Variants d’histones H2BFWT et macroH2A1

Variants d’histones H2BFWT et macroH2A1

Territoires chromatiniens

En interphase, la chromatine n’est pas homogène, au contraire elle est organisée en régions plus ou moins condensées. Ces territoires chromatiniens affectent l’expression des gènes ainsi que la stabilité des chromosomes. On considère que la chromatine se divise en deux compartiments distincts d’un point de vue structural, fonctionnel et cytologique: l’euchromatine, riche en gène et l’hétérochromatine contenant peu de gènes et beaucoup de séquences répétées (figure 6) (Grewal and Elgin, 27)7 Figure 6: Propriétés des régions euchromatiques et hétérochromatiques L’euchromatine décondensée et riche en gène est permissive à la transcription. Par opposition à l’hétérochromatine, fortement condensée et pauvre en gène réfractaire à la transcription. Adapté de (Grewal and Elgin, 27) 

L’euchromatine

L’euchromatine se trouve sous une forme relâchée en interphase, mais se compacte lors des divisions cellulaires. Cette compaction coïncide avec l’arrêt de la synthèse des ARNm pendant la mitose. La réplication de ces régions interviendrait tôt pendant la phase S, cependant de récentes expériences tendent à nuancer cette affirmation (Kim et coll., 23). Certaines modifications d’histone sont observées avec une plus grande fréquence dans le compartiment euchromatinien, c’est le cas de la méthylation de la lysine 4 de l’histone H3 (H3K4me) (Santos-Rosa et coll., 22), de la méthylation de la lysine 36 de l’histone H3 (H3K36me) (Bernstein et coll., 25) et de l’hyperacétylation des histones H3 et H4 (H3ac, H4ac) (figure 6) (Grunstein, 1997). 

 L’hétérochromatine

Propriétés

L’hétérochromatine peut être définie d’après les observations cytologiques comme la portion de la chromatine restant complètement condensée pendant toute la durée du cycle cellulaire. Fonctionnellement, les régions hétérochromatiques sont réfractaires à la transcription, la recombinaison , et la réparation ; en outre elles se répliquent plus tardivement que le reste du génome. Toutefois, l’hétérochromatine n’est pas totalement inerte, elle nécessite même d’être transcrite à faible niveau pour se former (figure 6) (Grewal and Elgin, 27). L’hétérochromatine participe également à la réplication, et la ségrégation des chromosomes (Nagaki et coll., 24). L’hétérochromatine peut également être décrite du point de vue de sa structure et composition (figure 6). En 1993, Jeppesen et Turner ont montré dans des cellules humaines et murines que l’hétérochromatine, qu’elle soit constitutive ou facultative, se trouve dépourvue d’histones acétylés (Jeppesen and Turner, 1993). Par la suite, de nombreuses études ont caractérisé un fort niveau de méthylation de la lysine 9 de l’histone H3 dans de nombreux organismes, de la levure S. pombe (mais absente de S. cerevisiae) aux mammifères et aux plantes (figure 6) (Litt et coll., 21; Nakayama et coll., 2; Taverna et coll., 22). Le mécanisme de formation de l’hétérochromatine est très conservé de la levure jusqu’à l’homme (Grewal and Elgin, 27). b. Hétérochromatine constitutive L’hétérochromatine constitutive regroupe quant à elle une grande partie des séquences répétées du génome, elle se situe principalement au niveau des centromères et des régions péri-centromériques, des télomères et des organisateurs nucléolaires (figure 6) (Grewal and Elgin, 27). L’hétérochromatine constitutive est généralement pauvre en gènes, riche en séquences hautement et moyennement répétées, telles que les séquences satellites (figure 6) (Grewal and Elgin, 27). Les séquences condensées sous forme d’hétérochromatine constitutive sont pour l’essentiel des séquences répétées, très peu de gènes y sont représentés (Grewal and Elgin, 27)9 L’hétérochromatine est nécessaire à l’intégrité du génome. Elle joue en effet un rôle important dans la ségrégation des chromosomes et la protection des télomères contre leur dégradation (Bernard et coll., 21; Garcia-Cao et coll., 24). L’hétérochromatine constitutive est un état stable et irréversible de la chromatine qui est transmis entre chaque division cellulaire. Elle peut également affecter l’expression de gènes. En effet, un gène situé près d’une région d’hétérochromatine constitutive voit son expression inactivée. Ce phénomène est décrit chez la Drosophile sous le nom de « variégation d’effet de position » (PEV) (Henikoff, 199). La structure de l’hétérochromatine, dictée à la fois par les modifications des histones et de l’ADN, est transmissible de manière stable à travers les mitoses, et constitue donc une forme de mémoire cellulaire (Grewal and Elgin, 27). 

Hétérochromatine facultative

L’hétérochromatine facultative correspond aux régions pouvant adopter de façon réversible les caractéristiques structurales et fonctionnelles de l’hétérochromatine constitutive en fonction de stades de développement particuliers ou dans des types cellulaires donnés. Un exemple bien caractérisé de formation d’hétérochromatine facultative est l’inactivation du chromosome X aboutissant à une constitution différente de la chromatine des deux allèles (chapitre I.2.3.).

Assemblage et remodelage de la chromatine 

Assemblage de la chromatine

Les processus cellulaires impliquant une réorganisation de la chromatine tels que la réplication, la transcription, ou la réparation de l’ADN nécessitent le remplacement des histones éjectées. L’expression des histones canoniques est régulée par rapport au cycle cellulaire, leur déposition est strictement couplée à la réplication de l’ADN. L’incorporation des variants d’histones échappe à cette dépendance de la réplication, ceux ci peuvent être déposés à tout moment du cycle cellulaire L’assemblage correct des histones sur l’ADN nécessite l’assistance de facteurs appelés « chaperonnes d’histones » (Henikoff and Ahmad, 25). Il existe deux voies distinctes d’assemblage de la chromatine: l’une dépendante de la réplication de l’ADN (RD), et l’autre indépendante de la synthèse d’ADN (RI) utilisée notamment lors de la réparation ou de la transcription (Henikoff and Ahmad, 25). Chacune de ces voies d’assemblage nécessite l’intervention de chaperonnes incorporant des variants d’histones spécifiques. L’élucidation des mécanismes de l’assemblage de la chromatine est cruciale pour la compréhension du caractère héritable de certaines modifications de la chromatine. L’autre enjeu important de la compréhension de l’assemblage RI réside en l’identification des facteurs responsables de l’incorporation des variants d’histone sur leurs séquences cibles

Assemblage dépendant de la réplication (RD)

Le dépôt des nucléosomes se fait rapidement après la synthèse d’ADN. Les expériences de microscopie électronique réalisées après liaison covalente induite au psoralène montrent que les nucléosomes se reforment environ 25 pb en aval de la fourche de réplication (Sogo et coll., 1986). L’assemblage de la chromatine au niveau de la fourche de réplication requiert des facteurs d’assemblage et des chaperonnes d’histones. Les histones H3-H4 forment un complexe stable avec des facteurs d’assemblages qui facilitent et régule la déposition sur l’ADN. Parmi ces facteurs, CAF-1 (Chromatin Assembly factor 1) composé des trois sous unités p15/p6/RbAp48 assiste la déposition du tétramère (Verreault et coll., 1996). CAF-1 cible les histones sur la fourche de réplication en interagissant directement avec PCNA via p15 (Shibahara and Stillman, 1999). CAF-1 est assisté par Asf1 (Anti-silencing function 1). Dans les cellules humaines en prolifération, Asf1 est la chaperonne majoritaire contrôlant l’incorporation des histones nouvellement synthétisées en phase S (Groth et coll., 25). Asf1 joue une fonction cellulaire essentielle puisque son absence est létale chez S. pombe, la drosophile et le poulet (Sanematsu et coll., 26). Asf1 requière la présence de CAF-1 pour incorporer les histones (Munakata et coll., 2). Le rôle de Asf1 semble d’être 31 le transfert des histones libres à CAF-1 (Groth et coll., 25). La structure de Asf1 suggère que Asf1 pourrait dissocier le tétramère, ce qui pourrait avoir des conséquences sur le mode d’assemblage de la chromatine (voir la suite) (Natsume et coll., 27). Selon le modèle actuel, le tétramère (H3-H4)2 est d’abord déposé sur l’ADN puis les deux dimères H2A-H2B viennent ensuite s’ajouter (Almouzni et coll., 199; Smith and Stillman, 1991; Worcel et coll., 1978). Cependant de récentes données suggèrent que l’assemblage de la chromatine pourrait être semi-conservatif (Natsume et coll., 27; Tagami et coll., 24). L’assemblage semiconservatif implique que l’information épigénétique portée par les modifications d’histones pourrait être transmise lors de la réplication. Les indices supportant l’existence d’une réplication semi-conservative de la chromatine reposent sur la supposition qu’un nucléosome nouvellement assemblé contiendrait un dimère (H3-H4) parental et un dimère (H3-H4) nouvellement synthétisé. Les données appuyant cette théorie se basent (Natsume et coll., 27) sur le fait que les chaperonnes impliquées dans la déposition du tétramère, HIRA et CAF, ont été co-purifiées avec des dimères H3-H4 et H3.3-H4 et non pas associées à des tétramères (Tagami et coll., 24). De plus, Asf1 est également associé à des dimères H3-H4 en solution et non avec des tétramères. La structure de Asf1 semble indiquer que cette chaperonne aurait pour fonction la dissociation des tétramères (H3-H4)2 stables en solution en deux dimères H3-H4 (Natsume et coll., 27). Nap1 (Nucleosome Assembly Protein 1) est conservée chez tous les eucaryotes, depuis la levure jusqu’à l’homme (Park and Luger, 26). La chaperonne d’histone Nap1 montre une affinité pour les quatre histones de cœur in vitro, mais co-purifie préférentiellement avec H2A/H2B (Ishimi et coll., 1984; Ishimi et coll., 1987; Ito et coll., 1996). Plusieurs études récentes indiquent que Nap1 incorpore les histones d’une façon couplée à la réplication mais également indépendamment de la synthèse d’ADN. Deux études réalisées chez S. cerevisiae montrent que Nap1 exerce sa fonction sous forme de dimère (McBryant et coll., 23; Toth et coll., 25). Des expériences de microscopies indiquent que Nap1 est localisée dans le cytoplasme pendant la phase G2 du cycle cellulaire. NAP1 entre dans le noyau en phase S (Ito et coll., 1996), 32 suggérant que Nap1 pourrait faire la navette entre ces deux compartiments cellulaires. Le fait que Nap1 interagisse avec Kap114p qui est une importine, supporte l’idée que sa fonction serait l’import nucléaire de H2A-H2AB (Mosammaparast et coll., 22). L’incorporation d’histones en cours de réplication est cruciale pour maintenir la densité en nucléosome. Chez S. cerevisiae, la déplétion en histone H4 pendant la phase S est létale (Kim et coll., 1988). Malgré l’expression forcée de H4 pendant la phase G2, les levures meurent, donc l’expression de H4 en G2 ne permet pas de supplémenter le déficit de la phase S (Kim et coll., 1988), démontrant que l’assemblage de la chromatine RC est vital. Les mutants nuls pour les sous-unités de CAF-1 sont viables et présentent des défauts de silencing des télomères et de réparation aux dommages à l’ADN, mais leur densité nucléosomale n’est pas altérée (Enomoto and Berman, 1998; Kaufman et coll., 1997). La survie des levures en l’absence de CAF-1 suggère qu’il existe des voies alternatives de l’assemblage de la chromatine RC.

Assemblage indépendant de la réplication (RI)

Les variants d’histones synthétisés durant tout le cycle cellulaire ont, quant à eux, la possibilité d’être incorporés indépendamment de la réplication de l’ADN. Les variants d’histone sont pris en charge et incorporés dans la chromatine par des chaperonnes spécifiques (table 1). Certains variants d’histone comme H3.3 jouent un rôle fondamental dans l’assemblage RI de la chromatine (Malik and Henikoff, 23). Ainsi l’assemblage RI fait toujours intervenir le variant d’histone H3.3 (Ahmad and Henikoff, 22) (chapitre I.3.2.3). Par immuno-précipitation, l’histone canonique H3 copurifie la chaperonne CAF-1, alors que le variant H3.3 co-purifie la chaperonne HIRA (Tagami et coll., 24). HIRA est la chaperonne en charge de l’incorporation indépendante de la réplication spécifique de l’histone H3.3 (Loppin et coll., 25). HIRA, qui interagit physiquement avec Asf1, est capable de déposer in vitro H3-H4 (Green et coll., 25; Prochasson et coll., 25). En plus des chaperonnes, l’incorporation de H3.3 fait également intervenir un complexe de remodelage de la chromatine ATP-dépendant appelé CHD1 (chapitre I.1.5) (Konev et coll., 27) 3 Le variant H2A.Z est incorporé par le complexe de remodelage SWR1 et la chaperonne Chz1 (Kobor et coll., 24; Krogan et coll., 23a; Mizuguchi et coll., 24) (Luk et coll., 27). Chz1 s’associe préférentiellement au dimère H2A.Z-H2B (Luk et coll., 27)

Table des matières

REMERCIMENTS
TABLE DES MATIERES
INDEX DES FIGURES
INDEX DES TABLES
ELEMENTS DE SIGNALEMENT DE LA THESE.
A. TITRE
a. Titre en français
b. Titre en anglais
B. RESUME
a. Résumé en français.
b. Résumé en anglais (« Summary ») .
C. MOTS CLES.
a. Mots clés en français
b. Mots clés en anglais (« Keywords ») .
D. INFORMATIONS SUR LES LABORATOIRES DANS LESQUELLES LA THESE A ETE PREPAREE
a. Laboratoire de rattachement
b. Autre laboratoire
LISTE DES ABREVIATIONS PRINCIPALES
AVANT-PROPOS
I. CHAPITRE I: INTRODUCTION
I.1. STRUCTURE ET ORGANISATION DE LA CHROMATINE
I.1.1. Le nucléosome
I.1.1.1. Structure du nucléosome
I.1.1.2. Les histones
I.1.2. Structures d’ordres supérieurs de la chromatine
I.1.3. Territoires chromatiniens
I.1.3.1. L’euchromatine
I.1.3.2. L’hétérochromatine
a. Propriétés8
b. Hétérochromatine constitutive
c. Hétérochromatine facultative
I.1.4. Assemblage et remodelage de la chromatine
I.1.4.1. Assemblage de la chromatine
I.1.4.2. Assemblage dépendant de la réplication (RD)
I.1.4.3. Assemblage indépendant de la réplication (RI)
I.1.5. Complexes de remodelage ATP-dépendants
I.1.5.1. Fonctions biologiques
I.1.5.2. Interactions avec les variants d’histones
I.2. REGULATIONS EPIGENETIQUES
I.2.1. Définition
I.2.2. L’empreinte génomique parentale
I.2.3. L’inactivation du chromosome X
I.2.3.1. Inactivation par l’empreinte
I.2.3.2. Inactivation aléatoire
I.2.3.3. Rôle de l’ARN Xist
I.2.3.4. Rôle des protéines polycomb
I.2.3.5. Méthylation de l’ADN et variants d’histones
I.3. SUPPORTS DE L’INFORMATION EPIGENETIQUE
I.3.1. La méthylation de l’ADN
I.3.2. Les variants d’histones
I.3.2.1. Généralités
I.3.2.2. Variants centromériques
I.3.2.3. H3.3
I.3.2.4. H2A.X
I.3.2.5. H2A.Z
I.3.2.6. MacroH2A
a. MacroH2A et le chromosome X inactif
b. MacroH2A et la méthylation de l’ADN
c. MacroH2A et la répression de la transcription
d. MacroH2A et le métabolisme de l’ADP-ribose
e. MacroH2A et l’arrêt du cycle cellulaire
I.3.2.7. H2ABbd et autres variants de la spermatogenèse
a. H2A.Bbd
b. TH2A
c. H2AL1 et H2AL
I.3.2.8. TH2B
I.3.2.9. H2BFWT
I.3.2.. Interactions entre variants
I.3.3. Modifications post-traductionnelles des histones
I.3.3.1. Généralités
I.3.3.2. Acétylation des histones
I.3.3.3. Méthylation des histones
I.3.3.4. ADP-ribosylation
I.3.3.5. Ubiquitination
I.3.3.6. Interactions entre modifications d’histones
I.3.4. Interactions entre différents niveaux d’informations épigénétiques
I.4. REMODELAGE DE LA CHROMATINE AU COURS DE LA SPERMATOGENESE
I.4.1.1. Déroulement de la spermatogenèse
I.4.1.2. Remodelage de la chromatine
I.4.1.3. Rôle des variants d’histones dans la transmission de l’information épigénétique
I.5. OBJECTIFS
I.5.1. H2BFWT
I.5.2. MacroH2A
II. CHAPITRE II: RESULTATS
II.1. STRUCTURE ET FONCTION DU NUCLEOSOME VARIANT H2BFWT
II.2. ÉTUDE IN VIVO DU VARIANT MACROH2A1
II.2.1. Matériels et méthodes : Création d’une lignée de souris knock out macroH2A
II.2.1.1. Stratégie
II.2.1.2. Construction du vecteur de recombinaison
II.2.1.3. Génération des souris déficientes macroH2A1-/-
II.2.1.4. Extraction des noyaux à partir de tissus
II.2.1.5. Western-blot
II.2.1.6. Analyses de la méthylation de l’ADN
a. Méthylation globale du génome (Southern-blot)
b. Méthylation du promoteur Xist
c. Méthylation d’une région soumise à l’empreinte
II.2.1.7. Northern-blot
II.2.1.8. Anatomopathologie
II.2.1.9. Expérience d’irradiation
II.2.2. Résultats
II.2.2.1. Knock out de macroH2A
II.2.2.2. Influence sur la méthylation de l’ADN
II.2.2.3. Transcription des rétrotransposons
II.2.2.4. Sensibilité des souris macroH2A1-/-
aux radiations ionisantes
II.2.2.5. Étude anatomopathologique
III. CHAPITRE III : DISCUSSIONS
III.1. STRUCTURE ET FONCTION DU NUCLEOSOME VARIANT H2BFWT
III.2. ÉTUDE IN VIVO DU VARIANT MACROH2A41
III.3. CONCLUSION GENERALE
IV. REFERENCES
V. ANNEXE

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