L’INTEGRATION DES ARTISTES AU PROJET URBAIN

L’INTEGRATION DES ARTISTES AU PROJET URBAIN

Sabine Thuilier affirme que l’action des artistes dans le projet urbain « […] est toujours contractualisée. A partir du moment où il y a une intervention sur l’espace public il y a à un moment donné un accord qui est fait avec le territoire sur lequel on intervient ». Concernant ces « accords » l’ensemble des personnes interrogées lors des entretiens ont évoqué plusieurs portes d’entrées permettant aux artistes d’intégrer un projet urbain. Ces portes d’entrées sont des moyens de formaliser et contractualiser leur intervention avec les commanditaires.  Le mode de contractualisation le plus évoqué est l’appel d’offre aussi appelé marché public. Ces appels d’offres sont effectués par les collectivités qui sont maitres d’ouvrage. Plus précisément, comme l’explique Christian Sieys, ce sont les services techniques du maitre d’ouvrage qui préparent ces appels d’offre. Parfois, la collectivité se fait aider et prend un prestataire, appelé programmiste. Un appel d’offre contient le cahier des charges qui correspond à l’étude de programmation. Franck Tessier explique qu’il doit contenir à la fois « une localisation, une explication de l’action urbaine, un planning et des coûts ». Les entretiens ont mis en évidence deux cas de figures pouvant être rencontrés. D’une part, l’appel d’offre contient un cahier des charges global. Comme l’explique Yvan Detraz, « il ne concerne pas uniquement les démarches qu’on peut développer. C’est un package élargie avec un marché d’études urbaines ou des choses comme ça, donc aux côtés d’urbanistes ». Dans ce cas-là, le cahier des charges est rédigé pour un ensemble d’intervenants du projet urbain, y compris les artistes. Ces derniers évoquent un cahier des charges très peu développé en ce qui concerne le volet artistique. Il apparait que les commanditaires rédigent rarement le volet artistique. Franck Tessier va dans ce sens lorsqu’il dit « j’aime bien me faire assister quand on a un cahier des charges au niveau artistique […] ce sont des archis ou des assistants à maitrise d’ouvrage qui vont réaliser le petit volet artistique ». D’autre part, l’appel d’offre concerne uniquement la démarche artistique et contient un cahier des charges spécifique pour l’accompagnement artistique. C’est le cas de l’appel d’offre passé par la Ville de Niort – Direction des Vies Participatives en prévision de l’aménagement des espaces publics dans un quartier et auquel le collectif Random a répondu. Du point de vue de la formalisation de son intervention dans le cadre de l’appel d’offre, l’artiste est un acteur comme un autre du projet urbain. La « procédure est identique que ce soit un artiste ou un urbaniste » (Christian Sieys).

Les personnes interrogées sont plusieurs à évoquer également des « commandes directes » (Yvan Detraz). Yvan Detraz explique que « tu es obligé de faire un appel d’offre quand tu es au-dessus d’un certain montant. On est souvent en dessous. Donc ça se passe comme ça ». Sabine Thuilier elle aussi évoque ces commandes directes lorsqu’elle parle du projet qu’elle a réalisé à Clermont- Ferrand dans le cadre de l’ANRU : « […] sur Clermont-Ferrand c’était une sollicitation directe. C’est une maison de quartier qui nous a sollicités. Donc cette maison de quartier est directement rattachée à la mairie. L’interlocuteur qui est venu nous chercher c’était un animateur de maison de quartier ». Yvan Detraz qui œuvre au sein du collectif Bruit du Frigo depuis 1998 note une nette augmentation du nombre d’appels d’offre destinés aux artistes. A ses débuts, les marchés publics destinés à des collectifs tels que Bruit du Frigo n’existaient pas. Les commanditaires passaient par de la commande directe. Concernant les processus d’appels d’offres, il estime être passé du « néant » à des commandes qui sortent régulièrement aujourd’hui. Cela induit une mise en concurrence, laquelle est obligatoire afin de respecter le code des marchés publics. Ainsi, les artistes ou collectifs d’artistes peuvent alors être plusieurs à répondre à l’offre. Le contenu des appels d’offre doit permettre au plus grand nombre d’y répondre. Afin de limiter cette concurrence, il semblerait que certains commanditaires aient recours à des pratiques déloyales. En effet, Yvan Detraz évoque la possibilité d’être contacté par une collectivité qui a envie de travailler avec lui, puis qui « trouve des moyens administratifs de travailler ensembles ». Dans la pratique, les commanditaires « trouvent des astuces pour passer commande en direct en faisant valoir le caractère […] un peu unique de ce qu’on va proposer ». (Yvan Detraz) Ces pratiques n’ont pas échappé à Florent Chiappero qui s’en inquiète. Il dit qu’en ce moment « la question que tout le monde se pose c’est comment truquer les marchés publics » et que « tout le monde truque les marchés […] il n’y a pas un marché […] où les mecs ne savent pas déjà avec qui ils veulent travailler ». Christian Sieys affirme ne pas avoir recours à ce genre de pratique mais connait des exemples où il sait que parfois « ça se fait de façon moins concurrentielle ».

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