Implantation ionique d’hydrogène et d’hélium à basse énergie dans le silicium monocristallin

Implantation ionique d’hydrogène et d’hélium à basse énergie dans le silicium monocristallin

Le SOI (« Silicon On Insulator »), ou silicium sur isolant, est un substrat avancé permettant d’améliorer les performances des composants électroniques. L’utilisation de SOI diminue la consommation des circuits électroniques par rapport à l’utilisation de silicium massif tout en gardant des fréquences de fonctionnement équivalentes, ou à consommation d’énergie identique, le SOI permet d’augmenter les cadences de fonctionnement des composants. Il est de plus en plus utilisé dans l’industrie, mais malgré ces avantages, il se heurte notamment à un coût de revient supérieur au silicium massif, principalement pour deux raisons. La première raison est que le SOI est élaboré à partir de silicium massif, mais comporte de nombreuses étapes de fabrication, il se vend donc plus cher que du silicium massif. La deuxième raison est que la conception et la fabrication des composants sur silicium massif ne peuvent pas être adaptées directement au SOI. Un enjeu majeur pour augmenter sa diffusion consiste donc à réduire le coût de revient du SOI. Dans la première partie de ce chapitre, nous allons présenter brièvement les étapes clés de la technologie Smart CutTM, l’implantation ionique et le collage direct des plaques de silicium. Suite à cela, nous décrirons les mécanismes physiques intervenants dans ce procédé. La technologie Smart CutTM utilisait initialement l’implantation ionique d’hydrogène à forte dose. Cependant, dans l’objectif de réduire le coût de revient et d’améliorer la qualité des produits, l’étape d’implantation ionique a évolué vers une co-implantation hélium / hydrogène. Nous présenterons ensuite un état de l’art non exhaustif du comportement de l’hydrogène et de l’hélium dans le silicium après implantation et après recuit puis nous discuterons l’effet de l’énergie d’implantation sur la dose nécessaire à la fracture. Nous terminerons ce chapitre avec une liste de questions technologiques et scientifiques que ce travail de thèse se propose d’éclaircir. 

APPLICATION DE SOI DANS LA TECHNOLOGIE MODERNE 

Afin de répondre aux besoins d’accroissement de la densité d’intégration et d’éliminer plusieurs problèmes liés au substrat massif dans les technologies nanométriques, la technologie silicium a évolué vers la technologie SOI. L’utilisation des structures SOI (Silicon- On- Insulator) est apparue dans les années 60s pour fabriquer de circuits intégrés très rapides . Cette technologie a connu son essor à partir des années 80s . La structure SOI, est constituée d’un empilement d’une couche de silicium sur une couche d’isolant (Fig. I-1) déposé sur un substrat qui joue le rôle d’un support mécanique. Figure I-1: Schéma de (SOI) substrats de silicium sur isolant. La couche du silicium dans la structure est une couche active du dispositif. Son épaisseur dépend de l’application dans laquelle elle sera utilisée (à basse ou haute tension) et peut varier de 50nm à 100μm [3, 4]. Le matériau couramment utilisée comme substrat est le silicium. Ce choix est pour des raisons de compatibilité avec les technologies classiques et de coût. Au contraire des dispositifs conventionnels sur silicium, il n’existe donc pas de contact entre la couche du semi-conducteur et son substrat. Ceci a pour avantage de réduire les effets capacitifs parasites ainsi que les fuites vers le substrat et d’augmenter le gain en courant [5]. L’un des principaux domaines d’application de cette technologie sont les circuits intégrés qui fonctionnent sous haute température et aussi le marché des systèmes portables d’où l’intérêt général qui lui est accordé . L’isolant peut être soit, l’oxyde de silicium (SiO2), le saphir (Al2O3), le nitrure de silicium (Si3N4) . Le substrat support peut lui aussi être différent du silicium, c’est le cas du verre pour la fabrication d’écrans LCD (Liquid Crystal Display) 

 METHODES DE FABRICATION DE SOI

 Il existe trois méthodes principales de fabrication de SOI, notamment:  BESOI (Bond and Etch-back SOI) qui consiste au collage moléculaire d’une plaque du silicium oxydé avec une autre plaque du silicium suivi par un polissage mécanochimique de la face arrière d’une des deux plaques [11, 12].  SIMOX ou SIMNI (Separation by Implantation of Oxygen or Nitrogen) qui consiste à former une couche d’isolant à une certaine profondeur par l’implantation d’oxygène (SIMOX) ou d’azote (SIMNI) suivi par un recuit à haute température [13, 14].  Smart CutTM qui consiste à l’implantation d’ions légers dans un substrat de silicium oxydé suivi par un collage moléculaire et un recuit [15]. Nous nous limitons ici essentiellement au procédé Smart-CutTM basé sur l’implantation d’hydrogène et d’hélium. 

PROCEDE SMART CUTTM 

 Etapes du procédé Smart CutTM 

Le procédé Smart Cut™ [15-19] sert à reporter une fine couche de cristal sur n’importe quel substrat. Il a été inventé par M. Bruel (ingénieur CEA) en 1991 et a été appliqué par la société SOITEC pour la fabrication de SOI. Le procédé comporte cinq étapes. Initialement nous disposons de deux plaques identiques de silicium monocristallin. Nous laissons l’une de ces plaques intacte qui sera le substrat de la structure SOI. Nous appliquons à l’autre plaque une oxydation thermique. La couche d’oxyde ainsi formée correspond à la couche d’oxyde dans la structure SOI. L’oxydation est suivie et par une implantation ionique à haute dose [20]. Les ions implantés traversent la couche d’oxyde et se localisent à une certaine profondeur (dans le silicium) (Fig. I-2), fixée par l’énergie d’implantation [21]. Il s’agit d’ions légers (H+ et/ou He+ ) [20, 22-25]. Figure I-2: Etape d’implantation ionique du Smart Cut™. La plaque intacte et la plaque traitée sont ensuite collées par un collage moléculaire (Fig. I3). Cela va permettre de solidariser les deux substrats. Figure I-3: Etape de collage moléculaire du Smart Cut™ Cette structure subit un recuit thermique (entre 350°C et 600°C) pour provoquer la croissance des fissures enterrées jusqu’à la rupture du silicium. Nous obtenons ainsi deux substrats : un substrat de silicium et un substrat de SOI. Le substrat de silicium peut être réutilisé dans le procédé Smart Cut™ (Fig. I-4). Figure I-4: Structure finale du SOI Le SOI subit un recuit à haute température (1100°C) pour éliminer les défauts présents dans sa structure après le transfert. Ensuite, un polissage mécano-chimique est appliqué afin de réduire la rugosité de la surface du SOI et d’ajuster son épaisseur. Ce procédé de fabrication semble complexe et couteux. En revanche, il est actuellement le procédé de fabrication le plus rentable. En effet les plaques de silicium sont recyclable ce qui évite la perte de la matière. La couche du silicium dans la structure SOI, produite par le procédé Smart Cut™, est caractérisée par une meilleur homogénéité et uniformité. L’épaisseur de la couche transférée dépend de l’énergie d’implantation ionique alors que l’épaisseur de la couche traitée est ajustable par l’étape du polissage électro- chimique. L’épaisseur de la couche d’oxyde est aussi ajustable. Il est à noter que le procédé Smart Cut™ peut servir à reporter des couches à base de matériaux autres que le silicium (SiC, GaAs, InP, …). 

 Phénomènes physiques dans le procédé Smart CutTM 

L’implantation ionique permet d’introduire des impuretés à l’intérieur d’un substrat. Elle consiste à bombarder un matériau avec des ions, accélérés à des énergies variant de quelques keV à quelques MeV. Dans le cadre de la technologie Smart CutTM, l’objectif est d’introduire l’hydrogène et/ou l’hélium pour fragiliser le matériau localement, à une profondeur donnée. La profondeur des ions implantés est modulée par l’énergie des ions implantés. Lors de l’implantation d’ions, un ion incident peut transférer une partie de son énergie cinétique à un atome de la cible. Lorsque cette énergie est égale ou supérieure à l’énergie « seuil de déplacement » (12-15 eV dans le silicium), cet atome est éjecté de son site cristallin. Il se forme alors une paire de Frenkel (un atome interstitiel de silicium « libre » et une lacune). Si cet atome « de recul » reçoit suffisamment d’énergie, il peut à son tour générer d’autres paires de Frenkel et ainsi développer une cascade de déplacement. À température ambiante, une partie de ces interstitiels et de ces lacunes peut se recombiner de façon dynamique et s’annihiler pendant ou immédiatement après l’implantation. Une autre partie peut se précipiter sous forme de complexes In ou Vm. Cependant, à cause des affinités chimiques et des diffusivités différentes, les ions implantées peuvent limiter l’efficacité du processus d’annihilation ou de précipitation des défauts en réagissant soit avec les lacunes soit avec les interstitiels de silicium pour former des complexes stables. Les types et les quantités de complexes formés dans la matrice après une implantation déterminent le développement du système ayant subi un recuit. L’implantation ionique d’ions légers dans le Si suivi par un recuit thermique conduit à la nucléation et la croissance d’objets 2D remplis par du gaz (platelets) qui génèrent une très forte contrainte dans le réseau cristallin environnant. Pendant ce recuit, les platelets croissent en taille suivant une maturation d’Ostwald puis coalescent, ce qui conduit, in fine, à la formation de fissures parallèles à la surface. Par ailleurs, l’évolution thermique des platelets et fissures contrôle également la fracture et le transfert de couches à la base du procédé Smart CutTM . Dans la partie suivante, nous allons rappeler l’état des connaissances concernant la nucléation et l’évolution thermique des défauts générés par l’implantation d’H et/ou d’He dans le silicium. 

Implantation d’H

L’implantation ionique d’hydrogène crée des défauts qui se précipitent sous forme de différents complexes dans les instants qui suivent l’implantation. L’hydrogène réagit avec des lacunes pour former des complexes stables (à température ambiante) de type VnHm et VHn. Plusieurs complexes mono-lacunaires (VH1-4) et multi-lacunaires (V2H, V2H2, V3H et V2H6) existent [30]. Egalement, l’hydrogène forme des complexes avec des interstitiels, il s’agit du complexe IH2 [31]. La présence de ces complexes dans la matrice de silicium a été détecté à travers l’apparition de leurs signatures sur les spectres Raman [32] et FTIR [33]. La Figure I-5 montre un exemple du spectre Raman de silicium implanté avec l’H. Dans la gamme des basses fréquences (LF, λ <2050 cm-1 ), ces modes correspondent aux complexes multi-lacunaires VnHm (n≥m) et IH2. Dans la gamme des hautes fréquences (HF, λ> 2050 cm1 ), ils correspondent aux complexes multi-hydrogénés tels que VH4, VH3 et V2H6.

Table des matières

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INTRODUCTION GENERALE
Chapitre I : Implantation d’hydrogène et d’hélium dans le
procédé Smart CutTM
I.1 APPLICATION DE SOI DANS LA TECHNOLOGIE
MODERNE
I.2 METHODES DE FABRICATION DE SOI
I.3 PROCEDE SMART CUTTM
I.3.1 Etapes du procédé Smart CutTM
I.3.2 Phénomènes physiques dans le procédé Smart CutTM
I.4 CLOQUES (SANS RAIDISSEUR)
I.5 BILAN ET OBJECTIFS
Chapitre II : Techniques d’analyse et méthodologies
II.1 INTRODUCTION
II.2 TECHNIQUES EXPERIMENTALES
II.2.1 Implantation ioniqu
II.2.2 SIMS
II.2.3 Diffraction des rayons X (DRX)
II.2.4 Spectroscopie Raman
II.2.5 Microscope électronique à balayage (SEM)
II.2.6 Microscopie optique
II.2.7 Microscope à force atomique (AFM)
II.2.8 Microscopie électronique en transmission (TEM)
II.3 METHODOLOGIES ET ANALYSES QUANTITATIVES
II.3.1 Distribution des ions implantés (SIMS)
II.3.2 Déformation hors plan générées dans la couche implantée (DRX)
II.3.3 Complexes hydrogénées formés à la suite de l’implantation (Raman)
II.3.4 Différents défauts formés après l’implantation d’H et/ou d’He et un recuit (TEM)
II.3.5 Cloques formées après un recuit (microscopie optique, MEB, AFM)
II.3.6 Cloques formées après recuit (méthode des éléments finis)
II.4 CONCLUSION
Chapitre III : Densité moléculaire d’He et d’H2 à l’intérieur de cavités de cloques enfouies dans du silicium à différentes positions (profondeurs) par rapport à la surface libre 
III. 1 INTRODUCTION
III. 2 DETAILS ET METHODOLOGIE EXPERIMENTALES
III.3 RESULTATS EXPERIMENTAUX
III.4 SIMULATION PAR ELEMENTS FINIS
III.5 DISCUSSION
III.6 CONCLUSION
Chapitre IV : Influence de l’ordre d’implantation sur le type et l’évolution thermique des défauts résultants d’une coimplantation He-H. Rôle du dommage
IV.1 INTRODUCTION
IV.2 DETAILS EXPERIMENTAUX
IV.3 ECHANTILLONS NON RECUITS
IV.3.1 Distributions en profondeur de l’He et de l’H
IV.3.2 Profils de déformation
IV.3.3 Complexes hydrogénés
IV.4 ECHANTILLONS RECUITS
IV.4.1 Recuit 350°C 3 min
IV.4.2 Recuit 412°C 60 min
IV.5 DISCUSSION
IV. 6 CONCLUSION
Chapitre V : Impact de la position nominale en profondeur du profil d’He par rapport au profil d’H et rôle du ratio entre les doses d’implantation d’H et d’He sur l’efficacité de formation des cloques
V.1 Introduction
V.2 Variation de l’énergie d’implantation d’He
V.2.1 Procédure expérimentale
V.2.2 Spectroscopie Raman (non recuit)
V.2.3 Nano-bulles, platelets et fissures en MET (après recuit)
V. 2.4 Cloques (expérience et simulation).
V.2.5 Densité des molécules remplissant des cloques
V.3 Variation de la dose d’implantation d’He
V.3.1 Procédure expérimentale
V.3.2 Spectroscopie Raman (non recuit)
V.3.3 Cloques (expérience et simulation)
V.4 DISCUSSION
V.5 Conclusion
CONCLUSION GENERALE
Annexe

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