Conséquences linguistiques et identitaires du contact linguistique et dialectal à Cali (Colombie)

Conséquences linguistiques et identitaires du contact linguistique et dialectal à Cali (Colombie)

Diversité linguistique et dialectale en Colombie 

 Diversité des langues L’espagnol est la langue officielle dans tout le territoire colombien. Soixante-cinq langues amérindiennes sont recensées par Landaburu (1999) – soixante-six selon Aguirre Licht (2004, 29; 2005, 229) – et actuellement parlées par environ quatre cent mille personnes dans différentes parties du pays (Landaburu 1999)12 . Deux langues créoles sont parlées par des populations d’origine afrocolombienne : le palenquero de San Basilio de Palenque et le créole de San Andrés y Providencia. Selon les classifications récentes la plupart des langues amérindiennes de Colombie sont regroupées dans douze familles linguistiques : d’une part, les familles Chibcha, Arhuaca, Caribe, Quechua et Tupí, qui font partie des grandes familles d’Amérique du Sud ; et d’autre part, les familles Chocó, Guahibo, Sáliba, Macú, Huitoto, Bora, et Tucano, uniquement présentes en Colombie. La classification de dix langues fait encore l’objet des discussions chez les spécialistes, ces dernières considérées comme isolées ne rentrent pas dans les 10 En 2010 l’UMR CELIA (CNRS, IRD, INALCO, Paris 7) (Centre d’Etudes des Langues Indigènes d’Amérique) est devenue l’UMR 8202 SEDYL (CNRS-IRD-INALCO). 11 Centro Colombiano de Estudios de Lenguas Aborígenes, rattaché à l’université de los Andes. 12 De manière générale, ces langues manifestent un degré de vitalité variable. Ainsi, d’un côté, on trouve des langues comme le wayuu, avec une population de 122 000 locuteurs, et de l’autre, on dénombre des langues comme le carijona ou tinigua avec moins d’une vingtaine de locuteurs. Source : https://www.ethnologue.com/country/CO/status. Consulté le 10/03/14 12 classifications proposées jusque-là (Landaburu 1999). Il s’agit de l’andoque, l’awá-cuaiquer, le cofán, le guambiano, le kamentsá, le páez, le ticuna, le tinigua, le yagua, et le yaruro. Cette diversité linguistique, représentée par la carte 1, est probablement due au positionnement stratégique de la Colombie dans le cône sud de l’Amérique. Landaburu signale par exemple que cette zone géographique devait être, depuis des époques lointaines, un passage obligatoire et un lieu d’établissement de différents groupes amérindiens ce qui a conduit à une situation de diversité remarquable du point de vue typologique et génétique. De nos jours, cette diversité est toujours visible. Et ce, malgré le fait que la Colombie, avec le Venezuela et le Brésil, a vécu des processus de métissage intenses entre populations (espagnols, populations indigènes et africaines). En effet, ces trois pays ont connu une démographie indigène importante avant l’arrivée des Espagnols et ces populations ont été décimées après leur arrivée. Ainsi, les groupes indigènes, qui restent nombreux, sont paradoxalement pauvres en individus et continuent de se mélanger. Carte 1. Diversité linguistique de la Colombie

 Diversité dialectale de l’espagnol 

La Colombie regroupe la deuxième plus large concentration de locuteurs hispanophones du monde et la première de l’Amérique du Sud (File-Muriel et Orozco 2012, 11). La variété d’espagnol parlée dans le pays, largement traitée dans la littérature, est décrite comme de l’espagnol colombien (Montes 1992; 1997; 1982; Flórez 1961; Patiño 2000) ou de l’espagnol d’Amérique (Lipski 1996; Bravo-García 2005; Aleza Izquierdo 2010). 13 D’après les travaux sur les langues amérindiennes de Colombie réalisés par le Centre Colombien d’Etudes des Langues Aborigènes (CCELA), Universidad de los Andes (Aguirre Licht 2005, 230–231). 14 En général, les variétés d’espagnol colombien reflètent des influences indigènes et africaines comme la plupart des variétés d’espagnol d’Amérique (Zamora et Guitart 1982)14 . Ces influences dépendent des zones géographiques où ces variétés d’espagnol sont parlées. Ainsi par exemple, sur la côte Pacifique à l’ouest de la Colombie ou sur la côte Atlantique au nord les variétés d’espagnol colombien semblent être influencées par un substrat de langues africaines aujourd’hui disparues. En revanche, les variétés andines ou centrales recouvrant les zones montagneuses des Andes seraient influencées par un substrat de langues indigènes. Les variétés dialectales d’espagnol colombien ont fait l’objet d’études proposant des classifications suivant les critères de l’Atlas Linguistique Ethnographique de Colombie15 qui se basent notamment sur des questionnaires. L’espagnol colombien est ainsi divisé en deux macro zones géographiques selon la proposition de Montes (1982, 30) : la macro zone côtière et la macro zone centrale ou andine. Cette bipartition a été réalisée sur la base de critères linguistiques comme la prononciation de certains phonèmes16 , l’emploi de certaines constructions morphosyntaxiques17 et de certains mots. Elle est basée également sur des critères historiques. A leur tour, ces deux macro-zones peuvent être divisées en d’autres zones correspondant à d’autres sous-variétés. Ainsi, dans la macro zone côtière on trouve des variétés entre l’espagnol de la côte Caraïbe et celui de la côte Pacifique, et ces variétés comportent, à leur tour, des sous-variétés (c.f. tableau 1), et dans la macro zone andine ou centrale, on trouve les variétés andine-orientale et andine-occidentale qui se subdivisent également en sous-variétés. Ces divisions et sous-divisions sont illustrées par le tableau cidessous selon la proposition de Montes (1982). Macro-variétés Variétés Sous-variétés Proposition de bipartition Côtières Côte Caraïbe cartagenero, samario, guajiro, caribe intérieur, llanero Côte Pacifique septentrional, méridional Andine ou centrale Andine-orientale tolimense-huilense, cundiboyancese, santanderano Andine-occidentale antioqueño-caldense, nariñense-caucano Tableau 1. Variétés d’espagnol en Colombie adapté de Montes (1982, 49) 14 Cités par File-Muriel et Orozco (2012, 11). 15L’ALEC résulte d’une initiative commencée dans les années cinquante par l’Institut Caro y Cuervo pour classifier les langues de Colombie et leurs variétés. 16 Le /s/ implosif, la neutralisation et perte des /r/ /l/ postvocaliques, l’articulation de n et ch, la conservation de /h/, le remplacement du hiatus par la diphtongue, par exemple. 17 Le tutoiement et l’emploi informel de la forme archaïque de vos à la 2SG (voseo), la pluralisation de hacer impersonnel, la marque de genre de costumbre, parmi d’autres. 15 Mora (1996), pour sa part, en se fondant sur des critères lexicaux, propose de diviser la sousvariété « nariñense-caucano » de Montes (1982, 49) en deux sous-variétés : andino-sureño et caucano-valluno. Par ailleurs, Rincón (2007, 178) propose une carte (ci-dessous) des variétés dialectales de l’espagnol colombien adaptée de la bipartition et subdivision des variétés de Montes (1982) et de la classification dialectale proposée par Flórez (1961)18, mais elle ne tient pas compte de la sous-division proposée par Mora (1996). Carte 2. Classification des variétés d’espagnol en Colombie (Rincón, 2007, 178) 18 Flórez (1961) propose que l’espagnol colombien se divise en plusieures variétés : costeño, tolimense, cundiboyancense, santandereano, antioqueño, nariñense-caucano et llanero. 16 Bien qu’imprécises, ces distinctions permettent de situer deux variétés d’espagnol qui sont d’intérêt pour ce travail de thèse : la variété d’espagnol de Cali qui ferait partie du caucanovalluno et la variété d’espagnol andin du sud ou andino sureño selon la proposition de Mora (1996). Ces deux sous-variétés sont marquées en bleu et en rouge respectivement sur la carte ci-dessous. Carte 3. Sous variétés caucano-valluno et andino-sureño d’après Mora (1996) Cette division pourrait encore faire l’objet d’autres sous-divisions plus particulières mais pour des questions de clarté de mon exposé je ne tiens compte ici que de la classification de Mora (1996). Je propose donc, dans les deux prochaines sous-parties, une description sommaire de deux variétés d’espagnol colombien : la variété de Cali (EC) et la variété d’espagnol andin (EA) parlée dans la zone andine du sud de la Colombie, mais aussi en Equateur. Nous verrons que pour cette dernière, il faut tenir compte du fait qu’elle appartient à un ensemble de variétés qui s’étend du sud de la Colombie jusqu’au nord de l’Argentine. Pour en discuter, il Caucano-valluno Andino-sureño Nariñense Nariñense-caucano (Montes, 1982) -caucano (Montes, 1982) 17 convient de considérer l’importante littérature consacrée à la description des multiples variétés d’espagnol andin. 

 La variété d’espagnol de Cali 

L’espagnol de Cali (EC) a des particularités phonétiques, morphosyntaxiques et lexicales intéressantes du point de vue sociolinguistique. Contrairement aux variétés d’espagnol de Bogotá, Medellín, et Barranquilla où des projets de descriptions sociolinguistiques – de type variationniste – de l’espagnol parlé sont en cours19, jusqu’à présent, peu de travaux sociolinguistiques concernent la description de la variété locale à Cali. On peut trouver certains travaux sociophonétiques comme celui sur la réalisation du /s/ en fin de mot et en début de mot dans des conversations spontanées des locuteurs de Cali (Brown et Brown 2012; File-Muriel et Brown 2010), ou dans l’espagnol soutenu de Cali (Ramírez Espinoza et Almira Vazquez 2011). Ces travaux variationnistes mettent particulièrement en avant une caractéristique qui semble être l’une des plus distinctives de l’espagnol de Cali et de l’espagnol colombien en général : l’aspiration du phonème /s/ (Brown et Brown 2012). On pourrait également citer le travail de Burgos (2007) sur la co-construction du discours, mais cette étude ne concerne pas directement une description de la variété de Cali. En revanche, elle décrit les mécanismes de « réalisation d’une unité syntaxique à partir de la contribution de deux locuteurs dans une conversation » (2007, 14) à partir de l’observation d’un corpus de conversations spontanées de locuteurs de Cali. Même si son orientation méthodologique et son objectif sont différents, elle pourrait contribuer à la caractérisation de la variété en question. Enfin, il y a quelques travaux de mémoire de licence et de master à l’université de Valle de Cali sur la caractérisation lexicale de la variété locale. Ces travaux décrivent des jargons de métier spécifiques comme celui des produits commerciaux (Barney, Ospina, et Vallés Calaña 2007) ou encore celui de la médecine (Tascón Quintero, Ramírez López, et Vallés Calaña 2010). 19 Les variétés d’espagnol parlées dans ces villes font l’objet d’un recueil de données au sein du projet PRESSEA. Ce projet « vise la création d’un corpus de langue espagnole parlée qui soit représentatif du monde hispanique dans sa variété géographique et sociale. Ces données sont recueillies en fonction des la diversité sociolinguistique des communautés de parole hispanophones » http://preseea.linguas.net/ 18 

Les variétés d’espagnol andin

 En général, l’espagnol andin (EA) fait référence à un ensemble de variétés d’espagnol parlées dans la région andine, en Amérique du Sud. Ces variétés sont principalement parlées en Equateur, au Pérou et en Bolivie, les trois principaux pays andins de la région. Cela ne veut pas dire que cette variété est parlée sur l’ensemble de ces territoires, mais elle est présente surtout dans les hautes terres des Andes. En Equateur par exemple, l’EA est appelé Highland Spanish par opposition à Lowland Spanish (Gómez Rendón 2008a, 137) qui n’est pas consideré comme de l’espagnol andin. L’EA est également parlé au nord-est argentin, au nord du Chili et dans une partie du sud de la Colombie. Par ailleurs, ces zones géographiques sont aussi caractérisées par la présence des dialectes de la famille quechua et de l’aymara en Bolivie20. Le quichua21 par exemple a coexisté avec l’espagnol en tant que lingua franca en même temps que beaucoup d’autres langues amérindiennes (Gómez Rendón 2008a, 132). Les variétés d’EA ont fait l’objet de nombreuses études. Ainsi, des auteurs comme Muntendam (2008, 44) ont suggéré que la variété d’espagnol andin équatorien est « le résultat de l’acquisition de l’espagnol comme langue seconde par les locuteurs quichuas adultes »  du fait d’un contact prolongé. Les Quichuas ont acquis l’espagnol comme langue maternelle de manière graduelle sans perdre nécessairement leur première langue. Cette situation aurait facilité les mélanges car les locuteurs étaient bilingues avec une domination plus forte de l’espagnol (Lipski 1994, 82–83). De nombreuses études sur le contact linguistique indiquent que cette variété d’espagnol serait influencée historiquement par le contact prolongé avec des variétés de langues indigènes (Haboud 1998; Merma Molina 2004; 2008; Palacios Alcaine 2005c; Adelaar et Muysken 2004). Il s’agirait d’un long processus d’apprentissage et d’acquisition de l’espagnol par des locuteurs quechuophones dans lequel on peut distinguer deux grandes étapes : a) La première étape concerne le moment où l’espagnol aurait intégré des particularités linguistiques du quichua et de l’aymara lors de son apprentissage par les locuteurs indigènes. 20 Mais également par d’autres langues indigènes de familles linguistiques diverses. 21 J’utilise dans ce travail le terme « quechua » pour me référer à la famille des langues quechuas et quichuas en Amérique amérindienne. Les termes « quichua » et « quechua » peuvent faire référence à des variétés particulières ; ainsi la variété parlée en Equateur est appelée le quichua, alors que celle du Pérou est appelée le quechua. Enfin, lorsque je parlei de la « comunauté » indigène parlant la variété de quichua équatorien, j’utilise l’appelatif « Quichuas ». 22 Haboud (1998) préfère le terme « castellano andino ecuatoriano ». 23 Ma traduction. 19 Dans cette première étape d’apprentissage, plusieurs types d’interlangues ou systèmes transitoires se seraient développés. Cette situation aurait donné par exemple des phénomènes comme ceux observés dans la Media Lengua (Muysken 1981; 1988; 1997; 2013; Gómez Rendón 2005; 2008a). La Media Lengua d’Imbabura par exemple est une langue mixte composée de grammaire quechua et d’éléments lexicaux de l’espagnol. En effet, dans la Media Lengua on peut observer des constructions syntaxiques typiquement hispaniques mélangées avec des affixes quichuas comme le montre l’exemple suivant de Gómez Rendón : (1) muy pok-ito disayuno-ta da -li-k ka-rka très peu.DIM petit-déjuener-ACC donner-DAT-DUR être-3SG.PST ‘Il avait l’habitude de nous donner un petit-déjeuner misérable’ (Gómez Rendón 2008a, 69) Ici par exemple, le mot disayuno est suivi de la marque d’accusatif du quichua –ta, ainsi que le verbe « dar » (donner) qui est suivi du datif espagnol 3SG le, ici li et d’une forme du duratif quichua –k. Pour certains auteurs, la Media Lengua est un système transitoire ou une sorte d’interlangue observée dans l’apprentissage de l’espagnol comme langue seconde par les locuteurs quechuophones. Dans ce processus, ils transforment la langue seconde de sorte que de nouvelles structures émergent par des processus de relexification, de transferts, par influence du substrat, etc. La Media Lengua est le résultat d’un contact intense entre locuteurs quichuas et la société hispanophone en Equateur ; et elle peut avoir lieu dans une situation de perte intergénérationnelle de la langue ou language shift au sens de Thomason et Kaufman (1988). Par ailleurs, les locuteurs de Media Lengua peuvent parler à la fois l’EA et la variété locale du quichua (Gómez Rendón 2008a; 2008b). b) La deuxième étape concerne le moment où l’espagnol appris par ces populations aurait été transmis aux nouvelles générations d’indigènes. Lors de cette deuxième étape, les descendants des Quichuas auraient acquis un espagnol plus stabilisé. Lipski (1994, 82-83) suggère que les métis ont fait le pont entre les deux cultures et ont facilité les transferts linguistiques et le développement d’une « interlangue ethnique stable », c’est-à-dire, une variété de langue mélangée qui leur est propre, plus stable que la Media Lengua. Cette variété d’EA perd alors certaines caractéristiques observées dans la Media Lengua et en stabilise d’autres. 20 Dans un contexte de ségrégation raciale et sociale comme c’était le cas durant l’époque coloniale, l’espagnol était non seulement utilisé pour les échanges importants avec les Européens, mais aussi pour les échanges entre les membres d’une même communauté indigène (Lipski, 1994, 82-83). Les politiques linguistiques ont été instaurées par toutes les administrations à l’époque coloniale dans le but de rendre les locuteurs non hispanophones compétents en espagnol pour favoriser la communication avec la société dominante. Dans le même temps, les locuteurs ont été contraints, soit d’abandonner leurs langues natives, soit de restreindre leur emploi à des contextes plus intimes (Gómez Rendón 2008a, 123-124). Par la suite, l’EA se serait aussi répandu à d’autres groupes sociolinguistiques bilingues et monolingues. Pour, Merma Molina (2007, 17), qui a étudié la variété d’EA au Pérou, l’influence du quichua a donné comme résultat, à travers le temps, la formation de divers types de phénomènes linguistiques d’interférence et de convergence au niveau lexical, phonétique, phonologique ou morphologique dont le résultat est l’espagnol andin. Toutes ces caractéristiques seraient le résultat, direct ou indirect, d’un contact intense entre l’espagnol et le quichua pendant des siècles (Palacios Alcaine 2005c, 46; Haboud 1998). Certains auteurs comme Pfänder (2009) préfèrent parler non pas d’un mélange entre le quichua (et aussi l’aymara) et l’espagnol mais d’un métissage culturel et linguistique « incommensurable » avec des conséquences très enrichissantes pour l’EA. La différence ici est terminologique car au fond ces auters s’intéressent tous au même phénomène : l’espagnol andin en contact avec le quichua et l’aymara. Aujourd’hui, on peut observer des caractéristiques morphosyntaxiques et syntaxiques propres à l’EA qui le différencient de l’espagnol ibérique et d’autres variétés d’espagnol du continent américain ; elles ont été bien documentées dans la littérature. Au niveau morphosyntaxique certains auteurs font état de particularités au niveau des accords grammaticaux comme les marques de genre et de pluriel pour les variétés d’EA au Pérou ; (Merma Molina 2004; 2007; Escobar 2000), mais aussi pour les variétés d’EA en Colombie (Arboleda, Toro 2000, 2002). Les pronoms clitiques comportent des particularités – comme la simplification des paradigmes – qui ont été étudiés par des auteurs comme Klee et Caravedo (2005) et Merma Molina (2008) en EA péruvien, par Palacios Alcaine (2005a; 2005b) pour l’EA équatorien et par Pfänder (2009) pour l’EA de Bolivie ; enfin, Arboleda Toro (2000; 2002) s’est consacré à la variété d’EA parlée au sud de la Colombie. 21 D’autres particularités comme le système de l’article, les emplois du possessif, des adjectifs, des prépositions et la négation ont également été étudiées par ces mêmes auteurs. Cependant, les particularités les plus travaillées qui semblent être les conséquences les plus directes de l’influence du quichua sur l’espagnol sont les emplois du gérondif perfectif, du gérondif d’antériorité et d’autres formes progressives (Merma Molina 2008; Manley 2007; Gómez Rendón 2008a; Haboud 1998; 2005; Muysken 2005; Olbertz 2008a; Pfänder 2009). Les emplois des temps verbaux avec des valeurs évidentielles, les marqueurs épistémiques et la modalité ont également été travaillées par des auteurs comme Merma Molina (2008), Manley (2007), Gómez Rendón (2008a), Olbertz (2008b), Pfänder (2009), Portilla Melo (2010) et Germán de Granda (1997b). Au niveau syntaxique, l’ordre des constituants a été étudié en EA péruvien par Escobar (2000), Merma Molina (2008) et Muntendam (2008; 2009; 2013) ; en EA équatorien par Muysken (1984), Ocampo et Klee (1995), Haboud (1998), Palacios Alcaine (2005c), Gómez Rendón (2008a) et Muntendam (2008; 2009; 2013). Quant à la variété d’EA parlée en Bolivie nous avons les travaux de Pfänder (2009) et Muntendam (2008; 2009; 2013) ; et pour la Colombie, les travaux de Arboleda Toro (2000; 2002). Enfin, d’autres particularités de l’EA ont éveillé l’intérêt des chercheurs, comme le montrent par exemple, les travaux sur l’adverbe dizque de Olbertz (2005) et Olbertz et Muysken (à paraître) sur les caractéristiques générales de l’EA rural équatorien et sur des questions phonétiques, en particulier, la réalisation de [ž/ż] – [y], ou l’opposition des phonèmes /Ḽ/ – /Y/ en EA équatorien et argentin (De Granda 1992). La multiplicité de travaux, d’approches, de méthodologies est synthétisée dans le tableau que je propose en Annexe 1, page 276. Comme outil de consultation, il permet au lecteur de se référer à une caractéristique de l’EA en particulier, d’identifier la variété géographique et les auteurs qui s’y sont consacrés. Ce tableau a également été pour moi un document heuristique qui m’a permis de me repérer dans l’ensemble des travaux sur l’EA. Du fait des mobilités de populations et des migrations propres de la situation socio-politique de la Colombie, l’EC et l’EA (mais aussi d’autres langues indigènes) sont rentrées en contact à la ville de Cali comme nous le verrons par la suite en 1.2.3 et 1.2.4.  

Table des matières

REMERCIEMENTS
INTRODUCTION
CHAPITRE 1: LA COLOMBIE : DIVERSITE LINGUISTIQUE ET DIALECTALE, MOBILITES DES POPULATIONS,
HETEROGENEITE DU TERRAIN.
1.1 Diversité linguistique et dialectale en Colombie.
1.1.1 Diversité des langues
1.1.2 Diversité dialectale de l’espagnol.
1.1.3 La variété d’espagnol de Cali
1.1.4 Les variétés d’espagnol andin
1.2 Mobilités des populations en Colombie.
1.2.1Situation socio-politique des populations indigènes en Colombie.
1.2.2 Mobilités de populations indigènes vers les centres urbains
1.2.3 Approches sociolinguistiques des mobilités et migrations en Colombie
1.2.4 Mobilités de population dans la ville de Cali
1.3 Un terrain hétérogène, des pratiques langagières hétérogènes
1.4 Conclusion
CHAPITRE 2: PREMIERE APPROCHE DU TERRAIN
2.1 Remarques méthodologiques
2.1.1 Le caractère théorique du « terrain »
2.1.2 Préparation de mon premier terrain
2.1.3 Difficultés d’accès au terrain via les responsables politiques
2.1.4 Vers une démarche de type ethnographique
2.2 Les Quichuas de Cali
2.2.1 Une communauté « connue » des chercheurs
2.2.1.1 Origines et migrations
2.2.1.2 Religion, langue et travail, entre mécanismes d’Intégration et affirmation de soi
2.2.2 Premières observations et premiers échanges issus de mon séjour sur le terrain
2.2.2.1 Deux origines différentes
2.2.2.2 Distribution au centre-ville
2.2.2.3 Pratiques langagières déclarées
2.2.2.3.1 « Maîtrise » du quichua et de l’espagnol
2.2.2.3.2 L’âge d’apprentissage des langues
2.2.2.3.3 Contextes d’utilisation des langues
2.2.2.3.4 Emploi des langues selon le type d’interlocuteur
2.3 La non transmission intergénérationnelle de la langue quichua
2.3.1 Quelques concepts.
2.3.2 Un constat de la rupture intergénérationnelle du quichua chez les Quichuas
2.3.3 Le rôle des facteurs sociaux dans la non-transmission
2.3.4 Les attitudes linguistiques et la non-transmission
2.3.5 Incidences sur les pratiques langagières
2.4 Conclusions
CHAPITRE 3: CONSTITUTION ET ANNOTATION D’UN CORPUS DE PRATIQUES LANGAGIERES EN EA
3.1 De l’enregistrement à l’annotation d’un corpus de pratiques langagières en EA
3.1.1 Enregistrement de pratiques langagières
3.1.2 Transcription des enregistrements
3.1.3 Annotation du corpus sous xml
3.2 Types de phénomènes remarquables
3.2.1 Phénomènes remarquables dans mon corpus.
3.2.2 Au niveau morphosyntaxique (PREMS
3.2.3 Au niveau interactionnel (PRINT)
3.2.4 Au niveau discursif (PREDISC)
3.3 Enoncés préverbaux en EA des Quichuas : PREMS, PRINT et/ou PREDISC
3.4 Enoncés de type doubling
3.5 La question de la fréquence intuitive
3.6 Conclusions
CHAPITRE 4 : ANALYSE PLURIFACTORIELLE DES ENONCES AVEC DES OBJETS PREVERBAUX
4.1 Qu’est-ce qu’une analyse plurifactorielle ?
4.2 L’étude de l’ordre des constituants dans la littérature
4.2.1 Perspective typologique
4.2.2 Perspective fonctionnaliste
4.2.2.1 La Structure de l’Information (SI)
4.2.2.2 Les notions de Topique et de Focus
4.2.3 Conclusion
4.3 Ordre des constituants en espagnol standard (ES)
4.3.1 Constructions transitives, ditransitives et intransitives
4.3.2 Constructions copulatives avec ser et estar
4.3.3 L’ordre de certains adverbes et compléments circonstanciels
4.3.4 Conclusion
4.4 Les variations de l’ordre des constituants en EA des Quichuas
4.4.1 Les constructions avec un OD et un OI en position préverbale
4.4.2 Les constructions copulatives
4.4.3 Conclusion
4.5 Explications traditionnelles
4.5.1 Ordre des constituants en quichua (famille des langues quechua)
4.5.2 Interférence du quichua
4.5.3 Convergence linguistique
4.5.4 Le rôle de la structure informationnelle
4.5.5 Les facteurs sociolinguistique
4.5.6 Autres situations de contact
4.5. Conclusion
4.6 Interaction des différents facteurs dans mon corpus
4.6.1 La multicausalité
4.6.2 Facteurs grammaticaux et informationnels dans les constructions de type OV
4.6.3 Des constructions similaires à celles du quichua
4.6.4 L’effet boule de neige et une haute productivité des énoncés de type OV
4.6.5 Haute productivité des énoncés de type OV et caractéristiques sociales des locuteurs
4. Conclusions
CHAPITRE 5 : APPROCHE SEQUENTIELLE DE VARIATIONS DE L’ORDRE DES CONSTITUANT
5.1 Le caractère socialement signifiant de la variation de l’ordre des constituants
5.2 Remarques méthodologiques pour l’analyse de la variation dans une perspective
interprétative.
5.2.1 Le tour de parole comme unité d’analyse conversationnelle
5.2.2 Le principe de séquentialité de la conversation.
5.2.3 Le codage des séquences de conversation
5.3 Analyse séquentielle de deux extraits de conversation issus de mon corpus
5.3.1 « como yo soy ecuatoriano »
5.3.1.1 Les participants
5.3.1.2 Le cadre d’interaction
5.3.1.3 Analyse
5.3.2 « Ahí yo vivo ahí »
5.3.2.1 Les participants
5.3.2.2 Le cadre d’interaction
5.3.2.3 Analyse
5.4 Discussion
5.4.1 L’expression des positionnements subjectifs et intersubjectifs
5.4.2 L’utilisation des énoncés de type OV et doubling et l’émergence des identités locales
5.5 Conclusion .
5.6 Prolongations
5.6.1 Le cas de la variation du phonème /s/.
5.6.2 Les constructions de type doubling
CONCLUSION GENERALE
BIBLIOGRAPHIE
Liste de gloses et abréviations
Conventions de transcription
Table des illustrations
ANNEXES
Annexe 1. Tableau non exhaustif des travaux sur l’EA
Annexe 2. Lettre adressée aux responsables de cabildos urbanos de la ville de Cali
Annexe 3. Questionnaire des pratiques langagières déclarées et connaissance des langues indigènes
Annexe 4. Guide d’observation des langues et des situations de communication au centre-ville de
Cali
Annexe 5. Guide d’observation des communautés indigènes de Cali
Annexe 6. Extraits du corpus
China/mostrá
Algunos que pahan diciendo
Cada año viajamos cada año
Puro español nomás habla
Ella habla en quichua también ella
Treinta me dijiste
Algunos yo puede habla
Toses quichua ya no saben

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