentrer sur son activité et donc par extension, nous avons un volume sonore plus acceptable. Je dois dire que ce principe, qui me semblait difficilement atteignable à la mise en place du projet, a été finalement le plus facilement exécuté par les enfants. Au début de l’année, nous avions 24 tiroirs d’expérimentation et de manipulation et j’envoyais toujours un groupe de 7 ou 8 élèves, au moment des ateliers, y travailler. Il y avait donc un large choix d’activités possibles pour chaque enfant, ce qui suffit généralement à éviter les disputes pour avoir la même activité. Le fait de travailler seul a pour la grande majorité des élèves, toujours été bien accepté dans la classe. Trois ou quatre élèves ont toutefois tendance à préférer observer les autres enfants travailler et tenter de s’intégrer à leur activité. Mais ce sont plutôt les enfants que ces activités « solitaires » apaisent qu’il est intéressant d’observer. Ainsi, les trois quarts des élèves de la classe sont assez contents d’avoir un moment de travail seul ce qui s’explique facilement par le peu de moments de retour sur soi et d’individualité qu’offre la vie en collectivité, longue pour certains. Océane, qui a souvent des difficultés à se mettre au travail et à ne pas bavarder avec ses voisins, est véritablement absorbée par son activité lors des moments de tiroir. Elle dit d’ailleurs, lorsqu’on l’interroge, aimer ces moments d’isolement, parce qu’elle peut se concentrer. En fait, le silence sur cette activité s’est assez facilement mis en place et c’est plutôt les autres ateliers en place dans la classe, beaucoup plus bruyants, qui pourraient gêner les élèves qui se servent des TME. Néanmoins l’absence de coopération entre les élèves m’a posé question, au début de l’expérience, et notamment puisque j’avais vu le fonctionnement des classe Decroly, dont on a parlé précédemment et dans lesquelles les élèves peuvent travailler seuls ou ensemble. Outre l’apprentissage de l’autonomie, l’accent est également mis sur le développement de la socialisation, l’entraide et la coopération. 9 Certaines expériences sont plus productives en groupes et il me semble que les élèves apprennent beaucoup en s’observant, en s’imitant, en transférant des savoir-faire. Certaines de mes collègues utilisant aussi le système des TME autorisent le fonctionnement à deux sur certains tiroirs. Toutefois, pour ne pas brouiller les pistes, j’ai choisi de ne pas autoriser le travail en groupes sur les TME. Par contre, nous le verrons ensuite, j’ai proposé de nouveaux créneaux horaires pour l’utilisation des TME ainsi qu’une organisation plus souple à certains moments. J’ai également cherché à trouver des solutions pour que cette activité autonome permette malgré tout la coopération et la valorisation des uns et des autres.

Table des matières

Introduction
I. La mise en place des tiroirs d’expérimentation et de manipulation : principes et fonctionnement
a) Organisation, fonctionnement et présentation des ateliers « TME »
b) Le libre choix
c) La possible réitération d’une activité à de multiples reprises
d) Travailler seul et en silence
II. Expérimentation et mise en place d’un livret de réussite
a) Nouvelles activités et mise en place d’un ouvel outil
b) La trace écrite
c) Suivre l’évolution des élèves
III. Les qualités et les limites de cette expérimentation
a) Un fonctionnement respectant l’individualité de chaque enfant tout en restant collectif
b) La livret de réussite peut-il être une modalité d’évaluation ?
c) Des exemples d’expériences plus complètes et structurées
Conclusion
Annexes
Bibliographie

projet fin d'etude

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