Influence de la lymphopénie sur la réponse au Cetuximab en première ligne de chimiothérapie palliative

Mutations génétiques et dérégulations épigénétiques

Les cellules tumorales évoluent d’un stade de l’oncogénèse au suivant en acquérant de nouvelles capacités liées à des mutations génétiques sur deux types de gènes : les oncogènes et les gènes suppresseurs de tumeurs.
Ces mutations génétiques sont souvent induites par des initiateurs de tumeurs, facteurs d’origine chimique (ex : benzopyrène), physique (ex : rayon ionisant) ou biologique modifiant l’information génétique et transformant la cellule. Ces gènes peuvent également subir des dérégulations épigénétiques.
L’épigénétique correspond aux changements dans l’activité des gènes, n’impliquant pas de modification de la séquence d’ADN et pouvant être transmis lors des divisions cellulaires.
Elles entrainent des surexpressions d’oncogènes et des répressions de gènes suppresseurs de tumeur.

Propriétés de la cellule tumorale

Ces mutations génétiques vont profondément modifier la physiologie cellulaire en permettant à la cellule d’acquérir de nouvelles propriétés qui définissent la cellule tumorale, Indépendance aux facteurs de croissance : favorisant la réplication illimitée, Inhibition de l’apoptose, Immortalité réplicative grâce aux télomérases, Dérégulation du métabolisme énergétique et de la lipogénèse : ce métabolisme est orienté majoritairement vers la fermentation pour accélérer la production de nouvelles molécules qui permettent la multiplication des cellules tumorales,  Néoangiogénèse, Sécrétion de facteurs inflammatoires: entrainant le recrutement de macrophages qui favorise l’angiogénèse et l’invasion tumorale du tissu sain, Capacité d’invasion et de dissémination à distance

Microenvironnement tumoral

Le microenvironnement tumoral correspond aux cellules normales (des fibroblastes, des cellules endothéliales, des péricytes, des cellules immunitaires inflammatoires, des cellules souches) et à la matrice extra cellulaire formant le stroma entourant les cellules tumorales.
Aux cours des dernières années de nombreux auteurs ont décrit l’importance du microenvironnement tumoral dans la progression de l’oncogenèse. La coopération cellulaire entre les différents constituants de ce microenvironnement favorise la mise ne place des caractéristiques tumorales fondamentales tel que la néoangiogenèse et la prolifération cellulaire rapide.

Les carcinomes epidermoides des voies aero digestives superieures

Epidémiologie : Les cancers des voies aéro-digestives supérieures (VADS) représentaient 686 000 nouveaux cas pour environ 375 000 décès dans le monde.
Selon l’inca, en France en 2015, le nombre de nouveaux cancers des VADS étaient estimé à 14706 (72% d’homme et 28% de femme) pour 3788 décès.
L’incidence de ces cancers avait tendance à diminuer chez l’homme et à progresser légèrement (+1% environ entre 2005 et 2012) chez la femme.
Cette évolution semble principalement liée aux modifications de comportement vis à vis de la consommation d’alcool et de tabac.
Les cancers des VADS regroupent une grande diversité de tumeurs mais les carcinomes épidermoïdes (CE) de l’oropharynx, hypopharynx, larynx et de la cavité buccale sont les plus fréquents et représentent en France plus de 90 % des cancers des VADS.
Facteurs de risque: Les principaux facteurs de risque retrouvés pour ces carcinomes épidermoïdes des VADS sont la consommation d’alcool et le tabagisme. Le risque est proportionnel à l’importance et à la durée de consommation. Pour la consommation isolée d’alcool le risque relatif estimé par l’odds ratio (OR) est fortement augmenté pour les consommations supérieures à 40 g/j (OR de 4,2 à 12,6 selon la localisation).
Pour le tabagisme, le risque devient majeur a parti de 20PA (OR : 1012) Ces deux facteurs de risque se potentialisent lorsqu’ils sont consommés conjointement. Les études cas-témoins portant sur le cancer du larynx [Tuyns, 1988] ou le cancer de la cavité buccale [Castellsague, 2004](montrent que la combinaison alcool-tabac se traduit par une multiplication des risques. D’autres facteurs sont évoqués : carences vitaminiques, immunosuppression, exposition au nickel ou à l’amiante ; et plus récemment, le régime pro inflammatoire (régime riche en viande rouge et pauvre en fruit légume).

Mécanisme de l’oncogenèse spécifiques aux carcinomes épidermoïdes des vads

Les immenses progrès de la recherche dans le domaine du séquençage de l’ADN ces dernières années et en particulier le whole exome sequencing ont permis de déterminer des mutations génétiques spécifiques à chaque type de cancer. Les mutations les plus fréquemment retrouvées dans les carcinomes épidermoïdes des voies aérodigestives supérieures touchent les gènes PT53, CDKN2A, PTEN, PIK3CA, HRAS, NOTCH1.
Nous développerons les deux principales mutations et leurs conséquences ainsi que la surexpression de l’Epidermal Growth Factor Receptor (EGFR) et les mécanismes immuns liés aux cancers ORL.
Le gène p53 : Le gène p53 est l’un des plus importants gènes suppresseurs de tumeur. Il est muté dans 83% des tumeurs HPV– et dans 3% des tumeurs HPV+. Il est situé sur le chromosome 17 et code pour la protéine p53 qui a un rôle essentiel dans la conservation de l’intégrité du génome : elle permet le contrôle du cycle cellulaire et l’induction de l’apoptose si nécessaire. La protéine p53 est une phosphoprotéine localisée dans le noyau cellulaire qui fonctionne en se fixant de manière spécifique sur les régions régulatrices de gènes dont elle contrôle l’expression.
Elle est faiblement exprimée dans la cellule normale car détruite par l’enzyme mdm2, mais en situation de stress (hypoxie, changements métaboliques, anomalie détectée sur l’ADN) l’association entre p53 et mdm2 est abolie, l’expression de p53 va augmenter, la protéine va se transformer et induire la transcription de nombreux gènes qui vont permettre des actions différentes en fonctions de l’état cellulaire.

Immunité et cancer des VADS

Le cancer des VADS est une maladie fortement liée au système immunitaire. Les patients souffrant de cette pathologie présentent souvent un taux de lymphocyte inférieur à la normale, une altération de la fonction des lymphocytes Natural killer (NK) et des cellules présentatrices d’antigène. A l‘inverse, ils présentent un taux élevé de lymphocytes T régulateurs.
Activation de la réponse immunitaire anti tumorale : Les lymphocytes T sont au cœur de la réponse immunitaire, ils reconnaissent les antigènes du non soi et orchestrent diverses réponses immunitaires conduisant par exemple à la destruction des cellules tumorales. L’activation de ces cellules est dépendante de plusieurs signaux :
Premier signal : Les récepteurs des lymphocytes T (TCR) vont rencontrer les peptides du complexe majeur d’histocompatibilité I (CMH I), présentés par les cellules tumorales et deux du CMH II présentés par les cellules présentatrice d’antigène (CPA). Ces ceux entités compose le complexe Human Leukocyte Antigen (HLA) chez l’homme. Cette liaison de haute affinité provoque la transduction de signaux dans le lymphocyte.
Deuxième signal : Cette première activation va entrainer la synthèse de molécules (CD28 par exemple) qui vont interagir avec des protéines membranaires de la CPA tel que CD86 pour CD28. En l’absence de ces molécules sur la CPA, l’activation du lymphocyte sera avortée. En revanche, si la liaison CD80-CD28 se fait, le lymphocyte sera activé.
Troisième signal : La liaison CD40/CD40L permet quant à elle l’activation finale des CPA qui vont sécréter des cytokines qui orienteront la réponse immunitaire cellulaire.

Table des matières

INTRODUCTION 
I. ONCOGENESE : GENERALITES 
1) Mutations génétiques et dérégulations épigénétiques
2) Propriétés de la cellule tumorale
3) Microenvironnement tumoral
4) Echappement du système immunitaire
II. LES CARCINOMES EPIDERMOIDES DES VOIES AERO DIGESTIVES SUPERIEURES 
1) Epidémiologie
2) Facteurs de risque
3) Pronostic et classification
III. MECANISME DE L’ONCOGENESE SPECIFIQUES AUX CARCINOMES EPIDERMOIDES
DES VADS 
1) Le gène p53
2) CDKN2A ou Cycline dependent kinase inhibitor 2A
3) Epidermal growth factor receptor : EGFR
4) Immunité et cancer des VADS
IV. TRAITEMENTS DES CARCINOMES EPIDERMOIDES DES VADS 
1) Prise en charge thérapeutique
2) Cetuximab
MATERIEL ET METHODE
I. PATIENTS 
II. OBJECTIFS 
1) Objectif principal
2) Objectifs secondaires
III. CRITERES D’EVALUATION
 
1) Critère d’évaluation principal
2) Critère d’évaluation secondaire
IV. RECUEILS DE DONNEES 
1) Données descriptives de la population
2) Taux de lymphocytes
3) Evaluation de la réponse au cetuximab
V. STATISTIQUES 
RESULTATS 
I. DESCRIPTION DE LA POPULATION DE L’ETUDE
1) Lésions initiales
2) Prise en charge palliative
II. DESCRIPTION DE LA POPULATION EN FONCTION DU TAUX DE LYMPHOCYTE 
1) Pour un seuil à 1,5G/L
2) Pour un seuil à 1,2 G/L
III. SURVIE EN FONCTION DU TRAITEMENT 
IV. SURVIE EN FONCTION DU TAUX DE LYMPHOCYTE 
1) Pour un seuil à 1,5G/L
2) Pour un seuil à 1,2 G/L
V. EVALUATION DE LA REPONSE AU CETUXIMAB 
VI. EVOLUTION DU TAUX DE LYMPHOCYTE CHEZ LES PATIENTS REPONDEURS 
DISCUSSION 
I. RAPPEL DES PRINCIPAUX RESULTATS 
II. CARACTERISTIQUES DE LA POPULATION 
III. LIMITES DE L’ETUDE
1) Population
2) Protocole de l’étude
IV. EFFICACITE DU CETUXIMAB 
V. FACTEUR PREDICTIF D’EFFICACITE DU CETUXIMAB 
1) Toxicité cutanée
2) La lymphopénie
VI. CETUXIMAB et IMMUNITE 
VII. PERSPECTIVES 
CONCLUSION 
BIBLIOGRAPHIE 

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