Contribution à la couverture vaccinale des populations 

Contribution à la couverture vaccinale des populations 

DEFINITION ET HISTORIQUE DE LA VACCINATION

La vaccination consiste à introduire dans l’organisme tout ou une partie d’un agent pathogène (virus, bactérie, toxine, sous-unité) rendu inoffensif, mais ayant conservé son pouvoir immunogène, pour induire le développement d’une réponse immunitaire active contre l’agent pathogène. La réponse immunitaire induite par le vaccin est spécifique et protectrice contre l’agent infectieux, en produisant des anticorps protecteurs et en induisant certains composants cellulaires. Un vaccin doit posséder trois grandes caractéristiques : • être efficace, c’est-à-dire induire une mémoire immunitaire et conférer une protection durable contre l’infection ; • avoir une excellente tolérance en étant dénué d’effets indésirables graves ; • être pratique à administrer au regard de la modalité de prise ou d’injection (souscutanée, intradermique, intramusculaire, orale), aux nombres d’administrations, aux conditions de conservation ou au coût. 

Historique

 La première vaccination a été réalisée par Jenner en 1881 avec le virus de la vaccine (Riedel 2005). Les travaux de Pasteur sur le choléra et la rage basés sur la possibilité d’atténuer des micro-organismes, ont largement contribué à l’essor de la vaccination. La pratique vaccinale a constitué ainsi l’une des interventions les plus efficaces des politiques de santé publique, à l’échelon individuel et collectif. Elle a été marquée dans le passé par l’éradication de la variole en 1980 et la certification en 2002 que la région européenne de l’OMS était devenue exempte de poliomyélite (Plotkin 2015). 

PRINCIPES ET BASES IMMUNOLOGIQUES DE LA VACCINATION 

Formé d’un ensemble de cellules, de molécules et d’organes, le système immunitaire a pour fonction de protéger l’organisme contre les agents infectieux et 10 autres éléments étrangers d’une part et d’autre part il doit empêcher le l’apparition et le développement de cellules cancéreuses à partir des composants du soi. Cette fonction de protection est exploitée dans la vaccination. 

Composantes fonctionnelles du système immunitaire

Il existe de nombreux acteurs de la réponse immune. Ils agissent grâce à un ensemble de mécanismes intégrés et répartis en deux branches fonctionnelles : réponse immunitaire innée et réponse immunitaire adaptative (Figure 1). Nœud lymphatique IMMUNITE ADAPTATIVE Lymphocytes T Lymphocytes B Anticorps Plasmocytes Lymphocytes T cytotoxiques Expansion clonale et différenciation Monocytes macrophages Lymphocytes NK Polynucléaires ANTIGENE IMMUNITE INNEE Cellules dendritiques Figure 1 : Acteurs et phases de la réponse immunitaire La réponse immunitaire innée regroupe les moyens de défense non spécifiques de l’organisme qui interviennent quel que soit l’antigène étranger en cause. C’est une réponse immédiate, présente en tout point de l’organisme et toujours prête à agir. Les cellules de la réponse immunitaire innée sont les monocytes macrophages, les polynucléaires, les mastocytes, les cellules NK et les cellules dendritiques. Les germes pathogènes expriment des motifs moléculaires 11 particuliers (lipopolysaccharides, peptidoglycanes, …) qui interagissent avec des cibles portées par des cellules immunitaires innées de l’hôte (TLR, protéines du complément, sucres, …).

Il existe même un ciblage préférentiel de groupe de pathogènes qui conditionne même le mode de réponse immunitaire qui va se développer. C’est l’une des propriétés exploitée dans la vaccination avec l’utilisant d’adjuvants vaccinaux adaptés (De Gregorio, Caproni et al. 2013). Tout ceci concourt à provoquer un signal de danger, entraînant la réponse inflammatoire. L’inflammation aiguë se déroule en trois phases classiques: phase d’initiation, phase vasculaire et phase cellulaire. Plusieurs protéines plasmatiques sont activées en cascade : la coagulation, le complément, la fibrinolyse, les kinines, entraînant une augmentation de perméabilité vasculaire, attraction et activation des polynucléaires et des monocytes sanguins, et signes cliniques de l’inflammation. Partenaire particulièrement important de la réponse immunitaire non spécifique, le complément est un ensemble de trente cinq protéines qui peuvent interagir avec les membranes biologiques et s’activer de façon séquentielle pour donner naissance à plusieurs activités biologiques. Le complément joue un rôle particulièrement important dans l’immunité anti-infectieuse et dans la pathogénie des lésions de certaines maladies auto-immunes (Pulendran and Ahmed 2011). Les interactions entre les polynucléaires et l’endothélium vasculaire font intervenir des molécules d’adhésion (sélectines et intégrines) et des facteurs chimiotactiques (chimiokines) qui favorisent le roulement des polynucléaires sur l’endothélium, leur activation, leur adhérence et leur pénétration dans les tissus. Plusieurs cytokines jouent un rôle majeur dans ces phénomènes; c’est le cas de l’IL-1, du TNF-α et de l’IL-6. Le système est hautement régulé par des cytokines anti-inflammatoires (IL1ra, IL-10, IL-4) et par le récepteur soluble du TNF.

Les polynucléaires accumulés au site de pénétration de l’antigène étranger phagocytent, détruisent les bactéries extracellulaires, et libèrent des radicaux libres oxygénés, des dérivés de l’acide arachidonique et de nombreuses protéinases (Slifka and Ahmed 1998). L’inflammation chronique est le plus souvent la perpétuation d’une période aiguë qui dure normalement de quelques heures à quelques jours lorsque l’agresseur est éliminé. Dans certains cas, la réaction inflammatoire peut démarrer sur le mode chronique. Les cellules présentatrices d’antigènes que sont les macrophages, les cellules dendritiques et les lymphocytes B vont fixer à leur surface une fraction du peptide antigénique associé au complexe majeur d’histocompatibilité de classe I ou II. Ce peptide sera reconnu par les lymphocytes T CD4+ (LTCD4+ ) ou CD8+ (LTCD8+ ). Il s’ensuit une activation de la réponse immunitaire adaptative avec une sécrétion de cytokines qui interviennent à plusieurs niveaux. Les LTCD4+ et les LTCD8+ prolifèrent avec pour les LTCD4+ l’induction d’une différenciation des lymphocytes B en plasmocytes et pour les LTCD8+ une destruction des cellules infectées (Figure 1). Les lymphocytes B reconnaissent le peptide antigénique en forme native et le présentent aux LTCD4+.

C’est suite à cette coopération T/B que les cellules B se différencient des en lymphocytes B mémoire ou en plasmocytes producteurs d’anticorps (Victora and Nussenzweig 2012). Lors d’un premier contact avec l’antigène, les plasmocytes produisent d’abord des anticorps de faible affinité, appelés IgM, puis des IgG et IgA par le mécanisme de commutation isotypique (Dorner and Radbruch 2007). L’affinité de ces anticorps pour l’antigène serait augmentée en fin de réponse. Suite à un nouveau contact avec l’antigène, les lymphocytes B mémoire sont activés et deviennent rapidement des plasmocytes qui sécrètent de grandes quantités d’anticorps avec une haute affinité et surtout de type IgG et IgA. Sur ces différents mécanismes, repose la réponse vaccinale (Dagan, Poolman et al. 2010). Pour être efficace, la vaccination doit permettre au système immunitaire d’identifier des antigènes comme étrangers et de lancer les processus immunitaires qui aboutiront à l’induction des mécanismes nécessaires à la protection. Cela nécessite la participation de l’immunité innée et de l’immunité adaptative. 13 II -2 – Réponse vaccinale Il existe deux types de réponses vaccinales. La réponse primaire est observée après la première injection du vaccin. Au cours de cette phase, il y a la formation de plasmocytes sécrétant des anticorps spécifiques de l’antigène vaccinal (Dorner and Radbruch 2007). L’apparition de cellules B mémoire est sera aussi notée grâce à l’intervention de cellules effectrices T qui prolifèrent et sécrètent des cytokines au niveau des centres germinatifs ou follicules secondaires (Figure 2). Les cellules T vont aussi permettre la formation des lymphocytes T mémoires (Lambert, Liu et al. 2005).

La durée de la période de latence est de 7 à 15 jours; elle est dépendante de caractères propres à l’individu vacciné et des qualités immunogéniques de l’antigène vaccinal. La cinétique des anticorps pendant cette réponse initiale, comporte deux phases : • une phase d’ascension rapide correspondant à la synthèse surtout d’IgM, pour atteindre un maximum au plus tard au bout d’un mois ; • une diminution du taux d’anticorps. Figure 2:Réponse vaccinale et mise en place d’une mémoire immunitaire (Victora and Nussenzweig 2012)La réponse secondaire est observée après les contacts ultérieurs ou rappels vaccinaux avec le même antigène. Réalisée en pratique un mois après la première administration, le rappel vaccinal permet une réactivation des cellules T et B mémoire. On assiste alors à une ascension rapide, importante et durable des anticorps protecteurs de type IgG ou IgA. En effet, les plasmocytes se différencient rapidement à partir des lymphocytes B mémoire. Cette réponse est caractérisée par un temps de latence plus court et des taux élevés d’anticorps de haute affinité.

La vaccination repose sur la mémoire immunologique. Elle persiste très longtemps, même lorsque le taux d’anticorps, qui diminue progressivement, devient très faible. Lors de toute nouvelle introduction de l’antigène (vaccinal ou infectieux), ces populations de lymphocytes sont à nouveau capables de produire rapidement de grandes quantités d’anticorps (Lambert, Liu et al. 2005). Le degré d’immunisation d’un sujet s’évalue par la mesure du titre d’anticorps. C’est le cas de la recherche des anticorps anti-AgHBs pour évaluer l’efficacité d’une vaccination contre l’hépatite B. Certains facteurs influencent la réponse immunitaire, tels que l’âge (immaturité du système immunitaire du nouveau-né et décroissance de la réponse à partir de l’âge de 40 ans), les déficits immunitaires congénitaux ou acquis et des facteurs génétiques encore assez mal connus. 

Paramètres influençant la réponse vaccinale 

En vaccinant contre un pathogène, on souhaite déclencher une réponse la plus efficace possible, génératrice d’une forte mémoire immunitaire en injectant le pathogène ou ses antigènes de manière inoffensive. Il s’agit d’une immunisation active car c’est le système immunitaire du patient qui génère les mécanismes de défense contre le pathogène ciblé (Bonten, Huijts et al. 2015). Tous les types de réponses (humorale et cellulaire) peuvent être déclenchés par la vaccination. Plusieurs paramètres influencent qualitativement et quantitativement la réponse vaccinale. Il faut ainsi prendre en compte : – la nature de l’antigène à injecter notamment son immunogénicité; 15 – la dose devant être optimale ; – la voie d’administration étant dans la plus part des cas sous-cutanée ; – la présence ou non d’adjuvants – le nombre d’injection ou de rappels vaccinaux. D’autres facteurs sont entièrement liés à la personne vaccinée, tels que le statut immunitaire, l’âge, l’état nutritionnel, …(WHO 2016) (Niewiesk 2014). 

 DIFFERENTS TYPES DE VACCINS ET ADJUVANTS 

Deux types de vaccins sont classiquement distingués: les vaccins vivants atténués et les vaccins inactivés ou inertes. Chacun a ses avantages et ses inconvénients. 

 Vaccins vivants atténués 

Ce type de vaccins est le plus ancien, basé sur le modèle de la vaccination antivariolique de Jenner. Ces vaccins contiennent un agent infectieux vivant (virus ou bactérie) dont le pouvoir pathogène est affaibli par différents procédés. Certains micro-organismes sont atténués en les cultivant dans des cellules non humaines ce qui permet de générer des mutations occasionnant la perte de leur pouvoir pathogène après plusieurs cycles de multiplication (De Gregorio, Caproni et al. 2013). A titre d’exemple, le Poliovirus est ainsi atténué par culture sur des cellules de rein de singe puis purifié pour donner le vaccin de Sabin (WHO 2016). Le BCG, utilisé comme vaccin contre la tuberculose, est issu de repiquages pendant une dizaine d’années de Mycobacterium bovis sur un milieu riche en bile lui faisant perdre sa virulence.

Ces vaccins sont très efficaces contre les virus. Effet, le micro-organisme vivant atténué mime parfaitement le micro-organisme à combattre (Tableau I). Une fois injecté, il est capable de faire quelques cycles de multiplication et induit ainsi une forte immunisation cellulaire et humorale. Une seule injection de ces vaccins est en général suffisante pour générer une immunité protectrice de longue durée. Cependant, leur administration est susceptible d’entraîner une maladie très bénigne et ces vaccins sont contre-indiqués chez la femme enceinte et, bien évidemment, chez les sujets immunodéprimés. Aussi parmi les inconvénients de ces vaccins, on retrouve une possibilité de réversion du micro-organisme vers la forme pathogène. Ce cas est très rare. De même, le mode de préparation de ces vaccins n’écarte pas à 100% la présence d virus contaminants (Lambert, Liu et al. 2005).

Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPELS SUR LE SYSTEME IMMUNITAIRE ET LA VACCINATION
I – DEFINITION ET HISTORIQUE DE LA VACCINATION
I-1 – Définition
I-2 – Historique
II – PRINCIPES ET BASES IMMUNOLOGIQUES DE LA VACCINATION
II-1- Composantes fonctionnelles du système immunitaire
II -2 – Réponse vaccinale
II -3 – Paramètres influençant la réponse vaccinale
III – DIFFERENTS TYPES DE VACCINS ET ADJUVANTS
III-1- Vaccins vivants atténués
III -2- Vaccins tués ou inactivés
III -3- Adjuvants et conservateurs
IV – CONSERVATION DES VACCINS
V – CARACTERISTIQUES IMMUNOLOGIQUES ET VACCINALES DE CERTAINES INFECTIONS CIBLEES
V-1 – Fièvre jaune et vaccin antiamaril
V-2 – Tuberculose: vaccination et IDR à la tuberculine
V-3 – Hépatite B et vaccin anti-hépatite B
V-4 – Rage, vaccination et traitement antirabique
DEUXIEME PARTIE : PRESENTATION ET ACTIVITES DU CENTRE
I – PRESENTATION DU CADRE D’ETUDE
I-1 Présentation et missions de l’Institut Pasteur de Dakar
I-2 Présentation, fonctionnement et activités du Centre Médical
I-2-1- Présentation
I-2-2- Fonctionnement
I-2-2-1 Fonctionnement du CVI
I-2-2-2 Fonctionnement du CAR
I-2-3 Différentes activités des centres
I-2-3-1 Activités de vaccination et de prophylaxie antirabique
I-2-3-2 Activités d’enseignement et d’encadrement
I-2-4- Principales collaborations
II – BILAN DES ACTIVITES DE 2009 A 2016
II- 1-1 – Evolution du nombre de doses par vaccin
II- 1-2- Répartition de l’activité vaccinale en fonction des antigènes
II- 1-3- Evaluation du suivi de la prophylaxie antirabique
II-2 Activités de santé publique et de recherche
II-3 Activités d’enseignement, d’encadrement et de formation
III- PERSPECTIVES ET RECOMMANDATIONS
III-1 Perspectives
III-2 Recommandations
CONCLUSION
REFERENCES

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