Santé mentale des femmes enceintes et développement de l’enfant

Santé mentale des femmes enceintes et développement de l’enfant

Santé mentale positive

Le bien-être d’un individu peut être mesuré par des mesures de santé perçue, de santé mentale perçue ou d’estime de soi [Canadian Institute for Health Information, 2009 ; Canadian Institute for Health Information, 2013]. Ces mesures de santé mentale positive ne peuvent pas être associées à des diagnostics. En revanche, elles suivent une distribution 31 normale au sein d’une population et peuvent être évaluées par des outils psychométriques [Lehto-Järnstedt, 2004]. Questionnaires multi-items Ces outils existent notamment pour évaluer la qualité de vie, le bien-être ou l’estime de soi. Pour la qualité de vie, les questionnaires les plus fréquemment utilisés sont le questionnaire de Duke (Duke Health Profile), le Nottingham Health Profile, le SF-36 (Short-Form General Health Survey – 36 items) et sa version courte le SF-12 [Parkerson, 1990 ; Lurie, 2000]. L’OMS a également développé des instruments de mesure de la qualité de vie : le WHOQoL-100 et ses versions courtes le WHOQoL-26 et le WHOQoL5 (BREF) [Leplege, 2000]. L’objectif de ces outils d’auto-évaluation est de permettre une mesure pluri-dimensionnelle de la qualité de vie en se basant sur la définition de la santé. Pour évaluer le bien-être, quelques instruments psychométriques sont également disponibles : l’index de Santé (Health Index) ou l’Index personnel de bien-être (Personal Well-Being Index) [Sjöström, 2004 ; Geyh, 2010]. Récemment, une question multi-items a été mise au point par l’OMS pour évaluer la santé perçue : le World Health Survey Health Status (WHSHS) [Van Ginneken, 2012]. Comparé à une question subjective unique, cet indicateur pourrait se révéler être un meilleur prédicteur de la mortalité. D’autres outils évaluant la satisfaction de la vie ont également été utilisés comme indicateurs de bien-être [Geyh , 2010]. Pour l’estime de soi, les questionnaires les plus fréquemment employés sont ceux de Rosenberg, le Self-Perception profile ou bien l’inventaire de Coopersmith [Wong, 2014 ; Cai, 2014 ; Holzer, 2014]. Enfin, de façon indirecte, des auteurs considèrent que les dimensions positives de la santé mentale sont également abordées dans certaines échelles. Exemple : dans le CES-D, l’item « j’ai été confiante dans l’avenir » pourrait-être considéré comme une évaluation indirecte du bienêtre [Lehto-Järnstedt, 2004]. Question unique En santé positive, ces questions sont souvent utilisées car elles permettent d’évaluer de façon subjective le bien-être ressenti des individus [Bowling, 2005]. Cette question peut par ailleurs être posée par une personne non expérimentée, en un temps court d’administration [Rohrer, 2005]. En santé générale perçue, la question unique généralement utilisée est la suivante : « Comment évaluez-vous votre santé ? Très bonne, 32 Bonne, Moyenne, Mauvaise, Très mauvaise ? ». Des variations peuvent être utilisées dans le nombre de réponses possibles, dans la formulation de la question ou dans la catégorie de référence (exemple : « Excellente » au lieu de « Très bonne »). Dans le domaine de la santé mentale, la question subjective unique généralement utilisée (et dérivée de la précédente) est : « Comment évaluez-vous votre santé mentale ? Très bonne, Bonne, Moyenne, Mauvaise, Très mauvaise ? ». Dans de larges échantillons, elle permet de décrire les variations de santé mentale perçue de façon valide [Jhajj, 2010]. Plusieurs études ont démontré des associations fortes entre cette question unique et les troubles de la santé mentale [Mawani, 2010 ; Fleishman, 2007 ]. Les travaux de Jhajj et coll. ont reporté une quarantaine d’études menées en population générale et ayant utilisé cette question subjective [Jhajj, 2010

Troubles mentaux courants Instruments d’hétéro-évaluation

Les principaux outils de dépistage d’une dépression ou d’une anxiété par hétéroévaluation comprennent le Composite International Diagnostic Interview (CIDI) développé par l’OMS, le Mini-International Neuropsychiatric Interview (MINI) et le Diagnostic Interview Schedule (DIS). Ce sont des entretiens structurés, permettant de générer des diagnostics et d’évaluer la fréquence et la sévérité des symptômes par diagnostic [Robins, 1981 ; Robins, 1988 ; Sheehan, 1997]. Ils sont conçus pour être utilisés par des cliniciens ou bien des non-cliniciens après une formation au recueil, à la saisie et à l’analyse des données. Instruments d’auto-évaluation Les principaux outils de dépistage d’une dépression ou d’une anxiété chez les femmes enceintes par auto-évaluation sont résumés dans le tableau 2. Ces outils de dépistage permettent de détecter des symptômes susceptibles d’être associés à un diagnostic clinique. Ils ne remplacent pas une évaluation clinique réalisée par un professionnel expérimenté [Austin, 2014].

Développement de l’enfant de 0 à 3 ans

Introduction générale et définitions utilisées

 Le développement est l’ensemble des processus successifs qui, dans un ordre déterminé, conduisent un organisme à sa maturité [Grand Dictionnaire de la Psychologie, 2013]. Chez l’enfant, les trois premières années de vie représentent la période majeure du développement cognitif, moteur, affectif et social. Ces aspects sont interdépendants et vont permettre la constitution d’un être humain doté d’une pensée réflexive, d’un langage et d’une sociabilité [Danion-Grilliat, 2011]. 

Développement des compétences cognitives 

Au cours du XXème siècle, Jean Piaget (1896-1980) et ses collaborateurs ont grandement contribué à la compréhension du développement cognitif de l’enfant. La théorie de Piaget est constructiviste : le développement de l’enfant se construit progressivement au cours 34 d’interactions complexes avec le monde qui l’entoure. Le schème est l’unité de base de l’apprentissage, c’est un ensemble organisé de mouvements dont l’enfant dispose ou qu’il acquiert et développe par son interaction avec l’environnement. Dans ce modèle, le développement des compétences cognitives passe par une série de 4 stades : le stade sensori-moteur de la naissance à 2 ans, le stade pré-opératoire entre 2 et 7 ans, le stade des opérations concrètes entre 7 et 11 ans et le stade des opérations formelles à partir de 12 ans [Houdé, 2013]. Ces stades ont trois caractéristiques : l’ordre de succession est constant, les acquisitions d’un âge sont intégrées dans la structure de l’âge suivant et chaque stade de développement correspond à un pallier d’équilibre. Ici, nous détaillerons les stades du développement précoce de l’enfant (0-6 ans) : • Le stade sensori-moteur est lui-même subdivisé en 6 stades, chacun se marquant par une évolution qui se traduit par l’utilisation d’une nouvelle technique : – Le stade 1 (0-1 mois) est celui des exercices réflexes. – Le stade 2 (1-4 mois) est celui des réactions circulaires primaires, des manifestation d’émotions (tend les bras, cris, pleurs etc.) et des schèmes primaires. – Le stade 3 (4-8 mois) est celui des réactions circulaires secondaires, du début de l’action sur les objets et les personnes qui l’entourent (expérimentation active) ainsi que de l’apparition de la coordination entre la préhension et la vision. – Le stade 4 (8-12 mois) est marqué par la coordination des schèmes secondaires, le nourrisson commence à comprendre les liens de causalité. – Le stade 5 (12-18 mois) est celui des réactions circulaires tertiaires, le nourrisson commence à explorer son environnement, à découvrir des moyens nouveaux. Tant que les objets sont visibles, le bébé va les déplacer en y introduisant des variations pour tester leurs effets. – Le stade 6 (18-24 mois) est celui de la représentation symbolique et de l’imitation différée. Le bébé est capable de se représenter des objets et situations non directement perceptibles. Il s’agit d’un stade de transition vers la période de l’intelligence pré-opératoire. • Le stade pré-opératoire est lui-même divisé en 2 stades : – Le stade de la pensée symbolique se caractérise par l’avènement du langage. L’enfant devient capable de penser en terme symbolique, de se 35 représenter des choses à partir de mots ou de symboles. Ce stade est également marqué par la pensée animiste (pensée magique), la pensée finaliste (toute chose à une raison qui s’explique), la pensée égocentrique et la pensée artificialiste (toutes les choses du monde sont faites par l’humain). – Le stade de la pensée intuitive permet à l’enfant d’envisager les choses comme extérieures à lui-même, la pensée égocentrique diminue. L’enfant investit la pensée et débute une pensée imaginaire. Il se concentre sur un objet ou une dimension du problème, l’ensemble des explications logiques impliquant l’enchaînement des causes et des conséquences ne sont pas encore accessibles. A l’encontre de ce « modèle de l’escalier », où l’enfant passe soudainement d’un stade à un autre, d’autres auteurs tels que Robert Siegler et ses collaborateurs ont proposé par la suite de concevoir le développement comme des « vagues qui se chevauchent ». Le principe est le suivant : parmi les stratégies dont l’enfant dispose pour atteindre ses buts, certaines vont se développer plus souvent au début pour devenir moins fréquentes par la suite ; d’autres stratégies vont être élaborées par la suite au dépens des anciennes qui ne seront plus utilisées [Godefroid, 2011]. La figure 3 décrit schématiquement les modèles du développement cognitif « en escalier » correspondant aux stades de J. Piaget ou selon des vagues (stratégies) de R. Siegler. 

Table des matières

1. INTRODUCTION
1.1. Santé et santé mentale
1.1.1. Définition de la santé et de ses déterminants
1.1.2. Santé mentale des femmes enceintes
1.2. Développement de l’enfant de 0 à 3 ans
1.2.1. Introduction générale et définitions utilisées
1.2.2. Les retards de développement chez le jeune enfant
1.3. Objectifs du travail
2. MÉTHODES
2.1. L’Enquête nationale périnatale de 2010
2.1.1. Contexte
2.1.2. Population
2.1.3. Recueil des informations
2.1.4. Effectifs et qualité des données
2.1.5. Autorisations
2.1.6. Structures impliquées dans le projet
2.2. La cohorte EDEN
2.2.1. Contexte
2.2.2. Population
2.2.3. Recueil des informations
2.2.4. Autorisations
2.2.5. Structures partenaires du projet
3. RÉSULTATS
3.1. Première partie : Santé mentale perçue des femmes enceintes – Données de l’Enquête nationale périnatale de 2010
3.1.1. Objectifs
3.1.2. Méthodes
3.1.3. Résultats
3.1.4. Discussion
3.2. Deuxième partie : Dépression, anxiété des femmes enceintes et issues de grossesse – Données de la cohorte EDEN
3.2.1. Objectifs
3.2.2. Méthodes
3.2.3. Résultats
3.2.4. Discussion
3.3. Troisième partie : Dépression, anxiété des femmes enceintes et développement cognitif de l’enfant à 2 et 3 ans – Données de la cohorte EDEN
3.3.1. Objectifs
3.3.2. Méthodes
3.3.3. Résultats
3.3.4. Discussion
4. DISCUSSION GÉNÉRALE
4.1. Synthèse des principaux résultats
4.1.1. Première partie de la thèse
4.1.2. Deuxième partie de la thèse
4.1.3. Troisième partie de la thèse
4.2. Commentaires
4.2.1. Forces et limites générales
4.2.2. Liens d’association et causalité
4.2.3. Modèles explicatifs
4.2.4. Prise en compte de la santé mentale des femmes en périnatalité.
4.3. Perspectives
5. CONCLUSION
6. RÉFÉRENCES
7. ANNEXES
7.1. Données de l’ENP de 2010
7.1.1. Liens entre les caractéristiques des femmes et la prématurité
7.1.2. Liens entre les caractéristiques des femmes et le petit poids de naissance
7.2. Données de la cohorte EDEN
7.2.1. Echelles d’auto-évaluation de la santé mentale . 198
7.2.2. Issues de grossesse et poids de naissance dans la cohorte EDEN
7.2.3. Observations sensibles dans les modèles de régression logistique
7.2.4. Lien entre la santé mentale des femmes enceintes et les issues de grossesse
7.2.5. Mesures du développement cognitif de l’enfant 208
7.2.6. Distribution des scores de développement à 2 et à 3 ans
7.2.7. Relations entre les scores aux échelles de santé mentale et la probabilité d’avoir
un enfant avec un score inférieur au seuil au CDI et à l’ASQ
7.2.8. Vérification des hypothèses pour les modèles de régression linéaire
7.2.9. Symptômes dépressifs ou anxieux maternels prénataux et développement cognitif de l’enfant à 2 ou à 3 ans
8. RESUME / ABSTRACT
8.1. Résumé en français
8.2. Résumé en anglais
9. ARTICLES .

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